Intervention de Jean-Vincent Placé

Réunion du 16 mai 2013 à 15h00
Instauration effective d'un pass navigo unique — Suite de la discussion et rejet d'une proposition de loi

Photo de Jean-Vincent PlacéJean-Vincent Placé :

Pourtant, cela répond à une demande forte des Franciliennes et des Franciliens, qui souhaitent pouvoir bénéficier de transports collectifs à moindre coût. Pour nos concitoyens qui vivent en périphérie de Paris, c’est la double peine : les trains sont peu nombreux, en mauvais état, surchargés ; les temps de transport sont considérables, pouvant parfois atteindre jusqu’à trois heures par jour, avec la fatigue et l’énervement que cela induit pour les usagers, qui voyagent dans des conditions difficiles et doivent, de surcroît, payer le prix fort. Je le constate dans ma circonscription, l’Essonne : si vous habitez en zone 5, à Brétigny par exemple, et si vous travaillez à Paris, comme c’est souvent le cas, votre abonnement de transport vous coûte 113, 20 euros tous les mois ! Même si la moitié de cette somme est remboursée par votre employeur, cela reste exorbitant et cette dépense réduit dans une mesure considérable le pouvoir d’achat des familles.

La mise en place d’un pass navigo à tarif unique répond donc à un premier enjeu, d’ordre social : permettre à chacun de se déplacer entre son domicile et son lieu de travail à un coût acceptable.

Mais n’oublions pas l’enjeu environnemental d’une telle mesure. Je regrette, à cet égard, que cet adjectif n’apparaisse pas dans l’exposé des motifs de la proposition de loi, mais je sais que le rapporteur a cette préoccupation à l’esprit.

L’instauration du pass navigo à tarif unique permettra de favoriser le report modal de la route vers le transport collectif. C’est un outil indispensable en vue de la transition écologique du territoire : combien de voitures roulent chaque jour sur les routes de la région sans autre occupant que leur conducteur ? Combien restent coincées dans les bouchons pendant des heures ? La pollution atmosphérique engendrée par ce mode de déplacement est dramatique pour la qualité de l’air en Île-de-France, en particulier à Paris, sans même évoquer la question du diesel.

Cela ne peut plus continuer ainsi, mais comment demander à nos concitoyens et à nos concitoyennes de prendre le train si l’offre est inexistante ou s’il est beaucoup moins coûteux de prendre sa voiture ? Il faut agir dès maintenant, d’une part en diminuant le prix des transports publics, notamment grâce au pass navigo à tarif unique, d’autre part en améliorant l’offre.

Enfin, comme l’a dit la présidente du groupe CRC – je suis certain que le Sénat sera sensible à cet argument –, le projet du pass navigo à tarif unique est fédérateur, car sa mise en œuvre permettra de renforcer la solidarité territoriale. Nous ne pouvons prétendre promouvoir la décentralisation et réfléchir à son acte III sans doter nos collectivités territoriales des moyens de susciter le sentiment d’appartenance aux territoires, de créer cette identité régionale à laquelle Éliane Assassi faisait référence.

Je vous l’accorde, si le principe est louable, la mise en œuvre n’est pas aisée. Différents modes de financement sont envisageables ; je n’y reviendrai pas. Le versement transport est un outil indispensable, mais complexe à gérer, surtout dans la situation économique difficile que nous connaissons aujourd’hui. Les modulations proposées par notre excellent rapporteur, M. Billout, ont le mérite de tendre vers un compromis, même s’il paraît délicat d’augmenter, ne fût-ce que dans une modeste mesure, le versement transport pour les entreprises de la grande couronne, compte tenu notamment de la faiblesse de l’offre de transports publics dans ce territoire. Cela étant, je sais Michel Billout parfaitement au fait de ces questions.

En effet, s’il est légitime que les entreprises participent au financement des moyens de transport qu’empruntent chaque jour leurs salariés, la zone 3, contrairement aux zones 1 et 2, ne bénéficie que très peu des infrastructures de transports. On peut d’ailleurs craindre, monsieur le ministre, que la mise en œuvre du projet du Grand Paris Express n’aggrave la situation, dans la mesure où celui-ci ne concernera qu’à la marge la grande couronne. Dans ces conditions, tant que l’offre de transports en commun n’aura pas été améliorée, je crois qu’il serait injustifié d’augmenter le versement transport pour cette zone périphérique.

En tant qu’ancien vice-président de la région d’Île-de-France chargé des transports, je sais combien les besoins en matière d’investissements restent importants, en dépit de ce qui a déjà été réalisé. Modernisation du réseau, offre de transports, régularité, fréquence, sécurité, qualité de service, éco-mobilité : il y a encore beaucoup à faire, au vu de l’état des lignes de RER ou du manque de liaisons inter-banlieues.

La stratégie suivie a été celle des « petits pas », consistant à promouvoir une tarification de plus en plus juste sans renoncer à réaliser les investissements nécessaires. J’avais ainsi proposé et obtenu la suppression de la zone 6, ce qui a permis à des milliers d’usagers d’économiser près de 14 euros sur leur abonnement mensuel.

Mon successeur et ami Pierre Serne – les écologistes étant attachés au non-cumul des mandats, j’ai démissionné du conseil régional alors que la loi ne m’y obligeait pas ! –…

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