La séance est ouverte à quinze heures.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions d’adaptation dans le domaine de la justice en application du droit de l’Union européenne et des engagements internationaux de la France (projet de loi n° 582, texte de la commission n° 597, rapport n° 596).
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la garde des sceaux.
Monsieur le président, madame, monsieur les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le présent projet de loi a été adopté le 15 mai dernier à l’unanimité par l’Assemblée nationale, après avoir été modifié en commission des lois puis en séance plénière. Il contribue à la mise en œuvre du programme de Stockholm, portant sur la période 2010-2014, qui vise à construire un espace de liberté, de justice et de sécurité.
À l’heure où nous constatons une assez forte désaffection à l’égard de l’Union européenne, ce projet de loi, qui transpose près d’une douzaine d’instruments juridiques européens et internationaux, vient à bon escient rappeler que, souvent, celle-ci a été à l’origine d’une progression des droits et des libertés individuelles.
L’obligation s’imposant à nous de transposer les instruments juridiques de l’Union européenne se trouve renforcée par le traité de Lisbonne, qui a accentué les dispositions introduites dans le traité d’Amsterdam. Cette obligation est en outre prévue par notre Constitution. Nous nous exposons à des sanctions en cas de retard.
Cela étant dit, ce n’est pas la crainte des sanctions qui nous conduit à vous proposer aujourd’hui de procéder à la transposition des instruments juridiques visés par ce texte : c’est essentiellement parce que nous partageons les principes qui les sous-tendent, la France participant d’ailleurs en amont à l’élaboration de ces normes.
Les textes dont le projet de loi tend à permettre la transposition portent, pour l’essentiel, sur la lutte contre la criminalité organisée internationale. Ils visent à harmoniser la définition des incriminations pénales, à renforcer la coopération afin d’accroître la capacité répressive, à améliorer les relations entre les autorités compétentes des différents pays en vue de l’instauration d’un meilleur dialogue et d’une meilleure coordination des actions au sein de l’Union européenne et, pour les instruments qui concernent le Conseil d’Europe ou les Nations unies, avec l’ensemble des pays auxquels la France est liée par des conventions et des traités multilatéraux ou bilatéraux.
L’Assemblée nationale a introduit trois modifications significatives, notamment la possibilité, pour les associations, de se constituer partie civile dans les affaires de traite d’êtres humains, dans les conditions déjà prévues dans notre code pénal, à savoir que leur objet soit lié à cette incrimination, qu’elles existent depuis au moins cinq ans au moment de la procédure et qu’elles disposent de l’accord des victimes. L’Assemblée nationale a également modifié le dispositif proposé pour le fonctionnement d’Eurojust et élaboré une définition de l’incrimination d’esclavage et de servitude. Je reviendrai sur ces deux points dans quelques instants.
En ce qui concerne la lutte contre la traite des êtres humains, il s’agit de transposer le contenu d’une directive qui elle-même reprend les stipulations d’une convention du Conseil de l’Europe signée à Varsovie en 2005 et du protocole additionnel de la convention de Palerme contre la criminalité transnationale organisée.
L’infraction de traite des êtres humains fait en général référence à trois éléments : une action, un moyen – habituellement considéré à travers l’échange de rémunération –et un but. Le projet de loi élargit le champ de cette incrimination, en y introduisant des éléments tels que le prélèvement d’organes, et inclut parmi les éléments constitutifs des éléments qui, jusqu’à présent, constituaient des circonstances aggravantes. L’Assemblée nationale a toutefois bien vu que cela pourrait avoir pour conséquence qu’une sanction soit inférieure à ce qui est prévu aujourd’hui. Elle a donc précisé qu’il suffirait que deux éléments constitutifs de l’infraction soient cumulés pour que la peine encourue s’élève à dix ans.
Deux articles concernent l’obligation d’interprétation et de traduction des documents essentiels de la procédure pénale. Une obligation procédurale nouvelle se trouve ainsi introduite dans notre droit qui, vous le savez, tant par l’usage que par la jurisprudence, consacre déjà l’obligation de l’interprétation.
Nous transposons également en droit interne un instrument extrêmement important concernant les abus sexuels commis contre les enfants, l’exploitation sexuelle des enfants et la pédopornographie. Conformément aux dispositions de la convention signée à Lanzarote en 2007, nous introduisons dans notre législation pénale des éléments supplémentaires qui permettront dorénavant de couvrir la totalité du champ des abus infligés aux enfants. Désormais, tous ces abus relèveront d’infractions punies par la loi.
Le projet de loi procède en outre à la transposition de l’instrument relatif à la décision-cadre de 2008 qui modifiait la décision-cadre de 2002 instaurant Eurojust. L’Assemblée nationale a souhaité aller plus loin : elle a introduit dans le texte des dispositions qui augmentent de manière significative les compétences et les prérogatives du membre national d’Eurojust.
Au nom du Gouvernement, j’ai plaidé pour que nous en restions à la transposition de la décision-cadre, considérant que nous ne pouvons pas anticiper sur le règlement européen actuellement en cours d’élaboration, qui permettra d’améliorer les moyens, les procédures et les pouvoirs d’Eurojust. Le contenu de ce règlement n’étant pas encore définitivement fixé, il serait quelque peu audacieux d’inscrire dans notre législation pénale des dispositions relatives au membre national d’Eurojust. Le Gouvernement a expliqué, à l’Assemblée nationale, qu’il n’était peut-être pas pertinent de confier au membre national d’Eurojust une véritable capacité d’exercice de l’action pénale alors qu’il n’est pas fondé aujourd’hui à exercer directement celle-ci.
Monsieur le rapporteur, vous avez procédé à une analyse juridique extrêmement fine, portant sur les aspects fondamentaux de notre système de justice pénale, les prérogatives et les missions de la police judiciaire, des magistrats du parquet et des juges du siège, ainsi que sur les contraintes constitutionnelles et organiques qui pèsent sur les magistrats du siège et sur ceux du parquet. Cette analyse vous a conduit à observer que le membre national d’Eurojust est un magistrat hors hiérarchie. Il ne participe pas de la structure pyramidale de l’institution judiciaire, et il n’y a pas d’articulation formalisée entre son action et celle de cette dernière sur le territoire national. C’est pourquoi vous proposez que le membre national d’Eurojust puisse formuler des suggestions d’actes d’enquêtes. Cela augmenterait incontestablement ses capacités en tant que membre d’Eurojust tout en apportant de la sécurité juridique aux actes dont il serait appelé à être à l’origine.
Le Gouvernement partage cette analyse et soutient cette proposition. Il reviendra bien entendu au Sénat de décider du sort qui doit lui être réservé.
Par ailleurs, nous introduisons des dispositions tendant à l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux décisions pénales, sur le fondement des principes définis par la Cour européenne des droits de l’homme, que la France respecte déjà : reconnaissance mutuelle des décisions pénales y compris en l’absence de la personne mise en cause, reconnaissance mutuelle des décisions en matière de transfèrements.
Il nous restera encore trois instruments à transposer avant décembre 2014. L’un concerne la lutte contre le racisme et la xénophobie, les deux autres portent sur la reconnaissance mutuelle en matière de décisions de justice s’agissant de la probation, d’une part, et de la privation de liberté antérieure au jugement, c’est-à-dire de la détention provisoire, d’autre part.
Outre la transposition d’instruments juridiques, ce projet de loi comporte des adaptations d’instruments internationaux émanant du Conseil de l’Europe et de l’Organisation des Nations unies. Trois d’entre elles sont particulièrement importantes.
La première concerne les disparitions forcées, visées par la convention des Nations unies de décembre 2006.
La deuxième a trait à la procédure de remise entre l’Union européenne, d’une part, et la République d’Islande et le Royaume de Norvège, d’autre part, conformément à l’accord du 28 juin 2006.
La troisième porte sur la très importante convention du Conseil de l’Europe signée à Istanbul le 11 mai 2011, qu’évoquera dans un instant Mme Vallaud-Belkacem.
Concernant les disparitions forcées, nous aboutissons, au terme d’un combat de vingt-cinq ans dans lequel la France a été extrêmement active, essentiellement grâce aux initiatives et à la forte mobilisation de M. l’ambassadeur Bernard Kessedjian, dont je tiens à saluer ici la mémoire et qui avait élaboré une proposition d’instrument normatif relatif à la protection des personnes contre les disparitions forcées.
Cette adaptation vise d’abord à définir précisément les disparitions forcées. Jusqu’à présent, cette définition était liée aux stipulations de l’article 7 du traité de Rome de juillet 1998 portant statut de la Cour pénale internationale, mais il est également important de prendre en compte les disparitions forcées ne relevant pas des crimes contre l’humanité et, par conséquent, de définir la prescription et les conditions dans lesquelles la compétence quasi universelle de nos juridictions pourra jouer.
Concernant ensuite la procédure de remise entre les États membres de l’Union européenne et l’Islande et la Norvège, celle-ci est assez proche du mandat d’arrêt européen mais s’en distingue par deux points.
D’une part, la remise de nationaux n’est pas autorisée, comme le prévoient déjà les procédures d’extradition.
