Il ne s'agit pas d'accuser qui que ce soit. Prenons l'exemple de la réforme des retraites, que je considère comme essentielle. Le rapport élaboré par Jean-Michel Charpin était fondé sur l'hypothèse de l'Insee selon laquelle la population active allait commencer à diminuer à partir de 2006 en raison du départ à la retraite des générations nombreuses du baby-boom et de l'arrivée sur le marché du travail des générations creuses du baby krack. Cette vision des choses m'a toujours semblé erronée en raison des indicateurs choisis : celui de l'indice de fécondité plutôt que celui du nombre de naissances par année, celui du taux de chômage au lieu de celui du taux d'emploi. Je n'entends ici mettre en cause ni Jean-Michel Charpin ni l'Insee. Mais j'estime important que l'on travaille davantage sur les indicateurs, les données et leur interprétation car ils jouent un rôle majeur dans la représentation que nous forgeons de la réalité et donc, pour une part, du futur. En outre, reconnaissons que nous avons beaucoup de mal à prendre en considération les variables dites « molles » alors qu'elles jouent un rôle déterminant. Plutôt que d'élaborer des prévisions très précises, inéluctablement fausses, sur une période de quarante ou cinquante ans, j'estime qu'il aurait été plus efficace d'élaborer des scénarios permettant de mieux représenter, certes de manière plus grossière, l'éventail des futurs possibles.