Mesdames, messieurs les sénateurs, l’ambition de cette proposition de loi est de combler un vide juridique qui pourrait être fort préjudiciable à la Guadeloupe et à la Martinique en matière de régularisation foncière de la zone littorale et de pallier l’inexécution de l'article 35 de la LODEOM, adoptée en 2009, relatif à la mission de titrement qui avait été confiée à un GIP unique, ce qui s’est avéré – nous avons pu le constater – inapplicable. Le Gouvernement a très bien compris l’intérêt de cette proposition de loi, qu’il soutient.
Je l'ai dit dans mon propos liminaire, une mission d'inspection a été diligentée : elle doit nous permettre d’avoir une vision d’ensemble de la question. Sitôt son rapport remis, ce qui sera fait dans quelques mois, nous n'hésiterons pas à en tirer des conclusions qui seront, je l'espère, significatives, et à proposer un dispositif plus global et définitif dans le véhicule législatif qui sera porté par Cécile Duflot.
Nous sommes bien conscients – en ce qui me concerne, pour l’avoir vécu personnellement – de la confusion qui s'est installée depuis longtemps sur ces zones. Nous avions déjà l’ONF et les agences des cinquante pas géométriques, dont l’existence a été prorogée à plusieurs reprises, avec une taxe spéciale d’équipement portée uniquement par les communes littorales. Nous aurons bientôt les EPF, de l’État ou locaux, qui seront financés au moyen d’une redevance.
La question se pose de savoir pourquoi – c'est, me semble-t-il Jacques Cornano qui a soulevé ce point intéressant – la plupart des collectivités ont écarté la formule de l'établissement public foncier d'État. Le Gouvernement a bien compris que, au regard de l'esprit de la décentralisation, l’EPFE représente en quelque sorte une forme de recentralisation d'une politique très importante pour les collectivités : la politique foncière et, demain, la politique du logement, en particulier du logement social.
Je me suis renseigné, les EPFE fonctionnent très bien. Mais le directeur est nommé par l'État, il est l'ordonnateur de l'établissement public. En revanche, un EPFL relève des élus locaux : ce sont eux qui désignent, qui gèrent et qui assument pleinement les responsabilités. Cette formule fonctionne bien à la Réunion, où l’EPFL mène une politique de réserve foncière. En Guadeloupe, l’ensemble des collectivités a été consulté : la plupart d’entre elles se sont prononcées pour un EPFL. Un rapport d'inspection a été fait. L'État avait proposé un EPFE, mais il s'est rendu compte que cette formule se heurtait à la forte volonté des élus de domicilier le pouvoir local dans les territoires. Attentif au souhait des élus, le Gouvernement a préféré proposer un EPFL.
La question de l'après-2016 a été posée par de nombreux orateurs, dont Jacques Cornano et Joël Guerriau. Nous avons différents scenarii selon les choix faits par les collectivités.
Je vérifierai ce qu’il en est pour Saint-Martin où je me rendrai très bientôt. Après avoir discuté avec les élus, la situation est la suivante. En Guadeloupe, c’est un EPFL. En Martinique, il y a l'agence et un EPFL a été créé. J'ai bien entendu la demande du sénateur Antiste d’attendre de voir si le dispositif fonctionne avant d’envisager une absorption par un nouvel organisme. Il faut s'assurer du caractère opérationnel de la formule choisie.
En Guyane, il y a l’établissement public d'aménagement guyanais, qui fera probablement l'objet d’un examen en vue d’une éventuelle révision. Un EPFL pourrait être créé, si tant est que cela soit le choix des élus guyanais.
À la Réunion, l’EPFL a été créé.