D’autre part, la règle de double incrimination est assortie de dérogations pour six types d’infractions particulièrement graves, à savoir le terrorisme, le trafic de stupéfiants, l’homicide volontaire, l’enlèvement et la séquestration, la prise d’otage, les coups et blessures graves, le viol.
Enfin, je laisse le soin à Mme la ministre des droits des femmes de vous parler plus amplement de la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, signée à Istanbul le 11 mai 2011. Il faut savoir que l’essentiel des dispositions de cette convention figurent déjà dans notre législation pénale, qui sanctionne les violences physiques, les violences psychologiques et sexuelles, les mariages forcés, les mutilations sexuelles, la stérilisation forcée, l’interruption volontaire de grossesse sans consentement. Toutefois, la convention du Conseil de l’Europe comporte d’autres incriminations, qu’il convient de transposer.
Comme je vous l’ai indiqué, l’Assemblée nationale a introduit une définition de l’esclavage et de la servitude, qui manque actuellement dans notre code pénal.
Cependant, ainsi que je l’ai souligné devant les députés, il est important que la définition d’une telle incrimination soit la plus compatible possible avec les engagements de la France en tant que partie à, notamment, la convention des Nations unies relative à l’esclavage de 1926, dont la définition de l’esclavage a été reprise par la convention relative à l’abolition de l’esclavage de 1956.
Aux termes des articles 212-1 et 212-2 du code pénal, la France punit le génocide et les autres crimes contre l’humanité, parmi lesquels l’esclavage. Cependant, il s’agit en l’occurrence de l’esclavage pratiqué de façon collective et systématique, et non par des personnes physiques se livrant à l’enlèvement et au commerce d’êtres humains, débouchant sur des abus sexuels, du proxénétisme, l’obligation de s’adonner à la mendicité, des brutalités et des violences diverses. La tradition juridique française était de punir ces effets de l’esclavage. De fait, aucune définition de l’esclavage ni de la servitude n’existe en droit français, alors que l’instrument juridique que le projet de loi tend à transposer évoque très précisément l’un et l’autre.
Les échanges que nous avons eus, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, nous amènent à considérer qu’il faut réfléchir à une définition de l’esclavage. Simplement, nous voulons lui conférer la plus grande sécurité juridique. Il n’y a pas, fort heureusement, de vide juridique en la matière, puisque notre législation permet déjà de punir tous les effets de la réduction en esclavage, mais il s’agit ici d’une incrimination générique plus globale, qui vise, outre ceux-ci, des éléments qualitatifs supplémentaires, tels que l’atteinte à la dignité de la victime et à sa liberté.
L’Assemblée nationale a souhaité maintenir la définition de l’esclavage et de la servitude qu’elle avait élaborée, mais, comme je l’ai dit devant les députés, il me paraît nécessaire de prendre le temps de la réflexion. Je crois que M. le rapporteur partage cette analyse.
Je m’engage à créer un groupe de travail sur ce sujet, qui serait composé de parlementaires, de représentants d’associations et d’ONG, ainsi que d’experts, provenant notamment de la direction des affaires criminelles et des grâces de la Chancellerie. Je mettrai à sa disposition la logistique, la documentation et les moyens matériels propres à lui permettre de travailler dans les meilleures conditions à l’élaboration d’une définition précise, compatible avec nos engagements internationaux et, surtout, d’une grande sécurité juridique. Je n’ai pas identifié de véhicule législatif de nature à permettre au Gouvernement d’introduire, dans un avenir proche, la définition de l’esclavage et de la servitude qui résultera de la réflexion de ce groupe de travail, mais rien n’empêche le Sénat ou l’Assemblée nationale de prendre une initiative à cette fin. Je m’engage par avance devant vous à la soutenir.
En conclusion, le travail accompli par la commission des lois du Sénat sous la houlette de son rapporteur me paraît améliorer le texte de façon substantielle et j’approuve la rédaction issue de ce travail. §
Monsieur le président, monsieur le président de la commission, madame, monsieur les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi que vient de vous présenter Mme la garde des sceaux n’est pas, vous l’aurez compris, une succession d’ajustements techniques. Il fait progresser très concrètement la réponse que les pouvoirs publics apportent aux victimes dans de nombreux domaines.
En premier lieu, ce projet de loi tend à renforcer la lutte contre la traite des êtres humains dans toutes ses dimensions, en élargissant sa définition et en retenant plusieurs conditions alternatives, et non plus cumulatives, constitutives de l’infraction. De plus, le prélèvement d’organe, l’esclavage, le travail forcé, la servitude seront désormais visés par la lutte contre la traite des êtres humains.
Au-delà du respect des engagements de la France et de la nécessaire réaction aux condamnations prononcées par la Cour européenne des droits de l’homme, il s’agit, au travers de ce texte, de se donner les moyens de mieux lutter contre la traite des êtres humains.
J’ai rencontré ce matin les associations membres du dispositif national d’accueil et de protection des victimes de la traite des êtres humains, le réseau Ac.Sé, qui assure la sécurité des anciennes victimes de la traite. C’est une réalité absolument dramatique, qui évolue vite, au rythme des épisodes géopolitiques. Elle prend sur notre territoire des formes très diverses et souvent difficiles à appréhender. La lutte contre la traite des êtres humains appelle une mobilisation interministérielle et, au-delà, une action conjointe avec les partenaires associatifs et territoriaux.
Dans cette perspective, nous avons mis en place la mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains, la MIPROF, qui se consacrera totalement à ce chantier. Elle est chargée d’élaborer, pour le mois d’octobre prochain, un plan gouvernemental de lutte contre la traite des êtres humains, faisant écho aux recommandations du Conseil de l’Europe. Ce travail, je le sais, est attendu par les associations concernées et les partenaires étrangers de la France. La création de cette mission interministérielle, composée d’experts issus des différentes administrations concernées, marquera un changement de rythme et de méthode.
En deuxième lieu, le renforcement de la coopération judiciaire avec Eurojust permettra de mieux lutter contre la criminalité transfrontalière, notamment contre la traite des êtres humains. Mme Taubira l’a dit, nous sommes déterminés à nous donner les moyens de barrer la route à ces réseaux.
En troisième lieu, ce projet de loi permettra aux justiciables de bénéficier d’une procédure judiciaire compréhensible dans leur langue, grâce à de nouvelles obligations de traduction des pièces.
En quatrième lieu, ce texte renforcera la lutte contre les agressions sexuelles sur mineurs, y compris les simples tentatives, ce qui n’était pas le cas auparavant, et alourdira les peines encourues. Il renforcera également la lutte contre la pédopornographie : les faits seront mieux sanctionnés.
Enfin, et je m’attarderai davantage sur ce point, le projet de loi vise à adapter notre droit pénal à la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, signée à Istanbul le 11 mai 2011 et qui marque une étape importante dans l’histoire des droits des femmes.
J’ai présenté voilà quelques jours en conseil des ministres le projet de loi de ratification de cette convention, à laquelle notre droit n’est pour l’heure pas tout à fait conforme.
Le champ de cette convention couvre un ensemble très large de violences faites aux femmes : violences sexuelles, violences physiques et psychologiques, harcèlement, mariages forcés, mutilations ou encore « crimes d’honneur ».
Cette convention prend acte d’une réalité fondamentale pour le mouvement de lutte contre les violences faites aux femmes : il y a un continuum des violences sexistes, qui commence avec les stéréotypes à l’origine des inégalités entre les hommes et les femmes et se prolonge, dans son aspect le plus dramatique, avec les violences, voire les crimes.
Ce continuum des violences appelle, en retour, une réponse globale des pouvoirs publics. La convention y fait écho à travers la prévention, la protection, l’aide aux victimes, la poursuite, la sanction et le suivi des auteurs des violences.
Notre droit pénal est déjà largement conforme aux obligations qui figurent dans cette convention, mais il ne l’est pas encore totalement. Or nous devons être exemplaires à cet égard.
La France a voulu que ce texte constitue un levier formidable, y compris au-delà des frontières du Conseil de l’Europe. Nous avons par exemple invité les pays francophones à y adhérer, à l’occasion du dernier Forum mondial des femmes francophones, organisé par la France en mars dernier.
Le présent projet de loi nous permettra de faire progresser la lutte contre les mariages forcés.
Ainsi, nous introduisons un nouveau délit dans le code pénal, constitué par le fait de tromper quelqu’un pour l’emmener à l’étranger et lui faire subir un mariage forcé.
Le droit français nous donne d’ores et déjà toutes les armes utiles pour lutter contre les mariages forcés sur notre territoire, mais, on le sait bien, c’est à l’étranger que les femmes vivant en France subissent le plus souvent ces violences. Avec Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée chargée des Français de l’étranger, nous avons décidé de mobiliser les postes consulaires sur cette question, afin de prévenir les mariages forcés et d’informer et d’aider les victimes. L’introduction de ce nouveau délit permettra de mieux lutter contre ces pratiques.
Au travers de ce projet de loi, nous faisons aussi avancer le combat contre l’excision.
