Séance en hémicycle du 23 mai 2013 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • enseignant
  • l’enseignement
  • l’école
  • l’éducation
  • socle
  • éducatif

La séance

Source

La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

En application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, ainsi que de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 prises pour son application, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un vote favorable – seize voix pour, zéro voix contre, une abstention – à la nomination de Mme Anne Paugam comme directeur général de l’Agence française de développement.

Acte est donné de cette communication

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République (projet n° 441, texte de la commission n° 569, rapport n° 568, avis n° 570 et 567).

Nous poursuivons la discussion des articles.

TITRE IER (suite)

DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Chapitre Ier

Les principes et missions de l’éducation

Section 2 bis

L’éducation à la santé et à la citoyenneté

Après l’article L. 121-4 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 121-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 121 -4 -1 . – I. – Au titre de sa mission d’éducation à la citoyenneté, le service public de l’éducation prépare les élèves à vivre en société et à devenir des citoyens responsables et libres, conscients des principes et des règles qui fondent la démocratie. Les enseignements mentionnés à l’article L. 312-15 et les actions engagées dans le cadre du comité prévu à l’article L. 421-8 relèvent de cette mission.

« II. – Le champ de la mission de promotion de la santé à l’école comprend :

« 1° La mise en place d’un environnement scolaire favorable à la santé ;

« 2° L’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation de programmes d’éducation à la santé destinés à développer les connaissances des élèves à l’égard de leur santé et de celle des autres ;

« 2° bis La délivrance effective de séances d’éducation à la sexualité est assurée, ainsi que la formation des personnels de l’éducation nationale et des intervenants extérieurs ;

« 3° La participation à la politique de prévention sanitaire mise en œuvre en faveur des enfants et des adolescents, aux niveaux national et régional ;

« 4° La réalisation des examens médicaux et des bilans de santé définis dans le cadre de la politique de la santé en faveur des enfants et des adolescents, ainsi que ceux nécessaires à la définition des conditions de scolarisation des élèves ayant des besoins particuliers. »

« La promotion de la santé à l’école telle que définie aux 1° à 4° du présent II relève en priorité des médecins et infirmiers de l’éducation nationale. »

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 337, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 2°bis de l’article 6 ter, pour le déplacer à un autre endroit du texte.

L’alinéa 2° bis dispose : « La délivrance effective de séances d’éducation à la sexualité est assurée, ainsi que la formation des personnels de l’éducation nationale et des intervenants extérieurs. »

Mme Morin-Desailly a souhaité que cet alinéa figure à cet endroit du texte. Cependant, ces préconisations – vous avez raison de vouloir rappeler l’importance de l’éducation à la sexualité, et nous partageons, vous le savez, votre préoccupation – de trois séances d’information et d’éducation figurent déjà au livre III du code de l’éducation.

Nous vous proposons toutefois, afin d’insister sur cet aspect des choses, d’ajouter par amendement, après l’alinéa 242du rapport annexé, un alinéa ainsi rédigé : « L’éducation à la sexualité fait l’objet d’au moins trois séances annuelles d’information dans les écoles, les collèges et les lycées qui peuvent être assurées par les personnels contribuant à la mission de santé scolaire, par des personnels des établissements ainsi que par d’autres intervenants extérieurs. Ces personnels sont spécifiquement formés dans ce domaine. »

Nous souhaitons donc en rester à la section consacrée à l’éducation à la santé et à la sexualité, au sein du Livre III du code de l’éducation.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 529, présenté par Mme Cartron, au nom de la commission de la culture, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Supprimer les mots :

est assurée

La parole est à Mme la rapporteur, pour défendre cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 337.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Il s’agit d’un amendement rédactionnel visant à supprimer les mots : « est assurée ».

S’agissant de l’amendement n° 337, la commission émet un avis favorable.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

En conséquence, l'amendement n° 529 n'a plus d'objet.

L'amendement n° 357, présenté par Mme Blondin, M. Magner, Mmes D. Michel, D. Gillot, Laurent-Perrigot, Lepage et Khiari, MM. Lozach, Assouline, Chiron, D. Bailly, Antiste, Eblé, Domeizel, Vincent, Madrelle, Antoinette, Percheron, Andreoni, Rainaud, Germain et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Remplacer les mots :

et régional

par les mots :

, régional et départemental

La parole est à Mme Maryvonne Blondin.

Debut de section - PermalienPhoto de Maryvonne Blondin

Cet amendement vise à ajouter la mention de l’échelon départemental après celle de l’échelon régional, au sein de l’alinéa consacré à la politique de prévention sanitaire.

La politique de santé publique des départements recouvre à la fois la protection maternelle et infantile, ou PMI, et la prévention, en coordination avec l’ARS.

Comme vous le savez, le département joue, en matière de PMI, un rôle de prévention et de dépistage auprès des futurs parents et des enfants de moins de six ans. Ces interventions doivent être complémentaires et coordonnées avec l’éducation nationale même si, dans la réalité, cela n’est pas toujours très facile à mettre en œuvre.

De plus, la planification et l’éducation familiale sont des missions obligatoires relevant du conseil général. À ce titre, l’éducation à la sexualité est l’un des enjeux de la collectivité. Pour cette raison, les départements financent des centres au sein des établissements hospitaliers et disposent également de leurs propres centres d’éducation et de planification familiale.

À partir de là, le département prend aussi le relais des campagnes nationales et a donc toute sa place dans cette échelle de coordination de la politique de prévention.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Bouchoux

Nous sommes d’accord avec tout ce qui vient d’être dit. Néanmoins, en dépit des textes existants, plus de 50 % des élèves de notre système éducatif ne suivent pas ces trois séances annuelles d’éducation à la sexualité.

Nous pouvons donc continuer à adopter des choses formidables, auxquelles nous croyons et que je suis prête à voter des deux mains, mais il faut savoir qu’elles ne sont pas traduites dans les faits!

Je voulais attirer votre attention sur cette question importante, dont je souhaiterais que l’on se saisisse soit à la faveur d’un rapport, soit d’une autre façon. Il me paraîtrait justifié de faire le point là-dessus.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Je voudrais rassurer Mme Bouchoux : nous nous sommes déjà saisis du problème, et l’éducation à la sexualité a fait l’objet d’un certain nombre d’instructions, en coordination étroite avec le ministère du droit des femmes et le ministère de la famille.

Il s’agit d’une de nos lignes d’action, car ce domaine recoupe nombre des problèmes que nous rencontrons aujourd’hui, notamment celui du harcèlement à l’école.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 358, présenté par Mme Blondin, M. Magner, Mmes D. Michel, D. Gillot, Laurent-Perrigot, Lepage et Khiari, MM. Lozach, Assouline, Chiron, D. Bailly, Antiste, Eblé, Domeizel, Vincent, Madrelle, Antoinette, Percheron, Andreoni, Rainaud, Germain et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

I. - Après l'alinéa 8

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

« 5° La détection précoce des problèmes de santé ou des carences de soins pouvant entraver la scolarité ;

« 6° L’accueil, l’écoute, l’accompagnement et le suivi individualisé des élèves ;

« 7° La participation à la veille épidémiologique par le recueil et l’exploitation de données statistiques. »

II. - Alinéa 9

Remplacer la référence :

par la référence :

La parole est à Mme Maryvonne Blondin.

Debut de section - PermalienPhoto de Maryvonne Blondin

Cet amendement tend à compléter et à préciser la circulaire fondatrice de la promotion de la santé à l’école, publiée en 2001.

Depuis cette date, la société a changé. De grands domaines d’intervention sont donc absents de cette circulaire, qu’il s’agisse des projets d’accueil individualisés, les PAI, du diagnostic et du suivi des enfants en situation de handicap, du domaine de la détection précoce des problèmes de santé et des carences de soins pouvant entraver la scolarité – nous en avons déjà parlé – ou de l’accueil, de l’écoute, de l’accompagnement et du suivi individualisé des élèves.

Ce dernier aspect constitue véritablement une composante essentielle de l’activité des personnels de santé scolaire, plus particulièrement des infirmiers, notamment dans le second degré. Ainsi, par exemple, l’infirmerie d’un établissement du second degré peut voir passer de trente à quarante élèves par jour.

Sur les quelque 150 000 passages en infirmerie répertoriés dans le second degré par l’inspection académique de Loire-Atlantique pendant l’année scolaire 2009-2010, 68 % concernaient des soins et traitements – parmi lesquels la contraception d’urgence –, 13% des conseils en santé et 7 % une écoute et relation d’aide.

Nous touchons là, chers collègues, à une tâche centrale en matière de promotion de la santé.

La participation à la veille épidémiologique à travers le recueil et l’exploitation de données statistiques constitue un autre domaine d’intervention omis par la circulaire.

Les observations de terrain des personnels de santé scolaire sont une source riche, mais ô combien mal et sous exploitée, de surveillance épidémiologique et de données psycho-sociales.

Chaque année, les médecins et infirmiers de l’éducation nationale renseignent un logiciel, rédigent un rapport annuel d’activité sans que soit effectuée ensuite une exploitation systématique dans les rectorats ou une synthèse à l’échelon national. C’est écrit mais ce n’est pas réalisé, et je rejoins là l’opinion de notre collègue Corinne Bouchoux. Nous nous privons ainsi de connaissances facilement valorisables sur l’état sanitaire et psychique de nos enfants et adolescents, alors même que les personnels de santé scolaires sont les seuls à pouvoir observer l’ensemble de la population scolaire.

C’est la raison pour laquelle la participation à la veille épidémiologique à travers le recueil et l’exploitation des données statistiques doit être clairement inscrite dans le champ de la promotion de la santé.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Je voudrais dire notre satisfaction à voir reconnue, à travers nos propositions, renforcées par l’amendement du Gouvernement, l’importance de l’éducation à la sexualité. Nous sommes également satisfaits de l’adoption, hier, d’un article additionnel sur les pratiques sportives.

Voilà qui montre le caractère essentiel, dans ce projet de loi sur l’école, de tout ce qui est de l’ordre de la maîtrise du corps, de l’attention portée à la santé.

M. le ministre acquiesce.

L'article 6 ter est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Section 3

Le socle commun de connaissances, de compétences et de culture

L’article L. 122-1-1 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° Les sept premiers alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« La scolarité obligatoire doit au moins garantir à chaque élève les moyens nécessaires à l’acquisition d’un socle commun de connaissances, de compétences et de culture, auquel contribue l’ensemble des enseignements dispensés au cours de la scolarité. Le socle doit permettre la poursuite d’études, la construction d’un avenir personnel et professionnel et de préparer à l’exercice de la citoyenneté. Les éléments de ce socle commun et les modalités de son acquisition progressive sont fixés par décret, après avis du Conseil supérieur des programmes. Ils se réfèrent à la recommandation du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2006 sur les compétences clés pour l’éducation et la formation tout au long de la vie (2006/962/CE). » ;

2° À l’avant-dernier alinéa, le mot : « obligatoire » est supprimé ;

3° Le dernier alinéa est supprimé.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

L’article 7 est vraisemblablement l’un des plus importants de ce projet de loi, puisqu’il est relatif au socle commun de connaissances, de compétences et de culture.

Nous souhaitons la suppression de cet article. Non pas que nous soyons contre le socle commun : bien au contraire, nous souhaitons le protéger et le renforcer !

Ainsi que ma collègue Françoise Férat et moi-même l’avons rappelé lors de la discussion générale, ce socle commun, qui date de 2005, définit les bases minimales préalables que les enfants doivent acquérir afin de poursuivre leurs études. C’est absolument essentiel !

Ce socle ne doit pas être appréhendé comme une série de disciplines, même importantes, ou comme une addition de tâches à savoir accomplir ou de qualités à développer. Le socle, c’est un ensemble de compétences primordiales à atteindre – « primordiales » parce que, sans elles, on ne peut pas poursuivre tout le reste.

Vous nous accusez sans cesse de faire du socle un objectif d’éducation. C’est tout le contraire ! Le socle, c’est la base sur laquelle on peut construire. Si celle-ci est faible, défaillante, l’édifice s’écroulera ou se fissurera à un moment ou un autre. C’est parce que nous voulons le meilleur pour nos enfants et la formation la plus complète à terme que nous souhaitons une base solide, et donc un socle fort.

Pour cela, nous pensons que c’est au législateur de fixer le cap : le socle y gagnera en force et en épaisseur, car, pour durer, il doit être intangible, quasi permanent dans le temps. Le modifier régulièrement reviendrait à le fragiliser.

D’ailleurs, une définition législative du socle n’enlèvera rien au Conseil supérieur des programmes, qui aura également un rôle important à jouer dans la déclinaison la plus ambitieuse possible de ces objectifs à atteindre.

Aussi proposerons-nous de supprimer l’article 7. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame le rapporteur, mes chers collègues, nous ne pourrons pas non plus voter l’article 7, qui modifie le dispositif prévu par la loi Fillon pour garantir aux élèves l’acquisition d’un socle commun de connaissances et de compétences durant leur scolarité.

Il y a à cela deux raisons.

Premièrement, vous remettez à un décret le soin de fixer « les éléments de ce socle commun et les modalités de son acquisition ». Cette disposition est étonnante et, d'ailleurs, à mon sens, inconstitutionnelle.

Je rappelle que l’article 34 de la Constitution précise que « la loi détermine les principes fondamentaux […] de l’enseignement ». Or je pense que la fixation de connaissances de base que nos élèves doivent maîtriser en fin de scolarité est précisément un point fondamental de notre système éducatif ! C’est notre République qui s’engage à transmettre ces connaissances, à garantir l’acquisition d’un socle commun.

Certes, l’article 7 retient le principe de ce socle commun. Mais priver le Parlement de la définition du socle est contraire aux prérogatives que la Constitution lui confère ! Du reste, on peut alors se demander ce qui relèverait de l’article 34… Que des dispositions relevant du pouvoir législatif soient prises par le pouvoir réglementaire est un cas manifeste d’« incompétence négative », puisque le législateur méconnaîtrait les prérogatives qu’il tient de la Constitution selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

Pour cette raison, notre formation politique a déposé deux amendements, l’un visant à réparer cette erreur, en supprimant le renvoi au décret, l’autre tendant à définir, élément par élément, le contenu du socle commun de connaissances et de compétences.

Deuxièmement, la rédaction du présent projet de loi entraîne la dilution de ce dernier.

Tout d’abord, vous vous référez à un « socle commun de connaissances, de compétences et de culture ». Nous ne sommes pas certains de bien comprendre ce que le mot « culture » vient faire ici.

Bien évidemment, nous partageons votre attachement à la culture. Cela étant, la culture est-elle un enseignement ? Selon moi, la culture se transmet, puis s’acquiert. Elle relève non pas spécifiquement de l’école, mais tout autant des autres agents socialisateurs que sont la famille, les amis, le village, le quartier, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

… l’enseignement religieux – pourquoi pas ? –, les médias…

De plus, selon l’opinion des linguistes, ce n’est pas la culture ou l’identité qui fait la langue ; c’est la langue qui engendre la culture et l’identité. Aussi, si nous faisons porter nos efforts sur l’apprentissage des vraies connaissances et des compétences fondamentales, à savoir la lecture, l’écriture et l’expression orale, de facto les éléments primordiaux de la culture française seront transmis aux enfants.

J’ajoute que l’utilisation du terme « culture » ne renvoie à rien de particulièrement précis. Or la définition du socle commun doit justement être précise afin de circonscrire un dénominateur commun, certes étroit, mais parfaitement consolidé. Pour ces raisons, l’emploi du terme « culture » ne nous semble pas approprié, à nous qui l’aimons tant.

Enfin, une lecture transversale du projet de loi montre que, selon vous, l’acquisition de la lecture et celle d’une morale laïque ou de capacités dans le domaine artistique sont d’égale importance. C’est la raison pour laquelle il est essentiel de fixer les fondamentaux dans la loi. Sinon, il serait possible à chaque gouvernement, au gré de l’alternance politique, d’établir ses propres priorités.

En conséquence, les membres du groupe UMP émettront un vote défavorable sur cet article 7.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Férat

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 7 constitue l’un des articles les plus importants du texte.

En préalable, je tiens à indiquer que je souscris sans réserve aux propos tenus par ma collègue Catherine Morin-Desailly.

À vous entendre, monsieur le ministre, votre projet de loi va résoudre tous les problèmes : tous les élèves sauront parler, lire, écrire et compter en fin de CM2 ; tous les professeurs seront formés à transmettre leur savoir et à développer le sens moral et l’esprit critique de leurs élèves…

Bref, dans quatre ans, à la fin de la mandature, grâce à vous, l’école aura remonté, dans le classement PISA, de la dix-neuvième à la quatrième, voire à la troisième place !

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Férat

Depuis quarante ans, on nous sert le même discours. Depuis quarante ans, on pense qu’une égalité de moyens permet une égalité de chances et de résultats. « Tous au collège unique ! », « Tous au bac ! »… Voilà ce à quoi on en appelle, alors que certains enfants sont déjà pénalisés en entrant à l’école maternelle. C’est là que le bât blesse.

On sait qu’à côté des inégalités naturelles, sur lesquelles nous ne pouvons rien, existent des inégalités culturelles et sociales.

Permettez-moi d’insister sur l’une des plus importantes : l’accès à la langue de notre pays pour les enfants vivant dans des familles où l’on ne parle pas le français ou on le parle mal. Sous prétexte de non-discrimination, rien n’a été fait, depuis l’immigration massive consécutive à la fin de la guerre d’Algérie, pour que les enfants scolarisés arrivent tous au même niveau de langage.

À cet égard, je répète que l’illettrisme n’est pas traité dans ce texte ! Pourtant, l’égalité dans l’acquisition d’un grand nombre de mots dès l’école maternelle permettrait, sans aucun doute, une meilleure acquisition de la lecture et de l’écriture à l’école primaire.

À cette inégalité s’ajoute votre décision de porter à neuf demi-journées la semaine scolaire des élèves de maternelle et du primaire. Ce temps supplémentaire n’apportera strictement rien aux enfants pour l’acquisition des fondamentaux. En revanche, il contribuera indiscutablement à une plus grande fatigue des enfants – et pour rien !

Monsieur le ministre, comme je vous le demandais au moment de la discussion générale, avez-vous déjà passé une journée complète – de sept heures trente à dix-huit heures trente – dans une école primaire ou une école maternelle, avec les élèves ? Je peux vous assurer que vous en sortirez épuisé ! Eh bien, sachez que les petits âgés de quatre à onze ans le sont encore davantage. Vous ajoutez une demi-journée de fatigue à des élèves qui n’en tireront aucun bénéfice puisque le nombre d’heures d’enseignement reste le même.

Enfin, je note que votre projet est plein de bonnes intentions concernant la formation des professeurs. Mais qu’en est-il de la difficulté majeure que rencontrent tous les professeurs de la maternelle à la terminale, à savoir la gestion d’une classe, quand aucune d’entre elles n’échappe à la présence de trublions empêchant le maître de transmettre son savoir et la majorité des élèves de profiter de son enseignement ? Quand allez-vous prendre ce sujet à bras-le-corps et lui apporter une vraie solution, sérieuse et efficace ?

