Le Gouvernement émet un avis défavorable sur tous ces amendements, sauf sur l’amendement n° 203, qui a pour objet les modalités de désignation des parlementaires appelés à siéger au Conseil supérieur des programmes : il n’appartient pas au Gouvernement de s’immiscer dans ces débats, et il s’en remet donc à la sagesse du Sénat.
Je pense que les uns et les autres sont pleinement sincères, et je voudrais donc essayer de faire comprendre ma logique dans cette affaire. Une fois que le projet de loi aura été adopté, la question des programmes sera l’enjeu essentiel ; on nous l’a d'ailleurs dit plusieurs fois au moment de la réforme des rythmes scolaires. Ni les programmes élaborés en 2002 ni les programmes élaborés en 2008 n’ont permis de parvenir à un accord. Il n’y a pas d’accord sur les programmes en France.
C’est une affaire extrêmement difficile. On a parlé du numérique : il faut utiliser le numérique pour apprendre, mais aussi savoir s’en servir. Cet élément doit entrer dans les programmes. Il faut également penser au parcours d’information et d’orientation, au parcours d’éducation artistique et culturelle et aux apprentissages fondamentaux.
Nos programmes sont surchargés. Chaque fois qu’il y a un débat, la tendance spontanée est de créer un module d’éducation à quelque chose. Je pourrais organiser soixante-dix heures de cours de cette façon : éducation à l’environnement, à l’économie sociale, etc. Tel est le résultat de la politisation des programmes et de la pression qui s’exerce depuis des années.
Nous avons besoin de retrouver un modèle d’indépendance intellectuelle, avec, pour la première fois, la présence de la souveraineté populaire au sein de ce conseil.
Vous parler d’élargir la composition du Conseil supérieur des programmes. En discutant avec les membres des précédents conseils, j’ai appris qu’ils venaient d’instances de délibération où un certain nombre de points de vue particuliers s’exprimaient. Lorsqu’il était ministre de l’éducation nationale, Lionel Jospin a institué le Conseil supérieur de l’éducation. Tout le monde y est représenté : parents d’élèves, représentants des lycéens, grandes associations, syndicats. Pas un seul programme n’est adopté sans avoir été examiné dans ses moindres détails par ce conseil.
Cependant, nous devons assumer notre responsabilité pédagogique en élaborant les programmes avec ceux qui connaissent les mathématiques, la physique, l’histoire, etc. Ces spécialistes consultent les professeurs. Ils peuvent également discuter entre eux ; nous devons d'ailleurs progresser en matière d’interdisciplinarité. Il ne faut pas se contenter de réunir les inspections générales et les associations spécialisées en lettres classiques, lettres modernes, histoire, etc. La responsabilité des politiques, c’est de mettre fin à ces accumulations – on veut être plus nombreux, on veut que tout le monde soit représenté, on veut que chacun parle – qui ont produit les résultats que nous connaissons.
Je défends avec une extrême fermeté, y compris par rapport aux commissions, le Conseil supérieur des programmes tel que je le propose, parce que je sais que nous en avons besoin pour assurer la réussite des élèves de France.
Une fois que les grands axes de la refondation de l’école – le service public du numérique, la priorité au primaire et la programmation, notamment – auront été entérinés, il faudra réaliser ce travail extrêmement méticuleux qui a fait autrefois la grandeur de l’école et dont l’absence pénalise aujourd'hui très fortement de nombreux élèves.
Je réaffirme que le sujet dont nous débattons en ce moment n’est pas sans importance. Nous y avons bien réfléchi ; je vous le dis avec la plus grande sincérité. Nous avons discuté pendant des dizaines d’heures avec les membres des précédents groupes et tous les comités d’experts du ministère. Je salue d'ailleurs le directeur général de l’enseignement scolaire, qui participe depuis le début à nos travaux.
Est-ce une découverte pour vous d’apprendre que les professeurs sont associés à l’élaboration des programmes ? Pensiez-vous qu’ils ne l’étaient pas ? Bien entendu, parmi les 800 000 professeurs, on sait choisir ceux que l’on veut associer aux travaux. Je souhaite que nous nous arrachions à cette manière de toujours tout tirer vers le bas.
J’irai vers les uns et vers les autres. Nous avons une mission qui, à mes yeux, constitue l’essentiel de la refondation de l’école. Une fois que les bases auront été posées, il faudra s’occuper des contenus. L’école doit permettre à chaque élève de se saisir de l’intelligence qui est mise à sa portée. Cela suppose que l’on ne se trompe pas sur les instruments, que l’on ne considère pas cette question comme secondaire et que l’on soit extrêmement rigoureux dans les choix à opérer.
Les choix du ministre vous surprendront, car ce ne seront pas des choix politiques. J’ai besoin d’être éclairé sur les sciences économiques et sociales d’aujourd'hui. Depuis combien d’années y a-t-il, dans notre pays, un débat entre les uns et les autres ? Vous avez bien vu les difficultés qui se posent en matière d’histoire ; vous en avez d'ailleurs parlé. J’ai remis l’histoire au programme de la terminale S. J’ai changé des éléments de l’enseignement des sciences économiques et sociales. J’avais même préparé la réforme du primaire, mais j’ai préféré prendre le temps de la nécessaire concertation.
Cependant, dans l’intérêt des élèves, afin de favoriser leur réussite, je veux organiser la concertation en dehors des cadres politiques. La concertation se déroulera sous le regard des sénateurs et des députés, mais je souhaite pouvoir nommer au Conseil supérieur des programmes quelques spécialistes, quelques grands universitaires, quelques personnes qualifiées du fait de leurs travaux. Si vous pensez que nous avons besoin d’autres instances, je vous signale qu’elles existent déjà, à l’échelon tant national que territorial.