La France avait connu un certain nombre de progrès dans ce domaine, mais nous avons décidé d’aller plus loin. Désormais, le fait d’inciter un mineur à subir une mutilation sexuelle sera en lui-même constitutif d’un délit.
En outre, grâce à un amendement présenté par la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes de l’Assemblée nationale, le fait d’inciter à faire subir à un mineur une mutilation sexuelle sera également constitutif d’un délit.
Nous pouvons être fiers du rôle de pionnier joué par notre pays en matière de lutte contre les mutilations sexuelles, et nous réjouir de la mobilisation de la communauté internationale, aujourd’hui unie dans ce combat : on l’a vu le 20 décembre dernier, lorsque l’assemblée générale de l’ONU s’est prononcée à l’unanimité en faveur de l’abolition de la pratique des mutilations sexuelles. On n’en compte pas moins, de par le monde, entre 100 millions et 140 millions de victimes de l’excision, dont 50 000 en France. Cela justifie largement l’introduction de ces deux nouvelles incriminations pénales.
Au-delà, il faut prévenir et détecter de telles mutilations. À cet égard, je souligne que nous avons lancé un vaste plan de formation à l’intention de celles et ceux qui sont au contact des victimes, afin de leur permettre de mieux déceler ce type de violences.
Parallèlement, la sensibilisation des populations susceptibles d’être concernées est également une réponse essentielle. Nous y travaillons avec les associations du collectif « Excision, parlons-en ! », qui préparent une mobilisation nationale à l’occasion de la journée internationale contre les mutilations sexuelles, le 6 février prochain.
Enfin, nous voulons pouvoir dire aux victimes que leur souffrance n’est pas nécessairement définitive, lorsque mutilation sexuelle il y a eu. Le protocole chirurgical de réparation, élaboré grâce à des médecins engagés, est désormais intégré à la nomenclature de l’assurance maladie. C’est là un progrès considérable pour les victimes.
D’autres dispositions issues de la convention d’Istanbul seront introduites dans notre droit via le texte qui vous est présenté aujourd’hui, mesdames, messieurs les sénateurs : je pense à la pénalisation de la tentative d’avortement forcé, d’une part, et à l’information des victimes se trouvant en danger du fait de l’évasion de l’auteur des violences qu’elles ont subies, d’autre part. Il s’agissait, là encore, d’une faille de notre droit.
Nous estimons donc que ce texte améliorera très concrètement notre droit et renforcera nos outils en matière de lutte contre les violences faites aux femmes et de protection des victimes. Je sais que la Haute Assemblée est très attentive à ces questions et je tenais à réaffirmer devant elle mon engagement, au côté de Mme la garde des sceaux. §
Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, cette après-midi est consacrée à des questions de droit pénal et de procédure pénale de portée internationale. Nous examinerons dans le détail les dispositions que nous allons très probablement adopter. Toutefois, si, suivant une expression courante outre-Atlantique, on commence par regarder « l’image plus large », on constate que le texte dont nous débattons s’inscrit dans un mouvement profond et constructif.
La volonté d’agir contre les criminalités transfrontalières et le refus de l’impunité, qui, du fait de la mondialisation, profite aux plus habiles et aux plus cyniques, inspirent une coopération croissante modelant progressivement nos systèmes judiciaires, notamment notre droit pénal.
Sur ce sujet, je risquerai brièvement une réflexion plus globale : via ce travail conventionnel de négociation et d’échange, on peut noter sans déplaisir le rapprochement des principes et des règles qui encadrent nos législations pénales. Ce mouvement est d’autant plus remarquable que tout droit pénal, issu des tréfonds de l’histoire, vient de traditions souvent très connotées et pour partie archaïques.
À mon sens, ce rapprochement de principes et de règles, de plus en plus unifiés au niveau mondial, autour du principe de la présomption d’innocence et de l’obligation de prouver la culpabilité traduit l’avancée patiente mais significative d’un universalisme humaniste. On aurait tort de ne pas le remarquer !
Je souligne à cet égard, toujours en prenant un peu de distance, que ce texte a connu une maturation progressive. De fait, le présent projet de loi est issu de multiples sources internationales, que Mme la garde des sceaux a exposées avec beaucoup d’érudition. Il s’agit notamment de directives de l’Union européenne et d’anciennes décisions-cadres. En effet, le présent texte additionne des engagements qui s’échelonnent sur une bonne demi-douzaine d’années. Or, jusqu’à l’entrée en vigueur des nouveaux traités européens, en 2010, il n’existait pas de directives européennes en matière judiciaire, mais simplement des décisions-cadres. Cette évolution est l’un des progrès de la démocratie en Europe : en accédant au statut de directives, ces mesures sont désormais le fruit d’un dialogue avec le Parlement européen.
D’autres conventions internationales sont transposées. Certaines ont été votées dans le cadre du Conseil de l’Europe. D’autres, plus larges, ont été adoptées au niveau des Nations unies. S’y ajoutent même des textes relevant d’un dispositif un peu périphérique de l’Union européenne : ces documents nous rappellent que, aux côtés de cette dernière, il y a l’Espace économique européen, auquel participent certains pays qui, s’ils acceptent d’appliquer nos règles, ne souhaitent pas nécessairement prendre part à nos partages de souveraineté. C’est le cas de l’Islande et de la Norvège, signataires de la convention en question.
Enfin, le présent texte prend en compte plusieurs arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme, ainsi qu’un jugement de la Cour de justice de l’Union européenne.
Ces dispositions se traduisent par un grand nombre de modifications du code pénal et du code de procédure pénale. Il est explicable et légitime que ce travail ait exigé du temps et de la réflexion de la part des services du ministère de la justice. Ce dernier n’a d’ailleurs pas manqué de mener de larges concertations avec les partenaires de l’élaboration du droit.
De ce fait, la maturation du présent texte a traversé une alternance politique : le gouvernement d’aujourd’hui a déposé un projet de loi largement travaillé par les gouvernements d’hier. C’est là un signe de continuité de l’État en matière de construction de notre droit pénal, contribuant à mettre en application nos engagements internationaux en général et européens en particulier. Cette occurrence relève, à mon sens, d’un état d’esprit républicain qu’il faut saluer.
Mes chers collègues, cette réalité n’est sans doute pas étrangère à l’esprit de concorde qui a animé notre commission des lois pour examiner les dispositions en discussion, et qui s’était déjà fait jour à l’Assemblée nationale. Notre débat sera donc sans doute tout à fait constructif et apaisé.
En partie grâce à ce temps de préparation et d’assimilation, le texte dont nous débattons est d’une très bonne qualité juridique. Il a fait l’objet d’apports positifs, eux-mêmes bien travaillés, par l’Assemblée nationale. En conséquence, la commission vous propose un accord complet, dès cette première lecture, sur quinze des articles en discussion.
Toutefois, madame la garde des sceaux, devant vous et vos collaborateurs, je me risquerai à une courte réflexion sur la préparation des textes de cette nature.
Au fond, toutes les dispositions visées consistent à modifier, de manière assez abondante, des articles du code pénal et du code de procédure pénale. Est-il logique que l’ordre des modifications que nous examinons suive celui résultant des sources internationales qui les déclenchent ? Ne serait-il pas plus logique et plus pratique d’examiner les dispositions du code pénal dans l’ordre où elles doivent intervenir en son sein, puis les dispositions du code de procédure pénale selon la même méthode ? Nous percevrons sans doute brièvement pendant nos débats que l’ordonnancement auquel aboutira le présent texte lorsqu’il entrera en vigueur – à savoir l’ordre des articles des deux codes – aurait facilité le dialogue législatif.
Cela étant, nous convergeons sur un grand nombre de points. En effet, comme Mmes les ministres l’ont très bien souligné, les dispositions du présent projet de loi vont apporter des progrès tout à fait significatifs à notre droit. Je songe notamment à la traite des êtres humains. Ce domaine, qui faisait déjà l’objet d’une directive, est très fortement marqué par la grande criminalité.
S’y ajoutent les différentes incriminations liées aux violences faites aux femmes. À cet égard, le dispositif de lutte contre les mariages forcés apporte des améliorations substantielles. Je pense également à la lutte contre les abus sexuels visant les enfants, à la pédopornographie et à la provocation aux mutilations sexuelles – les dispositions figurant déjà dans la loi de 1881 se trouvant complétées –, ainsi qu’aux détournements de signes humanitaires. Enfin, pour tenir compte d’une décision du Conseil constitutionnel, le présent texte élimine les termes « inceste » et « incestueux » de notre code pénal.
Toutes ces dispositions forment un ensemble de modifications très substantiel.
Par ailleurs, avant que Mme Blondin ne prenne la parole, je me plais à souligner l’apport très intéressant, quant aux conditions effectives de l’application du droit pénal, des réflexions fournies par notre délégation aux droits des femmes.
En matière de procédure, le corpus dont nous allons débattre est également très riche. Tout d’abord, pour commencer par les éléments les plus globaux, ce projet de loi permet le bon achèvement de la mission des deux tribunaux pénaux internationaux compétents pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda. Ensuite, il contient le nouveau dispositif de coopération pratique au sein d’Eurojust et la reconnaissance mutuelle des jugements rendus par défaut ; au surplus, il vise l’application coopérative des peines au sein de l’Union européenne et les conditions de remise, entre États, d’une personne poursuivie.
