Intervention de Victorin Lurel

Réunion du 21 mai 2013 à 14h30
Qualité de l'offre alimentaire en outre-mer — Adoption définitive d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Victorin Lurel :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est une proposition de loi importante qui est soumise aujourd’hui à votre examen. C’est un texte de santé publique et c’est aussi un texte d’égalité visant à mettre un terme à des pratiques discriminantes appliquées en outre-mer depuis bien trop longtemps.

En effet, depuis des années, les habitants des outre-mer consomment des aliments – principalement des boissons et des spécialités laitières – qui présentent des surdosages en sucre par rapport aux mêmes produits de mêmes marques commercialisés en France hexagonale.

Depuis des années, des citoyens français, sur des territoires français, consomment dès leur plus jeune âge des aliments et des boissons dont la composition en sucre a des effets désastreux sur la santé, comme le prouve la prévalence du diabète et de l’obésité outre-mer. Et, depuis des années, après l’indifférence, nous entendons les dénégations des industriels qui n’hésitent pas à affirmer que les habitants des outre-mer sont, comme naturellement, plus friands de sucre que les autres Français et qu’ils sont eux-mêmes demandeurs de ces excès !

Ce texte de loi est la seconde tentative de mettre un terme à ces pratiques. Il y a deux ans, à l’Assemblée nationale, malgré des faits, des analyses, des chiffres, des enquêtes épidémiologiques, malgré des preuves incontestables qui avaient suscité la stupéfaction des députés découvrant l’existence de pratiques ahurissantes, la proposition de loi que je défendais alors comme parlementaire avait été rejetée à quelques voix près. Pourtant, nous ne demandions qu’une chose : que les taux de sucre dans les aliments et les boissons outre-mer soient alignés sur ceux qui sont pratiqués dans l’Hexagone !

Outre les raisons purement politiciennes qui furent à l’origine de ce rejet in extremis, les arguments d’alors sont, à peu de chose près, ceux que nous avons pu entendre de nouveau en commission et dans les débats à l’Assemblée nationale : « C’est du domaine réglementaire… Un simple décret et le tour est joué… Pourquoi ne pas conclure des chartes de bonne conduite avec les industriels ?... »

Nous étions en octobre 2011 et, je le dis avec gravité, nous avons perdu un temps précieux durant lequel il ne s’est rien passé. Rien : ni décret ni engagement volontaire des industriels ! Les pratiques condamnables ont perduré. Depuis quelques semaines, cependant, il semble se produire une accélération puisque l’on a porté à ma connaissance la signature de quelques chartes ici ou là…

Il revient donc au Sénat de permettre de faire cesser ces pratiques en adoptant à son tour cette proposition de loi qui va dans le sens de l’un des trente engagements du Président de la République. Celle-ci bénéficie du soutien du Gouvernement, soutien que j’ai exprimé à l’Assemblée nationale avec mon collègue Guillaume Garot qui, je le précise au passage, vous prie de bien vouloir excuser son absence, car il est retenu par d’autres obligations.

Oui, mesdames et messieurs les sénateurs, ce texte mérite d’autant plus d’être voté qu’il a été sensiblement étoffé et amélioré par rapport à sa version de 2011 grâce au concours des parlementaires, et en particulier de la députée de la Guadeloupe, Hélène Vainqueur-Christophe, qui en était le rapporteur à l’Assemblée nationale. Il ne vise plus uniquement à réguler les taux de sucre ajouté ; il porte désormais plus largement sur l’amélioration de la qualité de l’offre alimentaire outre-mer, et ce toujours dans une optique d’égalité.

Car en travaillant sur le sujet, d’autres discriminations frappant les outre-mer dans le domaine alimentaire ont été mises en lumière. Je veux parler d’une autre pratique condamnable : celle des dates limites de consommation, ou DLC, différenciées pour un même produit vendu dans l’Hexagone et exporté dans les outre-mer. Cette pratique consiste à prolonger la date limite de consommation de certains produits à l’export.

À l’origine, les yaourts étaient visés, car certains ont une date limite de trente jours à Paris ou ailleurs dans l’Hexagone, quand elle peut être de cinquante jours à Saint-Denis ou à Fort-de-France. Toutefois, à mesure que le sujet a été fouillé et expertisé, il est apparu que plus de trois cents produits frais faisaient en réalité l’objet d’une date limite de consommation différenciée, la différence pouvant aller de quelques jours à plusieurs mois !

Ainsi, tel fromage – j’espère que vous ne prendrez pas cette information pour de la stigmatisation, mais il s’agit du reblochon, pour être précis

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