Tout comme ma collègue Geneviève Fioraso, je suis très heureux de la sérénité des débats de ce soir. Ainsi que j’avais déjà eu l’occasion de le constater à propos d’un texte relatif à la retenue de seize heures, la Haute Assemblée a, sur ces questions, un recul et une capacité à s’abstraire des idées reçues qui lui font honneur.
Je partage le point de vue de Mme Cukierman : les migrations internationales et le rapport de l’individu à la frontière seront l’un des grands sujets du XXIe siècle. Comme sur l’ensemble des grands sujets, il faut oser en débattre sans a priori, ni outrance, mais aussi sans angélisme, ni naïveté ; je rejoins le souhait de M. Capo-Canellas à cet égard.
La France a une position doublement singulière en Europe. D’une part, contrairement à la plupart de ses voisins, notre pays a une démographie favorable ; notre situation, sans être exceptionnelle, est enviable, surtout par comparaison avec l’Allemagne, l’Italie ou même les pays d’Europe du Nord. D’autre part, nous faisons face à une crise qui pèse lourdement sur la situation de l’emploi. Dans ce contexte, comme l’a souligné M. Chevènement, je ne pense pas que nous puissions augmenter sensiblement les flux réguliers d’immigration. En revanche, ma collègue Geneviève Fioraso l’a rappelé, nous devons savoir répondre aux besoins de notre économie et à l’impératif de rayonnement de notre pays dans le monde.
Débattre est utile, mais cela ne suffit pas : il faut agir. À cet égard, je vous proposerai trois grands temps.
À court terme, nous nous engageons à mettre en place par voie de circulaire ou de décret certaines des orientations que vous avez souhaitées. Qu’il s’agisse de la pluriannualité du titre de séjour étudiant, à laquelle Mme Bariza Khiari a fait référence, de la sélection des étudiants, de l’autorisation de travail ou de l’accueil en préfecture, tout ce qui pourra être traité par voie réglementaire le sera. Oui, madame Gillot, il faut mettre fin au cauchemar annuel du renouvellement des titres de séjour !
Nous pouvons d’ores et déjà aller vers une plus grande pluriannualité des titres de séjour étudiant ; MM. Kerdraon et Leconte se sont également exprimés en ce sens. Nous pouvons améliorer l’accueil des étrangers en préfecture, en généralisant la prise de rendez-vous par internet, comme le propose Mme Khiari, et en rapprochant les préfectures des campus universitaires. Nous pouvons définir une stratégie d’accueil des étudiants basée sur l’excellence et le rayonnement. Cela impliquera sans doute de responsabiliser les universités dans leurs stratégies de développement international et dans leur recrutement, et de mieux cerner et évaluer l’action de Campus France. Vous avez été nombreux – je pense à M. Chevènement, à M. Leconte ou à Mme Benbassa – à évoquer le caractère parfois inadapté de cet outil.
Toujours à court terme, nous devons aussi réfléchir à l’évolution de nos outils d’immigration professionnelle. Le foisonnement de normes et de dispositifs rend notre système peu lisible. Mes services agiront de concert avec le ministère du travail pour définir un cadre plus efficace et plus réactif, qui protège le marché de l’emploi, comme l’a évoqué M. Chevènement, sans dissuader les arrivées de ceux qui peuvent contribuer à la croissance et au rayonnement de notre pays ; Mme Khiari ou M. Capo-Canellas y ont fait référence.
À moyen terme, il nous faudra faire évoluer notre cadre légal. Les travaux de ce jour, le rapport que M. Matthias Fekl va nous remettre à la demande du Premier ministre et les différentes missions d’inspection que j’ai diligentées serviront de base à un projet de loi que je souhaite pouvoir déposer à l’été. Mes objectifs seront assez simples.
Premièrement, il s’agira de généraliser le titre de séjour pluriannuel non seulement pour faciliter l’intégration de tous les étrangers nouvellement arrivés, et pas uniquement des étudiants, …