Il faudrait peut-être interroger les responsables de deux pays que nous connaissons bien, la Finlande et le Canada, respectivement deuxième et troisième du classement PISA, pour savoir comment ils abordent ce problème – et les autres.

Monsieur le ministre, toutes les mesures que vous proposez seront efficaces si l’on s’accorde les moyens de donner aux futurs élèves du primaire, dès la petite enfance, une égalité dans le langage, si l’on forme les maîtres à gérer des classes de plus en plus difficiles, si l’on augmente le temps réel consacré chaque année à l’acquisition des savoirs.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

C’est précisément ce que l’on fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Férat

Sinon, je crains, monsieur le ministre, que les bonnes intentions inscrites à l’article 7 ne changent rien à mes constats.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet article 7, relatif au socle commun de connaissances et de compétences, est l’un des plus importants du projet de loi. En effet, il a à voir avec la visée que l’on veut assigner au système public de l’éducation.

Avec la rédaction actuelle de l’article 7, le Gouvernement entend créer un socle de connaissances et de compétences nouveau, visant à l’émanciper de la vision que la droite lui a conférée.

Il le rebaptise, en lui ajoutant le terme : « culture ». Si cette reformulation n’est sans doute pas idéale, elle constitue une amélioration.

D’ailleurs, monsieur Legendre, l’école n’est bien sûr pas le seul lieu où se construit la culture, mais elle participe de la construction de la culture, le vivre-ensemble et le « partage-ensemble » étant constitutifs d’une construction culturelle. Je ferme là la parenthèse…

Le texte supprime également la phrase suivante, qui figurait à l’article L.122-1-1 du code de l’éducation : « Parallèlement à l’acquisition du socle commun, d’autres enseignements sont dispensés au cours de la scolarité obligatoire ». De cela aussi, mes chers collègues, je me félicite ! En effet, cette phrase venait conforter une vision a minima du socle, conçu comme un « SMIC éducatif », et non comme une visée globale et commune pour tous les élèves. D’ailleurs, dans le fait que les enseignements complémentaires dispensés venaient renforcer le socle, on pouvait voir l’aveu de l’insuffisance et de la conception véhiculée par ce dernier…

Cela suffit-il pour parler de « rupture » ?

Nous pensons qu’une école émancipatrice doit favoriser l’autonomie de pensée et l’esprit critique, impliquant une certaine forme de désintéressement et un rapport non utilitariste à l’apprentissage, érigeant la culture et la connaissance en objectifs ultimes de ce dernier – bien loin, donc, de la notion de « compétences » introduite dans les réformes précédentes et dont le Gouvernement ne semble pas vouloir totalement s’affranchir.

Entendons-nous bien : nous ne pensons pas que la notion de « compétences » doive être dénoncée en tant que telle ; elle peut évidemment faire sens.

Toutefois, elle ne doit pas être instaurée comme la seule finalité de l’école, car elle deviendrait alors problématique. De surcroît, ces « compétences » ne doivent pas non plus se résumer à celles d’entre elles qui sont les plus opérationnelles et les plus aptes à l’« employabilité » et au marché du travail, conformément à la vision qu’en a l’Europe.

C’est au travers de ce prisme que nous avons examiné l’article 7. Et, sur ces points, cet article ne nous semble pas constituer une rupture assez profonde.

En effet, dans la rédaction actuelle du texte, le socle demeure en fait le cœur de tout le système éducatif, alors qu’il mériterait sans doute qu’un travail public plus large lui soit consacré au sein de la majorité. Le socle est désormais introduit partout : collège, brevet, programmes, baccalauréat… Tout, dans l’éducation, vise à son acquisition et donc, avec lui, au développement de compétences. Le socle est devenu omniprésent.

En outre, nous avons proposé une réécriture de l’article 7, adoptée en commission, qui tente d’éloigner le plus possible le socle de son asservissement quasi exclusif aux « compétences », telles que définies par la loi Fillon. Nous avions proposé de supprimer purement et simplement le mot « compétences » de l’article, mais cela nous a été refusé. Nous avons donc dû nous contenter de réécrire une phrase de ce dernier, qui donne corps au socle en affirmant que celui-ci « doit permettre la poursuite d’études, la construction d’un avenir personnel et professionnel et de préparer à l’exercice de la citoyenneté ».

Ainsi, nous voulons conférer au socle une visée de haut niveau de connaissances pour tous.

Le Gouvernement entend néanmoins revenir sur cette modification pour rétablir la rédaction initiale, qui n’assigne pas de grands objectifs au socle mais affirme bien plus modestement que « la maîtrise du socle est indispensable pour accomplir avec succès sa scolarité, poursuivre sa formation […] ».

Enfin, un autre élément nous fait craindre que la rupture annoncée ne soit qu’une redéfinition avec les mêmes objectifs : je veux évoquer la référence introduite en commission aux huit compétences clés européennes pour l’éducation et la formation tout au long de la vie, telles que définies dans la recommandation du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2006, compétences inscrites dans une vision complètement utilitariste.

Alors que le projet de loi initial gommait les références faites par la loi Fillon à certaines de ces compétences et renvoyait au décret la définition du socle, voilà que ces mêmes compétences sont réintroduites par voie d’amendement.

Le projet de loi fait donc exclusivement référence à la notion de compétences pour construire un nouveau socle. Qu’aura-t-il alors de nouveau ?

Ainsi, le texte délaisse la notion de culture, en fait une coquille vide, réduisant la réécriture du socle à une volonté de réforme qui ne trouvera pas, selon nous, à s’incarner.

Nous aurons l’occasion d’avancer des propositions au cours du débat, afin de revenir sur cet état de fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L’amendement n° 61, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Il s’agit d’un amendement de suppression de l’article dont j’ai largement développé l’objet dans mon intervention liminaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

L’article 7 du projet de loi conserve la valeur législative du socle commun. En revanche, il supprime la liste des grands items qu’il comprend. Mais la liste définie à l’article L. 122-1-1 du code de l’éducation n’est pas véritablement le contenu du socle commun, lequel est beaucoup plus vaste et entièrement défini par décret.

Le pouvoir réglementaire est compétent sur les programmes et le socle, selon l’article L. 311-2 du code de l’éducation.

Le législateur de 2013 n’a pas moins de compétences que le législateur de 2005, mais il souhaite que la définition du socle commun soit cohérente avec la refonte des programmes.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Je voudrais dire un mot sur cet article 7, que certains semblent considérer comme étant le plus important du projet de loi. Ce n’est pas mon point de vue.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je veux vous expliquer pourquoi nous avons adopté cette démarche pour le socle.

Je tiens, tout d’abord, à vous rappeler les faits, ce qui n’est jamais inutile.

Depuis huit ans qu’il existe, le socle ne s’est pas traduit dans la réalité de l’école française. Il y a à cela plusieurs raisons.

Premièrement, cela a été dit, le socle a dû être modifié un an seulement après avoir été voté par les parlementaires. Personnellement, je souhaite associer ces derniers au Conseil supérieur des programmes. Ce sera, d’ailleurs, une première dans notre histoire. Pour autant, décider du socle dans la tranquillité des débats de l’Assemblée nationale ou du Sénat me semble impensable. Preuve en a été faite : un an après l’avoir voté, les parlementaires étaient obligés de le modifier. Il faut en tirer la leçon.

Deuxièmement, pour que le socle soit mis en œuvre, il faut faire en sorte que ceux qui sont chargés d’enseigner aux enfants le soutiennent. Or tel n’a pas du tout été le cas, et c’est même l’inverse qui s’est produit.

Mme Gonthier-Maurin a insisté sur ce point, le socle a été compris, interprété, comme un minimum, une forme de « SMIC culturel » accordé à un certain nombre d’enfants. Voyant cela, constatant la non-articulation du socle aux programmes – c’est tout de même assez étonnant ; le socle doit pouvoir, en effet, se décliner en programmes – et la difficile cohabitation du socle, des programmes et du livret de compétences, les enseignants se sont découragés. Tout cela a conduit à introduire de la complexité, voire de l’obscurité, et à dévaloriser même le principe du socle.

Pour moi, vous le savez, le socle exprime un devoir de l’État à l’égard de tous les enfants de la Nation. Il ne faut pas le comprendre comme étant le minimum accordé à certains, et il ne faut pas que cette interprétation puisse prospérer.

Le socle que nous essayons de construire est plutôt un tremplin. Nous voulons que l’État prenne des engagements à l’égard de l’ensemble des enfants, pour que tous possèdent au moins ce bagage. Cela suppose un certain nombre de décisions, et c’est justement celles que nous avons prises : le juste milieu, la tempérance, la médiété, la volonté de tirer les leçons des expériences passées et de répondre aux interrogations des uns et des autres, nous conduisent à adopter une position qui me semble raisonnable, entre celle de Mme Gonthier-Maurin et celle de l’opposition sénatoriale.

Certains veulent supprimer le socle, parce qu’il faudrait supprimer la culture. Vraiment ? Nous avons pourtant réussi, pour la première fois, à rassembler l’ensemble des acteurs du monde éducatif autour de l’idée selon laquelle le socle a pour effet non pas d’abaisser le niveau, mais, au contraire, de l’élever et de permettre l’accès de tous les enfants à cette culture. Nous avons donc, sur ce point, trouvé une position de synthèse.

D’autres voudraient supprimer le socle parce qu’on en resterait ainsi à cette seule interprétation.

En réalité, le socle est un tremplin. Il doit donc être discuté sérieusement, en même temps que les programmes et les évaluations. Il faut accepter que le Conseil supérieur des programmes soit plus habilité à le faire que nous, même si nous avons évidemment des directives à donner.

Vous serez, mesdames, messieurs les sénateurs, associés à ce travail. Il est tout à fait fondamental de conserver ce socle, tout en lui donnant, ainsi qu’aux élèves, les moyens de réussir. Or tel n’a pas été le cas depuis son adoption dans la loi Fillon.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Je n’aurai pas l’ambition d’égaler les arguments présentés par les orateurs des groupes UDI-UC et UMP, qui combattent l’article 7 dans sa rédaction actuelle, mais les explications données à l’instant par M. le ministre, qui ne me convainquent pas, m’incitent à prendre la parole.

Au moment même où notre société est confrontée, dans des conditions qui ne pourront que s’aggraver, à un problème de cohésion lié à la diversité des expériences, des origines, des parcours, ou des projets, il me paraissait de bon sens que le Parlement soit associé non pas simplement au principe d’un socle, qui vient d’être évoqué, mais en grande partie à son contenu. C’est bien à la cohésion sociale, à la cohésion d’une population, que l’école a vocation à contribuer puissamment.

Où pouvons-nous en parler plus légitimement qu’au Parlement, à l’occasion d’un débat sur le contenu du socle ? Je suis quelque peu étonné de vos propos, monsieur le ministre. Vous dites que nous serons associés aux discussions. Certes, mais la décision ne nous appartiendra pas.

Il faudrait vraiment que soit discuté au Parlement le contenu du socle, en particulier tout ce qui est lié, d’une façon ou d’une autre, aux sciences humaines, aux capacités de développement et d’épanouissement de nos jeunes, entretenues par l’apprentissage de la lecture, de l’écriture, et des éléments de base des mathématiques ou des langues. Sur ce dernier point, le débat est aujourd’hui politique : personnellement, je soutiens la position de Mme Fioraso, considérant qu’elle a raison. En effet, si nous voulons des citoyens qui aient une dimension mondiale et qui puissent exister dans un système ouvert, il faut leur donner la chance d’étudier en anglais. Ces questions sont profondément politiques, au sens fort du terme, c'est-à-dire au sens de la vie en commun.

Donc, si vous laissez à un Conseil, aussi éminent, diversifié, nourri et pétri de bonnes intentions soit-il, la responsabilité de ce contenu en en privant les parlementaires, vous donnez le sentiment de mutiler leur vocation profonde, la construction collective du socle de la cohésion sociale. C’est ce que vous faites, monsieur le ministre, au travers de cet article 7, et c’est la raison pour laquelle je ne le voterai pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

J’ai écouté très attentivement M. le ministre et je voudrais réagir à ses propos : l’échec du socle serait lié à l’incapacité ou, selon lui, au désarroi de ceux qui étaient chargés de le mettre en œuvre, à savoir les enseignants qui ne se seraient pas approprié cette manière d’aborder l’éducation et ne se seraient par conséquent pas impliqués.

L’instauration du socle requiert bien une nouvelle façon d’enseigner et de travailler. Il ne s’agit plus de rester cantonné dans sa propre discipline.

M. Gérard Longuet acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

En vingt ans d’expérience au sein de l’éducation nationale, je me suis souvent dit, avec d’autres, que nous étions trop cantonnés dans notre petite discipline.

M. Gérard Longuet acquiesce à nouveau.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Il faut absolument réfléchir aux missions de l’enseignement et à l’organisation du travail aujourd’hui. Je déplore que ces sujets soient totalement absents de ce projet de loi. §Lors de la discussion générale, Françoise Férat et moi-même avons regretté que ce projet de loi de « refondation » n’aborde pas la question de l’organisation du travail des enseignants, les premiers susceptibles, pourtant, de faire réussir l’école.

Je tenais à faire ces quelques remarques pour vous dire, monsieur le ministre, que le socle est plus qu’un tremplin, c’est une base intangible.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Je confirme que je ne pourrai voter cet article 7.

M. le ministre a mentionné l’expression utilisée par certains de « SMIC culturel », pour désigner le socle. C’est une expression détestable, que nous ne voulons absolument pas voir concrétisée.

Notre objectif n’est pas de donner à des élèves un « SMIC culturel », il est de s’assurer qu’ils disposent, en maîtrisant des matières essentielles, de la possibilité de réussir dans toutes les disciplines, et que chacun d’entre eux pourra se bâtir une culture lui étant propre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Cela me paraît d’ailleurs préférable à la notion de « culture commune ». Chacun doit pouvoir se construire sa culture pour être un citoyen du XXIe siècle.

C’est tellement important, monsieur le ministre, qu’il me semble impensable de laisser à un organisme de l’éducation nationale le soin de rédiger le contenu du socle commun, pour la simple raison que ce qui avait été décidé n’a pas été véritablement appliqué.

C’est suffisamment important pour que le Parlement revienne sur cette question quand c’est nécessaire et qu’il veille, à cette occasion, à l’application effective de ses décisions par le ministère de l’éducation et par l’ensemble du monde enseignant.

Voilà pourquoi il nous paraît très important que le Parlement ne soit pas dessaisi de son rôle, sur une question qui nous semble essentielle.

On ne parle pas assez de l’éducation au Parlement, et nous voulons pouvoir prendre nos responsabilités.

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je suis saisi de douze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 87, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Scouarnec, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Le code de l’éducation est ainsi modifié :

1° L’article L. 122-1-1 est abrogé ;

2° À l’article L. 161-1, la référence : « L. 122-1-1 » est supprimée ;

3° Au deuxième alinéa de l’article L. 332-6, les mots : « atteste la maîtrise des connaissances et compétences définies à l’article L. 122-1-1, » sont supprimés ;

4° Au quatrième alinéa de l’article L. 337-3, les mots : « concourt à l’acquisition du socle commun de connaissances et de compétences mentionné à l’article L. 121-1-1 et » sont supprimés.

II. – Le premier alinéa de l’article L. 6111-2 du code du travail est supprimé.

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

La notion de socle commun de connaissances et de compétences a été introduite par la loi Fillon du 23 avril 2005. Elle figure dans le code de l’éducation, dans le chapitre relatif aux objectifs et missions de l’enseignement scolaire.

L’article L. 122-1-1 du code de l’éducation affirme que « la scolarité obligatoire doit garantir à chaque élève les moyens nécessaires à l’acquisition d’un socle commun constitué d’un ensemble de connaissances et de compétences qu’il est indispensable de maîtriser », et énumère le contenu de ce socle commun : langue française, mathématiques, culture humaniste et scientifique, pratique d’une langue vivante étrangère, maîtrise des techniques de l’information et de la communication.

Par conséquent, je réaffirme ici notre opposition formelle au maintien de la notion de « socle commun de connaissances et de compétences » dans le code de l’éducation. Outre que le « socle commun » peut s’interpréter comme un « minimum », l’expression renvoie à des compétences clés définies qui nous semblent relever avant tout de l’« employabilité ». On instaure donc une vision a minima, légitimant un tri des élèves qui sera malheureusement le reflet de leur origine sociale.

Par ailleurs, et cela a été rappelé, des programmes scolaires qui, eux, ne sont pas limités au socle continuent d’exister. Il y a donc, d’un côté, un minimum de savoirs dont l’éducation nationale garantirait l’acquisition à tous les élèves et, de l’autre, des programmes plus exigeants et plus larges, dont elle n’a pas besoin de garantir l’acquisition à tous…

Au demeurant, et M. le ministre l’a souligné, la mise en place du socle a produit des effets psychologiques et culturels redoutables. Au lieu de pinailler sur la question de savoir si le dispositif a bien été appliqué ou non, examinons plutôt l’image terrible qui a été renvoyée aux enseignants, à plus forte raison quand le socle a été couplé au livret de compétences.

Imaginez un enfant scolarisé en deuxième année de maternelle rentrer un soir de fin d’année scolaire chez ses parents avec son livret de compétences composé de cases binaires à remplir : « acquis » ou « pas acquis » ; cela fait franchement froid dans le dos ! Je doute fort qu’il s’agisse là du meilleur moyen de valoriser le potentiel de chaque individu en devenir…

Voilà une raison supplémentaire pour supprimer l’article L. 122-1-1 du code de l’éducation, qui fait perdurer la reproduction des inégalités sociales, instaure des objectifs différenciés selon les élèves et ne se fonde pas sur le principe que tous sont capables d’apprendre et de réussir à un haut niveau d’exigence.

Si le Gouvernement redéfinit partiellement la notion de socle commun à l’article 7, il ne revient ni sur la dichotomie entre programmes et socle ni sur la notion de « minimum » associée à ce socle, qui créent de facto une différence d’exigence et de traitement entre les élèves selon leurs résultats scolaires et leurs capacités présupposées.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 55 rectifié, présenté par MM. Guerriau, Merceron et J.L. Dupont, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

« La scolarité obligatoire doit au moins garantir à chaque élève les moyens nécessaires à l’acquisition d’un socle commun de connaissances, de compétences et de culture, auquel contribuent l’ensemble des enseignements dispensés au cours de la scolarité. La maîtrise du socle est indispensable pour accomplir avec succès sa scolarité, poursuivre sa formation, construire son avenir personnel et professionnel et se préparer à l’exercice de la citoyenneté. Les éléments de ce socle commun et les modalités de son acquisition progressive sont fixés par décret, après avis du Conseil supérieur des programmes. Les élèves qui éprouvent des difficultés dans cette acquisition reçoivent des aides et bénéficient des adaptations nécessaires à la poursuite de leur formation. » ;

La parole est à M. Joël Guerriau.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Guerriau

Hier après-midi et cette nuit encore, j’ai entendu nombre d’intervenants s’adresser avec leur cœur aux élèves en difficulté ayant du mal à acquérir le niveau de connaissances et de compétences prévu par le socle.