D’autres dispositions ont déjà été mentionnées, comme le droit à la traduction et à l’interprétation dans la procédure pénale ou le droit des associations compétentes à se constituer partie civile dans certains contentieux. Le présent texte tire enfin les conséquences de toutes ces modifications dans le champ des compétences pénales extraterritoriales.
Mes chers collègues, vous le constatez, à l’issue de nos débats, nous aurons modifié des dispositions tout à fait essentielles de notre droit.
Pour ma part, en ce début de discussion générale, je me bornerai à relever quatre sujets sur lesquels subsistent des différences d’appréciation, principalement avec l’Assemblée nationale. Ces divergences ne portent pas sur des considérations politiques de fond ; elles traduisent seulement deux manières différentes de rechercher la clarté et l’efficacité du droit.
Le premier point a été évoqué par Mme la garde des sceaux en des termes auxquels je souscris pleinement : il s’agit de la définition pénale, que nous devons introduire dans notre droit, de ce que j’appellerai la réduction en esclavage ; car l’esclavage est un état, et ce qui est criminel, c’est évidemment le fait d’y contraindre autrui.
Concernant cet enjeu, qui soulève plusieurs questions, nous ne pouvons qu’être flattés par l’attitude de l’Assemblée nationale. En effet, les députés ont proposé une première définition, en reconnaissant qu’elle n’était pas tout à fait achevée, et, compte tenu des scrupules qu’un tel sujet exige nécessairement, ils ont conclu en ces termes : « Nos collègues sénateurs aboutiront à une définition tout à fait parfaite. » Un sentiment confus me pousse hélas à craindre qu’ils ne nous aient surestimés ! §
En effet, à mon sens, il n’était pas possible de résoudre l’ensemble des problèmes liés à ce travail de définition dans les délais qui nous étaient fixés.
Mme la garde des sceaux a très bien indiqué quel était l’enjeu central : la convention de 1926, dont les termes ont été reproduits dans la convention de 1956, prenait pour cibles des États ou des sociétés dans lesquels le droit organisait l’esclavage.
Ces deux textes partent d’une définition juridique, en considérant l’esclavage comme la situation dans laquelle des êtres humains font l’objet d’un droit de propriété. Or le sujet auquel nous sommes confrontés aujourd’hui n’est plus du tout le même : exceptés les cas où cette question se pose encore –car le phénomène persiste malheureusement dans quelques sociétés –, la situation face à laquelle sont placés nos tribunaux et nos juridictions, c’est ce que j’appellerai l’esclavage privé.
De surcroît, en travaillant très rapidement sur ce point –et, je le répète, de manière infructueuse –, j’ai constaté qu’un malencontreux hasard de traduction avait fait apparaître, dans les conventions internationales, une distinction entre « esclavage » et « servitude ». Or cette différence n’existe pas en français : dans notre langue, ces deux termes désignent un même phénomène. §La réalité que reconnaissait l’ancien droit français et qui subsiste dans notre langue, à côté de l’esclavage, c’était la condition de serf, qui était nommée le servage.
Ce terme nous renvoie à un événement resté dans notre mémoire historique : l’accomplissement du tsar Alexandre II, abolissant le servage en Russie en 1861, la France ne l’ayant quant à elle aboli qu’à la fin de l’Ancien Régime.
À mes yeux, ce sujet nécessite encore beaucoup de travail. Il convient en particulier de trancher une question délicate : la réduction en esclavage constitue-t-elle un délit de très haute gravité ou un crime ? Cette qualification emporte de nombreuses conséquences dans notre procédure pénale.
Je n’ai pas un mot à ajouter à la description, proposée par Mme la garde des sceaux, du groupe de travail que nous devrions constituer en la matière : comme les choses fonctionnent particulièrement bien en ces lieux, Mme Taubira a répondu par avance à la question que je m’apprêtais à lui poser ! §À mon sens, c’est exactement en ces termes qu’il convient d’organiser les travaux que souhaite le Gouvernement.
Mon deuxième point touchera à l’anticipation du rôle du représentant français, devenu le membre français, au sein d’Eurojust. Il est très compréhensible que nos collègues députés aient souhaité manifester l’engagement volontaire de la France à intensifier et à approfondir la coopération judiciaire à l’intérieur de l’Union européenne. Il n’est pas nouveau que nous soyons une force d’avancée dans ce domaine.
Toutefois, alors que je crois comprendre que le Gouvernement est en train de mener une démarche fructueuse et rassembleuse pour engager le développement d’une application concrète de l’objectif du parquet européen, cela nous semble constituer une sorte de contournement que de chercher à donner de premiers pouvoirs du parquet à ce membre national d’Eurojust, autorité judiciaire qui n’est pas membre du parquet.
Comme l’a laissé entendre Mme la garde des sceaux, je plaiderai donc tout à l'heure pour que nous ne maintenions pas cette disposition, et j’essaierai de convaincre nos amis députés qu’il s’agit d’une anticipation un peu incertaine, dans la mesure où notre loi organique ― l’ordonnance portant loi organique relative au statut de la magistrature ― fixe des cadres extrêmement stricts. Par définition, sa valeur est supra-législative, et il ne me paraît pas possible de conférer par la loi ordinaire des pouvoirs d’autorité sur les membres du parquet à une autorité qui n’est pas placée dans la chaîne hiérarchique définie par la loi organique. Il me semble donc qu’il faut différer en la matière.
Le troisième point sur lequel notre vision diffère quelque peu relève d’une question de compétence juridique. Il nous a semblé, en relisant les textes, qu’à l’égard du droit à la traduction et à l’interprétation, le Gouvernement avait renvoyé vers le domaine réglementaire des dispositions constituant des garanties individuelles essentielles. Nous nous permettrons donc de proposer de les faire remonter au niveau législatif, dont elles nous semblent relever.
Enfin, le quatrième et dernier point de divergence avec nos amis députés concerne la suppression de l’incrimination d’offense au chef de l’État dans le code pénal. Chacun a le droit intellectuel de souhaiter que le chef de l’État soit offensé librement et gratuitement, nous pouvons tout à fait comprendre cette conception de la société. Je crois cependant que le facteur déterminant du choix de l’Assemblée nationale se trouvait dans la décision de mars dernier de la Cour européenne des droits de l'homme déclarant contraire aux principes du procès équitable la condamnation d’un individu qui avait proféré des expressions fort peu obligeantes à l’égard du chef de l’État. Or cette juridiction a considéré non pas que l’incrimination d’offense au chef de l’État était contraire à la convention européenne des droits de l'homme, mais que, en l’espèce, la condamnation qui avait été opposée à cette personne sortait des limites raisonnables de la sanction pénale.
Après en avoir débattu, la commission des lois a donc préféré rétablir cette incrimination, le délit d’offense au chef de l’État. Je crois parler au nom de tous nos collègues qui ont souhaité ce rétablissement, dont je n’étais pas, en disant que la commission était motivée par la préservation institutionnelle de la fonction de chef de l’État, alors que les sanctions pénales de substitution auxquelles on pouvait songer, à savoir l’injure, ne visaient que les atteintes à la personne, et non à la fonction du chef de l’État.
Par conséquent, la commission des lois proposera au Sénat de rétablir cette incrimination.
Pour conclure, je relèverai deux interrogations.
Tout d’abord, faut-il finalement introduire dans notre droit pénal positif l'infraction de disparition forcée à la charge d’organisations politiques prises comme distinctes des États ? Je dois dire que, en tant que rapporteur, j’ai véritablement hésité sur ce point, dans la mesure où, compte tenu du caractère odieux et contraire à tous les droits de l'homme de la disparition forcée, on veut être certain que les victimes bénéficient d’un dispositif tout à fait efficace contre les différents auteurs de ce crime, qui ne sont pas forcément des États.
Cependant, je crois qu’il faut toujours se défier de surajouter des dispositions pénales portant sur les mêmes faits. Or, après examen attentif, il nous est apparu que les autres dispositions criminelles qui existent aujourd’hui, notamment celles qui visent les actions de terrorisme, permettent de poursuivre effectivement les auteurs de disparitions forcées ne relevant pas de structures étatiques.
Ma seconde interrogation concerne l’efficacité de la lutte contre la traite. Que pouvez-vous nous dire, mesdames les ministres, de la protection effective des témoins et des victimes qui aident à confondre les filières de traite et d’exploitation des personnes ? Cette question est très difficile, parce qu’elle pénètre très profondément dans la vie concrète, dans le soutien social et dans l’accompagnement psychologique ; elle a des conséquences budgétaires non négligeables. Certains des États qui sont en avance sur nous dans ce domaine ont d’ailleurs été obligés d’en rabattre beaucoup, pour des raisons de rareté budgétaire. Nous ne proposons donc pas du tout de créer des obligations à l’État sans savoir s’il est en mesure de les remplir, mais il nous semble que ce sujet doit rester ouvert.
Mes chers collègues, comme vous le voyez, de grands débats se présentent devant nous à l’occasion de l’examen d’un texte aussi concret et détaillé que le projet de loi dont nous sommes saisis.
