Intervention de Catherine Morin-Desailly

Réunion du 23 mai 2013 à 9h30
Refondation de l'école de la république — Article 10

Photo de Catherine Morin-DesaillyCatherine Morin-Desailly :

L’article 10 revêt une importance particulière, car il concerne le numérique éducatif et l'enseignement à distance. Plus encore que dans le reste du texte, il est bien ici question de l'avenir de l'école.

L’école ne peut ignorer la troisième révolution que constitue, après l'écriture et l'imprimerie, l'arrivée de l'ordinateur conjuguée au développement d’internet. C'est devenu un lieu commun de dire combien cette révolution a bousculé notre façon de communiquer, de nous informer, d’échanger et de travailler. Au fur et à mesure du développement des usages d’internet, tous les aspects de notre vie quotidienne et l'ensemble des secteurs sont touchés.

Par conséquent, l'école ne saurait être écartée de cette mutation extrêmement importante, de ce « changement de monde », pour reprendre une expression de Michel Serres. Elle doit prendre en considération cette nouvelle génération d'enfants que l'on appelle les digital natives, lesquels ont un rapport familier et intuitif à l’outil internet.

Monsieur le ministre, le Sénat s'est préoccupé depuis quelque temps déjà de cette question au travers des travaux que j'ai évoqués dans mon intervention lors de la discussion générale. Ainsi, notre groupe d'études « Médias et nouvelles technologies », qui est rattaché à la commission de la culture, a produit des rapports et émis des préconisations.

C'est par ailleurs au Sénat que revient le mérite d’avoir pris la première initiative en faisant inscrire dans le code de l'éducation la nécessité de sensibiliser les enfants, certes déjà familiers d’internet, aux immenses potentiels de l’outil numérique, mais aussi à ses risques. Un amendement a ainsi été voté à l'unanimité lors d'un débat sur le droit à l'oubli sur internet.

Il faut noter l'ambition du projet de loi sur ce sujet particulier, tout en soulignant que nous ne pourrons réussir qu’à un certain nombre de conditions.

Tout d’abord, il faut conjuguer cette ambition à celle de l’aménagement numérique de notre territoire. Sans une politique volontariste de l'aménagement de notre territoire en haut débit, voire en très haut débit, on risque une fracture territoriale et cognitive pour les enfants.

Ensuite, il ne faut pas considérer cette révolution au travers du seul prisme des outils, mais il convient avant tout de l’envisager dans ses conséquences sur les usages et sur l’évolution de la façon d’enseigner. En ce sens, les collectivités territoriales ne doivent plus être de simples pourvoyeurs d'outils déconnectés de toute réflexion sur les usages du numérique, et réciproquement. Nous avons pu le constater ces dernières années : les collectivités ont voulu investir, mais cela n’a pas toujours correspondu aux besoins fondamentaux des enseignants.

Enfin, je n’insisterai jamais assez sur ce point, l'introduction du numérique doit contribuer à renforcer le rôle du maître : on pourrait penser que l’outil numérique tend à remplacer ce dernier. Bien au contraire, son rôle sera plus que jamais déterminant pour orienter les élèves dans le flot communicationnel que représente internet.

Voilà les trois points essentiels que je tenais à souligner au moment où nous abordons un passage du texte qui nous semble tout à fait essentiel.

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