Intervention de David Assouline

Réunion du 24 mai 2013 à 9h45
Refondation de l'école de la république — Article 35

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

Inscrire cette formation n’est que le début du processus. Comment allons-nous faire pour qu’elle soit effective ?

Nous savons que quelque chose qui est enseigné et qui n’est pas évalué risque parfois, avec toutes les contraintes d’enseignement et de discipline qui incombent à l’éducation nationale, de « passer à l’as », surtout s’il s’agit d’une nouveauté et qu’il faut développer des efforts particuliers pour pratiquer cet enseignement.

Par ailleurs, le fait que cet enseignement soit obligatoire au niveau du seul collège n’empêche pas de le dispenser, sous une forme ou une autre, dès le primaire, ni de l’articuler avec une nouvelle étape au lycée.

Je ne pense pas que l’on puisse aller plus loin dans la loi. La mise en pratique va être importante et intéressante, en particulier dans ce domaine. Je pense d’ailleurs que nous devrions, nous, parlementaires, assez rapidement – peut-être dans les six à dix mois suivant l’entrée en vigueur de ce texte – mener des évaluations sur les premières mises en pratique de cette disposition.

La question de l’éducation aux médias avait déjà été acceptée, notamment dans la loi de 2006. Cette mission entrait dans les attributions du Centre de liaison de l’enseignement et des médias d’information, ou CLEMI.

Il s’agissait d’ailleurs d’une mission quasi militante et les moyens du CLEMI ont baissé de façon régulière alors que tout le monde déclarait que l’éducation aux médias était appelée à recouvrir de plus en plus d’importance.

Mon propos est donc aussi une adresse au ministre. Nous devons conforter cette mission du CLEMI – ce n’est pas la seule –, car il s’agit d’une mine, y compris en raison du travail et de l’expérience accumulés jusqu’à présent.

Personnellement, j’aurais été partisan de donner une application concrète à cette initiation obligatoire, qui n’est pas une discipline en tant que telle, en créant un module de dix-huit heures, par exemple, réparties sur un cycle, comme le collège, et dédiées à la réalisation d’un projet.

Réaliser un projet dans ce domaine, les médias, faire un reportage journalistique, tourner une vidéo, capter des images, permet d’allier la technique au contenu.

Faire de dix heures de rush trois minutes de film permet de comprendre que ces trois minutes ont été choisies de manière subjective. On saisit bien, alors, que ces quelques minutes que l’on voit sur internet ne sont pas la vérité révélée et ne relèvent pas de l’objectivité absolue.

À mon sens, donc, il faudra préciser, à un moment ou à un autre, ce que cette initiation obligatoire veut dire, et comment elle peut être évaluée, sans que cela soit une sanction.

Je tenais à souligner ce point devenu fondamental, il y a un hiatus entre ce que les jeunes reçoivent au quotidien devant leurs écrans, où ils passent plus de temps qu’en cours, et l’absence de médiation, y compris familiale, dont ils pâtissent. Cela requiert qu’un effort soit fait sur le regard critique et l’analyse à porter sur ces médias.

Toute l’école de Jules Ferry s’est construite à partir des textes, la connaissance du monde s’est faite par l’écrit, et la culture de l’éducation nationale est livresque. Passer au regard sur l’image, à l’analyse, aux techniques, à l’étude des textes spécialisés, c’est rentrer dans la fabrication de l’imaginaire et le cerveau de nos enfants. Ce n’est pas une mince affaire. C’est pourquoi je voulais insister sur ce point : ce n’est pas parce que le projet de loi contient cet article que ce qu’il instaure doit être perçu comme une évidence. Il va donc falloir beaucoup d’attention et de suivi.

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