Intervention de Maryvonne Blondin

Réunion du 27 mai 2013 à 15h00
Adaptations dans le domaine de la justice en application du droit de l'union européenne — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Maryvonne BlondinMaryvonne Blondin :

Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes a produit de nombreux travaux relatifs à la traite des êtres humains et aux violences domestiques, deux fléaux mondiaux qui touchent particulièrement les femmes. À la demande de la commission des lois, nous avons donc examiné le chapitre Ier du présent projet de loi, qui transpose la directive du 5 avril 2011 concernant la traite des êtres humains, et le chapitre XI, qui adapte la législation française à la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, signée à Istanbul le 11 mai 2011.

Les modifications de notre droit interne induites par ces textes internationaux comportent des avancées qui doivent avoir pour effet, en assouplissant et en élargissant la définition des faits en cause, de faciliter leur établissement par les services judiciaires et, par voie de conséquence, d’améliorer leur prévention et leur répression. Elles faciliteront ainsi la coopération internationale, qui est fondamentale sur ces sujets, de nombreux États se dotant du même ordonnancement juridique en ces matières.

Les seize recommandations de la délégation s’inscrivent dans cette double logique.

La répression de la traite des êtres humains rencontre des difficultés de plusieurs natures, certaines matérielles, d’autres juridiques. La coopération progresse au sein de l’Union européenne, en particulier avec la Roumanie et la Bulgarie, qui sont les États membres principalement concernés, mais d’autres hésitent encore ou ne coopèrent pas.

Le principal problème juridique rencontré est celui de l’établissement de la preuve de l’infraction par les enquêteurs. L’infraction de traite des êtres humains n’est retenue que dans à peu près 10 % des cas où elle pourrait l’être, les services préférant recourir à la seule qualification de proxénétisme, plus facile à établir. La directive et le projet de loi tendent à remédier à ces lacunes.

Concernant cette partie du projet de loi, la délégation fait des recommandations dans trois directions, afin de renforcer l’efficacité de la lutte contre la traite des êtres humains.

Nous recommandons, tout d’abord, de considérer qu’il y a traite d’êtres humains dès lors que des personnes font l’objet d’une exploitation, au profit de celui qui les exploite ou d’un tiers.

Ensuite, nous suggérons une mobilisation des différents services publics concernés afin que cette lutte devienne une priorité de notre politique pénale. Nous insistons sur la formation des personnels. Nous pensons également qu’une implication forte des magistrats financiers est nécessaire, car l’action la plus efficace est celle qui consiste à confisquer les avoirs et les biens des trafiquants. La mobilisation doit aussi être diplomatique, pour amener tous les États concernés à coopérer, car cette lutte est d’échelle mondiale.

Enfin, nous nous tournons vers les victimes, généralement étrangères et en situation irrégulière, souvent contraintes elles-mêmes à commettre des actes de délinquance. Elles doivent être bien protégées, dans leur intérêt, certes, mais aussi afin d’obtenir leur témoignage.

L’arsenal répressif contre les violences faites aux femmes est de plus en plus complet en France. La véritable innovation issue de l’application de la convention d’Istanbul est l’incrimination de la tromperie en vue d’envoyer une personne à l’étranger pour lui faire subir un mariage forcé.

La convention d’Istanbul emporte par ailleurs deux autres changements : l’introduction de l’incrimination de la tentative d’interruption de grossesse non souhaitée et de celle de l’incitation d’une mineure à subir une mutilation sexuelle non suivie d’effet.

Depuis plusieurs années, la lutte contre les violences faites aux femmes est une priorité de nos politiques pénales, donc de l’action des parquets et de la Chancellerie. Les condamnations pour violences conjugales ont ainsi augmenté de plus de 80 % entre 2004 à 2011, ce qui n’est probablement pas imputable, pour l’essentiel, à une hausse du nombre de faits, mais plutôt à une volonté croissante de les révéler et de les réprimer.

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