Intervention de Maurice Antiste

Réunion du 21 mai 2013 à 14h30
Qualité de l'offre alimentaire en outre-mer — Adoption définitive d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Maurice AntisteMaurice Antiste :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, depuis plusieurs années, on assiste en France hexagonale et dans les collectivités d’outre-mer à une augmentation de la prévalence du surpoids, de l’obésité et du diabète de type 2.

Cette augmentation a une origine multifactorielle : le patrimoine génétique, la trop faible activité physique quotidienne ou encore le déséquilibre alimentaire.

Cependant, pour les ultramarins, à ces facteurs s’ajoute une véritable inégalité de traitement, à savoir, jusqu’à aujourd’hui, des teneurs en sucre qui ne sont pas les mêmes dans certaines denrées alimentaires selon qu’elles sont distribuées dans l’Hexagone ou en outre-mer.

Or, cette problématique de teneur en sucres élevée des produits alimentaires de consommation courante revêt une importance vitale en termes de santé publique dans les territoires d’outre-mer, où l’obésité représente un véritable fléau, sans commune mesure avec la situation sanitaire que connaît l’Hexagone.

Ainsi, en Martinique, le constat est très inquiétant, puisqu’un enfant sur quatre est atteint d’obésité. À titre d’illustration, une canette de soda contient 14 grammes de sucres ajoutés en Martinique, contre 10 grammes sur le territoire métropolitain. Il en est de même pour le yaourt, qui contient 15, 8 grammes de glucides dans l’Hexagone, contre 20 grammes en Guadeloupe.

Pourtant, ce n’est pas faute d’avoir essayé de pallier cette situation. Voilà quelques années, l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments a supprimé la collation du matin dans les écoles, car elle pouvait favoriser l’augmentation de l’obésité. En 2001, était parue une circulaire qui visait à interdire les distributeurs de friandises et de boissons sucrées dans les établissements scolaires. Cette décision s’était alors heurtée aux proviseurs ainsi qu’aux parents d’élèves qui considéraient que les distributeurs limitaient les sorties des élèves pendant les interclasses.

Par ailleurs, un nombre croissant de scientifiques et de médecins affirment que la menace constituée par la consommation excessive de sucre, en particulier du fructose et du glucose, est telle qu’elle justifie la mise en place de mesures comparables à celles qui sont prises pour limiter la consommation de tabac et d’alcool.

En effet, c’est ce sucre raffiné, que nous consommons dans les aliments industriels, qui provoque une certaine dépendance et un appauvrissement des défenses immunitaires. Et que dire de certains industriels qui ont justifié la nature plus sucrée de leurs produits par un plus grand attrait des populations d’outre-mer pour le sucre ? De telles aberrations se passent de commentaires !

Enfin, en ce qui concerne la « date limite de consommation » apposée sur les yaourts, j’ai été heureux de constater qu’il en avait été pris bonne note dans ce présent texte, comme je vous l’avais demandé, monsieur le ministre, dans une de mes questions écrites en décembre dernier. Il est en effet impensable et injuste que les yaourts fabriqués en France hexagonale et expédiés dans les départements d’outre-mer aient une DLC différente de celle des mêmes yaourts vendus en métropole.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à rappeler brièvement ma préoccupation. Certains fabricants de métropole allongent la DLC en la portant à soixante jours afin que les produits arrivant en outre-mer soient commercialisables et restent donc à la vente plus longtemps en rayons dans les magasins d’alimentation.

Je rappelle que la durée de vie d’un aliment est définie comme la période durant laquelle le produit répond à des spécifications en termes de sécurité – innocuité – et de salubrité – absence d’altération –, dans les conditions prévues de stockage et d’utilisation, y compris par le consommateur. C’est ce qui s’appelle la date limite de consommation, la DLC, qu’il faut distinguer de la date limite d’utilisation optimale, la DLUO. La durée de vie d’un produit dépend donc de ses caractéristiques physico-chimiques, qui résultent de différents facteurs tels que la nature des ingrédients, le procédé de fabrication, le type de conditionnement et les modalités de conservation.

Ainsi, il est anormal qu’un produit fabriqué en métropole ait une DLC à 55 ou 60 jours, alors que les produits locaux identiques sont soumis à une DLC à 30 jours, ce qui conduit à avoir des produits fabriqués et importés qui affichent une DLC plus longue qu’un produit fabriqué ultérieurement. Cette pratique constitue pour les producteurs de yaourts des DOM une atteinte au libre jeu de la concurrence et revêt dès lors un caractère déloyal au sens de la législation nationale et européenne. Je me réjouis donc que le Gouvernement ait pris la pleine mesure de cette injustice et qu’il ait introduit dans ce texte, par voie d’amendement, un alignement de la DLC des yaourts vendus outre-mer sur celle des yaourts vendus en France métropolitaine.

Monsieur le ministre, je tiens toutefois à nuancer mes propos. Si je suis favorable à une DLC commune entre la métropole et l’outre-mer, je m’inquiète des conséquences que pourrait avoir ce texte sur le pouvoir d’achat du consommateur ultramarin. En effet, je sais à quel point le Gouvernement a été soucieux de lutter contre la vie chère dans nos départements puisque nous avons adopté dernièrement une loi dans ce but.

Cependant, l’alignement des DLC pour les yaourts, mais aussi pour l’ensemble des produits frais et autres denrées périssables, risque d’entraîner une hausse des prix de revient de plus de 250 %. Comme vous le savez, les DLC des produits frais de métropole ne sont pas soumises à la contrainte du temps de transport, qui représente de 15 à 25 jours pour le transport maritime en direction des DOM. Et l’importation de ces mêmes produits par avion renchérirait inévitablement les prix. Une telle issue serait, vous en conviendrez, contraire à l’esprit des actions que nous avons engagées contre la cherté de la vie.

Au regard de ces éléments, pouvez-vous, monsieur le ministre, me préciser les mesures envisagées par le Gouvernement pour garantir une sécurité sanitaire maximale, tout en évitant une hausse des prix des produits frais ?

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