Monsieur le ministre, vous avez déclaré à l’instant que le socle était un ensemble d’engagements à l’égard de tous les enfants, qui doivent au minimum posséder ce bagage. Je souscris à vos propos. Si nous décidons de mettre en place un socle commun, avec toutes les difficultés de définition du contour que cela présente, il faut évidemment le rendre effectif en pratique, afin que tous les enfants atteignent le niveau de connaissances et de compétences souhaité. D’ailleurs, cela soulève la question des moyens et des méthodes à mobiliser pour permettre aux élèves en difficulté d’y parvenir.

C’est précisément le sens de mon amendement. Je propose d’introduire la notion d’« adaptations » dans le texte, afin de prendre un compte la nécessité d’accompagner certains enfants dans l’acquisition du socle de connaissances et de compétences.

En outre, je souhaite également que soient mis en place les outils indispensables à l’apprentissage en milieu ordinaire pour des enfants en situation de handicap.

Pour avoir présidé un institut de sourds pendant six ans, je sais à quel point certaines difficultés d’acquisition des connaissances par des enfants malentendants réclament un traitement particulier.

J’espère donc que cet amendement fera l’objet de toute votre attention, mes chers collègues.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 193, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou, Lenoir et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Alinéa 3, première phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

La scolarité obligatoire garantit à chaque élève les moyens nécessaires à l'acquisition d'une socle commun de connaissances et de compétences auquel contribue l'ensemble des enseignements dispensés au cours de la scolarité.

La parole est à Mme Colette Mélot.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Par cet amendement, nous vous proposons d’adopter une rédaction plus précise, en remplaçant les mots « doit au moins garantir », qui ont pour effet de minimiser l’objectif visé, l’acquisition du socle commun, par « garantit », ce qui met davantage en relief l’exigence absolue de maîtriser les savoirs à l’issue de la scolarité.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 89, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Scouarnec, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 3, première phrase

Supprimer les mots :

au moins

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Cet amendement s’inscrit dans le même esprit que mon amendement précédent.

Si un socle commun de connaissances, de compétences et, désormais, de culture existe, il ne doit pas constituer une exigence minimale de la scolarité obligatoire.

L’article 7 supprime le dernier alinéa de l’article L. 122-1-1 du code de l’éducation, qui est ainsi rédigé : « Parallèlement à l’acquisition du socle commun, d’autres enseignements sont dispensés au cours de la scolarité obligatoire. »

Ce faisant, le projet de loi tend à réduire cette vision minimaliste d’un socle commun pour les élèves en difficulté. Pour autant, il ne va pas au bout de sa logique. Pour en finir véritablement avec une telle conception, il faudrait également, selon nous, supprimer les mots « au moins », dans le premier alinéa.

C’est ce que nous proposons par cet amendement. En supprimant la notion de minimum garanti par la scolarité obligatoire et en conservant la notion de culture, introduite par le projet de loi, nous affirmerions une exigence commune pour tous les élèves. La scolarité obligatoire garantirait ainsi à chaque élève les moyens nécessaires à l’acquisition de ce socle, dès lors conçu de manière ambitieuse.

Ce texte, qui veut refonder l’école, doit être plus exigeant et viser une éducation, une culture et une qualification de haut niveau pour tous, sous peine de condamner l’éducation nationale à transformer les inégalités sociales en inégalités scolaires.

L’école pour tous doit se fonder sur les élèves qui n’ont que l’école pour apprendre. Pour autant, cela ne signifie pas une baisse d’exigence : il ne faut pas inscrire des minimums culturels qui s’appliqueraient seulement à ces élèves.

Nous entendons développer une vision d’une scolarité obligatoire exigeante et de haut niveau, jusqu’à dix-huit ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 88, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Scouarnec, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 3

I. - Première phrase

Remplacer les mots :

un socle commun de connaissance, de compétences et de culture, auquel

par les mots :

une culture commune, à laquelle

II. - En conséquence :

1° Deuxième phrase

Remplacer les mots :

Le socle

par les mots :

cette culture commune

2° Troisième phrase

Remplacer les mots :

ce socle commun

par les mots :

cette culture commune

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Avec cet amendement, nous tentons d’introduire une nouvelle définition de ce que devrait garantir la scolarité obligatoire.

En lieu et place d’un socle commun de connaissances et de compétences, l’article 7 instaure un « socle commun de connaissances, de compétences et de culture ».

Toutefois, et de manière totalement contradictoire avec l’objectif affiché de redéfinition du socle de connaissances et de compétences, la commission de la culture du Sénat a décidé, sur l’initiative de nos collègues du groupe écologiste, d’introduire une référence explicite à la recommandation du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2006, laquelle a justement servi de fondement au socle de la loi Fillon et se résume uniquement à des « compétences clés », transformant l’idée de culture, et même de connaissances, en vœu pieux ! Cette vision très utilitariste, qui asservit l’école aux besoins immédiats des employeurs, pose véritablement problème.

Vous le comprendrez, si nous sommes favorables à l’idée de « culture » commune, nous nous interrogeons sur la nécessité de maintenir la notion de « compétences », à plus forte raison lorsqu’il s’agit d’introduire une référence explicite aux compétences clés européennes.

Voilà la preuve, s’il en était besoin, que, si l’article 7 représente une légère amélioration par rapport à la notion de socle qui figurait en 2005 dans la loi Fillon, il faudra encore beaucoup bouger pour que le projet de loi puisse répondre à des exigences de haut niveau.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 194, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou, Lenoir et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Alinéa 3, première phrase

Remplacer les mots :

socle commun de connaissances, de compétences et de culture

par les mots :

socle commun de connaissances et de compétences

La parole est à Mme Colette Mélot.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Nous réaffirmons que le socle commun doit être acquis par les élèves.

Le terme « culture », qui est ajouté, est flou. Certes, nous sommes évidemment attachés à la culture, qui peut s’acquérir à l’école et plus encore au sein de la famille. Quel que soit le milieu social, il y a des éléments culturels dont l’enfant doit s’enrichir, puis faire profiter les autres.

Mais l’introduction d’un terme flou et en décalage avec la réalité nuit à la pertinence de l’article. Le socle commun doit concerner les connaissances et les compétences, et non la culture. Voilà pourquoi l’amendement n° 194 vise à supprimer ce dernier terme.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 388, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 3, deuxième phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

La maîtrise du socle permet de poursuivre avec succès sa scolarité et ses études, de construire son avenir personnel et professionnel et de se préparer à l’exercice de la citoyenneté.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Cet amendement, qui pourrait passer pour un amendement de forme, va en réalité plus loin.

La commission a souhaité remplacer les mots : « La maîtrise du socle est indispensable » par les mots : « Le socle doit permettre la poursuite d’études ». J’en comprends bien les raisons, qui sont au cœur de nos débats : il s’agit d’éviter que le socle commun ne puisse être interprété comme un dispositif a minima.

Ainsi que je l’ai indiqué à plusieurs reprises, nous partageons totalement cet objectif. D’ailleurs, c’est, me semble-t-il, parce que l’on n’a pas su le faire partager que le socle, associé au livret – c’est le livret que vous avez attaqué tout à l’heure, madame Gonthier-Maurin ; je l’ai déjà modifié cette année – et à des programmes refaits en 2008 sans concertation, a pu susciter une telle interprétation. Un changement s’impose donc.

En ce sens, nous avons décidé de remplacer le « socle commun de connaissances et de compétences » par un « socle commun de connaissances, de compétences et de culture ». Mais c’est bien la maîtrise de ce socle qui doit être recherchée. Ce n’est ni un examen ni un diplôme. Cela doit permettre et même favoriser la poursuite d’études au-delà. Cette maîtrise est donc nécessaire. C’est ce que l’État doit à tous les enfants.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 290 rectifié bis, présenté par Mme Laborde et MM. Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Fortassin, Hue, Mazars, Mézard, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 3, deuxième phrase

Après le mot :

poursuite d'études,

insérer les mots :

la maîtrise d'un parcours d'orientation choisie, tout au long de la scolarité à l'école, au collège et au lycée, qui constitue un véritable passeport orientation,

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Le projet de loi consacre une place centrale à la problématique de l’orientation, afin qu’elle puisse être choisie en pleine connaissance de cause, car elle garantit la réussite des élèves. L’orientation doit dépendre non seulement des résultats des élèves, mais également de leurs aptitudes, de leurs aspirations, des débouchés et des réalités du marché du travail.

L’orientation, envisagée comme une connaissance, doit être pragmatique et systématique pour devenir un outil efficace au service de la lutte contre les inégalités sociales, afin d’ouvrir un large éventail des possibles à tous les élèves. Cela permettra également de revaloriser les filières d’orientation professionnelle et d’apprentissage.

En outre, l’ensemble des acteurs éducatifs, c'est-à-dire, entre autres, les personnels enseignants, les parents, les personnels éducatifs, doivent participer à la mise en œuvre de ce parcours d’orientation. L’élève doit également être actif dans la définition et l’élaboration de ce parcours.

Au regard de ces objectifs, il me semble indispensable que le nouveau socle commun de connaissances, de compétences et de culture comprenne la maîtrise d’un parcours d’orientation choisi tout au long de la scolarité, afin de mettre en place un véritable passeport d’orientation.

Alors que le présent projet de loi n’évoque l’orientation qu’à partir de l’enseignement secondaire, la maîtrise du parcours d’orientation doit être assurée tout au long de la scolarité : le niveau des élèves, leurs aspirations et les réalités du marché du travail sont des facteurs variables.

Aussi, par cet amendement, nous proposons de préciser que la maîtrise de ce parcours doit être assurée de l’école au lycée.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Les amendements n° 90 et 195 sont identiques.

L'amendement n° 90 est présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Scouarnec, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° 195 est présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou, Lenoir et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 3, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l’amendement n° 90.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Cet amendement est en lien avec mes amendements précédents.

Il s’agit de supprimer la référence, introduite en commission malgré notre opposition, à la recommandation du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2006 sur les compétences clés pour l’éducation et la formation tout au long de la vie.

Comme nous avons déjà eu l’occasion de l’exprimer, il y a là, selon nous, une contradiction assez forte avec l’objectif même qui est assigné à l’article 7.

S’il s’agit bien de rompre avec la logique du socle commun de connaissances et de compétences introduit dans la loi Fillon de 2005, s’il s’agit bien non plus de faire de ce socle un minimum pour les élèves en difficultés, mais de fixer un haut niveau d’exigence pour la scolarité obligatoire pour tous, alors il faut ajouter la notion de culture à ce socle. Toutefois, il faut rompre plus clairement avec la notion de « compétences ».

Pour notre part, nous aurions préféré que le concept de « culture » soit substitué purement et simplement aux compétences et aux connaissances, mais le verdict est tombé.

Ajouter le mot « culture » ne suffit pas à redéfinir véritablement ce socle. Ce débat prouve que nous avons encore des difficultés à nous comprendre !

La commission, tout en affirmant l’existence d’un socle commun de connaissances, de compétences et de culture, précise dans le même temps que les éléments de ce socle sont fixés en référence expresse aux huit compétences-clés de l’Europe. Seules les compétences sont mentionnées. Le socle européen exclut culture et connaissances et se réfère aux mêmes compétences que le socle de la loi Fillon.

Nous contestons la rédaction de cet article, qui introduit deux notions que l’on ne peut associer. Nous en demandons donc la suppression.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter l'amendement n° 195.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

La nouvelle rédaction de l’article 7 renvoie à un décret pour la définition de ce socle commun.

Si tel devait effectivement être le cas, le Parlement serait privé d’un débat et la composition du socle ne serait pas inscrite dans la loi, ce qui serait fort dommageable.

Comme nous le constatons ce matin, la définition des éléments du socle commun donne lieu à un vif débat. Il serait donc vraiment très regrettable que nous ne puissions pas pousser à son terme ce débat.

Concrètement, nous souhaitons que les objectifs du socle commun soient inscrits dans la loi. Nous avons tous notre conception du système éducatif, et c’est au sein du Parlement que cette conception doit être discutée.

Tel est l’objet de cet amendement tendant à la suppression de la dernière phrase du troisième alinéa de l’article 7.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 62, présenté par Mmes Férat, Morin-Desailly et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 3, dernière phrase

Remplacer cette phrase par deux phrases ainsi rédigées :

Le socle s’organise en quatre grandes catégories : la maîtrise de la langue française, les principaux éléments de culture scientifique et de mathématiques, les humanités, la pratique d'au moins une langue vivante étrangère. Ses contenus et ses modalités d’acquisition progressive sont fixés par décret.

La parole est à Mme Françoise Férat.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Férat

Vous l’aurez compris, il s’agit d’un amendement de repli par rapport à l’amendement n° 61, qui visait à supprimer l’article 7 relatif au socle commun de connaissances, de compétences et de culture.

Dans la même logique, nous proposons que les quatre grands piliers du socle commun soient cités dans l’article 7, tel qu’il est désormais rédigé, à savoir la maîtrise de la langue française, les principaux éléments de culture scientifique et de mathématiques, les humanités, la pratique d’au moins une langue vivante étrangère, piliers auxquels s’ajoute une sensibilisation aux arts et à la culture, ainsi qu’à l’éducation sportive.

Il nous appartient de fixer les grands caps de nos politiques, en particulier en matière d’éducation.

Ce n’est pas être bavard que de voter cet amendement, c’est bien être réaliste et conscient des ambitions qu’il convient de fixer pour notre école.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 197, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou, Lenoir et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 3

Insérer huit alinéas ainsi rédigés :

« Ce socle comprend :

« - la maîtrise de la langue française ;

« - la maîtrise des principaux éléments de mathématiques ;

« - une culture humaniste et scientifique permettant le libre exercice de la citoyenneté ;

« - la pratique d'au moins une langue vivante étrangère ;

« - la maîtrise des techniques usuelles de l'information et de la communication.

« Les modalités d'acquisition progressive de ce socle commun sont fixées par décret après avis du Conseil supérieur des programmes.

« Le Gouvernement présente tous les trois ans au Parlement un rapport sur la manière dont les programmes prennent en compte le socle commun et sur la maîtrise de celui-ci par les élèves au cours de leur scolarité. » ;

La parole est à Mme Colette Mélot.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Il s’agit d’un amendement de cohérence avec l'amendement précédent.

Nous souhaitons revenir à l'esprit de la loi Fillon : il appartient à la loi et non au règlement de définir l'ensemble des connaissances et des compétences constituant le socle commun des acquis des élèves.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Vous n’avez pas réussi !

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

En outre, un contrôle de la mise en œuvre du socle commun et de son efficacité doit être opéré. À cet effet, nous proposons que le Gouvernement remette un rapport au Parlement tous les trois ans.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Après avoir écouté les arguments des uns et des autres, le Gouvernement retire l’amendement n° 388, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 388 est retiré.

Quel est l’avis de la commission sur les onze amendements restant en discussion ?

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 87, madame Gonthier-Maurin, car elle est attachée au maintien d’un socle commun ambitieux. Nous nous retrouverons sur l’amendement n° 89.

Elle émet également un avis défavorable sur l’amendement n° 55 rectifié, qu’elle considère pleinement satisfait par le droit en vigueur : les dispositifs de soutien, comme les programmes personnalisés de réussite éducative, les PPRE, sont prévus à l’article L. 311-3-1 du code de l’éducation, en lien direct avec le socle. Les aménagements de scolarité sont prévus à l’article L. 332-4.

La commission est également défavorable à l’amendement n° 193, qui vise à supprimer la notion de « culture » dans le socle commun. Or nous considérons que cette notion permet d’élargir le socle commun, comme l’a d’ailleurs dit Mme Morin-Desailly, au-delà des connaissances disciplinaires et des compétences. Il faut donc la conserver, dans un esprit humaniste.

En revanche, la commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 89. En supprimant les termes : « au moins », on fait en sorte que l’éducation nationale s’engage à mettre en œuvre tous les moyens pour que les enfants acquièrent le socle commun. Il s’agit donc d’un amendement de clarification.

La commission demande le retrait de l’amendement n° 88, qui vise à modifier la discrimination, sans modifier en lui-même le contenu du socle. Or l’usage du socle commun de connaissances et de compétences, que le projet de loi complète avec un volet « culture », est bien répandu. Il nous apparaît donc inutile de revenir sur la discrimination élargie.

La commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 194, qui vise à supprimer les termes « et de culture » dans l’intitulé du socle commun.

La commission est défavorable à l’amendement n° 290 rectifié bis. Nous considérons que cet amendement est en partie satisfait par l’article 7 dans la rédaction de la commission, qui prévoit que le socle doit permettre la construction d’un avenir personnel et professionnel. Nous vous prions donc, madame Laborde, de bien vouloir retirer votre amendement.

L’amendement n° 90 vise à supprimer le renvoi à la recommandation du Parlement européen pour la définition du socle commun. C’est revenir sur une proposition qui avait été adoptée en commission. L’objectif n’était pas de mettre en avant exclusivement les compétences, mais, si le renvoi à une recommandation européenne devait être interprété comme un rabaissement de l’ambition du socle, alors, nous pensons qu’il faut le supprimer. Nous émettons donc un avis favorable sur votre amendement, madame Gonthier-Maurin.

L’amendement n° 195 tend, lui, à supprimer le renvoi à un décret pour la définition des éléments du socle commun. Certes, la conception du socle commun et de ses finalités relève du Parlement et non du pouvoir réglementaire. En revanche, le pouvoir réglementaire a toujours été compétent pour le définir précisément, conformément à la compétence du ministre de l’éducation nationale en matière de définition des programmes et d’organisation des enseignants.

Cette compétence ministérielle, qui est inscrite dans le code de l’éducation, a été constamment soutenue par la jurisprudence du Conseil d’État. D’ailleurs, le législateur de 2005 ne pouvait prétendre à l’exhaustivité de la liste des cinq éléments qu’il avait dressée. C’est ce qui a permis au pouvoir réglementaire d’enrichir de deux nouveaux piliers le socle commun et d’en détailler tous les attendus.

Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Exclamations sur les travées de l'UMP et de l’UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

M. le président. Madame la rapporteur, nos collègues ont sans doute besoin d’une précision supplémentaire, car les amendements n° 90 et 195 sont identiques, mais recueillent un avis différent.

Rires.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Pour la clarté de nos travaux, pourriez-vous préciser votre position ?

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Monsieur le président, nous avions considéré, et l’avions dit, que le libellé proposé par M. Legendre – pardonnez-moi de le dire ainsi, mon cher collègue – était mauvais.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

M. Marc Daunis. Vous avez donc fait preuve d’élégance, et non de sectarisme, en émettant un avis défavorable !

Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je vous remercie de cette précision, madame la rapporteur, et vous invite à poursuivre en donnant l’avis de la commission sur les deux derniers amendements en discussion commune, n° 62 et 197.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

L’amendement n° 62 vise à développer la définition du socle commun, avec le souci de mettre en harmonie les programmes et le socle.

Dans ce cas encore, la rédaction proposée n’est pas satisfaisante. Pourquoi ne pas reprendre les compétences sociales et civiques ou l’autonomie et l’initiative ? Pourquoi éliminer les techniques de l’information et de la communication ? Pourquoi reprendre le terme d’« humanités », qui, techniquement, renvoie à l’étude du latin et du grec, ainsi rendue obligatoire ?

