Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je reprends aujourd’hui une question orale que des conditions climatiques exceptionnelles m’avaient obligée à annuler le 12 mars dernier, le Nord étant alors coupé de sa capitale.
Du mois de mars au mois de mai, la situation de la caisse d’allocations familiales du Nord a malheureusement continué à se dégrader. Fermée au public plus de quatre semaines au cours du dernier trimestre de 2012, la CAF du Nord suspend désormais son accueil au public tous les jeudis depuis le 1er janvier 2013, sans parvenir, malgré ses efforts, à rattraper son retard.
Ses indicateurs de résultats, hormis le traitement du RSA, sont tous au rouge. En avril 2013, le taux d’appels traités par un agent a encore baissé de 15 % par rapport au mois précédent et atteint son taux le plus bas, soit 37, 9 %, à comparer au critère fixé par la convention d’objectifs et de gestion, la COG, de 90 %, et à un taux de 94 % en avril 2012.
Lors de la départementalisation de la CAF du Nord, qui comptait huit conseils d’administration pour 2, 5 millions d’habitants, j’ai été la première parmi les élus à alerter sur le risque d’accoucher d’un « monstre administratif », où les gains de gestion attendus de la mutualisation se paieraient cher en termes de manque de proximité et de moindre réactivité dans un contexte social tendu.
Madame la ministre, j’avais fait valoir ce risque auprès de vos prédécesseurs. Il les avait amenés à considérer un aménagement spécifique pour ce département en raison de sa taille – plus de 530 000 familles allocataires –, de sa topographie et de sa situation sociale : un tiers des allocataires perçoivent une prestation versée au titre des minima sociaux ; on compte 130 000 bénéficiaires du RSA, 2 500 nouvelles demandes étant enregistrées par mois. D’où le principe d’une gouvernance aménagée avec la création de huit commissions territoriales, et la promesse d’un maintien d’une politique spécifique d’action sociale.
Dix-huit mois plus tard, le constat est sévère. La nouvelle organisation centralisée du travail allonge les circuits de décision et amoindrit la réactivité de la caisse. Le service aux usagers en a pâti. L’autonomie des commissions territoriales est grignotée constamment. Ces dernières n’ont désormais plus que deux directeurs responsables, chacun, de quatre antennes territoriales. L’engagement de tenir compte des spécificités territoriales, en particulier pour les crédits d’action sociale, s’efface, et la CAF affiche son souhait d’harmoniser tous les dispositifs d’action sociale. Cette gestion compromet le travail partenarial entrepris de longue date par les CAF avec leurs partenaires sur les territoires. C’est ainsi que, après sept ans de coopération fructueuse dans le repérage de l’habitat privé dégradé et la lutte contre l’habitat insalubre, la CAF a dénoncé la convention la liant à la communauté d’agglomération de Valenciennes métropole sur ce sujet. Un nouveau pan d’une action utile va disparaître, et ce sont les allocataires qui seront pénalisés.
Certes, la gravité de la crise accroît encore la charge de travail et la pression. Toutefois, la caisse n’a à l’évidence pas retrouvé un fonctionnement satisfaisant depuis la mise en œuvre de la départementalisation. Une grande opération de solidarité interservices conduite au mois d’avril a permis de réduire quelque peu le stock et d’améliorer la production. Mais cet effort ponctuel ne pourra pas être demandé en continu. Les agents se découragent et souhaitent qu’on leur accorde d’urgence des moyens supplémentaires pour faire face à une augmentation assez importante du nombre des dossiers.
Avec le recul dont nous disposons aujourd’hui, comment ne pas reconnaître que la départementalisation de la CAF du Nord mérite d’être ajustée ? La caisse est de toute évidence surdimensionnée par rapport à la moyenne des autres CAF. La négociation de la prochaine COG arrive à point nommé et pourrait permettre cet ajustement.
Madame la ministre, ma question est simple : l’État envisage-t-il, à l’occasion de cette négociation avec la Caisse nationale des allocations familiales, de repréciser le rôle des commissions territoriales et la prise en compte des spécificités locales dans la politique d’action sociale de la CAF du Nord ?