Intervention de Joseph Thouvenel

Commission des affaires sociales — Réunion du 2 avril 2013 : 1ère réunion
Sécurisation de l'emploi — Audition des partenaires sociaux : organisations syndicales signataires de l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013

Joseph Thouvenel, vice-président de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) :

S'agissant des CDD, la mécanique mise en place vise à renchérir les contrats de précarité, et non les CDD de bon sens comme ceux qui permettent de remplacer un salarié en congé maternité ou en absence pour maladie, ou de recruter du personnel saisonnier pour les vendanges. Il s'agit d'augmenter le coût de l'abus de précarité.

Les entreprises peuvent parallèlement bénéficier d'un abaissement de charges pour l'embauche de jeunes de moins de 26 ans directement en CDI. Il n'y a pas de contradiction entre ces deux mesures, comme certains l'affirment. Notre objectif n'est pas de renchérir le coût du travail, mais d'assurer aux jeunes un accès au marché du travail en CDI afin de leur permettre de vivre correctement. Cependant, même si nous nous sommes efforcés de produire le meilleur compromis possible, nous n'avons pas la prétention d'avoir produit un texte parfait.

Quant aux accords de maintien de l'emploi, s'agit-il d'un élément de régression ? Il est sûr en tout cas que ne rien prévoir dans le code du travail revient à satisfaire les ultralibéraux. En inscrivant des règles dans la loi, nous souhaitons sécuriser la situation des salariés dont l'entreprise est menacée de fermeture et dont l'emploi est en jeu. Il s'agit pour les organisations syndicales - au moins pour celles d'entre elles qui sont présentes aujourd'hui - de prendre leurs responsabilités dans ces situations difficiles. Je suis d'ailleurs un peu étonné que certaines organisations syndicales plus importantes que la mienne aient si peu confiance dans leurs délégués syndicaux qu'elles ne veuillent pas leur donner le pouvoir de disposer d'une meilleure information et d'agir pour sauver leur emploi.

Si le dispositif fonctionne et qu'un accord est passé, il ne pourra pas y avoir de licenciement économique pendant toute la durée de cet accord. Nous faisons le pari que la situation pourra ensuite se redresser, et que les salariés pourront conserver leur emploi et prendre leur part de la bonne marche de l'entreprise en cas de retour à meilleure fortune. Les salariés de l'entreprise Poclain sont aujourd'hui très contents d'avoir fait des efforts pendant quelques mois : ils ont ainsi conservé leur emploi et ont désormais un meilleur salaire. Si en revanche la situation de l'entreprise ne devait pas s'améliorer, les salariés n'y perdront rien, puisque leurs indemnités seront calculées sur la base de leur rémunération initiale. Encore une fois, je ne prétends pas que nous ayons produit un texte parfait ; mais il est en tous cas bien meilleur que ce qui existe actuellement.

S'agissant des PSE, nous avons souhaité donner la faculté aux organisations syndicales de signer un accord collectif pour fixer son contenu. Cela revient à donner davantage de pouvoir à ces organisations. Si cette solution n'est pas choisie par l'employeur, il devra soumettre les orientations retenues à l'homologation de l'administration. Certains réclament depuis des années un retour à l'autorisation administrative de licenciement : il ne s'agit pas exactement de cela, mais on s'en rapproche. Tout ce dispositif doit aboutir à sécuriser les licenciements économiques - ce que chacun doit souhaiter, sauf à considérer qu'on ne peut avoir aucune confiance dans les organisations syndicales et dans l'administration, ce qui est un autre débat.

L'abaissement du délai de prescription des réclamations de salaires non payés constitue très clairement une régression voulue par le patronat. Pour ma part, je trouve cette disposition complètement stupide : lorsqu'on doit un salaire à quelqu'un, il est normal de le lui verser, même si cette personne s'en rend compte des années plus tard, par exemple par méconnaissance de sa convention collective ; et en réalité, la partie de salaires non versés qui se situe au-delà du délai de prescription est bien souvent accordée par le juge sous forme de dommages et intérêts. Quoi qu'il en soit, il fallait bien apporter des contreparties au patronat.

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