Intervention de Vincent Peillon

Réunion du 23 mai 2013 à 15h00
Refondation de l'école de la république — Article 20

Vincent Peillon, ministre :

Ne perdons pas de vue l’essentiel. Il est très important de remettre en place un Conseil supérieur des programmes.

Ce sujet a provoqué des polémiques ces dernières années, en particulier en 2008, mais il dépasse les clivages entre la gauche et la droite. Il m’est arrivé de discuter avec d’anciens ministres, dont certains avaient d’ailleurs présidé ce conseil, et j’ai constaté qu’il était préférable d’avoir un Conseil supérieur des programmes plutôt que de ne pas en avoir.

La gauche rétablit une procédure de transparence et de respect à l’égard d’un sujet majeur, les programmes de nos élèves, qui avait été supprimée par la majorité précédente, ce qui, vous en conviendrez, était regrettable.

J’ai longuement parlé avec le président du HCE, qui a remis au Président de la République, en ma présence, son dernier rapport : lui-même valide l’évolution que nous proposons, alors qu’il n’appartient pas à notre majorité politique.

En effet, attribuer au même conseil une mission relevant de la proposition et de l’évaluation, c’est confondre deux fonctions qui ont beaucoup coûté ces dernières années à l’institution de l’éducation nationale, où le prescripteur était en même temps l’évaluateur ; je pense notamment aux rapports entre la Direction générale de l’enseignement scolaire, la DGESCO, et la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance, la DEPP.

C’est pourquoi j’ai pris des engagements très forts, autant sur les programmes que sur l’évaluation. Je ne sais si nous atteindrons la perfection, mais nous essaierons en tout cas d’éviter de reproduire les erreurs de nos prédécesseurs.

D’une part, pour éviter un trop grand nombre de personnalités nommées par le politique, nous veillerons à faire figurer des experts dans la composition du Conseil. D’autre part, pour ne pas avoir une trop grande majorité de personnalités nommées uniquement en fonction de leurs qualités pédagogiques, nous introduirons, pour la première fois, la présence de sénateurs, de députés et de membres du Conseil économique, social et environnemental dans cette procédure. Enfin il faudra réunir un nombre de personnes suffisant pour que cette institution puisse travailler.

Sur de nombreuses questions – socle commun de connaissances, de compétences et de culture –, articulation du socle et des programmes, livret de compétences et des évaluations –, c’est au Conseil supérieur des programmes de prendre ses responsabilités, dans un travail qu’il mènera avec des groupes techniques de l’inspection générale ou avec des praticiens, dont nous avons besoin.

Vouloir réunifier les programmes et l’évaluation et procéder à des nominations exclusivement politiques sans professionnels, ou l’inverse, nuirait au projet que nous poursuivons.

Vous pourrez délibérer annuellement de ces questions. Et, comme pour le socle, je vous recommande de vous en saisir. Certains voudraient qu’il y ait une consultation préalable des commissions. Je n’y suis pas favorable : il ne faut pas toujours tout politiser. Je viens d’en faire l’expérience avec l’affaire des rythmes scolaires.

J’ai entendu dire qu’il n’y aurait pas eu de concertations ; elles ont pourtant été menées par mon prédécesseur pendant un an et demi, puis par nous pendant des mois ! Les associations d’élus n’auraient pas été consultées ; elles l’ont été, elles sont dans le comité du suivi, et c’est même parce que nous avons suivi leurs recommandations que parfois nous avons beaucoup de difficultés – demandez donc aux professeurs s’ils sont satisfaits des arbitrages !

Il ne faut pas ramener à un débat entre la gauche et la droite les questions qui concernent la progression des programmes en géométrie, en lettres ou en histoire. Le Sénat doit manifester sa sagesse. Mesdames, messieurs les sénateurs, mon objectif est d’arracher la question des programmes à une gestion politique et de permettre à la souveraineté d’exercer son droit de regard.

Au début de la IIIe République, à l’époque des comités de l’instruction publique, les meilleurs universitaires, les meilleurs professeurs du Collège de France et les membres de l’Institut travaillaient avec les praticiens de terrain. Nous devons être capables de les réunir aujourd’hui.

Nous parviendrons ainsi à dignifier le travail des enseignants et à obtenir, enfin, des programmes établis dans la transparence et utiles pour nos élèves.

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