Intervention de Marie-Françoise Leflon

Commission des affaires sociales — Réunion du 2 avril 2013 : 1ère réunion
Sécurisation de l'emploi — Audition des partenaires sociaux : organisations syndicales signataires de l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013

Marie-Françoise Leflon, secrétaire nationale de la CFE-CGC :

La CFE-CGC est attachée à cet accord qu'elle a signé car elle estime qu'il s'agit d'une prise de responsabilité et d'un acte de modernisation du marché du travail dans une situation économique extrêmement difficile : le taux de chômage augmente de façon continue depuis dix-sept mois et atteint un niveau difficilement supportable, en particulier pour les jeunes, pour lesquels il s'établit à 22 % ; l'augmentation de sa durée entraîne l'épuisement des conditions nécessaires à son indemnisation ; les salariés et les demandeurs d'emploi sont aujourd'hui dans l'impossibilité d'avoir de véritables perspectives professionnelles.

Dans ce cadre, nous avons abordé les négociations avec une volonté réelle de parvenir à trouver des solutions avec l'ensemble des partenaires sociaux, qu'ils soient salariés ou patronaux. Au final, l'Ani établit un juste équilibre entre les attentes des entreprises en matière de compétitivité et par conséquent d'emploi, et celles des représentants salariaux pour sauvegarder les droits des salariés et assurer une plus grande continuité des parcours professionnels.

La CFE-CGC tient à insister sur quatre points principaux.

En premier lieu, l'Ani crée des droits nouveaux, rendus nécessaires par la libéralisation et la flexibilisation accrues du marché du travail. Je pense à la généralisation de la couverture complémentaire santé et à l'amélioration de sa portabilité.

Je pense également à la lutte contre la prolifération des contrats à durée déterminée (CDD). Actuellement, l'embauche en contrat à durée indéterminée (CDI) ne revêt plus un caractère systématique. Pour revenir à ce principe, il était nécessaire de taxer les contrats courts sans pour autant freiner l'embauche dans les PME ni peser sur le déficit de l'Unedic. De ce point de vue, la CFE-CGC estime que l'Ani est parvenu à un équilibre subtil concernant les taux de majoration et la durée des contrats concernés.

La création du compte personnel de formation permet de consacrer un droit important qui devra encore être développé. Il s'agit pour nous d'un premier pas vers une modernisation de la formation professionnelle.

Autre droit auquel la CFE-CGC est particulièrement attachée, la création d'une période de mobilité volontaire sécurisée devrait renforcer l'employabilité des salariés. Il ne s'agit pas seulement d'un concept et la CFE-CGC a beaucoup travaillé à sécuriser le dispositif et renforcer sa visibilité.

Enfin, l'encadrement du recours au temps partiel constitue le premier fondement d'un vrai travail de lutte contre la précarité.

L'Ani et sa transcription dans le projet de loi, qui a su coller au plus près à la volonté des négociateurs, comportent un deuxième axe important visant à renforcer l'information des salariés sur les perspectives et les choix stratégiques de l'entreprise. La création d'une base de données à disposition des élus, et qui doit être étendue à tous les représentants du personnel, en constitue l'élément le plus novateur. Le suivi des informations contenues dans cette base de données devra être assuré afin qu'il ne s'agisse pas d'un outil statique mais vivant.

La réforme des règles de gouvernance constituait un autre point d'attention pour la CFE-CGC. Nous avons obtenu la généralisation de la présence d'administrateurs salariés avec voix délibérative aux conseils d'administration ou de surveillance des grandes entreprises. S'ils peuvent sembler un peu élevés, les seuils de 5 000 salariés en France et 10 000 salariés dans le monde correspondent aux préconisations du rapport Gallois.

La négociation sur la gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences (GPEC) constitue également une avancée. Jusqu'à présent, la GPEC n'était pas suffisamment opérationnelle et le mécanisme de pénalités imposées aux entreprises ne respectant pas leurs obligations de négociation n'était pas optimal. Le renforcement de la GPEC, notamment sur les orientations du plan de formation, est très important et va permettre de négocier les mobilités internes dans l'entreprise.

La création de la base de données, l'implication renforcée des administrateurs salariés et l'élargissement du champ de la GPEC constituent des bases structurelles pour continuer à négocier sur des éléments plus conjoncturels.

Je pense notamment aux accords de mobilité interne. La mobilité interne est indispensable pour permettre à une entreprise de restructurer son outil de travail. Mais elle doit avoir été préparée par un accord en amont et se faire sans diminution des effectifs. La CFE-CGC a toujours demandé qu'un salarié ne pouvant assumer la mobilité interne puisse faire l'objet d'un licenciement économique et non d'un licenciement simple. Les améliorations apportées au texte lui conviennent.

L'Ani s'est également penché sur les situations dans lesquelles les entreprises rencontrent davantage de difficultés et ont par conséquent recours au chômage partiel. La CFE-CGC appelle à une simplification des mécanismes existants pour que les entreprises disposent d'un outil unique, simple et lisible, et que les salariés soient indemnisés rapidement.

Si les difficultés de l'entreprise persistent, des accords de maintien dans l'emploi, négociés en amont et de façon encadrée, pourront être mis en oeuvre. Nous avons insisté pour la mise en place de retours à bonne fortune, pour qu'existe un parallélisme des formes et pour que les accords soient négociés à une majorité de 50 %.

Les points relatifs à la négociation ou à l'homologation des plans de sauvegarde de l'emploi (PSE), au raccourcissement du délai de prescription des infractions au droit du travail ou la diminution des indemnités proposées, s'ils ont pu être difficiles à accepter, n'ont été accordés qu'en contrepartie de sécurités supplémentaires apportées aux salariés.

Dernier point, l'Ani aménage le contentieux prud'homal.

Au final, la CFE-CGC espère que cet accord et sa transposition permettront un renforcement du dialogue social.

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