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Enfin, par cohérence avec l’avis qu’elle a émis sur l’amendement n° 195, …

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

… la commission émet également un avis défavorable sur l’amendement n° 197.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Quel est l’avis du Gouvernement sur ces onze amendements ?

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Le Gouvernement partage l’avis de Mme la rapporteur sur l’ensemble des amendements.

À ce stade, permettez-moi de signaler à la Haute Assemblée la très grande importante des votes qui vont intervenir dans quelques instants.

Nous avons conservé le socle commun de connaissances et de compétences de 2005 mais en corrigeant les défauts profonds qui l’avaient empêché de se traduire dans la réalité, alors qu’il partait d’une idée généreuse, je le pense sincèrement, puisqu’il s’agissait de définir ce que la puissance publique doit à tous les enfants, en particulier à ceux qui ont le moins en termes d’accès à la connaissance et à la culture.

Le travail effectué en commission, l’impulsion du groupe CRC et la volonté de bien interpréter ce socle ont permis cet enrichissement.

Pour ma part, cela fait plus de deux ans que je travaille avec l’ensemble des enseignants de toutes les sensibilités afin de conserver certains volets de ce socle que, d’un côté comme de l’autre, on l’a vu, on tente de supprimer, mais en lui permettant de trouver tout son sens.

Je salue le travail du Sénat, car il a permis ce résultat, et je remercie les sénatrices – elles sont nombreuses dans ce débat sur l’école – et les sénateurs qui y ont participé.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote sur l'amendement n° 87.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Bouchoux

Mme Corinne Bouchoux. Permettez-moi d’expliquer le vote du groupe écologiste afin que celui-ci ne froisse personne, au risque de répéter ce que j’ai déjà dit en commission. Nous souscrivons évidemment à ce que vient de dire M. le ministre. Sur un point, nous ne suivrons pas l’avis de Mme la rapporteur. Mon explication est en fait de nature amicale et s’adresse à nos amis du groupe CRC.

M. Michel Savin s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Bouchoux

Nous partageons les inquiétudes du groupe CRC sur l’ « employabilité » et sur la mauvaise interprétation qui pourrait être faite de la notion de « compétences » si d’aucuns avaient l’esprit très mal tourné.

Vous le savez, chers collègues, nos positions divergent parfois – les nuances sont subtiles – par exemple, sur l’Europe. Pour notre part, nous faisons culturellement une lecture moins inquiète que vous de ce sujet. En votant l’amendement n° 90, nous voterons donc non pas contre vous, chers collègues, mais pour soutenir la référence introduite à notre demande, en commission, à l’article 7.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement est adopté.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Vous n’acceptez jamais de retirer vos amendements !

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

J’en ai retiré beaucoup hier, monsieur le ministre !

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Mme Françoise Laborde. Non, monsieur le président. Nous aurons l’occasion de traiter ailleurs cette question, mais je resterai vigilante, car le parcours d’orientation doit commencer dès l’école primaire.

M. André Gattolin applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 290 rectifié bis est retiré.

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 90 et 195.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Mon explication sera à la fois très courte et amicale, pour faire écho au débat avec nos camarades Verts.

Sourires sur les travées du groupe CRC et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Ce matin, « à l’heure où blanchit la campagne », je suis allée rechercher le texte, au reste assez consistant, de la recommandation à laquelle l’article 7 fait référence. Or on y fait état, dès l’exposé des motifs, des inquiétudes que nous avons exprimées ici.

Qu’il me soit permis de vous en lire quelques lignes, qui renvoient, bien sûr, par la suite à une définition extrêmement précise des compétences-clés et des paliers : « Au niveau des États membres, la réforme des programmes d'éducation initiale fait l'objet de nombreuses mesures témoignant d'une évolution de priorité de la transmission de connaissances vers le développement de compétences transférables préparant les jeunes à la vie adulte et à de futurs apprentissages ».

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Ces deux amendements sont parfaitement identiques. La seule différence tient au fait que Mme la rapporteur a manifesté pour le premier, déposé par le groupe CRC, une certaine tendresse ; pour ce qui est du second, déposé par le groupe UMP, elle ne pouvait évidemment pas l’approuver !

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

M. Vincent Peillon, ministre. Mais si, la commission a une tendresse cachée pour vous, monsieur Legendre !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Ce qui compte, c’est la proposition faite et non son origine. Puisque le Gouvernement approuve l'amendement n° 90, soyons heureux, le nôtre sera adopté aussi !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

M. Alain Fouché. Effectivement, ces deux amendements, bien que d’origine différente, sont identiques. Il nous appartient donc, comme vient de l’indiquer M. Legendre, de les voter ensemble ! C’est logique et, de surcroît, convenable !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Un mot pour sauver l’honneur de Mme la rapporteur, qui est de bonne foi et dont le travail n’a rien de partisan !

Monsieur Legendre, rappelez-vous, lors de son examen en commission, l’amendement de votre groupe portait sur une autre rédaction de l’alinéa 3, de sorte que les deux amendements ne tendent plus à supprimer la même phrase.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Mais, sur le fond, nous sommes d’accord !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

M. le président. Monsieur Legendre, votre amendement aurait dû viser l’avant-dernière phrase et non la dernière phrase de l’alinéa 3 de l’article 7 dans la rédaction de la commission. C’est la raison de ce malentendu.

Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Les amendements sont adoptés.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Françoise Férat, pour explication de vote sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Férat

Vous l’aurez compris, nous ne voterons pas l’article 7.

Nous ne sommes pas contre le socle commun, bien au contraire. Il nous semble en effet essentiel que ce socle soit le véritable pilier portant les principaux éléments et les grands caps de notre politique éducative.

Cette notion doit être mise en œuvre sous la responsabilité du législateur et nous n’approuvons pas que sa définition dépende d’un simple décret.

L'article 7 est adopté.

L’article L. 122-2 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° La première phrase du premier alinéa est ainsi rédigée :

« Tout élève qui, à l’issue de la scolarité obligatoire, n’a pas atteint un niveau de formation sanctionné par un diplôme national ou un titre professionnel enregistré et classé au niveau V du répertoire national des certifications professionnelles doit pouvoir poursuivre des études afin d’acquérir ce diplôme ou ce titre. » ;

2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Tout jeune sortant du système éducatif sans diplôme bénéficie d’une durée complémentaire de formation qualifiante qu’il peut utiliser dans des conditions fixées par décret. Cette durée complémentaire de formation qualifiante peut consister en un droit au retour en formation initiale sous statut scolaire. »

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

L’article 8 aborde la question, importante, du « décrochage scolaire », qui touche 120 000 à 150 000 jeunes sortant du système éducatif sans diplôme.

Un mot sur cette question du décrochage scolaire. Le faire reculer significativement nécessite d’abord d’agir en amont et donc à l’école, en interrogeant véritablement la construction des mécanismes de l’échec scolaire. Cela implique des personnels formés en conséquence, comme je l’ai déjà souligné avec d’autres. Je pense, bien évidement, au rôle des enseignants RASED, qui doit être conforté, ce qui ne peut être possible sans des départs en formation en nombre suffisant, point sur lequel je vous ai déjà interpellé, monsieur le ministre, et sur lequel je vous redis mes inquiétudes.

Je pense aussi aux enseignants dans leur classe, qui ont besoin de disposer enfin d’une véritable formation continue et réflexive, en lien avec la recherche.

Ce que vous proposez à l’article 8 intervient en aval du décrochage. Dans sa rédaction actuelle, le code de l’éducation précise que tout élève « qui, à l’issue de la scolarité obligatoire, n’a pas atteint un niveau de formation reconnu doit pouvoir poursuivre des études afin d’atteindre un tel niveau. L’État prévoit les moyens nécessaires, dans l’exercice de ses compétences, à la prolongation de scolarité qui en découle ».

L’article 8, qui réécrit et complète l’article L. 122-2 du code de l’éducation, précise, dans son alinéa 3, ce degré de formation, le fixant à un niveau équivalent au brevet national des collèges et au CAP.

Je souhaite à cette occasion obtenir, monsieur le ministre, des précisions sur deux points.

Ma première interrogation porte sur le sens de la référence au titre professionnel du répertoire national des certifications professionnelles, insérée à l’alinéa 3.

Elle m’étonne, puisqu’il s’agit d’élèves dans le cadre de la scolarité obligatoire, qui ressortissent donc à l’éducation nationale. Or l’éducation nationale délivre non des titres, mais des diplômes, les titres professionnels étant, eux, délivrés par le ministère de l’emploi.

À moins qu’il ne s’agisse d’englober l’apprentissage et de prévoir un filet de secours, notamment pour les jeunes orientés en dispositif d’initiation aux métiers en alternance, le DIMA, dispositif que vous maintenez pour les élèves de quinze ans ?

Ma seconde interrogation porte sur le droit différé à une formation qualifiante, dont les conditions d’utilisation sont renvoyées au décret.

Si notre amendement prévoyant de préciser que tout jeune sortant du système éducatif « se voit garantir par l’État le droit de bénéficier d’une durée complémentaire de formation sanctionnée par un diplôme national » a subi les fourches caudines de l’article 40, nous nous interrogeons sur les modalités de mise en œuvre de ce qui est présenté comme un droit à une durée complémentaire de formation qualifiante.

Comment, selon quels critères et par qui sera déterminée la durée de cette formation qualifiante ? Par qui cette formation sera-t-elle mise en œuvre ? S’agira-t-il de l’État via l’éducation nationale ?

C’est ce dont nous avons voulu nous assurer en proposant d’ajouter, par amendement, la possibilité que cette durée complémentaire de formation qualifiante puisse consister en un droit au retour en formation initiale sous statut scolaire.

L’adoption de cet amendement en commission démontre, en quelque sorte, le bien-fondé de notre proposition d’allongement de la scolarité obligatoire au-delà de seize ans.

Ce droit différé à une durée complémentaire de formation sera-t-il assuré par la région ? Il s’intégrerait alors aux dispositifs de formation professionnelle existants, ce qu’a anticipé d’une certaine façon l’article 5 du projet de loi relatif à la sécurisation de l’emploi.

Mais sur quels financements précis sera prise en charge cette durée de formation complémentaire ? Avec quelles garanties d’effectivité, pour combien de temps et sous quelles conditions les jeunes concernés pourront-ils en bénéficier ? Devront-ils réussir à décrocher préalablement un contrat d’apprentissage, un contrat d’avenir, un contrat de génération ?

S’agira-t-il alors d’une formation diplômante ou seulement certifiante, comme le laisse envisager l’étude d’impact du projet de loi ? Cela n’a pas la même valeur ni le même degré de reconnaissance.

Autant de points que nous souhaiterions voir éclaircis dans la mesure où, à l’article 8, on prétend créer un droit nouveau.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 196, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou, Lenoir et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Après les mots :

niveau V

insérer les mots :

ou un titre professionnel enregistré et classé au premier niveau

La parole est à M. Jacques Legendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Cet amendement vise à rétablir la rédaction initiale du texte pour respecter la double mission du répertoire national des certifications professionnelles : élaborer l’inventaire de toutes les formes de certification tel que le prévoit l’article L. 335-6 du code de l'éducation et élaborer une nouvelle nomenclature des niveaux de certification en rapport avec les emplois occupés et susceptible de permettre des comparaisons européennes et internationales, ce qui est parfois bien utile.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

L’amendement juxtapose et met en quelque sorte en concurrence deux notions, celle, plus technique, de titre de niveau V et celle, plus générique, de titre de premier niveau.

Ces deux notions sont censées être synonymes. Il faut donc faire un choix. Il me semble préférable d’en rester à la version de l’Assemblée nationale. C’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Je suis du même avis, pour les mêmes raisons. J'en profite pour répondre à l'interpellation de Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Nous avons organisé le retour en formation depuis des plates-formes et les réseaux FOQUALE, Formation Qualification Emploi, que nous avons créés en collaboration étroite avec les régions, sous la responsabilité de l'État. Nous mobilisons les places offertes dans le cadre de l'éducation nationale qui n’ont pas été pourvues. Ce dispositif nous permet d'obtenir le résultat que j’ai déjà évoqué à plusieurs reprises : depuis janvier dernier, plusieurs milliers de jeunes réintègrent des formations.

Nous sommes en mesure de proposer des entretiens individuels à chaque jeune. Nous utilisons d'ailleurs internet, en lien avec l’ONISEP, pour permettre aux jeunes de prendre connaissance des offres les plus proches de chez eux. Les rendez-vous individuels débouchent sur des offres de formation. Les plates-formes mises en place par mon prédécesseur ont donné des résultats, mais il manquait en face l’offre de formation. Pour être clair, on retrouvait les décrocheurs, mais on ne parvenait pas à mobiliser les moyens. Nous nous sommes attelés à la tâche et j'espère qu'avant la fin de l'année nous pourrons atteindre le nombre de 20 000 « raccrocheurs » dont je vous ai parlé.

Je le redis, cette action est le fruit d’une collaboration entre l'État et les régions, sous la responsabilité de l'État.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 314 rectifié, présenté par Mme Laborde et MM. Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin, Hue, Mazars, Mézard, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 5, première phrase

Remplacer le mot :

éducatif

par le mot :

scolaire

La parole est à M. François Fortassin.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La rédaction proposée n’est pas anodine. La notion de « système éducatif » est plus large que celle de « système scolaire » : elle couvre en particulier l’apprentissage et l’enseignement agricole. Il est préférable de garder le renvoi au système éducatif, conformément à la rédaction en vigueur de l’article L. 122-3 du code de l’éducation.

La commission demande le retrait de cet amendement.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Même avis !

L'article 8 est adopté.

(Non modifié)

Au premier alinéa de l’article L. 131-1-1 du code de l’éducation, après le mot : « personnalité, », sont insérés les mots : « son sens moral et son esprit critique, » et, après la seconde occurrence du mot : « professionnelle », sont insérés les mots : «, de partager les valeurs de la République ». –

Adopté.

Section 4

Le service public du numérique éducatif

Le second alinéa de l’article L. 131-2 du code de l’éducation est remplacé par six alinéas ainsi rédigés :

« L’État organise, à sa charge, dans le cadre du service public de l’enseignement et afin de contribuer à ses missions, un service public du numérique éducatif et de l’enseignement à distance, qui a pour mission de :

« 1° Mettre à disposition des écoles et des établissements d’enseignement des services numériques permettant de diversifier les modalités d’enseignement, de prolonger l’offre des enseignements qui y sont dispensés, de contribuer à l’innovation des pratiques et aux expérimentations pédagogiques favorisant la coopération, et de faciliter la mise en œuvre d’une aide personnalisée à tous les élèves ;

« 2° Proposer aux enseignants une offre diversifiée de ressources pédagogiques pour leur enseignement, des contenus et services contribuant à leur formation initiale et continue ainsi que des outils de suivi de leurs élèves et de communication avec les familles ;

« 3° Assurer l’instruction des enfants qui ne peuvent être scolarisés dans une école ou dans un établissement scolaire ;

« 4° Apporter son soutien au développement de projets innovants favorisant les usages pédagogiques du numérique à l’école.

« Ce service public utilise en priorité des logiciels libres et des formats ouverts de documents. »

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

L’article 10 revêt une importance particulière, car il concerne le numérique éducatif et l'enseignement à distance. Plus encore que dans le reste du texte, il est bien ici question de l'avenir de l'école.

L’école ne peut ignorer la troisième révolution que constitue, après l'écriture et l'imprimerie, l'arrivée de l'ordinateur conjuguée au développement d’internet. C'est devenu un lieu commun de dire combien cette révolution a bousculé notre façon de communiquer, de nous informer, d’échanger et de travailler. Au fur et à mesure du développement des usages d’internet, tous les aspects de notre vie quotidienne et l'ensemble des secteurs sont touchés.

Par conséquent, l'école ne saurait être écartée de cette mutation extrêmement importante, de ce « changement de monde », pour reprendre une expression de Michel Serres. Elle doit prendre en considération cette nouvelle génération d'enfants que l'on appelle les digital natives, lesquels ont un rapport familier et intuitif à l’outil internet.

Monsieur le ministre, le Sénat s'est préoccupé depuis quelque temps déjà de cette question au travers des travaux que j'ai évoqués dans mon intervention lors de la discussion générale. Ainsi, notre groupe d'études « Médias et nouvelles technologies », qui est rattaché à la commission de la culture, a produit des rapports et émis des préconisations.

C'est par ailleurs au Sénat que revient le mérite d’avoir pris la première initiative en faisant inscrire dans le code de l'éducation la nécessité de sensibiliser les enfants, certes déjà familiers d’internet, aux immenses potentiels de l’outil numérique, mais aussi à ses risques. Un amendement a ainsi été voté à l'unanimité lors d'un débat sur le droit à l'oubli sur internet.

Il faut noter l'ambition du projet de loi sur ce sujet particulier, tout en soulignant que nous ne pourrons réussir qu’à un certain nombre de conditions.

Tout d’abord, il faut conjuguer cette ambition à celle de l’aménagement numérique de notre territoire. Sans une politique volontariste de l'aménagement de notre territoire en haut débit, voire en très haut débit, on risque une fracture territoriale et cognitive pour les enfants.

Ensuite, il ne faut pas considérer cette révolution au travers du seul prisme des outils, mais il convient avant tout de l’envisager dans ses conséquences sur les usages et sur l’évolution de la façon d’enseigner. En ce sens, les collectivités territoriales ne doivent plus être de simples pourvoyeurs d'outils déconnectés de toute réflexion sur les usages du numérique, et réciproquement. Nous avons pu le constater ces dernières années : les collectivités ont voulu investir, mais cela n’a pas toujours correspondu aux besoins fondamentaux des enseignants.

Enfin, je n’insisterai jamais assez sur ce point, l'introduction du numérique doit contribuer à renforcer le rôle du maître : on pourrait penser que l’outil numérique tend à remplacer ce dernier. Bien au contraire, son rôle sera plus que jamais déterminant pour orienter les élèves dans le flot communicationnel que représente internet.

Voilà les trois points essentiels que je tenais à souligner au moment où nous abordons un passage du texte qui nous semble tout à fait essentiel.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

L’article 10 vise à instaurer un service public du numérique éducatif dans le cadre du service public de l’enseignement. Il vient en réalité se greffer à l’article L. 131-2 du code de l’éducation relatif au service public de l’enseignement à distance.

L’ambiguïté du projet de loi initial sur le point de savoir à qui incombe la charge de ce service public avait, me semble-t-il, été levée par la rédaction retenue en commission. Mais j’y reviendrai au moment de l’examen de l’amendement n° 386 du Gouvernement.

Je souhaiterais évoquer les opérateurs qui devront assurer ce service public.

Le CNED, le CNDP et l’ONISEP, mentionnés dans l’étude d’impact, seront, nous dit-on, «très fortement mobilisés pour la mise en œuvre de la stratégie numérique du ministère de l’éducation nationale ».

Je regrette que le projet de loi ne mentionne pas expressément ces opérateurs, aux missions bien différentes, afin, d’une part, de distinguer leur rôle respectif et d’écarter toute tentative de fusion et, d’autre part, de préciser que leur action dans le domaine du numérique éducatif s’organisera autour d’une stratégie commune.