Il est vraisemblable que, à un moment ou un autre de l’après-midi, nous entendions l’expression : « c’est une disposition technique ». En tant que vieux législateur, j’ai tendance à combattre cette utilisation de l’adjectif « technique ». Rien de ce que nous faisons ici n’est technique, si du moins ce terme vise à affirmer que l’élément qu’il qualifie est dépourvu de sens politique ou éthique. Nous sommes comptables, ici, d’un souci d’exactitude et de netteté. À mon sens, il ne faut donc pas se laisser aller à « déconsidérer » comme technique la recherche d’un droit qui soit exact et fixé.
Je suis persuadé que les multiples échanges que nous allons avoir nous autoriseront le constat satisfaisant que la législation française – le droit pénal et de procédure pénale – est déjà extrêmement bien préparée, dans tous les domaines que nous allons aborder. Nous n’avons finalement à introduire que des transpositions à la marge, car nos dispositions sont déjà parmi les plus complètes et les plus rigoureuses dans la garantie des droits.
Cela permettra sans nul doute une large convergence entre nous et avec le Gouvernement, dans l’accomplissement d’un travail législatif que j’espère attentif et soigneux. §
La parole est à Mme la rapporteur de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes.
Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes a produit de nombreux travaux relatifs à la traite des êtres humains et aux violences domestiques, deux fléaux mondiaux qui touchent particulièrement les femmes. À la demande de la commission des lois, nous avons donc examiné le chapitre Ier du présent projet de loi, qui transpose la directive du 5 avril 2011 concernant la traite des êtres humains, et le chapitre XI, qui adapte la législation française à la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, signée à Istanbul le 11 mai 2011.
Les modifications de notre droit interne induites par ces textes internationaux comportent des avancées qui doivent avoir pour effet, en assouplissant et en élargissant la définition des faits en cause, de faciliter leur établissement par les services judiciaires et, par voie de conséquence, d’améliorer leur prévention et leur répression. Elles faciliteront ainsi la coopération internationale, qui est fondamentale sur ces sujets, de nombreux États se dotant du même ordonnancement juridique en ces matières.
Les seize recommandations de la délégation s’inscrivent dans cette double logique.
La répression de la traite des êtres humains rencontre des difficultés de plusieurs natures, certaines matérielles, d’autres juridiques. La coopération progresse au sein de l’Union européenne, en particulier avec la Roumanie et la Bulgarie, qui sont les États membres principalement concernés, mais d’autres hésitent encore ou ne coopèrent pas.
Le principal problème juridique rencontré est celui de l’établissement de la preuve de l’infraction par les enquêteurs. L’infraction de traite des êtres humains n’est retenue que dans à peu près 10 % des cas où elle pourrait l’être, les services préférant recourir à la seule qualification de proxénétisme, plus facile à établir. La directive et le projet de loi tendent à remédier à ces lacunes.
Concernant cette partie du projet de loi, la délégation fait des recommandations dans trois directions, afin de renforcer l’efficacité de la lutte contre la traite des êtres humains.
Nous recommandons, tout d’abord, de considérer qu’il y a traite d’êtres humains dès lors que des personnes font l’objet d’une exploitation, au profit de celui qui les exploite ou d’un tiers.
Ensuite, nous suggérons une mobilisation des différents services publics concernés afin que cette lutte devienne une priorité de notre politique pénale. Nous insistons sur la formation des personnels. Nous pensons également qu’une implication forte des magistrats financiers est nécessaire, car l’action la plus efficace est celle qui consiste à confisquer les avoirs et les biens des trafiquants. La mobilisation doit aussi être diplomatique, pour amener tous les États concernés à coopérer, car cette lutte est d’échelle mondiale.
Enfin, nous nous tournons vers les victimes, généralement étrangères et en situation irrégulière, souvent contraintes elles-mêmes à commettre des actes de délinquance. Elles doivent être bien protégées, dans leur intérêt, certes, mais aussi afin d’obtenir leur témoignage.
L’arsenal répressif contre les violences faites aux femmes est de plus en plus complet en France. La véritable innovation issue de l’application de la convention d’Istanbul est l’incrimination de la tromperie en vue d’envoyer une personne à l’étranger pour lui faire subir un mariage forcé.
La convention d’Istanbul emporte par ailleurs deux autres changements : l’introduction de l’incrimination de la tentative d’interruption de grossesse non souhaitée et de celle de l’incitation d’une mineure à subir une mutilation sexuelle non suivie d’effet.
Depuis plusieurs années, la lutte contre les violences faites aux femmes est une priorité de nos politiques pénales, donc de l’action des parquets et de la Chancellerie. Les condamnations pour violences conjugales ont ainsi augmenté de plus de 80 % entre 2004 à 2011, ce qui n’est probablement pas imputable, pour l’essentiel, à une hausse du nombre de faits, mais plutôt à une volonté croissante de les révéler et de les réprimer.
La convention d’Istanbul invite également à porter le regard sur un phénomène connu, qui va désormais pouvoir être combattu : l’escroquerie au mariage forcé. Des familles envoient ainsi leurs enfants à l’étranger en les trompant sur le but du voyage. Ces jeunes filles, très majoritairement binationales, sont ensuite contraintes à un mariage puis bloquées à l’étranger.
Sur cette partie du projet de loi, la délégation propose dix recommandations : quatre ont un caractère général, les six autres portent plus particulièrement sur l’escroquerie au mariage forcé à l’étranger.
Nous demandons que la convention soit rapidement ratifiée ; madame la ministre, vous nous l’avez assuré et nous en sommes très heureux. Nous demandons également qu’un effort soit fait afin de mieux connaître les phénomènes de violences faites aux femmes et de mieux y sensibiliser les services publics, en particulier par le biais d’une formation spécifique, car ce fléau prospère à l’abri des regards de la société.
À propos des mariages forcés à l’étranger, nous recommandons que des initiatives diplomatiques soient prises à l’égard des quelques États où ces mariages concernant de jeunes françaises sont le plus fréquents.
Nous formulons en outre une série de recommandations visant à ce qu’une appréciation pragmatique de cette tromperie soit adoptée. En effet, certains jeunes sont envoyés frauduleusement à l’étranger pour d’autres raisons que le mariage, par exemple pour les faire changer d’orientation sexuelle. Ils peuvent aussi parfois consentir initialement au mariage, mais subir ensuite toutes sortes de violences.
Nos dernières recommandations sont davantage tournées vers les victimes. Nous proposons ainsi qu’une interdiction de sortie du territoire puisse être prononcée à l’égard d’une personne risquant de subir un mariage forcé à l’étranger. Nous souhaitons que les familles qui empêchent leurs proches de revenir en France puissent aussi être inquiétées par la justice. Nous proposons que nos postes diplomatiques, en particulier les consulats dans les pays concernés, soient informés et sensibilisés à cette question et agissent pour protéger les victimes et faciliter leur retour.
Mesdames les ministres, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est soumis aujourd’hui comporte d’indéniables avancées, à commencer par la traduction de la volonté commune de nombreux pays européens de marcher du même pas dans la lutte contre la traite des êtres humains et les violences touchant les femmes. Néanmoins, nous le savons, la loi ne fait pas tout, les criminels savent s’adapter et beaucoup – pour ne pas dire tout – dépend de l’action concrète, sur le terrain, de nos policiers, gendarmes et magistrats, ainsi que des services publics pouvant être amenés à travailler avec ces derniers sur ces sujets. Tout ce qui peut leur faciliter la tâche est bienvenu, et toute initiative en vue d’une meilleure coopération internationale est nécessaire.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste . – M. Jean Boyer applaudit également.
Monsieur le président, madame la garde des sceaux, madame la ministre, mes chers collègues, chacun sait ici que la France, pourtant l’un des pays fondateurs de l’Europe, ne s’illustre guère par son zèle à transposer dans les meilleurs délais les directives européennes, bien qu’il s’agisse désormais d’une obligation non seulement communautaire, mais aussi constitutionnelle – depuis la décision du Conseil constitutionnel du 10 juin 2004.
Toutefois, selon le tableau de transposition par les États membres des directives européennes sur le marché unique publié par la Commission européenne en février dernier, la France a enregistré de nets progrès en la matière. En effet, notre déficit de transposition s’est considérablement amélioré, pour atteindre un plancher de 0, 3 %, ce qui nous place, enfin, au-dessus de la moyenne européenne. Néanmoins, la France fait toujours l’objet de cinquante-deux procédures d’infraction, quatre États de l’Union européenne seulement étant plus mal placés que nous à cet égard.
Ces quelques statistiques illustrent l’importance de ce projet de loi portant transposition de diverses directives et de divers engagements internationaux dans le domaine de la justice, essentiel dans un État de droit.
Le traité de Lisbonne a communautarisé les questions relatives à la justice pénale, qui relèvent aujourd’hui de la procédure législative européenne ordinaire. Notre groupe, profondément attaché à la construction européenne, se félicite naturellement de ce renforcement de l’intégration communautaire, qui ouvre la voie, certes appelée à être encore longue et ardue, à la construction d’un parquet européen et à l’avènement d’un espace commun des droits et des libertés, lesquels participent de la nécessaire construction politique de l’Union européenne.
