Intervention de Brigitte Gonthier-Maurin

Réunion du 23 mai 2013 à 9h30
Refondation de l'école de la république — Article 7

Photo de Brigitte Gonthier-MaurinBrigitte Gonthier-Maurin :

La notion de socle commun de connaissances et de compétences a été introduite par la loi Fillon du 23 avril 2005. Elle figure dans le code de l’éducation, dans le chapitre relatif aux objectifs et missions de l’enseignement scolaire.

L’article L. 122-1-1 du code de l’éducation affirme que « la scolarité obligatoire doit garantir à chaque élève les moyens nécessaires à l’acquisition d’un socle commun constitué d’un ensemble de connaissances et de compétences qu’il est indispensable de maîtriser », et énumère le contenu de ce socle commun : langue française, mathématiques, culture humaniste et scientifique, pratique d’une langue vivante étrangère, maîtrise des techniques de l’information et de la communication.

Par conséquent, je réaffirme ici notre opposition formelle au maintien de la notion de « socle commun de connaissances et de compétences » dans le code de l’éducation. Outre que le « socle commun » peut s’interpréter comme un « minimum », l’expression renvoie à des compétences clés définies qui nous semblent relever avant tout de l’« employabilité ». On instaure donc une vision a minima, légitimant un tri des élèves qui sera malheureusement le reflet de leur origine sociale.

Par ailleurs, et cela a été rappelé, des programmes scolaires qui, eux, ne sont pas limités au socle continuent d’exister. Il y a donc, d’un côté, un minimum de savoirs dont l’éducation nationale garantirait l’acquisition à tous les élèves et, de l’autre, des programmes plus exigeants et plus larges, dont elle n’a pas besoin de garantir l’acquisition à tous…

Au demeurant, et M. le ministre l’a souligné, la mise en place du socle a produit des effets psychologiques et culturels redoutables. Au lieu de pinailler sur la question de savoir si le dispositif a bien été appliqué ou non, examinons plutôt l’image terrible qui a été renvoyée aux enseignants, à plus forte raison quand le socle a été couplé au livret de compétences.

Imaginez un enfant scolarisé en deuxième année de maternelle rentrer un soir de fin d’année scolaire chez ses parents avec son livret de compétences composé de cases binaires à remplir : « acquis » ou « pas acquis » ; cela fait franchement froid dans le dos ! Je doute fort qu’il s’agisse là du meilleur moyen de valoriser le potentiel de chaque individu en devenir…

Voilà une raison supplémentaire pour supprimer l’article L. 122-1-1 du code de l’éducation, qui fait perdurer la reproduction des inégalités sociales, instaure des objectifs différenciés selon les élèves et ne se fonde pas sur le principe que tous sont capables d’apprendre et de réussir à un haut niveau d’exigence.

Si le Gouvernement redéfinit partiellement la notion de socle commun à l’article 7, il ne revient ni sur la dichotomie entre programmes et socle ni sur la notion de « minimum » associée à ce socle, qui créent de facto une différence d’exigence et de traitement entre les élèves selon leurs résultats scolaires et leurs capacités présupposées.

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