Concernant le périmètre des missions que le projet de loi assigne à ce service public, je souhaite m’arrêter sur la situation du CNED. J’étais intervenue en 2011 auprès de votre prédécesseur, monsieur le ministre, pour l’alerter sur le devenir de cet opérateur et de ses missions de service public.

Je le rappelle brièvement, le CNED a une double mission : d’une part, assurer l’instruction des enfants empêchés d’aller à l’école, par la maladie ou toute autre difficulté, et garantir à des adultes des formations qualifiantes et diplômantes de qualité, à des tarifs accessibles à tous ; d’autre part, permettre à des enseignants « accidentés de la vie », du fait d’une maladie ou d’un handicap, de continuer à travailler. Cet opérateur est donc très important.

Au sein du service public du numérique, les missions qui ont été confiées au CNED, dans un premier temps, comprennent deux volets : proposer un enseignement aux élèves empêchés, rôle qu’il remplit déjà, et offrir un dispositif de soutien scolaire en ligne au sein des établissements.

Ce dispositif de soutien nécessite, pour être efficace, plusieurs ingrédients : une relation humaine privilégiée, une implication de l’élève, soutenu par un enseignant et non un simple tutorat en ligne, une pédagogie du contournement - ne pas répéter le même type de cours, ne pas être vécu comme un dispositif discriminant.

Cette stratégie du contournement implique la fourniture de cours et d’exercices en ligne interactifs. Or le CNED, comme l’a relevé la Cour des comptes dans un récent rapport, n’est pas armé aujourd’hui pour dispenser un vrai e-learning.

Le Gouvernement entend-il lui accorder le temps et les moyens pour qu’il adapte ses outils, notamment technologiques, la formation de ses personnels et ses contenus ? Comment l’État compte-t-il assurer ce tutorat en « présentiel » dans les établissements ? Est-il envisagé que cette mission incombe au CNED ? Quels seront les personnels mobilisés ? Je rappelle que, pour obtenir un poste au CNED, les enseignants doivent avoir une maladie stabilisée qui les contraigne à travailler à domicile.

Cette question est importante puisque, dans le même temps, l’étude d’impact fait état de « mesures à court terme de rationalisation-restructuration » pour les opérateurs et de la recherche d’un budget « à l’équilibre » pour le CNED.

Ce dernier objectif ne sera pas aisé à atteindre, compte tenu des conséquences néfastes des politiques, notamment tarifaires, menées ces dernières années au CNED. Ainsi, des commandes passées par l’État comme « English by yourself », ou « L’académie en ligne », trente et unième académie, ont été financées sur les fonds propres du CNED, sans compensation financière de l’État.

À ce titre, j’aimerais connaître votre position, monsieur le ministre, sur la réduction du périmètre du service public et de la gratuité de l’enseignement à distance à la seule scolarité obligatoire, opérée par décret en 2009. Cette mesure exclut de fait les élèves de plus de seize ans. Comptez-vous, comme l’a recommandé la Cour des comptes dans son rapport public annuel de 2013, élargir ce périmètre pour qu’il tienne compte de celui de la gratuité dans l’enseignement scolaire ?

Je rappelle que les usagers du CNED, qu’il s’agisse de formation initiale ou continue, sont souvent issus de milieux peu favorisés.

Nous le voyons, la mise en œuvre de la stratégie voulue par le ministère va donc nécessiter de stabiliser cet établissement dans sa structure, son fonctionnement et ses effectifs afin d’être en adéquation avec les objectifs affichés pour le numérique.

Tels sont les éléments sur lesquels je voulais attirer l'attention de notre Haute Assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Je souhaiterais commencer mon propos par deux observations liminaires.

Je voudrais d’abord insister sur l'intérêt du numérique, un constat partagé, me semble-t-il, par l'ensemble des groupes parlementaires. Une telle assertion est bien banale aujourd'hui, mais l’évoquer avec force est une façon d'exprimer notre intérêt pour ce que le numérique peut apporter à l'éducation et à la formation, aussi bien pour les scolaires que pour les enseignants. On pourra débattre de la question pendant des heures, mais je tiens à faire une intervention compendieuse !

Je voudrais ensuite insister sur l'apport du numérique dans les territoires ruraux. Vous n'êtes bien évidemment pas chargé de cette question, monsieur le ministre, mais nous discuterons sans doute prochainement du problème de la couverture numérique du territoire.

J’en viens à l'objet principal de mon intervention. Nous retrouvons ce matin les éléments d'un débat que nous avons eu hier soir s’agissant de l’emploi du mot « notamment ».

La commission a été bien inspirée en affirmant que le service public du numérique éducatif relèvera de l'État, alors que le texte initial laissait entendre que d'autres partenaires auraient pu être sollicités. Or un amendement du Gouvernement tend à faire de nouveau figurer dans la rédaction de l’article le terme « notamment ».

Je veux reprendre l’idée que j’ai défendue hier soir à propos de l'enseignement artistique. La tendance forte de ce projet de loi – d'autres gouvernements ayant tenté de procéder de la même façon, nous sommes particulièrement attentifs à ce point ! – est de faire porter une partie de la charge de ce nouveau service par les collectivités territoriales. Que les collectivités mettent la main à la poche, si elles sont si attachées au développement du numérique dans leurs écoles : voilà ce que l’on dira, et cela, nous ne pouvons pas l’envisager !

Bien entendu, cela n’empêche pas les collectivités de participer à des initiatives et à des opérations permettant d’amplifier le travail – nous rejoignons ici notre débat d’hier soir.

Mais veillons à ce qu’une ligne soit tracée pour séparer ce qui est assumé par l’État, et relève de sa responsabilité, de ce qui peut – j’insiste sur le mot « peut » – être apporté en complément par les collectivités territoriales.

Le mot « notamment » n’est pas neutre ; j’en veux pour preuve qu’il entre, qu’il sort, qu’il revient, qu’il repart… Le débat n’a pas commencé, mais je félicite déjà la commission d’y avoir veillé. Le Gouvernement tient beaucoup à ce mot, alors qu’il ne s’agit pas d’un mot fort : on a tendance à le banaliser pour garder la possibilité d’évoquer d’autres pistes…

Quoi qu’il en soit, j’attire à nouveau votre attention, monsieur le ministre, sur notre souhait que la ligne soit bien tracée entre ce qui relève de votre ministère et de son budget, et ce qui est demandé aux collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Je serai d’autant plus bref que je partage totalement l’interrogation de mon collègue Jean-Claude Lenoir.

Dans l’histoire récente de la diffusion des technologies numériques au service de l’enseignement, les collectivités territoriales ont pris des initiatives généreuses et audacieuses, lorsque l’État n’en avait parfois ni la possibilité, ni les moyens, ni l’intention.

J’ai présidé un conseil régional et, pour ce qui concerne l’enseignement secondaire, nous avons, dès le siècle précédent, équipé des salles de libre accès informatique dans tous les lycées de Lorraine.

Les collectivités territoriales sont très partagées, car elles veulent le succès de leurs élèves et souhaitent doter les établissements primaires et secondaires – écoles, collèges et lycées – des meilleurs atouts pour la réussite. C'est pourquoi, lorsque l’État est sinon défaillant, du moins en retrait ou en attente, les collectivités territoriales prennent des initiatives.

Je regretterais qu’elles ne puissent plus les prendre… Et, en même temps, je partage totalement l’observation de mon collègue Jean-Claude Lenoir : le « notamment » de l’article 10 suscite un certain malaise. Si, avec cet article, il s'agit de moderniser la direction nationale de l’enseignement à distance, cela ne pose pas de problème, car c’est de la responsabilité de l’État. Mais, s’il s'agit de diffuser l’accès au numérique en tant que soutien pédagogique, la logique est alors celle, assez différente, d’une diffusion de moyens et de supports pédagogiques nouveaux.

Quelle est la bonne politique ? C'est sans doute une politique contractuelle entre l’État et les collectivités territoriales.

S’agit-il, pour l’État, de commander aux collectivités territoriales ? On ne peut pas l’imaginer.

S’agit-il, pour l’État, de n’agir que si les collectivités territoriales cofinancent ? Il l’a décidé dans d’autres domaines, par exemple, pour les routes nationales : aucune d’entre elles ne peut être modernisée sans la participation des collectivités territoriales. Dans ce cas, ces collectivités mettraient la main dans un engrenage qui les broierait tout entières.

Faut-il, pour autant, supprimer la coopération entre l’État, qui a un savoir-faire national, une expérience, et les collectivités territoriales, qui savent prendre des initiatives, comme elles l’ont montré ?

Je trouve, monsieur le ministre, que votre article est un petit peu ambigu et j’aimerais que vous nous disiez très clairement ce que vous attendez de cet article 10 : faire de l’enseignement à distance, et c'est l’État qui est concerné, ou diffuser des bonnes pratiques ? Dans cette hypothèse, le « notamment », selon moi, n’épuise pas le sujet et ne fixe pas les règles d’une coopération durable, saine et transparente.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

À propos de l’enseignement à distance, le CNED est un établissement que je connais bien puisque je fais partie – avec René Monory, avec Mme Cresson… – de ceux qui, à l’époque, dans le cadre des délocalisations administratives, avaient déplacé le CNED à Poitiers, dans la technopole du Futuroscope.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Ce n’était pas un trop mauvais choix ! Il y avait aussi l’ESEN – l’École supérieure de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche –, parmi tant d’autres.

Le CNED est une très belle structure, qui a simplement besoin de moyens financiers complémentaires et à laquelle le ministre devrait rester très attentif. Selon moi, le CNED doit rester le fil conducteur pour un certain nombre d’actions, même s’il convient évidemment de tenir compte de tous les services publics alentour.

Quelle doit être la répartition des rôles ? Celui de l’académie – ou de ses structures – est d’être le fil conducteur et celui des collectivités, d’être des partenaires. Naturellement, dans le domaine de l’enseignement à distance, l’État – ou ses structures – doit être le guide, et les partenaires arrivent en soutien, s’ils sont d’accord.

Enfin, l’enseignement à distance permet aux personnes qui connaissent des difficultés, qui sont handicapées, de ne pas avoir à se déplacer et d’accéder ainsi à une meilleure scolarisation. Toutes les difficultés rencontrées sont concernées. Par exemple, la surdité des enfants : ils ont besoin, pour une meilleure scolarisation, d’une reconnaissance officielle de la langue des signes. Dans ce domaine, le rôle du CNED doit être encore accru.

Le CNED est une institution forte. L’État abonde naturellement un certain nombre de lignes de financement, et les collectivités territoriales sont des partenaires. C'est comme cela que cela peut fonctionner, et non en partant dans tous les sens…

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

L’article 10 aborde plusieurs sujets précis. Toutefois, je pense que son objet n’est pas d’apporter des améliorations ou des réponses concernant quelques problèmes précis. On est dans la décision, dans l’installation de ce qui représente une révolution pour l'éducation nationale. D'ailleurs, comme je l’ai dit au cours de la discussion générale, cela explique en grande partie que l’on puisse parler de loi de refondation.

Le dispositif, tel qu’il résulte de cet article, est-il figé ? Je pense qu’il est impossible de rentrer dans le débat à partir d’une telle vision, car c'est une révolution qui est en cours. Les bouleversements qui s’ensuivent vont conduire le ministère de l'éducation nationale – je l’espère, je le sais – à porter un regard suffisamment attentif sur la mise en œuvre de ce dispositif pour connaître, lui-même, une profonde évolution.

Je pense que nous devons appréhender le sujet de cette façon. Aborder le problème sous le seul angle de la mise à contribution des collectivités territoriale serait réducteur pour le Sénat. Nous autres, sénateurs, devrions considérer, au contraire, que les collectivités ont jusqu’à présent assumé une charge en termes de matériels et de supports qui n’a pas produit, sur le terrain et dans l’éducation, la plénitude des effets escomptés.

En effet, l’État n’a pas fait ce qui était nécessaire pour que ces matériels soient utilisés : la formation, la fourniture des contenus pédagogiques et la mise en place d’une vision collaborative.

C'est pourquoi nous parvenons à un taux d’utilisation réelle de ces matériels de 5 %. Le problème n’est donc pas, pour les collectivités territoriales, de redouter qu’on leur en demande plus, mais que leurs investissements servent enfin à quelque chose ! Des maires m’ont confié qu’ils ont acheté des ordinateurs pour tout le monde mais, de fait, les matériels restent dans les placards, faute de professeurs formés à leur utilisation !

Je ne comprends donc pas que l’on prenne le problème par ce bout-là.

Aujourd'hui, à la lecture de cet article, on devrait se réjouir de ce que l’État, assumant son rôle en termes de formation, fasse enfin en sorte que l’investissement des collectivités territoriales réalise tout son potentiel.

On peut, comme Mme Gonthier-Maurin s’exprimant sur le CNED, dire qu’il faut veiller à ce que chaque organisme existant ne soit pas dépouillé ni affaibli, et soit au contraire conforté. Mais l’on peut tout aussi bien se dire – puisqu’il s’agit d’une révolution – que chacune de ces institutions va évoluer.

Nous avons fait un voyage d’étude au Canada, sous la direction de M. Legendre. On nous a montré les innovations pédagogiques en cours et je me souviens bien – cela m’avait marqué – qu’auprès d’un public très défavorisé, constitué de jeunes qui n’avaient pas de parents pour l’aide au devoir le soir, le numérique était devenu un outil pour le soutien scolaire et, au-delà, contre les inégalités sociales. Certains ont auprès d’eux leurs parents le soir, d’autres pas, et c’est là que le numérique peut intervenir.

Dans ce que nous avons vu, l’informatique et le numérique permettaient le suivi personnalisé d’un élève par un professeur via un ordinateur, et de façon interactive et collaborative, c'est-à-dire qu’il ne s’agissait pas simplement de corriger un devoir et de le renvoyer, mais d’engager, le cas échéant, une véritable discussion.

Donc, la vision de l’enseignement à distance doit être élargie, bien au-delà de ce qu’il peut apporter, par exemple, aux personnes en situation de handicap. Ce qui est proposé dans cette loi permet, en effet, d’aller beaucoup plus loin.

J’en termine donc en affirmant avec force que l’État s’engage enfin, avec cet article, à placer le numérique au cœur de l’enseignement. C'est là une révolution, et une refondation !

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

Nous parlons beaucoup du CNED. C'est un bon instrument, particulièrement utile à nos jeunes qui sont malades ou expatriés – nous avons tous rencontré des élèves du CNED dans des endroits reculés de l’Afrique –, mais qui ne s’est pas encore emparé de toutes les innovations intervenues dans le domaine du numérique : il ne s’agit encore que de transmettre plus rapidement de l’écrit, sans interactivité.

Le CNED est en quelque sorte un grand lycée international qui a besoin de bouger. Je suis donc favorable à un service public, une sorte d’école internationale fondée sur le numérique, mais, monsieur le ministre, avec une révolution pédagogique ! Je suis du côté de Michel Serres qui exprime, dans son célèbre ouvrage…

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

… – exactement ! –, certaines idées sur le sujet. Il faut utiliser le potentiel de réactivité des élèves pour faire passer des messages. Mais notre corps enseignant est un peu conservateur. Monsieur le ministre, il faut faire bouger tout cela !

Par ailleurs, j’estime qu’il est besoin de régulation dans le domaine de l’éducation par correspondance. Une multitude d’expériences ont lieu. J’ai eu l’occasion, il y a peu, de me rendre en Afrique pour me pencher sur la marchandisation – pardonnez-moi l’emploi de ce terme – de l’éducation. Or cette marchandisation est en marche ! Certains pays sont complètement livrés à l’enseignement en ligne, et il y a du bon, et du très bon, mais aussi du mauvais, voire du très mauvais.

Cet enseignement a besoin d’une charte et d’une régulation. Je pense que le ministère de l'éducation nationale et son ministre gagneraient à intervenir sur ce sujet.

Des problèmes existent en matière de soutien, ou tout simplement en matière de délivrance de diplômes, qui exigeraient que l’on se penche un jour sur le sujet. En tout cas, oui, pour le CNED, oui, pour sa modernisation, car elle est urgente et doit être menée en profondeur.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Je voudrais affirmer le plein et entier soutien du groupe écologiste du Sénat à l’article 10 du projet de loi, en appui à ce que vient de dire précédemment mon collègue David Assouline.

Oui, le développement d’un service public du numérique éducatif est essentiel, voire capital. Il ne s’agit pas simplement, comme je l’ai entendu, d’assurer un enseignement par correspondance ou de pallier notamment l’absence de système d’information pour les publics en situation de handicap. Nous pensons sincèrement que ce service public de l’éducation via le numérique est aussi une chance exceptionnelle de mettre en place de nouvelles formes de travail collaboratives, co-élaboratives entre les élèves, entre les enseignants et, naturellement, entre les enseignants et les élèves.

Il faut faire confiance au CNED pour se moderniser. Je le dis d’autant plus que j’ai participé pendant plusieurs années, en tant qu’enseignant à l’université Sorbonne Nouvelle, à une expérience d’enseignement à distance dans le cadre des sciences de l’information et de la communication. Une collaboration entre l’enseignement supérieur et l’enseignement dans les écoles peut se révéler très rapidement riche et opérationnelle parce que nous expérimentons ces techniques depuis des années dans les universités en direction des étudiants à la fois sur le territoire français et à l’étranger.

Nous savons faire passer des épreuves, des entretiens, des examens via internet. Nous savons élaborer des bases de données. Les restrictions proviennent davantage – nous y reviendrons ultérieurement – de blocages dans l’accession aux contenus. Un travail doit être engagé auprès des éditeurs, en particulier des éditeurs de manuels pédagogiques, mais aussi en matière de liberté d’accès à certaines sources, ce que nous appelons l’exception pédagogique concernant les droits d’auteurs.

Quoi qu’il en soit, la possibilité existe aujourd’hui. Elle ne requiert pas des moyens humains exceptionnels ; elle demande une intelligence, une inventivité et une capacité à utiliser des ressources qui existent déjà au sein de l’enseignement, notamment au sein de l’enseignement supérieur. Les futures ESPE destinées à remplacer les IUFM peuvent être l’occasion de combiner l’expérience universitaire en la matière et la formation des cadres professoraux et des enseignants dans l’école.

Par conséquent, nous appuyons pleinement la démarche du Gouvernement sur cet article.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Je vous remercie, mesdames, messieurs les sénateurs, de la qualité de vos interventions et de la précision des problèmes que vous soulevez, sur lesquels, je le conçois bien, il faut apporter des réponses.

D’abord, et chacun l’a compris, nous ne sommes pas dans la continuité de ce qui a été fait ; nous sommes dans un nouvel élan, et c’est bien un service nouveau que nous voulons créer.

Nous avons connu les difficultés qui ont été évoquées par M. Gérard Longuet ; le Président de la République lui-même a eu à les connaître : des collectivités locales mettent des moyens mais, derrière, les déficiences de l’État empêchent la formation au numérique et les usages du numérique. Des rapports de l’inspection générale de l’éducation nationale que j’ai rendus publics ont d'ailleurs été très nets sur ces questions.