Le débat d’aujourd’hui constitue la première discussion, par le Parlement français, d’un texte portant précisément sur la construction de l’espace pénal européen. À ce propos, le travail conjoint des services de la Chancellerie et du Secrétariat général des affaires européennes, grâce auquel notre retard en matière de transposition a, en partie, été résorbé, doit être souligné.
Nous sommes ici au cœur d’une question fondamentale, qui touche à notre souveraineté, celle de la nécessaire articulation des instruments de protection des libertés entre ordre juridique interne et ordre juridique international au sens le plus large. Le monisme de notre système juridique, posé par le Préambule de la Constitution de 1946, nous invite à trouver la meilleure articulation entre ces deux sources de droit, parfois en tension, afin de pouvoir mettre en place une coopération efficace pour appréhender des phénomènes de criminalité transnationale de plus en plus complexes.
En outre, la coopération entre juridictions suprêmes est aujourd’hui une réalité tangible. Les réticences longtemps exprimées par le Conseil d’État pour recourir à la question préjudicielle devant la Cour de justice des communautés européennes, devenue aujourd’hui la Cour de justice de l’Union européenne, ont été levées, tandis que le Conseil constitutionnel a pour la première fois, le 4 avril dernier, opéré un tel renvoi, signe supplémentaire de l’intégration du droit communautaire à notre ordre constitutionnel français.
Pour autant, le compromis – parfois a minima – est le plus souvent la règle en matière d’harmonisation des standards de droit, ce qu’expliquent aisément les différences de systèmes juridiques. Il importe cependant, en matière de droit pénal, qu’il ne débouche pas sur une coquille vide, malgré l’application du principe de subsidiarité. Nous ne connaissons que trop bien ce type de règles minimales, qui laissent en réalité les coudées franches aux États membres, en matière par exemple d’harmonisation fiscale ou de droits sociaux. Restons toutefois optimistes, l’autorité persuasive des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme dans l’ensemble des États du Conseil de l’Europe ayant permis, au fil des années, de rapprocher les standards de protection des droits et des libertés.
En l’espèce, les règles que nous avons à transposer représentent, pour nous, une réelle avancée. Elles viennent même combler des vides de notre droit. Je pense en particulier aux conséquences des arrêts Siliadin c/ France et C.N. et V. c/ France, respectivement rendus par la Cour européenne des droits de l’homme en 2005 et en 2012, qui relevaient le caractère non opératoire de notre droit en matière de répression des crimes d’esclavage et de servitude. Cela étant, nous approuvons la position de M. le rapporteur, qui a préféré approfondir le travail de concertation avec les organisations non gouvernementales et les praticiens du droit sur cette question, position relayée par Mme la garde des sceaux.
En tout état de cause, l’ensemble des textes que nous allons introduire dans notre droit marquent les progrès constants des institutions internationales et communautaires vers un renforcement des règles de protection des droits et des libertés.
Il en est ainsi de la directive du 20 octobre 2010 relative au droit à l’interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales, qui introduit une obligation qui ne figurait pas encore dans notre code pénal : l’obligation d’interprétation et de traduction à tous les stades de la procédure.
Comme le signalait la rapporteur du Parlement européen, Sarah Ludford, il s’agit d’encourager l’ensemble des États de l’Union européenne à se doter des standards contenus dans la Convention européenne des droits de l’homme. En l’espèce, il faut se féliciter que les députés européens aient obtenu la limitation, par principe, du recours à des traductions partielles ou orales, le suspect ne pouvant, par ailleurs, renoncer à ce droit sans avoir bénéficié d’un conseil juridique préalable.
La directive du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 relative à la lutte contre les abus sexuels et l’exploitation sexuelle des enfants, ainsi que la pédopornographie, vient quant à elle pénaliser plus fortement la sollicitation en ligne d’enfants à des fins sexuelles par un adulte et ajouter d’importantes dispositions en matière de protection des victimes : elle élargit la notion d’agression sexuelle, porte de sept à dix ans la peine encourue en cas d’agression sexuelle sur un mineur de moins de 15 ans et étend la compétence des juridictions françaises, en cas de proxénétisme aggravé, si l’auteur est un étranger résidant en France. Cette extension du principe de territorialité de la loi est particulièrement bienvenue dans un tel cas de figure. Symétriquement, un aménagement dudit principe est prévu pour le tourisme sexuel dont les victimes sont des enfants, au moyen de l’introduction d’une clause destinée à permettre le jugement extraterritorial des ressortissants. La notion de consultation d’un site pédopornographique, incrimination punie de deux ans d’emprisonnement, est également étendue à l’assistance « en connaissance de cause » à des spectacles pornographiques impliquant la présence d’un enfant ou à la consultation occasionnelle – et non plus habituelle – d’un site si ce dernier est payant. Les peines encourues pour atteinte sexuelle sont, elles aussi, aggravées.
Parallèlement, le projet de loi transpose trois décisions du Conseil : les décisions-cadres du 26 février 2009 et du 27 novembre 2008, ainsi que la décision du 16 décembre 2008.
La décision-cadre du 26 février 2009 vise principalement à fixer des règles de procédure en matière de citation à comparaître, de révision de procès, de recours appropriés et de représentation en justice. Il s’agit de renforcer la protection des personnes, tout en favorisant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux décisions judiciaires émanant d’un État étranger. Cette décision-cadre concerne plus particulièrement le mandat d’arrêt européen et les procédures de remise entre États membres : désormais, ceux-ci ne pourront plus refuser d’exécuter un mandat d’arrêt européen que dans des cas limitativement prévus, au nombre de quatre.
La décision-cadre du 27 novembre 2008 concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements en matière pénale prononçant des peines ou des mesures privatives de liberté aux fins de leur exécution dans l’Union européenne a pour objet de faciliter le mécanisme de transfèrement d’un État membre à un autre des personnes condamnées, en vue d’une meilleure réinsertion. Cette décision, visant à faciliter la réhabilitation sociale des condamnés, concerne un aspect essentiel de la justice, insuffisamment abordé jusqu’alors.
La décision du 16 décembre 2008 relative à l’unité de coopération Eurojust commande une mise en conformité du code pénal. L’adoption du projet de loi permettra que les nouvelles compétences d’Eurojust, notamment en matière de coopération judiciaire avec les pays tiers non membres de l’Union européenne, ainsi que ses pouvoirs en termes d’investigation particulière et d’avis en cas de conflits de compétences et d’accès aux informations contenues dans les divers fichiers, soient introduits dans notre droit national.
Le texte dont nous débattons ne saurait cependant se résumer à ces seuls aspects techniques parfois arides, mais néanmoins éthiques et démocratiques, monsieur le rapporteur ! Je tiens d'ailleurs à saluer votre travail, qui, une fois de plus, a permis d’éclairer utilement le Sénat.
J’évoquerai enfin brièvement l’article 17 bis, tendant à abroger le délit d’offense au Président de la République, qui a été supprimé en commission. Notre groupe, dans sa diversité, n’a jamais été attaché au présidentialisme de la Ve République et a toujours affiché son scepticisme à l’égard du délit prévu par la loi du 29 juillet 1881. La condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’homme, le 14 mars dernier, pour violation de la liberté d’expression a confirmé que cette survivance du crime de lèse-majesté n’avait plus sa place dans un État de droit moderne, du moins tel qu’il existe aujourd'hui.
Néanmoins, comme l’a rappelé le rapporteur, l’abrogation pure et simple de ce délit donnerait paradoxalement au chef de l’État un statut moins protecteur que celui des membres du Gouvernement. Au regard de la réflexion en cours sur le statut juridictionnel du Président de la République, il nous semble plus raisonnable de renvoyer cette question à nos futurs débats.
Madame la garde des sceaux, madame la ministre, mes chers collègues, vous l’aurez compris : le groupe du Rassemblement démocratique social et européen apporte son entier soutien à ce texte. §
Monsieur le président, mesdames les ministres, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l’examen de ce projet de loi intervient dans un contexte de réel désamour de nos concitoyens à l’égard de l’Europe et de ses institutions, ressenties comme des instruments supplémentaires d’austérité, voire de paupérisation, et jugées impuissantes à aider les populations à améliorer leurs conditions de vie.
La discussion du présent texte constitue une belle occasion de montrer au plus grand nombre que l’Europe et la construction de son droit commun peuvent aussi contribuer à renforcer les droits fondamentaux de tous les citoyens européens, ainsi que ceux des ressortissants des pays tiers.
Les écologistes ont toujours revendiqué leur attachement sans faille à la construction européenne et à l’édification nécessaire d’un socle de droits cohérents en matière de justice, mais aussi en matière sociale et environnementale. Ainsi, l’instauration d’un délit général d’atteinte à l’environnement au sein de l’Union européenne ainsi que la création d’un crime d’« écocide » permettraient d’aller vers une Union européenne plus cohérente et plus forte en matière de justice et vers un monde plus solidaire et plus respectueux de l’environnement.
