Intervention de Jacques Cornano

Réunion du 21 mai 2013 à 14h30
Qualité de l'offre alimentaire en outre-mer — Article 3

Photo de Jacques CornanoJacques Cornano :

« À consommer jusqu’au », « à consommer avant le », « à consommer de préférence avant le », ces mentions figurent sur les emballages de nos produits alimentaires. Cependant, comment savoir ce qu’elles signifient réellement ?

La problématique fondamentale revêt un double aspect : comment concilier nos préoccupations relatives à la santé et les défis environnementaux engendrés par le gaspillage alimentaire et qu’il convient de relever ? Les enjeux de la lutte contre ce gaspillage sont la réduction de l’impact environnemental de l’alimentation, l’aide aux personnes les plus démunies et l’optimisation de l’agriculture. Ces impératifs de développement durable sont aujourd’hui incontournables.

À mon sens, la question du gaspillage alimentaire s’inscrit dans une réflexion d’ensemble à mener pour l’avenir de notre société et non seulement à l’égard des outre-mer.

Si je me félicite de voir étudiée la question posée par la vente de produits alimentaires différemment datés selon qu’ils sont vendus en métropole ou outre-mer, je reste dubitatif quant au problème dans son ensemble. Soit des aliments sont distribués outre-mer et, au mieux – si je puis m’exprimer ainsi –, ils sont dénués de qualités organoleptiques et nutritionnelles sans constituer un danger immédiat pour la santé ; soit la France est face à un véritable scandale environnemental, économique et social, résultant d’un gaspillage alimentaire institutionnalisé. À cet égard, les pouvoirs publics sont tout aussi responsables que les industriels de l’agroalimentaire, parce qu’ils les laissent faire.

En effet, si nous sommes confrontés à de tels problèmes, c’est essentiellement en raison du vide juridique lié à l’absence de dispositions légales et réglementaires concernant les DLC et les DLUO.

Dès lors, il apparaît que le sujet doit être étudié en amont et qu’il nous faut – pourquoi pas ? – repenser toute la méthodologie d’évaluation et de validation des documentations sur lesquelles se fondent les professionnels des secteurs.

En attendant cette refonte plus profonde et salutaire du système, il est possible d’introduire une obligation de prévoir, dans la rédaction des guides nationaux de bonnes pratiques et d’hygiène, des moyens et méthodes à mettre en œuvre afin de répondre aux objectifs sanitaires relatifs aux aliments, à l’intention des professionnels souhaitant vendre leurs produits dans les collectivités d’outre-mer.

De fait, parmi les principes de la méthode HACCP, système qui identifie, évalue et maîtrise les dangers significatifs au regard de la sécurité des aliments, l’étude scientifique et les avis rendus par les différents comités d’experts spécialisés ne font presque jamais mention de l’évolution des produits dans les contextes naturels ultramarins. Il s’agirait là d’un moyen de s’assurer de la bonne analyse des dangers biologiques – identification, caractérisation, exposition –, chimiques ou physiques à prendre en compte en fonction des produits ou productions considérés et des procédés utilisés dans l’environnement spécifique aux outre-mer.

Par ailleurs, au cours de la procédure de validation des guides nationaux de bonnes pratiques et d’hygiène, le protocole distingue cinq étapes, dont la première prévoit la notification du projet de guide aux trois directions – la direction générale de l’alimentation, ou DGAL, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, ou DGCCRF, et la direction générale de la santé, la DGS – par la branche de secteur et la désignation d’une administration dite « pilote » par le comité interministériel de suivi des guides afin d’être l’interlocuteur principal du professionnel sur le projet de guide.

À mes yeux, il est indispensable que le ministère des outre-mer soit systématiquement associé aux discussions entre l’administration pilote et les professionnels des secteurs. Les guides ont pour objectif d’aider ceux-ci à maîtriser la sécurité sanitaire des aliments et à respecter leurs obligations réglementaires. Dès lors, pourquoi exclure de leurs champs d’études les collectivités d’outre-mer et risquer de mettre en péril la santé de nos concitoyens ?

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