Mayotte, qui entre également dans le périmètre de la mission de titrement, doit encore être consultée : ce sera soit un GIP, soit un EPFE ou un EPFL. Compte tenu du choc institutionnel que Mayotte devra absorber, un dialogue opiniâtre, ou à tout le moins soutenu, devra être mené avec les institutions et les élus pour faire le choix définitif de la structure qui sera chargée des deux missions. Un EPFE est envisageable, si la collectivité le souhaite, compte tenu du choc institutionnel que Mayotte devra absorber, je le répète, à compter du 1er janvier 2014. Nous prenons de nombreuses ordonnances, car nous ne pouvons pas faire autrement. Le code général des impôts devra désormais être appliqué sur ce territoire, ce qui suppose de nouveaux impôts ; sont également en cours une mission cadastre, et une mission état civil, qui s’achève. Ensuite, il y aura l'octroi de mer. Un énorme travail notamment en matière de cadastre doit être effectué. Il faudra donc être très attentif à la situation.
En tout cas, on peut retenir la souplesse de loi : elle sera adaptée en fonction de la volonté des élus locaux et selon les réalités locales.
Le bilan des agences des cinquante pas géométriques, évoqué par Serge Larcher, est mitigé, je le reconnais. Ce n’est pas une stigmatisation. Leur durée de vie a été prolongée, et le sera sans doute encore jusqu'en 2016. Après un certain nombre d’années de fonctionnement, on ne peut nier qu’elles rencontrent des difficultés. Une formule appropriée devra être trouvée. C’est pourquoi – j’hésite à vous le dire, mais c’est dans l’ordre des choses –, selon le contenu du rapport qui nous sera remis par les deux inspecteurs, des conclusions devront être tirées. Faudra-t-il aller jusqu'à l'absorption des agences par les établissements publics fonciers ou, comme cela a été fait à la Réunion, aller jusqu’à donner les terres aux communes et, depuis 1922, les titrements ont été faits ? Voilà un exemple qui n'a pas été évoqué !
Si l'on veut éviter de créer trop d'institutions, trop d’instances, trop de « zinzins », diraient certains, une réflexion ne doit-elle pas être menée sur ce sujet ?
Je sais bien que des inquiétudes existent quant au personnel, à la pérennisation, aux institutions. Mesdames, messieurs les sénateurs, toutes ces questions seront mises sur la table et nous reviendrons bien évidemment devant vous.
Une autre question pose problème, sur laquelle j’ai, là aussi, demandé à l'inspection de nous éclairer : il s’agit des différences d'évaluation des terrains en Martinique et en Guadeloupe. Je ne comprends pas les méthodes employées.
J'ai bien entendu tous les intervenants demander des aides plus importantes pour aider les occupants de ces zones, qui sont des populations défavorisées. Mais, dans mon budget, 500 000 euros sont inscrits sur une ligne budgétaire unique. La distribution de ces crédits est très certainement pertinente, mais elle n’est peut-être pas parfaitement appropriée. Le montant est-il suffisant ? J'ai voulu évacuer un affreux soupçon porté par certains élus, lesquels estimaient qu’avec des évaluations aussi élevées, on reprenait d'une main ce qu’on donnait de l’autre avec des subventions déjà insuffisantes. Il faudra soulever toutes ces questions et trouver la meilleure solution, je n'ose dire la moins mauvaise, compte tenu de la situation des finances publiques.
Sur la lourdeur des procédures, évoquée par Jean-Claude Requier, vingt-deux étapes nécessaires pour régulariser, c’est long.
S’agissant des zones rouges, la question de leur gestion se pose : faut-il reloger les occupants actuels ? Comment le faire ? Je n'ai pas aujourd’hui la réponse.
J'ai déjà répondu à Joël Labbé, qui s'est excusé de devoir partir, la réflexion se poursuivra.
Je tiens à remercier tous les groupes, en particulier l'UMP, qui va voter ce texte de consensus. Je profite de l’occasion pour remercier le groupe l’UDI-UC, qui, ayant changé de position, a voté en faveur de la précédente proposition de loi.
Enfin, nous devrons poursuivre une réflexion sur le financement. Nous n’avons pas évoqué ce point, mais à l'époque où les textes ont été discutés au Parlement, 60 % du financement provenait de l'État, contre 40 % des collectivités. §