Ce projet de loi n’en montre pas moins une véritable volonté de l’exécutif de rattraper le retard pris par la France en termes de transposition de textes européens. Européenne convaincue, je me réjouis que le texte et les travaux des commissions des lois de l’Assemblée nationale et du Sénat aient pour objet de mettre le droit français en conformité avec la jurisprudence des juridictions européennes.
En janvier 2012, la Cour européenne des droits de l’homme, dans un arrêt Popov contre France, condamnait notre pays pour avoir permis le placement d’enfants en centre de rétention administrative. Interdiction des traitements inhumains et dégradants, droit à la liberté et à la sûreté, droit au respect de la vie familiale : voilà autant de droits fondamentaux que la juridiction européenne considérait comme bafoués par le placement en rétention d’une fillette de 3 ans et d’un bébé. Malheureusement, cette décision n’a pas eu les effets escomptés, et les placements d’enfants en rétention, si leur nombre a diminué, n’ont pas totalement disparu.
Revenons-en au contenu de ce projet de loi, qui, pour adapter notre droit à de nombreux instruments européens et internationaux, aborde plusieurs sujets. Je ne dresserai pas ici un catalogue de toutes les mesures qu’il comporte, même si chacune d’entre elles mériterait d’être évoquée longuement.
Je m’attacherai à aborder certains sujets qui me tiennent particulièrement à cœur, en premier lieu les dispositions relatives à la prévention de la traite des êtres humains, à la lutte contre ce phénomène et à la protection des victimes.
Le présent texte, amélioré par la commission des lois de l’Assemblée nationale, modifie le code pénal afin de donner une véritable définition de ce qu’est la traite des êtres humains.
Il est certain que la traite des êtres humains constitue une violation grave des droits de l’homme, ce principe ayant été maintes fois réaffirmé au travers de différents instruments internationaux spécifiques.
Toutefois, le droit pénal français, et particulièrement la rédaction actuelle de l’article 225-4-1 du code pénal, ne permet pas, en l’état, de punir ce crime de manière satisfaisante. La traite des êtres humains mérite d’être une incrimination claire et précise et, pour que notre droit soit conforme aux engagements internationaux de la France, il doit punir toutes les formes de traite, qu’un profit soit recherché ou non et quelles que soient les formes d’exploitation. La réécriture de l’article 225-4-1 du code pénal telle qu’elle est prévue dans le projet de loi constitue sans aucun doute une avancée considérable pour les droits des victimes de la traite.
De même, on ne peut que se réjouir que l’échelle des peines encourues ait été modifiée de telle sorte qu’une sanction sévère soit appliquée à la traite des personnes les plus vulnérables et que le champ d’application de l’infraction soit étendu à la traite des mineurs.
Cependant, lutter contre la traite, c’est aussi élaborer une véritable politique de coopération avec les pays d’émigration et réformer en profondeur des organes tels que Frontex.
Une autre disposition importante, notamment au regard de la protection des droits des étrangers, figure à l’article 3 du projet de loi, qui tend à insérer dans le code de procédure pénale un article relatif au droit à la traduction des pièces essentielles à la défense de la personne concernée et à la garantie du caractère équitable du procès.
L’article 4 du projet de loi vise à mettre le droit français en conformité avec le droit européen en matière de lutte contre les abus sexuels et l’exploitation sexuelle des enfants, ainsi que contre la pédopornographie. Il convient de noter ici que, si des améliorations sont toujours possibles, notre droit était, en la matière comme en d’autres, largement conforme aux prescriptions européennes.
Cependant, pour garantir la protection des droits des enfants, il convenait de créer certaines incriminations aujourd’hui inexistantes dans notre droit, comme le fait de contraindre ou de forcer une personne à subir des atteintes sexuelles de la part d’un tiers. C’est chose faite avec ce texte, qui va même au-delà des obligations qui s’imposent à notre pays en étendant la compétence des juridictions françaises aux crimes de proxénétisme commis à l’étranger à l’encontre d’un mineur par un étranger résidant habituellement sur le territoire français.
Il s’agit donc non pas seulement de rendre le droit français conforme au droit européen ou de respecter nos engagements internationaux, mais bien d’améliorer notre droit, de le rendre plus effectif, qu’il concerne nos concitoyens ou les ressortissants des pays tiers.
D’ailleurs, l’article 15 constitue un bel exemple de la volonté marquée de protéger de la même manière les droits des nationaux et ceux des autres.
En effet, dans un arrêt de grande chambre du 5 septembre 2012, la Cour de justice de l’Union européenne avait jugé l’article 695-24, 2°, du code de procédure pénale contraire au principe de non-discrimination fondée sur la nationalité, car il réservait aux seuls ressortissants français le bénéfice de la non-exécution d’un mandat d’arrêt européen en vue de procéder à l’exécution sur le territoire français d’une peine d’emprisonnement prononcée dans un autre État membre.
Les dispositions pertinentes du code de procédure pénale seront donc modifiées, afin de mettre notre législation en conformité avec la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne. Le bénéfice desdites dispositions ne se limitera plus aux seuls ressortissants français ; il sera étendu aux personnes résidant légalement de façon continue depuis au moins cinq ans sur le territoire national.
J’ai eu l’occasion de l’évoquer, et Mme la rapporteur de la délégation aux droits des femmes en a longuement parlé, les droits des femmes seront particulièrement renforcés par le texte que nous examinons aujourd’hui, notamment par les articles 16 et 17, qui tendent à adapter notre droit pénal aux dispositions de la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, signée à Istanbul le 11 mai 2011.
En effet, ce sont trois nouvelles incriminations qui seront créées dans le code pénal.
Il s’agit, tout d’abord, de l’incrimination du fait de tromper un adulte ou un enfant – souvent une jeune fille –, afin de l’emmener dans un autre pays que celui où il réside en vue de l’y forcer à se marier. La loi du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants envisageait le mariage forcé comme une circonstance aggravante de faits de violence ou de coercition. Grâce à cette disposition, l’usage de la violence ne sera plus requis pour prononcer une condamnation : le seul fait d’user de subterfuges pour emmener une jeune fille à l’étranger afin de l’y marier sera répréhensible.
Il s’agit, ensuite, de l’incrimination de l’incitation d’une mineure à subir des mutilations génitales, même si cette incitation n’est pas suivie d’effet.
Enfin, l’article 17 vise à modifier le code de procédure pénale, en supprimant les conditions liées à la nationalité ou à la régularité du séjour auxquelles l’indemnisation par la Commission d’indemnisation des victimes d’infractions est conditionnée.
Vous le voyez, mes chers collègues, le chemin à parcourir est encore long pour que les droits des femmes soient mieux protégés. Cependant, ce texte témoigne de la volonté d’avancer en ce sens et apportera un progrès en matière de justice. Pour cette raison et pour toutes celles que j’ai eu l’occasion d’évoquer précédemment, le groupe écologiste le votera sans réserve. §
Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, le projet de loi dont nous débattons aujourd’hui a pour objet de transposer plusieurs directives et décisions de l’Union européenne et d’adapter la législation française à diverses conventions ou résolutions de l’ONU.
Les thèmes abordés relèvent tous de la mise en place du programme de Stockholm visant à créer un espace judiciaire européen en matière de lutte contre les violences et contre la criminalité organisée. Ils concernent des domaines variés, tous aussi importants les uns que les autres. La lutte contre la criminalité organisée, la lutte contre les violences faites aux femmes, la lutte contre les violences domestiques ou la lutte contre les abus sexuels, notamment ceux qui sont commis contre les enfants, sont en effet des sujets d’une haute importance.
Compte tenu du temps qui nous est imparti, je ne reviendrai pas sur les différents points de ce projet de loi que Mme et M. les rapporteurs ont déjà pris le soin d’exposer. J’évoquerai pour ma part l’article 1er, qui a pour objet de transposer la directive de 2011 relative à la lutte contre la traite des êtres humains. Cette transposition devait être effectuée avant le 6 avril 2013 : nous avons donc un mois de retard, ce qui explique l’examen de ce texte en procédure accélérée. Cependant, cela ne doit pas nous empêcher d’étudier dans le détail un sujet aussi important que la définition de l’infraction de traite des êtres humains.
La traite des êtres humains est à l’origine de violations des droits de l’homme comptant parmi les plus graves. Il faut que notre arsenal législatif permette de poursuivre et de condamner efficacement ces pratiques attentatoires aux droits les plus fondamentaux, notamment à la dignité humaine. Il convient donc, mes chers collègues, de veiller à ce que la transposition de la directive dans notre droit interne ne joue pas en défaveur des victimes, avec l’introduction d’éléments constitutifs de cette infraction qui rendrait plus difficile son établissement.
La définition de l’infraction de traite des êtres humains repose, dans le droit européen, sur un triptyque : l’action, les moyens utilisés par l’auteur et l’objectif poursuivi. Seuls les deux derniers éléments de ce triptyque font l’objet d’une modification par le projet de loi. Le champ des agissements répréhensibles – recrutement, transport, transfert, hébergement, accueil de personnes – reste inchangé.
