Intervention de François Grosdidier

Réunion du 16 mai 2013 à 9h00
Préjudice écologique — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de François GrosdidierFrançois Grosdidier :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, déposée par Bruno Retailleau, cette proposition de loi vise à inscrire la notion de préjudice écologique dans le code civil

Président de la collectivité vendéenne, Bruno Retailleau connaît mieux que personne le préjudice causé par la catastrophe de l’Erika, qui ne fut qu’une étape dans une série noire allant de l’Amoco Cadiz au Prestige.

Certes, cette affaire emblématique de l’Erika a donné lieu à une jurisprudence innovante, la Cour de cassation consacrant la notion de préjudice écologique.

Le 25 septembre 2012, elle a jugé Total civilement responsable de la catastrophe, confirmant ainsi les indemnités déjà versées par le pétrolier, et le condamnant à « réparer les conséquences du dommage solidairement avec ses coprévenus d’ores et déjà condamnés », sans oublier les dommages et intérêts.

Malgré cette avancée, la France est encore loin du compte.

D’abord, si l’on compare la condamnation pécuniaire de Total dans l’affaire de l’Erika à celle qui a été prononcée l’encontre d’Exxon Mobil dans une autre affaire célèbre aux États-Unis, on constate qu’une marée noire coûte infiniment plus cher à son responsable de l’autre côté de l’Atlantique.

En 1994, à l’issue d’un procès historique, un jury fédéral condamna Exxon Mobil. En plus des centaines de millions de dollars déjà déboursés pour nettoyer les sites et indemniser les professionnels de la mer, Exxon a dû verser plus de 5 milliards de dollars de dommages dits « punitifs », soit l’équivalent, à l’époque, d’une année de bénéfices du groupe pétrolier.

D’ailleurs, l’affaire de l’Exxon Valdez a marqué un coup d’arrêt net, même s’il faut « toucher du bois », aux catastrophes provoquées par les tankers transportant du fioul lourd.

En France, à la suite des plus importantes marées noires, jamais de telles indemnités n’ont été prononcées par des juridictions ni même réclamées. En effet, pour l’affaire de l’Erika, la somme demandée était de l’ordre de 1 milliard d’euros et Total a finalement été condamné à payer moins de 200 millions d’euros, amende et dommages et intérêts confondus, soit moins d’une semaine de bénéfices du groupe.

D’un côté, 5 milliards de dollars ; de l’autre, 200 millions d’euros !

Dans notre économie mixte française, le bénéfice est privatisé, mais le risque et la réparation du préjudice sont trop souvent socialisés, mutualisés, payés par le contribuable.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion