Nos collègues du groupe CRC nous présentent aujourd’hui un texte visant à instaurer un pass navigo unique au tarif des zones 1-2. Cette proposition se heurte malheureusement à un problème de taille, celui du coût.
Évidemment, inspirés par de bonnes intentions, nous pourrions être tentés d’instaurer la gratuité des transports publics pour tous. Mais, on le sait, dans ce domaine comme dans tant d’autres, la gratuité n’existe pas : le coût est simplement transféré à des acteurs moins identifiables que l’usager qui achète un ticket ou une carte d’abonnement.
La réponse qu’apporte cette proposition de loi à la question du financement passe ainsi par l’augmentation du versement transport. Cette charge, qui pèse sur les entreprises, a représenté environ 3, 2 milliards d’euros en 2012, soit quasiment l’équivalent des recettes tarifaires de la RATP et de la SNCF en Île-de-France, qui se sont élevées à 3, 3 milliards d’euros en 2011.
Si l’on ajoute à ce montant le remboursement de la moitié du pass navigo de leurs salariés, qui atteint environ 800 millions d’euros par an, la contribution des entreprises au financement des transports en commun aura été de l’ordre de 4 milliards d’euros en 2012, soit pratiquement la moitié du coût de fonctionnement des transports en commun franciliens.
Mes chers collègues, j’interviens aujourd’hui en tant qu’élu parisien soucieux de la bonne mise en œuvre du projet du Grand Paris, soucieux aussi de ne pas voir se déliter le réseau d’entreprises qui contribue à la création de richesse francilienne et constitue un maillon très important de notre territoire.
Le contexte économique a imposé à de nombreuses entreprises de réduire la voilure pour ne pas succomber aux effets de la crise. Il est aujourd’hui impensable de leur porter un coup supplémentaire en alourdissant le poids des charges qui pèsent sur l’activité.
Pourtant, la mise en place d’une tarification unique pour le pass navigo devrait coûter entre 550 millions et 700 millions d’euros par an, sur la base d’un tarif forfaitaire de 65 euros par mois pour les abonnements et d’une diminution du prix des billets longue distance. Le point d’équilibre financier de cette mesure s’établit à 91 euros par mois. Selon le STIF, cette mesure pourrait être financée par l’application d’un taux unifié de 2, 6 % pour le versement transport.
Une telle harmonisation affecterait très fortement des départements comme la Seine-Saint-Denis ou le Val-de-Marne, pour lesquels le taux du versement transport passerait de 1, 7 % à 2, 6 %, et plus encore les quatre départements de la grande couronne, le taux s’appliquant actuellement à ces derniers étant de 1, 4 %.
Le surcoût net, pour les entreprises, s’élèverait à 586 millions d’euros, soit une augmentation de près de 25 % en une seule année.
Mes chers collègues, nous avons le devoir de préserver le tissu entrepreneurial francilien. Notre énergie doit s’orienter vers la création de richesses ; celle-ci assure la prospérité de tous et le financement de services publics de qualité. Si les entreprises disparaissent, c’est l’emploi qui disparaît, et l’instauration du pass navigo unique devient alors une question très accessoire…
Par ailleurs, je tiens à formuler une inquiétude s’agissant spécifiquement des usagers parisiens.
Les entreprises ne pouvant indéfiniment être sollicitées, il est à craindre que le coût de cette harmonisation du versement transport ne se reporte un jour, une fois de plus, sur les usagers parisiens, lesquels ont déjà vu augmenter considérablement le prix de leur abonnement depuis plusieurs années. Cela serait tout à fait fâcheux, les Parisiens n’ayant pas vocation à subventionner les déplacements de ceux qui ont fait le choix de s’éloigner de la capitale. §