Nous avons donc à nous ressaisir, et ce à un moment où, vous avez raison, le numérique permet de transformer les pédagogies, mais aussi, et bien au-delà, la communication avec les parents – c’est ce que proposent souvent les espaces numériques de travail, ou ENT, fournies par les collectivités locales –, l’aide aux élèves en difficulté, etc.

Vous citez des exemples étrangers. Je tiens tout de même à vous dire que, depuis notre belle région de Poitou-Charentes, à la rentrée, 30 000 élèves des zones d’éducation prioritaire auront accès à une assistance éducative par internet. De même, l’ONISEP a mis en place une identification des offres de formation que les « décrocheurs » peuvent recevoir sur leur téléphone mobile ; ces jeunes savent désormais qu’une formation leur est offerte à deux kilomètres ou à quatorze kilomètres de chez eux. Cette mesure n’est pas étrangère à nos succès en matière de décrochage. Le service public du numérique, nous l’avons déjà mis en œuvre à cette occasion.

Pour ce qui est des langues étrangères – et j’ai été heureux d’entendre votre soutien au travail de la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, monsieur Longuet –, nous prévoyons dans ce projet de loi leur apprentissage dès le cours préparatoire. À cet égard, nous disposons déjà d’un site qui permet aux tout-petits d’apprendre les langues de façon ludique.

Vous appelez l’attention sur les apprentissages fondamentaux et la place des parents qui veulent accompagner leurs enfants et comprendre ce qui se passe au CP pour la lecture et l’écriture. Nous avons mis au point des moyens d’accompagnement pour les parents qui veulent suivre la progression de leur enfant au CP, ce qui concourra également à lutter contre les difficultés. C’est un projet considérable et pour tout dire assez extraordinaire qui est ainsi mis en œuvre – je vous invite d'ailleurs à venir le consulter.

Vous avez émis ici ou là une inquiétude concernant les opérateurs. La Cour des comptes, dont on parle beaucoup depuis vingt-quatre heures, avait déjà rendu un rapport très sévère sur l’enseignement à distance. Les opérateurs doivent évoluer, mais, dans le même temps, il faut les conforter, et c’est ce que nous comptons faire. Sont concernés l’ONISEP, le CNED, mais aussi le CNDP, le Centre national de documentation pédagogique, qui est une merveilleuse machine à produire de l’intelligence collective.

La France ne doit pas se laisser imposer des modèles uniquement anglo-saxons de logiciels pédagogiques, car ce ne serait pas sans conséquences. Nous devons organiser une filière française de la production du logiciel éducatif, et nous y travaillons également avec des éditeurs privés.

J’ai demandé à Louis Gallois de mobiliser des moyens, et nous en disposons comme jamais auparavant. Il faut recueillir des fonds européens, y compris pour relier au très haut débit de petites collectivités qui n’y ont pas accès aujourd’hui, où les enseignants renoncent à se servir d’internet en raison des coupures incessantes.

Nous devons unir nos forces. Pour revenir sur l’échange de vues entre Mme Gonthier-Maurin et ses collègues de l’autre côté de l’hémicycle, nous avons besoin d’une logique collaborative où les uns et les autres, et donc les collectivités locales, puissent librement, avec un droit d’initiative, apporter leur contribution. L’État garantit la sienne ; il va d'ailleurs accroître considérablement ses apports, dans des proportions jamais vues. Je viens de demander 100 millions d’euros pour mobiliser les fonds européens en faveur du très haut débit scolaire. Nous avons obtenu, d’une part, 10 millions d’euros et, d’autre part, 15 millions d’euros du Commissariat général à l’investissement. Vous pouvez consulter les sites dont je vous ai parlé. Nous nous sommes déjà mis en mouvement et nous irons beaucoup plus loin.

Je prendrai deux exemples pour faire comprendre où se situent les difficultés.

Nous avons besoin, pour le parcours d’éducation artistique et culturelle, de mobiliser des ressources numériques culturelles pour les élèves. Certaines appartiennent à l’État, et nous menons, par exemple, des négociations compliquées avec les musées nationaux pour qu’ils acceptent de mettre leurs ressources au service de la pédagogie. D’autres appartiennent en revanche aux collectivités locales et ne sauraient être à la charge de l’État. Certaines collectivités veulent également produire.

Les espaces numériques de travail sont des outils de liaison tout à fait importants avec les parents, avec la communauté éducative. Les villes, les régions construisent d’ailleurs souvent leurs propres modèles. Elles doivent pouvoir le faire !

Voilà pourquoi je récuse la logique d’un service public qui incomberait uniquement à l’État. J’entends dans les débats que les collectivités locales ne participeraient pas au service public : mais elles l’assument ! Elles sont démocratiques et participent par conséquent au service public. C’est cette logique collaborative qui permettra, là comme ailleurs – nous avons évoqué le projet éducatif de territoire –, la réussite de notre objectif pédagogique.

Vous mesurez l’importance du travail entrepris, et je vous en remercie. Vous avez raison de vouloir identifier clairement les responsabilités des uns et des autres. Vous demandez à l’État de s’engager pleinement ? C’est ce que nous faisons.

Pour répondre à une sollicitation adressée hier par M. Assouline, nous sommes en train de réorganiser en profondeur l’administration centrale de l’éducation nationale – et croyez-moi, la chose n’est pas facile…

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Il ne s’agit pas de courage. Cette réorganisation sera opérée, car c’est l’intérêt de tous. Nous devons recevoir le soutien de tous pour que le numérique soit précisément identifié.

Si vous interrogez mes prédécesseurs, qui n’ont pas toujours eu de mauvaises intentions sur ces sujets, ils vous diront qu’à un moment l’intendance ne suit pas. Nous avons, d’un côté, ceux qui s’occupent du tuyau, de l’autre côté, ceux qui traitent des contenus, sans compter les opérateurs, et je n’oublie pas de signaler que nous n’avons pas articulé l’académique et le national. Cette intégration est en cours de réalisation et sera sans doute annoncée plus précisément dans les semaines qui viennent. Elle est indispensable pour montrer l’engagement de l’État et la profonde mutation opérée.

J’ai constaté que la commission était revenue sur l’un des amendements du Gouvernement. Vouloir que l’ensemble du service public du numérique éducatif, y compris l’innovation et les ressources, soit à la charge de l’État, c’est s’engager dans une course en se créant des obstacles considérables ! Ce serait d’ailleurs revenir sur ce qui existe déjà, créant une situation invraisemblable.

Je prends l’engagement que l’État assumera totalement ses responsabilités dans les ressources numériques, dans sa restructuration et dans la formation de ses professeurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 63, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« L'État confie, à sa charge, à l'éducation nationale, une mission de service public du numérique éducatif et de l'enseignement à distance, dont les objectifs sont de :

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

L’article 10 du projet de loi nous mobilise tous, tant l’enjeu du numérique est important. Pour ma part, cependant, je ne comprends pas cette nouvelle notion de « service public du numérique ». Nous pensons qu’il s’agit plutôt d’une nouvelle et importante mission confiée à l’éducation nationale, et non pas d’un nouveau service public, puisque l’éducation nationale est le service public premier en tant que telle. Dès lors, pourquoi créer un nouveau service public au sein d’un service public existant ?

Par ailleurs, un service public du numérique ne saurait être circonscrit à l’éducation nationale, puisque tous les secteurs de notre société subissent aujourd'hui la conséquence de cette mutation numérique. Je citerai les secteurs de la santé, de l’énergie, des transports…Aussi les besoins de nos concitoyens en matière d’apprentissage aux nouveaux usages du numérique sont-ils larges. Tous les acteurs de la société sont concernés. Par conséquent, il nous semble que l’expression « mission de service public » est plus appropriée. Mais peut-être M. le ministre nous répondra-t-il sur les éléments qui nous auraient échappé ?

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 386, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Dans le cadre du service public de l’enseignement et afin de contribuer à ses missions, un service public du numérique éducatif et de l’enseignement à distance est organisé pour notamment :

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Cet amendement est au cœur des discussions que nous venons d’avoir. Il vise à supprimer la mention ajoutée par la commission, à savoir « à la charge de l’État », pour les raisons que j’ai développées. L’État va assumer ses charges, mais le service public n’incombe pas exclusivement à l’État.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

C’est un débat qui traverse notre pays depuis deux siècles, mais il va tout de même falloir s’y mettre ! S'agissant de l’école, c’est un élément très important, qui est au cœur de notre loi de refondation.

Vous avez d’ailleurs noté, nous ne l’avons pas encore abordé, que nous avons changé la représentation des collectivités locales dans les conseils d'administration. Quand les collectivités locales paient 25 % de la dépense d’éducation en France, il faut en tirer les conséquences. Vous m’avez assigné l’objectif de progresser dans les évaluations PISA. Justement, les pays qui réussissent le mieux sont ceux où tous les acteurs du monde scolaire et éducatif collaborent.

Nous assumons donc pleinement, je le répète, les responsabilités qui incombent à l’État. Nous souhaitons même les développer en y consacrant des moyens nouveaux. Toutefois, je souhaite que l’on supprime la notion de « à charge de l’État », car elle est extrêmement limitative.

Disant cela, je vous apporte une réponse, madame Morin-Desailly. Votre intervention montre d’ailleurs qu’une incompréhension subsiste quant à ce que nous voulons faire.

Ce que nous voulons, c’est que le service public soit le résultat de la collaboration de tous ceux qui doivent y contribuer, chacun dans son rôle.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

S’agissant de l’amendement n° 63 de Mme Morin-Desailly, la commission considère qu’il est préférable, dans un souci de lisibilité et d’efficacité du dispositif, que le numérique scolaire soit intégré dans un véritable service public au sein de l’éducation nationale, plutôt qu’il ne fasse simplement l’objet d’une mission supplémentaire.

Au vu de cette ambition, que nous avons en commun avec le Gouvernement, nous émettons un avis défavorable.

En ce qui concerne l’amendement n° 386 du Gouvernement, la commission était animée, lorsqu’elle l’a examiné, par la même exigence de réussite de ce nouveau service public du numérique que celle qui est défendue par le ministre et que nous partageons tous. Cependant, au regard des expériences passées, elle souhaitait aussi que l’État ait un rôle d’impulsion et d’accompagnement, afin que nous ne rations pas ce rendez-vous.

L’amendement visant à supprimer les mots « L’État organise, à sa charge, », la commission a émis un avis défavorable.

À titre personnel, et compte tenu des explications que vient de nous donner M. le ministre, je m’en remets à la sagesse du Sénat.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Il est défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Je suis surpris par cet amendement du Gouvernement, qui tend à supprimer la référence à la charge qui incombe à l’État.

Ce que vous proposez pour l’éducation nationale est tout à fait intéressant, monsieur le ministre, mais cette politique se fait en partie, me semble-t-il, sur le compte des collectivités locales.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Vous avez pris des engagements importants, en affirmant que l’État assumerait ses responsabilités financières pour améliorer la mise en place du numérique et l’éducation au numérique dans les établissements scolaires. Pouvez-vous également vous engager à donner aux collectivités locales les moyens d’accompagner l’État dans la mise en place de cette politique ?

On ne peut pas tenir deux discours ! D’un côté, on compte sur les collectivités locales pour mettre en œuvre un projet et, de l’autre, on diminue leurs dotations. Je rappelle que la DGF va diminuer de 4, 5 milliards d’euros en deux ans !

Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Les collectivités territoriales s’impliquent d’ores et déjà de façon importante dans le système éducatif !

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Le groupe CRC a trouvé un mauvais soutien...

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

En ce qui concerne les collèges, les départements n’ont pas à rougir de leur action ! Ainsi, la Marne, qui bénéficie de 3 millions d’euros de dotation globale de fonctionnement, dépense en travaux pour ses collèges entre 16 et 22 millions d’euros par an.

Tout cela pose une véritable difficulté, notamment pour les départements. Comme vous le savez, du fait de l’absence de compensation des allocations de solidarité, ceux-ci n’ont plus de marges de manœuvre. Ils ne pourront donc pas vous accompagner comme ils le souhaiteraient dans cette démarche tout à fait intéressante de développement de l’éducation numérique.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

La réforme des rythmes scolaires se traduit par un coût supplémentaire de plus de 3 % pour le transport scolaire. Dans le département de la Marne, aux 20 millions d’euros consacrés à ce budget, il faudra ajouter 800 000 euros !

Sont aussi désormais à la charge des départements les mineurs étrangers isolés, ce qui représente un coût de 700 000 à 800 000 euros supplémentaires tous les trois à quatre mois. Et je ne parle pas de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales et des cotisations qui augmentent ! Monsieur le ministre, les collectivités locales n’en peuvent plus !

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Vous risquez donc d’être déçu, vous qui attendez tant d’implication de la part des collectivités territoriales, qu’il s’agisse des communes, pour les écoles, ou des départements et des régions pour les collèges et les lycées !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Jacques-Bernard Magner, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques-Bernard Magner

Contrairement à ce qui vient d’être dit, tout n’est pas remis en cause à l’occasion de ce débat sur le numérique.

La commission a longuement débattu, ses membres ont pu s’exprimer et le ministre a pris des engagements concernant la participation financière de l’État.

Mme le rapporteur l’a rappelé, la commission avait émis au départ un avis défavorable. Comme elle s’en est remise, avec raison, à la sagesse du Sénat, le groupe socialiste soutiendra l’amendement du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Il ne faudrait pas que l’UMP et la droite en général s’exonèrent de leurs responsabilités s’agissant de la politique qu’elles ont menée pendant des années.

Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Cela ne veut pas dire pur autant, chers collègues socialistes, qu’il faut poursuivre dans cette voie !

Ce nouvel étranglement, envisagé ici, des collectivités territoriales, auxquelles on ne cesse de demander plus, pose un véritable problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Je ferme le ban !

Tout d’abord, il est vrai que le numérique ouvre la voie d’une véritable révolution. Il est donc légitime de réfléchir à un service public du numérique éducatif.

Cela étant dit, si l’on veut que cette révolution soit positive, c’est-à-dire porteuse d’émancipation humaine, il ne faut pas, selon moi, qu’elle soit désincarnée. Pour que tel ne soit pas le cas, nous devons veiller à respecter deux exigences, aux deux bouts de la chaîne.

D’un côté, il faut des organismes opérateurs, dont il convient de définir le périmètre, l’articulation et les missions, et pour lesquels seront recrutés des personnels qualifiés, donc bien formés, ce qui nous renvoie au débat général que nous avons entamé et que nous poursuivrons sur la restauration urgente de la formation initiale et continue des enseignants. Il faut aussi doter ces opérateurs des moyens nécessaires à leur fonctionnement, surtout si l’on souhaite les faire évoluer.

De l’autre côté, c’est-à-dire à l’autre bout de la chaîne, il faut veiller à ce que les élèves qui sont appelés à utiliser ces ressources ne soient pas complètement délaissés, sans structures, sans lieux et sans enseignants, qui sont les mieux à même de donner de l’incarnation, au sens de la chair et de la présence physique, à ces enseignements numériques.

La collaboration, cela ne veut pas dire le transfert !

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Il est absolument indispensable que chacun veuille collaborer. En effet, le champ de la circulation de l’information est complètement bouleversé et ouvre, on l’a dit, des potentiels non explorés jusqu’alors.

Nous sommes plus rassurés par la rédaction retenue par la commission. Après tout, on ne parle pas simplement d’un « service au public », mais d’un « service public » qui engage la responsabilité de l’État ! Il convient donc de définir les périmètres et les missions relevant de cette responsabilité d’État, notamment celle qui consiste à veiller à l’égalité d’accès sur l’ensemble du territoire.

Nous voterons donc pour la rédaction de la commission, qui nous rassure davantage, même si nous avons bien entendu les propos du ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Sido

Je soutiens les propos de René-Paul Savary, auxquels j’ajouterai que l’enfer est pavé de bonnes intentions. Je crains que cet article ne soit un coup d’épée dans l’eau.

Sur le fond, monsieur le ministre, on ne peut y être défavorable. D’ailleurs, comme l’a dit mon collègue René-Paul Savary, nous assumons déjà ces missions : le numérique existe dans les collèges grâce à la clause de compétence générale, et les départements ont fait beaucoup dans ce domaine.

Cela étant, je le signale au passage, pour que le numérique fonctionne dans les collèges, encore faut-il que le haut débit y arrive. Et qui paie, pour cela ? Encore une fois, les départements, car la plupart du temps – mais il y a des exceptions ! –, les autres collectivités, que je ne nommerai pas ici, se dessaisissent de cette question.

Je le répète, grâce à la clause de compétence générale, nous avons déjà accompli beaucoup.

Souvent, la gauche plaide pour la cohérence, et elle a raison de le faire. Là aussi, soyons cohérents ! L’État diminue nos dotations, toutes collectivités confondues – ce n’est pas une critique ; on peut le comprendre ! –, de deux fois 1, 5 milliard d’euros, auxquels s’ajoute 1, 5 milliard déjà prélevé, soit 4, 5 milliards ! Comment les collectivités, en particulier les départements pour les collèges, feront-elles en pratique pour mettre en place le service public du numérique ?

Je suis d’accord sur le fond de votre proposition. Il s’agit, certes, d’investir législativement pour l’avenir. Or de nombreux départements ne pourront pas participer, tout simplement parce qu’ils manquent de moyens. L’intention est donc bonne, mais le dispositif restera malgré tout inapplicable.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Dans l’amendement du Gouvernement figure un adverbe que je n’aime pas rencontrer dans un texte de loi, car il n’y a pas sa place : « notamment ». On n’écrit pas cela dans la loi ! On dit simplement ce que l’on fait, sans ouvrir à l’infini le dispositif.

Je lis par ailleurs dans l’objet de cet amendement qu’il s’agit de mobiliser « l’ensemble des acteurs du numérique éducatif, sans préjuger des multiples modalités de financement et de mise en œuvre de leurs missions ».

À la lecture des mots « multiples modalités de financement », je me dis que l’on s’apprête à présenter une addition salée ! Cela me fait penser à la célèbre formule de Mme Aubry : « Quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup » !

Je ne souhaite pas que nous laissions passer dans la loi, mes chers collègues, un flou dont nous aurions peut-être ensuite à nous plaindre.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Chers collègues de l’UMP, si le repentir peut être nécessaire, souhaitable et vertueux, il n’efface pas pour autant les conséquences des fautes passées.

Cela vous honorerait, à titre individuel, de reconnaître que vous avez beaucoup fauté par le passé, raison pour laquelle vous exercez une telle pression sur le Gouvernement depuis un an déjà.

Efforçons-nous, à l’occasion d’un débat d’une telle qualité, de ne pas répéter ces antiennes, et de nous poser des questions très concrètes et pragmatiques.

Comment répondre à l’enjeu du numérique éducatif ? Un service public du numérique placé sous la seule autorité de l’État correspondrait-il à la réalité que nous connaissons ? Regardons ce que nous faisons actuellement !

Notre collègue Bruno Sido l’a dit, dès qu’il y aura transfert des données, il y aura forcément partenariats et collaborations.

Dès qu’il y aura des productions, nous savons qu’il y aura un apport, au vu des rythmes scolaires, des associations et du secteur associatif. Il faudra en effet travailler sur les contenus et les adapter en fonction des objectifs pédagogiques des enseignants, et cela donnera forcément lieu à l’établissement d’un partenariat à moment donné.

Cela étant, je ne souhaiterais pas que, dans le cadre de ce partenariat, le bâton soit tordu dans le mauvais sens. Il ne faut pas que l’État exerce une tutelle sur les collectivités, en leur donnant seulement le droit de payer, mais à aucun moment celui de dialoguer.

Dans la proposition qui nous est soumise, l’État a pour mission de garantir les fondamentaux et les missions de l’éducation nationale au travers de ce service public numérique, mais aussi de donner la possibilité aux collectivités, qui contribuent à l’équipement des salles de classes, de collaborer. Il s’agit d’en finir avec une situation dans laquelle les collectivités ont le droit de payer, mais rarement d’intervenir dans le cadre d’une organisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Nous avons besoin d’organiser une corrélation entre les temps pédagogique, extrascolaire et périscolaire. Voulez-vous vraiment que le service public du numérique éducatif ne s’inscrive que dans le seul temps scolaire ? Ce serait absurde !

Les collectivités interviennent pendant les temps périscolaire et extrascolaire. L’ouverture que permet ce dispositif est à la fois exigeante sur les fondamentaux, puisque l'État devra jouer son rôle, et d'un pragmatisme de très bon aloi qui permettra aux uns et aux autres d'intervenir dans leurs domaines respectifs de compétence.

Enfin, il appartiendra à l'État de veiller à éviter les distorsions trop fortes entre les collectivités. C’est là sa mission. Je ne doute pas que les départements, les établissements publics de coopération intercommunale, les régions sauront, en partenariat avec l'État, mettre en place un système global tiré par le haut. Il ne faudrait pas que seules quelques collectivités, parce qu'elles en ont la volonté politique ou plus simplement les moyens, offrent à leurs concitoyens un service public performant.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. le vice-président de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Nous sommes souvent tentés d’inscrire des garanties dans les textes. Ce peut être utile, mais, en l’occurrence, les explications du ministre devraient suffire. Brigitte Gonthier-Maurin, à ce titre, conforte le réflexe premier de la commission et agit dans un souci de protection.

Certes, si ajouter cette précision ne mangeait pas de pain et rassurait, ce qui est votre objectif, nous pourrions, dans un esprit de concorde et de rassemblement, répondre : pourquoi pas ? Mais le ministre affirme – et c’est un élément tout à fait nouveau par rapport au débat que nous avons eu en commission – que cette mention pourrait compromettre certaines collaborations – c’est le terme qu’il a employé – et permettre à des collectivités de se désengager. Il n’est qu’à voir l’esprit de certains...

Si c’est le cas, il y a là un vrai sujet.

La rédaction actuelle de l'article 10 n’exonère en rien l’État des missions qui lui incombent. L’État ne se défausse pas : n’est-il pas en train d’accomplir ce qui n'a pas jamais été fait jusqu'à présent ?

M. Jean-Jacques Mirassou s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Aujourd'hui, sur le numérique, il ne s'agit pas simplement de faire mieux qu'avant ! C'est le seul domaine où, en matière de connaissances comme d’apprentissages, les enfants se forment sans le truchement de l'éducation nationale ou de la famille, car les parents sont dépassés ! En d’autres termes, les connaissances, les savoirs que les enfants acquièrent, les mauvaises influences qu’ils subissent, tout cela se fait hors de tout contrôle, parce que les enfants maîtrisent un outil que ceux-là mêmes qui doivent éduquer ne se sont pas approprié.

L'éducation nationale en a conscience et « met le paquet » : le fonds Gallois, les fonds européens sont mobilisés, une direction centrale du ministère est créée, une unification est prévue, et pour revenir au texte, une loi de refondation qui consacre un article au numérique éducatif.

La question n’est donc pas de savoir si l’État cherche à se défausser sur les collectivités territoriales. C’est tout le contraire que prévoit cet article ! L’État assume ce qui lui incombe, parce que les collectivités territoriales ont commencé à s’engager.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Nous sommes assurément sur la bonne voie.

Il faut soutenir le ministre quand il défend sa vision du numérique éducatif et qu’il avance l’argument du danger que ferait courir cette précision : elle risquerait de compromettre des projets de collaboration, notamment avec les musées.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Colette Mélot, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Nous en sommes tous persuadés, et moi la première, le numérique est une véritable révolution.

Monsieur le ministre, nous prenons acte de votre engagement. Nous devons nous mettre d'accord et travailler tous ensemble. Mais, de grâce, nous ne sommes tout de même pas passés de l'obscurité à la lumière ! D’aucuns prétendent qu'il ne se passait rien et que, tout à coup, le problème est pris à bras-le-corps. Non !

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Il faut reconnaître que les progrès sont flagrants, mais nous sommes au début d'une nouvelle ère et il faut que les choses se mettent en place.

Toutes les communes de France n'ont du reste pas les mêmes équipements, certaines n'ont pas encore le haut débit, petit à petit la fibre optique est installée. Par conséquent, des disparités entre communes demeurent qui se retrouvent aussi dans les écoles.

Nous savons tous que les collectivités territoriales – communes, départements, régions – ont beaucoup investi et veulent avancer. Il faut saluer tous les efforts qui sont accomplis et qui continueront à l’être. La confiance doit primer. Ce projet, nous pouvons le porter tous ensemble : ce n'est pas une question de couleur politique. Nous avons confiance dans l'avenir du numérique.

Monsieur le ministre, dans quelque temps, nous dresserons un premier bilan et nous saurons si ce grand service public du numérique éducatif aura permis des avancées.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Oui, nous évaluerons !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

En vérité, nous sommes en train de faire en séance publique un travail de commission ! Tel qu’il est rédigé, l'article 10 comporte une ambiguïté profonde.

Il est incontestable que l'enseignement à distance est une charge exclusive de l'État. Sur ce sujet, je soutiens tout à fait l'analyse du groupe CRC. En effet, l’isolement des élèves et leur dispersion sur le territoire et au-delà entraînent deux conséquences pratiques : d’une part, ils ne sont rattachés à aucune collectivité locale ; d'autre part, ils ont besoin d'une pédagogie adaptée à leur isolement, j'allais dire à leur solitude.

Monsieur le ministre, vous proposez dans le même syntagme « un service public du numérique éducatif et de l'enseignement à distance », alors qu’il s'agit de deux objectifs totalement différents.

L’enseignement à distance est spécifique. Quant à l'enseignement éducatif numérique, il est évidemment nécessaire, nous sommes tous d'accord. Nous connaissons tous les efforts qui sont consentis et les difficultés auxquelles nous devons faire face. Nous savons tous que l'État doit s’impliquer pour promouvoir les bonnes pratiques, confronter les expériences et négocier – j'insiste sur ce mot – avec les collectivités et leurs associations, l'Association des régions de France, l'Assemblée des départements de France, l'Association des maires de France, mais aussi l'Assemblée des communautés de France, puisque, de plus en plus, l'enseignement élémentaire est pris en charge par des intercommunalités.

Or cette négociation ne figure pas dans l'article 10. Au contraire, la confusion demeure entre ce qui est incontestablement à la charge exclusive de l'État, à savoir l’enseignement à distance, et ce que l'État partage avec les collectivités, à savoir l'enseignement numérique pour tous les élèves scolarisés dans des classes, qui n’obéit pas aux mêmes règles.

C'est la raison pour laquelle ce malentendu et ce malaise ne se dissipent pas. Nous avons le sentiment que, au nom de l'un, on fait passer l'autre. Tant que cette conférence, cette rencontre nationale n'aura pas été organisée, nous garderons cette attitude de défiance.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Claude Haut, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Haut

Au cours de la discussion générale, j’ai, au nom de la commission des finances, pointé certaines ambiguïtés dans la répartition des compétences entre l'État et les collectivités. Le débat que nous avons sur l'article 10 est très intéressant et nous a permis de répondre à certaines interrogations. Certains doutent encore, d'autres sont rassurés.

Monsieur le ministre, lorsque vous avez parlé de coopération avec les collectivités locales, vous avez pris un certain nombre d’engagements qui me semblent particulièrement encourageants et permettent déjà, pour peu que l’on vous fasse confiance, de clarifier la répartition des compétences.

Notre souci majeur sera désormais de poursuivre dans cette voie, car il faut que l'État continue à apporter les éclaircissements nécessaires sur certains points de droit. La Cour des comptes a déjà relevé qu'aucune règle ne fixait précisément les compétences des services académiques, des collectivités et des établissements eux-mêmes en matière de maintenance et de renouvellement des équipements. Sur ce sujet, une mise au point sera bienvenue et, à l'avenir, le ministère aura tout son rôle à jouer.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Haut

Contrairement à d'autres, monsieur le ministre, je trouve vos engagements rassurants.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

La discussion qui a lieu me conforte dans l’idée qu’il est nécessaire, comme je le propose dans mon amendement, de substituer aux mots « service public » l’expression « mission de service public ».

Nous partageons l'ambition du ministre : le numérique est un enjeu majeur et l’outil doit absolument être introduit à l'école. Cependant, les choses ne sont pas encore mûres et n'ont pas été pleinement discutées pour que nous ayons l’assurance que les collectivités, en partenariat avec l'État, s'impliqueront dans ce vaste chantier.

On peut faire le rapprochement avec ce qui s'est passé pour les rythmes scolaires ! Il faut prendre le temps de mesurer comment les différents acteurs pourront s'engager avant de prendre une quelconque décision. L’inquiétude de nos collègues qui représentent ici les territoires persiste, malgré les éclaircissements que vous avez apportés, monsieur le ministre.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 385, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 3 et 4

Rédiger ainsi ces alinéas :

« 1° Mettre à disposition des écoles et des établissements scolaires des services numériques permettant de prolonger l’offre des cours qui y sont dispensés, d’enrichir les modalités d’enseignement et de faciliter la mise en œuvre d’une aide personnalisée à tous les élèves ;

« 2° Proposer aux enseignants une offre diversifiée de ressources pédagogiques, des contenus et des services, contribuant à leur formation ainsi que des outils de suivi de leurs élèves et de communication avec les familles ;

II. – Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa

« 4° Contribue au développement de projets innovants et à des expérimentations pédagogiques favorisant les usages du numérique à l’école et la coopération.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Cet amendement vise à améliorer la rédaction de l'article 10 à la suite des nombreux apports de la commission.

Il s’agit à la fois d’éviter les répétitions, trop nombreuses dans l’actuelle version des alinéas 3 et 4, et de regrouper ce qui relève de l’innovation et de l'expérimentation.

Pour davantage de cohérence, nous proposons de déplacer la mention de l’innovation et des expérimentations pédagogiques favorisant la coopération – il ne serait pas inutile, d’ailleurs, que les collectivités locales puissent participer à cette innovation, mais je ne reviens pas sur le débat quelque peu absurde auquel a donné lieu l'amendement précédent ! – à l’alinéa 6, consacré au « développement de projets innovants favorisant les usages pédagogiques du numérique ».

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 64, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer les mots :

Proposer aux enseignants

par les mots :

Inciter les enseignants à avoir recours à

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Cet amendement s’inscrit dans le droit fil de celui que nous avons déposé à l'article 6 sur l'éducation artistique et culturelle. Il a pour objet de montrer notre volontarisme sur les missions confiées à l'école en matière d'introduction du numérique.

La substitution du mot : « inciter » au mot : « proposer » témoignerait du réel engagement de l’État dans la formation initiale et continue des enseignants au numérique, formation aujourd’hui très incomplète, voire inexistante. Si l’on met en place ces outils, c’est bien dans le but d’inciter les enseignants – et non pas de les y obliger – à recourir à cette offre diversifiée de ressources pédagogiques. Cette démarche, mesurée, nous apparaît comme plus volontariste.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 198, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou, Lenoir et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Après le mot :

pédagogiques

insérer les mots :

, respectant leur liberté de choix,

La parole est à M. Jacques Legendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

La promotion du numérique éducatif va conduire à proposer aux enseignants une offre diversifiée de ressources pédagogiques. Cela ne doit pas remettre en cause leur liberté pédagogique. S’agissant des manuels scolaires, la règle a toujours été que les enseignants disposent d’une liberté de choix ; il est utile de rappeler qu’ils doivent conserver cette même liberté dans le choix des ressources pédagogiques utilisées pour promouvoir le numérique éducatif.

Tel est le sens de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 385 du Gouvernement, qui est un amendement rédactionnel. Cependant, il lui paraîtrait préférable de mentionner, à l’alinéa 3, « l’offre des enseignements » en lieu et place de « l’offre des cours ».

S’agissant de l’amendement n° 64, la commission considère que le rôle du service public du numérique éducatif et de l’enseignement à distance dans ce domaine est bien de proposer des ressources numériques aux enseignants. Aussi, la commission émet un avis défavorable.

S’agissant de l’amendement n° 198, la liberté des enseignants pour le choix de leurs supports pédagogiques, qui existe depuis 1880, n’est en aucune manière remise en cause s’agissant des ressources numériques. La précision proposée alourdirait donc inutilement la rédaction de l’article.

Je rappelle également que, sur l’initiative de la commission, cette précision a été introduite à l’alinéa 165 du rapport annexé.

Aussi, la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Monsieur le ministre, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par la commission ?

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Même si cette rectification n’est pas très heureuse sur le plan stylistique, car elle introduit une répétition, j’accède à la demande de la commission, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je suis donc saisi d’un amendement n° 385 rectifié, présenté par le Gouvernement, et qui est ainsi libellé :

I. – Alinéas 3 et 4

Rédiger ainsi ces alinéas :

« 1° Mettre à disposition des écoles et des établissements scolaires des services numériques permettant de prolonger l’offre des enseignements qui y sont dispensés, d’enrichir les modalités d’enseignement et de faciliter la mise en œuvre d’une aide personnalisée à tous les élèves ;

« 2° Proposer aux enseignants une offre diversifiée de ressources pédagogiques, des contenus et des services, contribuant à leur formation ainsi que des outils de suivi de leurs élèves et de communication avec les familles ;

II. – Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa

« 4° Contribue au développement de projets innovants et à des expérimentations pédagogiques favorisant les usages du numérique à l’école et la coopération.

Monsieur le ministre, quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements n° 64 et 198 ?

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Avis défavorable !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Monsieur le ministre, fort heureusement, la liberté pédagogique est la règle, et depuis très longtemps. Mais là, nous sommes confrontés à une situation nouvelle : l’enseignant devra choisir entre les nouveaux instruments proposés par l’État et d’autres instruments disponibles par ailleurs. Le risque existe donc bien d’une remise en cause de la liberté pédagogique des enseignants. C’est pourquoi il n’est ni inutile ni redondant que cette liberté de choix soit rappelée dans la loi.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

En conséquence, les amendements n° 64 et 198 n'ont plus d'objet.

L'amendement n° 65 rectifié, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigée :

, notamment ceux à besoins éducatifs particuliers. Des supports numériques adaptés peuvent être fournis en fonction des besoins spécifiques de l’élève ;

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Nous sommes tous d’accord pour considérer que cette nouvelle mission du service public du numérique éducatif confiée à l’éducation nationale doit permettre l’inclusion de tous les élèves.

Au-delà de la révolution technologique qui nous touche tous, qui touche toutes les familles, de nombreux nouveaux outils spécifiques peuvent être utilisés pour l’intégration des enfants en situation de handicap. Le groupe UDI-UC a déposé un certain nombre d’amendements ayant pour objet d’améliorer encore et toujours la prise en compte du handicap à l’école.

Le présent amendement vise à mobiliser l’outil numérique pour l’éducation des enfants éloignés des bancs de l’école qui connaissent en outre des difficultés d’apprentissage. Il vise bien sûr essentiellement à garantir à ces enfants une mobilisation optimale de l’outil numérique.

Il existe d’ores et déjà des outils qui permettent par exemple à des enfants dyslexiques ou ayant des difficultés d’audition de lire des documents numériques.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Du fait de la nature même des missions qui lui sont confiées, le service public du numérique éducatif et de l’enseignement à distance répond à l’exigence formulée dans le présent amendement. C’est également le sens de la réforme ambitieuse entreprise par la direction du CNED à la faveur du développement de ses supports éducatifs numériques.

La commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Même avis !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Je vais finir par croire que la commission est de parti pris sur les amendements qu’a déposés mon groupe !

Il n’est pas inutile, bien au contraire, que la loi précise une nouvelle fois quelles sont les exigences et les ambitions en matière d’inclusion à l’école des enfants porteurs de handicap, qu’ils soient scolarisés en établissement ou qu’ils bénéficient d’un enseignement à distance. Ces nouveaux outils numériques s’inscrivent dans une mutation majeure.

Hier, nous avons eu des débats importants au cours desquels Mme Campion a rappelé combien il était difficile de faire appliquer la loi de 2005, combien il était difficile d’intégrer ces enfants de manière satisfaisante. Je le répète, madame le rapporteur, il est essentiel de rappeler dans la loi l’exigence d’intégration de ces enfants.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Madame Morin-Desailly, l’article 3 A, que nous avons adopté, dispose que le système éducatif a comme objectif majeur « l’inclusion scolaire de tous les enfants ». C’est ce principe fondateur que nous avons voté. C’est dit, c’est écrit, c’est voté ! Par conséquent, vous ne pouvez pas nous reprocher d’adopter une attitude sectaire. Tout simplement, la disposition que vous proposez d’introduire est redondante ; il n’est pas utile d’y revenir à chaque instant.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 10 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 91, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Scouarnec, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les articles L. 133-1, L. 133-2, L. 133-3, L. 133-4, L. 133-5, L. 133-6, L. 133-7, L. 133-8, L. 133-9, L. 133-10, L. 133-11 et L. 133-12 du code de l’éducation sont abrogés.

La parole est à M. Michel Billout.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Billout

Cet amendement vise à abroger les dispositions issues de la loi de 20 août 2008 instituant « un droit d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire ».

Brigitte Gonthier-Maurin avait défendu, au nom de mon groupe, dans cet hémicycle, en janvier 2009, une proposition de loi abrogeant le service minimum d’accueil en cas de grève, soutenue à l’époque par l’ensemble de l’opposition de gauche.

Ce texte faisait suite à l’adoption, dès l’été 2007, de la loi relative au « service minimum » dans les transports terrestres.

Ces deux textes, puis la proposition de loi relative au « service minimum » dans les transports aériens, votée en mars 2012, en fin de législature, ont été autant de symboles du mépris du Président Sarkozy envers les corps intermédiaires, dont les syndicats, et de la volonté de casser toute action collective. D’où cette attaque contre le droit de grève, moyen d’expression ultime des salariés.

La gauche, alors dans l’opposition, était convenue que, loin de renforcer le dialogue social et le service public, ces lois constituaient une atteinte inadmissible au droit de grève.

