Le présent projet de loi marque une volonté forte de placer notre jeunesse au cœur de la République. Les objectifs, les orientations et la programmation des moyens proposés pour y parvenir enclenchent une nouvelle dynamique, porteuse d’une grande ambition.
En Guadeloupe, la concertation qui a précédé l’élaboration de ce texte a beaucoup mobilisé. Les collectivités locales, qui consacrent une part importante de leur budget à l’éducation, et la très grande majorité des familles sont très attentives à la vie et aux résultats scolaires des enfants. Il faut en chercher les raisons dans la particularité de l’histoire des Antilles, de leur structure géographique, de leur situation économique passée et actuelle.
L’attente est donc forte. Elle l’est d’autant plus que, malgré des progrès réguliers, les résultats au brevet et au baccalauréat sont parmi les plus faibles de France ; ceux des évaluations de CM2 de l’académie de Guadeloupe accusent un retard d’une dizaine de points par rapport aux chiffres nationaux. En outre, les abandons sont nombreux à l’université.
Le malaise s’installe aussi au sein de l’école parce que, même si la plupart des élèves se sentent bien dans leur établissement et estiment avoir de bons rapports avec leurs enseignants, les violences, incivilités, vols, addictions, agressions de toutes sortes sont en constante augmentation.
Quelles demandes ont émergé de cette concertation dans mon département ?
Tout d’abord, celle d’un ancrage territorial plus important de l’école. La prise en compte de l’environnement social, culturel et linguistique de l’élève est jugée insuffisante. Ainsi, la langue de communication de l’élève, qui est le plus souvent le créole, est très peu utilisée pour faciliter l’apprentissage et la compréhension des notions par les enfants et pour dialoguer avec les familles, en particulier en maternelle.
L’enseignement des langues des pays voisins est également souhaité. Cela n’exclut en aucun cas la volonté d’acquérir une meilleure maîtrise du vocabulaire et de la syntaxe du français soutenu, indispensable à la réussite du futur adulte.
Or, ces dernières années, les créoles sont restés marginaux dans les académies ultramarines. Peu d’enseignants y sont formés. On ne compte que quatre admis au CAPES de créole par an pour tous les départements d’outre-mer, un ou deux postes en créole seulement sont ouverts au concours de professeur des écoles en Guadeloupe. Dans les faits, seul un petit nombre d’élèves bénéficient d’un enseignement en créole, langue pourtant largement utilisée au quotidien en Guadeloupe.
Les autres demandes ont porté sur la nécessité de favoriser l’intégration des parents dans la communauté scolaire, l’accès au numérique et une meilleure prise en compte du handicap.
C’est précisément dans ce sens que va ce projet de loi ; je m’en réjouis. Il prend acte des inégalités subies par les élèves ultramarins, encourage l’accueil des enfants de moins de 3 ans dans ces territoires. Il instaure l’apprentissage d’une langue vivante dès le primaire, encourage le bilinguisme français-créole, favorise la connaissance des langues et cultures régionales, permet aux enseignants de recourir à celles-ci dès lors qu’ils en tirent profit pour leur enseignement. Les parents disposeront de locaux au sein des établissements scolaires. L’accent est mis sur le mieux vivre ensemble, l’exigence du respect de la personne, de ses origines et de ses différences.
Cet attachement de la Guadeloupe à une meilleure prise en compte de la réalité caribéenne pour l’éducation de ses enfants, je l’illustrerai par l’adoption récente, par les élus du congrès de Guadeloupe, d’une résolution demandant à ce que soit votée au Parlement, à l’occasion de l’examen de l’acte III de la décentralisation, une habilitation dans le domaine de l’éducation. Celle-ci permettrait aux collectivités territoriales de Guadeloupe d’adapter les contenus des programmes et des rythmes scolaires, d’intervenir dans le contenu des supports éducatifs, ainsi que d’assurer une prise en charge renforcée de certaines pathologies ou de certains risques touchant les enfants, tels que l’obésité, la maltraitance, l’inadaptation sociale.
Je me réjouis donc à l’avance de l’adoption de cet article et de l’ensemble du projet de loi.