Concernant le service minimum d’accueil, nous avions également tous pointé les multiples difficultés d’application et d’organisation matérielle pour les communes, notamment celles de moins de 2 000 habitants, confrontées à un vivier insuffisant de personnes capables de participer au service minimum d’accueil, soit un adulte pour garder vingt enfants, à l’impossibilité de recenser les compétences professionnelles des personnes requises par les maires, à l’impossibilité aussi, dans beaucoup de cas, d’assurer le service de restauration des enfants, autant de problèmes concrets qui subsistent aujourd’hui ! Et nous avions dénoncé le fait que la loi n’exigeait au final ni taux d’encadrement ni qualification particulière.

Depuis l’entrée en vigueur de la loi, une jurisprudence administrative semble se dégager : un refus de principe d’appliquer le service minimum d’accueil pourra être, en urgence, suspendu et la commune enjointe de l’organiser en lien avec l’État. Cependant, les maires rencontrant des difficultés d’organisation ponctuelles et matérielles, dûment établies, pourront se permettre de ne pas l’organiser.

C’est donc bien le règne du flou et de l’inégalité, pour ce qui avait été présenté aux parents comme un « droit d’accueil » de leurs enfants.

Si le Gouvernement a dit vouloir faire du dialogue social sa marque de fabrique, il nous semble au préalable important de rétablir la confiance, une confiance indispensable pour mener à bien les réformes, ce qui est d’autant plus nécessaire dans le cas de l’école.

La restauration de cette confiance avec les personnels de l’éducation nationale nous semble donc prendre toute sa place dans un projet de refondation de l’école.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 92, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Scouarnec, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 2 du chapitre III du titre III du livre Ier de la première partie du code de l'éducation est complétée par un article L. 133–... ainsi rédigé :

« Art. L. 133–... Le Gouvernement établit un rapport évaluant l’impact des dispositions de la loi n° 2008–790 instituant un service minimum à l’école. Ce rapport est remis au plus tard le 31 décembre 2013 aux commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat. Il donne lieu à un débat en séance publique. »

La parole est à M. Michel Billout.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Billout

Cet amendement de repli vise à ce que, à défaut d’une suppression des dispositions de la loi instituant un service minimum à l’école en cas de grève, nous puissions en évaluer l’impact.

Nous demandons qu’un rapport à cette fin soit remis au plus tard le 31 décembre 2013 aux commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat et qu’il donne lieu à un débat en séance publique.

Pour mémoire, l’article 14 de la loi prévoyait que le Gouvernement déposerait, avant le 1er septembre 2009, sur le bureau des assemblées, un rapport retraçant notamment les difficultés matérielles rencontrées par les communes pour l’organisation du service d’accueil. Ce rapport a tout simplement été oublié !

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

En présentant son amendement n° 91, M. Billout a pointé les difficultés qui lui ont été signalées auxquelles donne lieu l’application du service minimum d’accueil. Avant une éventuelle abrogation, nous souhaitons disposer d’une évaluation précise de ces difficultés, recenser les charges supportées par les collectivités. Aussi, la commission émet un avis défavorable.

Par l’amendement n° 92, cher collègue, vous souhaitez que le Gouvernement établisse un rapport d’évaluation de la loi instituant un service minimum d’accueil. En commission, nous vous avions demandé d’apporter deux rectifications : d’une part, reporter au 31 décembre 2014 la date ultime pour la remise de ce rapport ; d’autre part, supprimer les mots : « il donne lieu à un débat en séance publique », puisque cette disposition relève d’une loi organique.

Sous réserve de cette double rectification, à laquelle il n’a pas encore été procédé, je le constate, la commission émet un avis favorable.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Nous avons demandé le rapport visé à l’amendement n° 92. Ce rapport, qui a été rédigé conjointement par l’Inspection générale de l’administration et l’Inspection générale de l’éducation nationale, a été remis très récemment et il sera rendu public. Il s’agit d’évaluer la mise en place du service d’accueil minimum.

La mission conjointe des deux inspections générales conclut qu’il n’est pas nécessaire de revenir sur ce dispositif, qui, malgré des difficultés d’application, a permis de soulager un certain nombre d’usagers du service public, sans pénaliser gravement les personnels en termes d’exercice du droit de retrait ou du droit de grève.

Les deux inspections générales formulent quelques recommandations visant à améliorer le service d’accueil minimum. Nous allons bien entendu y donner suite. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable aux deux amendements. Il communiquera le rapport en question aux deux assemblées le plus rapidement possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Comme nous l’avons fait nous-mêmes en d’autres circonstances, le groupe CRC demande la remise d’un rapport et la tenue d’un débat en séance publique. Il est répondu à chaque fois par la négative, au motif que cela ne relève pas de la loi ordinaire. Je peux le comprendre, mais il serait tout de même souhaitable que le Gouvernement remette les rapports au Parlement avant l’examen du projet de loi de finances, de manière à éclairer nos débats sur celui-ci. Cela serait judicieux au regard tant de l’édification du Parlement que de la qualité de nos travaux.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

J’y suis tout à fait favorable, monsieur Legendre. S'agissant du rapport que je viens d’évoquer, je souhaite qu’il soit rendu public le plus rapidement possible. De manière générale, j’ai d'ailleurs pris l’engagement de mettre à la disposition du Parlement tous les éléments dont dispose mon ministère. Je suis pleinement favorable à ce que le Sénat évalue le plus largement possible le dispositif du présent texte. L’Assemblée nationale a mis en place un comité de suivi chargé de veiller à l’application de ses mesures essentielles.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Monsieur Billout, que pensez-vous de la suggestion de Mme la rapporteur

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Billout

Je rectifie mon amendement en ce sens, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je suis donc saisi d’un amendement n° 92 rectifié, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Scouarnec, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et ainsi libellé :

Après l'article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement établit un rapport évaluant l’impact des dispositions de la loi n° 2008-790 instituant un droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire. Ce rapport est remis au plus tard le 31 décembre 2014 aux commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat.

Je le mets aux voix.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 10.

Chapitre II

L’administration de l’éducation

Section 1

Les relations avec les collectivités territoriales

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 36 rectifié, présenté par M. Carle, Mme Primas, MM. Humbert et B. Fournier, Mmes Mélot et Duchêne et M. Duvernois, est ainsi libellé :

Avant l’article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 912-1-3 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 912-1-… ainsi rédigé :

« Art. L. 912-1-… – L’organisation de l’enseignement scolaire vise à ce que les enseignants les plus performants soient en priorité affectés dans les zones d’éducation prioritaire. Sa réalisation est mise en œuvre sous la forme notamment de dispositions réglementaires, d’incitations financières ou d’accords négociés ».

« Les outils permettant le calcul économétrique de la valeur ajoutée des enseignants sont déterminés par décret. »

La parole est à Mme Colette Mélot.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Cet amendement vise à inciter les enseignants les plus efficaces à exercer leur métier là où les situations de grande difficulté scolaire sont le plus concentrées.

Depuis plus de vingt ans, nous savons que le déterminant le plus important de l’apprentissage et de la réussite des élèves est le travail de l’enseignant. C’est ce que les chercheurs en sciences de l’éducation ont appelé l’« effet maître », qui peut contrebalancer l’influence de l’ensemble des autres facteurs exogènes, notamment celui du milieu socioéconomique de l’élève. L’effet maître affecte la performance scolaire de tous les élèves, ceux en difficulté en étant les plus grands bénéficiaires potentiels. Ainsi, si les élèves les plus faibles étaient confiés aux meilleurs enseignants, ils obtiendraient presque les mêmes résultats que les meilleurs élèves.

Aujourd’hui, l’effet maître est subi, puisque l’affectation des enseignants est déterminée par leur ancienneté et non par les besoins des élèves. Il importe par conséquent, dans un souci de pilotage plus efficient du système éducatif, d’identifier les enseignants les plus efficaces et de leur confier les élèves qui ont le plus besoin de bénéficier de l’effet maître. Il s’agit de viser un objectif d’équité sociale, mais aussi d’améliorer significativement la performance de notre système éducatif.

Il est donc nécessaire de créer, au sein du système éducatif, un instrument de mesure de l’influence du travail des enseignants sur la progression des élèves aux moments les plus déterminants de leur scolarité, c'est-à-dire au cours des cycles des apprentissages fondamentaux.

Un tel instrument permettrait non seulement, si l’incitation proposée est suffisante, d’orienter très rapidement les enseignants les plus efficaces vers les élèves qui ont le plus besoin d’eux, mais également d’identifier les déterminants des pratiques pédagogiques les plus efficaces.

Aujourd’hui, les pratiques pédagogiques n’étant pas observées, les bonnes pratiques ne sont pas connues et ne peuvent donc être diffusées. Les dispositions de cet amendement portent en germe un pilotage plus efficace du système éducatif.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Cet amendement, qui vise à permettre de mesurer la valeur ajoutée des enseignants afin d’affecter les plus performants d’entre eux dans les zones d’éducation prioritaire, nous laisse perplexes.

La stabilité des équipes enseignantes dans l’éducation prioritaire est un enjeu primordial, un élément fondamental pour assurer la réussite des élèves. Nous pouvons partager le souhait de nos collègues de limiter l’affectation des nouveaux enseignants et des stagiaires dans les établissements difficiles, mais l’amendement n’offre pas de dispositif opérationnel permettant de progresser dans cette voie.

En outre, l’évaluation de la performance individuelle des enseignants soulève beaucoup de difficultés : qui aurait la légitimité et la compétence pour y procéder ? C’est la qualité du collectif, de l’équipe, qui nous paraît primordiale. Il serait très réducteur de se limiter à des évaluations individuelles. De plus, l’expression « valeur ajoutée » ne nous semble pas appropriée. Le renvoi au décret montre d'ailleurs que l’amendement crée plus de difficultés qu’il n’en résout. Par conséquent, l’avis de la commission est défavorable.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Il s'agit d’une préoccupation très forte, prise en compte par le Premier ministre dans le cadre de la modernisation de l’action publique. J’ai annoncé que j’ouvrirai à l’automne une grande concertation avec l’ensemble des représentants du monde éducatif, afin d’avancer sur ces sujets. Depuis plusieurs semaines, la direction générale de l’enseignement scolaire réunit des groupes dédiés à la réflexion sur l’évolution du collège et sur la refondation de l’éducation prioritaire.

Bien que j’aie la réputation d’être très souvent maladroit

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Il est même certain qu’ils le prendraient très mal !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Colette Mélot, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Je reconnais qu’il est difficile de mesurer la valeur ajoutée des enseignants.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

On peut cependant réfléchir sur ce sujet, et souhaiter que les enseignants les plus expérimentés puissent faire profiter leurs collègues débutants de leur connaissance du métier. Il serait également préférable d’éviter d’affecter ces derniers en ZEP, à moins qu’ils n’en aient émis le souhait et aient été formés à l’enseignement à des publics difficiles. Je crois que tout cela mérite réflexion. Cela étant, je retire l’amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 36 rectifié est retiré.

L'amendement n° 66, présenté par Mmes Férat, Morin-Desailly et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Avant l'article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les collectivités territoriales sont associées à la définition des grandes orientations et des expérimentations menées par l’éducation nationale ainsi qu’à leurs déclinaisons territoriales, notamment dans le cadre du Conseil territorial de l’éducation nationale, dont les attributions sont précisées à l’article L. 239-1 du code de l'éducation.

La parole est à Mme Françoise Férat.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Férat

Monsieur le ministre, entendez-vous les inquiétudes et les critiques des élus locaux ? Dans toutes nos interventions, nous avons rappelé l’importance d’associer tous les acteurs aux réformes de l’éducation nationale, et nous avons insisté sur le rôle primordial que jouent les élus. Je le répète, les élus sont bien des acteurs, et plus seulement des payeurs.

La mise en œuvre de la réforme des rythmes scolaires constitue à mon avis l’exemple type de ce qu’il ne faut pas faire avec les collectivités territoriales. Monsieur le ministre, vous leur avez imposé une réforme sans les avoir réellement écoutées et en leur demandant de tout mettre en œuvre en six mois. De surcroît, cette réforme n’aborde le problème des temps scolaires que sous un angle étroit. Les résultats sont là : moins de 25 % des écoles l’appliqueront à la rentrée prochaine.

Cet amendement vise donc à associer les collectivités territoriales à la définition des grandes orientations et des expérimentations menées par l’éducation nationale ainsi qu’à leurs déclinaisons territoriales, notamment dans le cadre du Conseil territorial de l’éducation nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Au travers de cet amendement, c’est le rôle des collectivités territoriales que vous souhaitez clarifier. Il est évident – nous y reviendrons au cours du débat – que nous sommes à l’aube de nouveaux partenariats entre l’éducation nationale et les collectivités territoriales. Plusieurs des dispositifs du projet de loi s’inscrivent dans cette perspective, notamment les projets éducatifs territoriaux, la carte régionale des formations ou les conventions tripartites.

Outre que l’amendement pose des problèmes rédactionnels, il n’apporte aucune solution opérationnelle. Par conséquent, s’il n’est pas retiré, la commission émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Il me paraît légitime de bien préciser la position de chacun. S’il s’agit d’une relation partenariale, autant l’écrire ! On sait qu’elle existe, il faut la renforcer, ce qui implique la mise en œuvre d’un certain nombre de moyens. Nous sommes dans le même bateau : nous voulons tous faire progresser nos enfants. C'est la raison pour laquelle il est tout à fait essentiel d’affirmer dans la loi la volonté d’instaurer une coopération entre l’État et les collectivités territoriales. Il convient d’élaborer ensemble des propositions en vue de réaliser des économies, puisque nous souhaitons tous réduire la dépense publique. Cela permettra d’assumer les dépenses nouvelles nécessaires à l’amélioration de l’éducation donnée à nos enfants.

L'amendement n'est pas adopté.

(Non modifié)

Le premier alinéa de l’article L. 211-2 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° La première phrase est complétée par les mots et une phrase ainsi rédigée : « et de la carte des formations professionnelles initiales définie à l’article L. 214-13-1. Cet arrêté est pris après concertation avec la région et recueil de son avis. » ;

2° À la dernière phrase, après le mot : « investissements », sont insérés les mots : « et des engagements conclus dans le cadre du contrat de plan régional de développement des formations professionnelles et de la convention annuelle définis aux articles L. 214-13 et L. 214-13-1, ».

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Avec cet article, qui ouvre la voie à une mise en œuvre de la formation professionnelle par les territoires, nous sommes au cœur du projet de loi.

En réalité, c’est l’article 18 qui modifie fondamentalement l’organisation en la matière, l’article 11, ainsi que les articles 16, 17 et 19, n’opérant que des coordinations. Mon intervention vise l’ensemble de ces articles, qui forment un tout cohérent.

Nous sommes en profond désaccord avec les dispositions de la section du texte consacrée aux relations avec les collectivités territoriales, qui porte essentiellement sur la formation professionnelle.

Nous ne pouvons approuver ces articles, qui remettent en cause le rôle de l’État stratège dans la définition des cartes de la formation et, partant, portent atteinte à la continuité du service public de la formation professionnelle, notamment initiale, sur le territoire.

En effet, le projet de loi supprime l’arbitrage de l’État prévu à l’article L. 214-13 du code de l’éducation en cas de désaccord entre l’État et les régions concernant les conventions annuelles d’application du contrat de plan régional de développement des formations professionnelles. L’État ne sera plus le garant du respect des décisions permettant de maintenir la continuité du service public et rien n’est prévu en cas de désaccord.

Le rôle de la région ressort donc largement renforcé, puisque, aux termes de l’article 18, c’est elle qui arrêtera la carte des formations professionnelles initiales, conformément aux choix inscrits dans la convention.

Une inégalité en matière d’offre de formation professionnelle initiale en sera irrémédiablement la conséquence. L’État se trouvant évincé, plus personne ne sera garant de la cohérence globale de cette carte à l’échelle nationale et de l’égalité d’accès à la formation professionnelle initiale sur tout le territoire.

Les arguments employés pour contrer notre raisonnement sont connus : on nous objecte que l’État conserve le dernier mot et aura un pouvoir réel de décision, puisque c’est lui qui affecte ou non les moyens et les personnels dans les établissements d’enseignement professionnel. Certes, mais ce pouvoir n’est aucunement stratégique, car il ne permet pas de définir une vision de la formation professionnelle, alors même que le redressement productif fait partie des priorités affirmées pour notre pays.

Il résulterait de l’adoption de l’article 18 dans sa rédaction actuelle l’octroi d’un simple pouvoir de blocage à l’État en fin de parcours, ce qui, au mieux – ou au pire –, lui permettrait de s’opposer le cas échéant à une décision d’ouverture prise par la région. Mais que se passera-t-il si les autorités de l’État souhaitent l’ouverture d’une formation professionnelle que la région n’aurait pas décidée ? Quel sera alors le pouvoir de l’État ? Certes, il dispose des moyens, mais, sans établissements, il ne peut aucunement les affecter.

L’argument qui nous est opposé ne tient donc pas. À nos yeux, l’État sera très clairement affaibli et ne conservera pas de rôle prépondérant.

Par ailleurs, les dispositions de cette section du projet de loi ne peuvent être lues et comprises qu’à la lumière d’un autre texte, qui leur donne toute leur logique : je veux parler de l’acte III de la décentralisation et, plus particulièrement, du projet de loi relatif à la mobilisation des régions pour la croissance et l’emploi et la promotion de l’égalité des territoires.

L’article 5 de ce texte vise à récrire les mêmes articles du code de l’éducation que la section du présent projet de loi que nous nous apprêtons à examiner, sans que les rédactions proposées soient tout à fait identiques. Il en précise souvent la portée et en permet une meilleure compréhension ; rappelons qu’il figure dans la section intitulée « Renforcement des compétences des régions ». D’ailleurs, le Gouvernement entend introduire d’autres dispositions contenues dans ce projet de loi par voie d’amendement au Sénat, anticipant encore une fois sur un autre débat.

L’amendement du Gouvernement renforce le rôle de la région en matière d’orientation : c’est elle qui en aura intégralement la charge, depuis l’orientation vers la formation initiale jusqu’à la formation tout au long de la vie. Nous ne le voterons donc pas, bien entendu, pas plus que nous n’approuverons la décentralisation en matière de formation professionnelle initiale.

Nous ne croyons pas, évidemment, que l’État soit vertueux par essence – s’il l’était, cela se saurait, et l’expérience de ces dernières années a été éclairante à cet égard –, mais nous ne pensons pas que la région le soit davantage. Ce qui est certain, c’est que l’État a une vision plus large et peut s’assurer de la cohérence globale des offres entre les différentes régions, même si ces dernières sont mieux à même de relayer les besoins des territoires.

En matière d’éducation nationale, l’argument de l’adaptation aux réalités locales nous semble moins important que celui du maintien de l’égalité de traitement de tous les citoyens. Le sujet de la formation des jeunes, de leur avenir, est d’envergure nationale. Il est bien trop important pour qu’on puisse l’envisager sous un angle exclusivement territorial.

Il faut donc s’assurer que les deux visions puissent s’accorder. Nous présenterons un certain nombre d’amendements en ce sens, afin de rééquilibrer le dispositif du projet de loi en atténuant le rôle prépondérant confié à la région, laquelle risquerait de faire prévaloir l’intérêt économique immédiat et local au détriment d’une réflexion plus globale que seul l’État peut conduire.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Jean-Pierre Bel.