Concernant l’objectif poursuivi, le projet de loi apporte des améliorations indiscutables via des références nouvelles au prélèvement d’organe, à l’esclavage et au travail forcé, qui viennent compléter et préciser la définition actuelle.
Nous approuvons bien entendu cette extension qui couvre les faits commis aux fins d’exploitation, que celle-ci soit liée au proxénétisme, aux agressions et atteintes sexuelles, à l’exploitation de la mendicité, aux conditions de travail ou d’hébergement contraires à la dignité humaine, à la soumission à un travail forcé, à la servitude, à l’esclavagisme ou encore au prélèvement illicite d’organes. L’introduction de ces nouveaux éléments, venant parachever la liste des objectifs poursuivis par le traitant, contribuera à rendre plus efficace la lutte contre ce fléau.
Concernant l’adjonction dans notre définition en droit interne de la traite d’une liste de moyens employés par le ou les prétendus traitants, nous sommes beaucoup plus circonspects. Cela nous a amenés à déposer un amendement sur ce sujet.
En effet, dans le droit actuel, le recours à la contrainte, aux violences ou à un abus d’autorité ou l’exploitation de la vulnérabilité de la victime sont des circonstances aggravantes, qui permettent d’alourdir la peine encourue par les traitants. Ces circonstances aggravantes n’ont pas à être réunies pour caractériser l’infraction. Or le projet de loi prévoit qu’elles deviendront des éléments constitutifs de l’infraction de traite des êtres humains, au côté de la rémunération du traitant ou de sa promesse de rémunération.
Cette modification soulève un double problème, dont il faut prendre la mesure. L’un a été résolu au travers d’un amendement adopté, en séance publique, à l’Assemblée nationale, l’autre reste en suspens.
Le premier est relatif à la peine encourue. Le recours à des contraintes, les violences, l’exploitation de la vulnérabilité d’une personne, définis actuellement en tant que circonstances aggravantes, sont punis de dix ans de prison. En tant qu’éléments constitutifs de l’infraction, ils ne seront punis que de sept ans de prison. Cela aurait pu être compris comme un geste en faveur des coupables, mais l’Assemblée nationale a adopté un amendement permettant, de manière habile, de ne pas diminuer le quantum de la peine.
Le second problème a trait à l’énumération, certes alternative, mais limitative, des moyens employés par les traitants, dont l’usage devra être prouvé par la victime pour que la traite soit caractérisée. Dans la définition figurant actuellement dans notre code pénal, contrairement à ce que prévoit la définition consacrée par le protocole de Palerme et par la directive que nous tentons de transposer, il n’est pas nécessaire que la victime établisse le recours à de tels moyens pour que l’infraction puisse être caractérisée.
Aussi, en faisant de la définition internationale de la traite une infraction aggravée, le droit français ne se contente pas de respecter les engagements internationaux, il va au-delà, en étendant aux majeurs la protection réservée aux seuls mineurs dans le protocole de Palerme.
Cette définition plus large est à l’honneur de la France, car elle renforce la répression de la traite des êtres humains. La lutte contre ce fléau sera d’autant plus efficace que, dans notre pays, la tentative et la complicité de traite sont punissables, ce qui permet de remonter relativement loin la chaîne des comportements pouvant aboutir à la traite d’une personne.
Cette différence avec le protocole de Palerme est justifiée par la Commission nationale consultative des droits de l’homme, que du reste le Gouvernement aurait pu saisir pour avis, car, pour une commission chargée d’éclairer le législateur sur les questions ayant trait aux droits de l’homme, quel sujet plus important que la traite des êtres humains ? Peut-être s’agit-il, là encore, d’un manque de temps.
Dans son avis du 18 décembre 2009 sur la traite et l’exploitation des êtres humains en France, cette commission rappelle que, l’exploitation étant considérée comme l’une des atteintes aux droits fondamentaux les plus graves, les moyens employés par l’auteur importent peu ; seuls comptent ses agissements et le mobile poursuivi par lui. C’est la raison pour laquelle nous présenterons un amendement tendant à maintenir la définition interne plus protectrice. En effet, si nous nous alignons complètement sur la définition européenne, plus difficile à caractériser, le nombre de condamnations pour traite d’êtres humains diminuera, alors qu’il est déjà très faible par rapport à ce qu’il devrait être.
Au demeurant, l’Union européenne n’a jamais reproché à la France d’avoir une loi plus protectrice. Nous disposons d’une marge de manœuvre délimitée par le respect des politiques pénales internes. D’ailleurs, l’article 1er de la directive du 5 avril 2011 prévoit que celle-ci n’établit que « des règles minimales relatives à la définition des infractions pénales et des sanctions dans le domaine de la traite des êtres humains ». La France peut donc être plus sévère.
Permettez-moi, pour conclure, d’annoncer le second amendement que nous avons déposé, relatif au délit d’offense au chef de l’État. La commission des lois a voté la suppression de l’article 17 bis, que la commission des lois de l’Assemblée nationale avait introduit dans le projet de loi pour abroger ce délit. Loin de tout esprit de « fayotage », pour reprendre un mot utilisé en commission sur un ton humoristique, nous vous proposerons de rétablir les dispositions que l’Assemblée nationale a adoptées !
Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste et du RDSE.
Monsieur le président, madame la garde des sceaux, madame la ministre, mon propos ne sera pas exhaustif, car nous sommes en accord complet avec le projet de loi dans la rédaction proposée par la commission des lois, qui du reste l’a adopté à l’unanimité.
Notre soutien est justifié par deux raisons : d’une part, nous sommes d’accord avec la trame générale des dispositions qu’il est question d’introduire dans notre droit ; d’autre part, nous trouvons excellent le travail qui a été accompli par notre rapporteur et nous approuvons les modifications que la commission des lois a adoptées sur son initiative.
De surcroît, le travail dont ce projet de loi est issu n’a pas commencé en juin 2012 ; il a été amorcé sous la précédente législature par les services de la Chancellerie. Nous avons donc un bel exemple de ce que nous aimons appeler la continuité de l’État : le gouvernement, quel qu’il soit, respecte les engagements internationaux pris par la France, que ce soit dans le cadre de l’Union européenne, dans l’espace du Conseil de l’Europe ou dans celui des Nations unies.
Permettez-moi de mettre brièvement en relief trois aspects du projet de loi.
Premièrement, les différents textes que nous nous apprêtons à transposer dans notre droit montrent que nous sommes aujourd’hui entrés dans l’ère d’un droit pénal international. Autrement dit, nous sommes sortis de la vieille conception régalienne du droit pénal, suivant laquelle celui-ci est l’un des attributs de la souveraineté de l’État. Si ce droit évolue aujourd’hui, c’est pour deux raisons.
D’abord, supérieure à la répression, il y a la protection des droits de l’homme. Or, à propos de la définition des droits de l’homme, un consensus existe qui se manifeste dans les textes très parallèles que sont la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et les différents textes signés dans le cadre des Nations unies.
Comme le Conseil constitutionnel l’a rappelé à plusieurs reprises, il n’y a pas de spécificité française en matière de droits de l’homme, excepté quelques aspects que, les uns et les autres, nous connaissons bien. En définitive, il y a une base commune en ce qui concerne les droits fondamentaux, qui surplombent le droit régalien visant à réprimer tel ou tel type d’infraction.
Ensuite, comme M. le rapporteur l’a signalé à juste titre en commission, nous assistons à une internationalisation de la criminalité organisée qui rend nécessaire l’adoption de normes internationales, ou en tout cas de normes qui vaillent sur le plan international. Ce résultat peut être obtenu soit en enjambant les frontières, soit en permettant aux États de reconnaître les sanctions prononcées dans les États voisins, notamment ceux qui appartiennent au même espace juridique et judiciaire. Il y a là un impératif absolu, surtout pour les crimes les plus graves : ceux qui portent atteinte aux droits des personnes, notamment de la femme ou de l’enfant. C’est pourquoi il est nécessaire d’introduire dans le droit français ces textes adoptés à l’échelon européen ou à l’échelle mondiale.
Deuxièmement, comme M. le rapporteur l’a également souligné en commission, nous devons faire preuve à la fois d’une grande loyauté dans la manière d’intégrer ces normes internationales dans l’ordre juridique français et d’une grande clarté – je ne dirai pas d’une grande prudence –, pour la raison qu’en matière de droit pénal la plupart des normes n’ont pas de définition internationale ; elles sont le fruit des traditions nationales. C’est ainsi qu’on essaie, notamment dans le cadre de l’Union européenne, de trouver des éléments communs à des traditions juridiques souvent extrêmement différentes, non pas tant sur le plan du droit pénal proprement dit que sur le plan de la procédure pénale. De fait, on sait très bien que le droit anglo-saxon et le droit continental présentent des différences considérables : on n’emploie pas les mêmes concepts, on n’utilise pas les mêmes procédures et, du coup, on ne tombe pas d’accord.
En ce qui concerne le parquet européen, je me souviens que, lors des auditions organisées par la commission des affaires européennes sur le programme de Stockholm il n’y a pas si longtemps, on nous a très bien expliqué que le problème essentiel résidait dans l’impossibilité d’un accord entre les Britanniques et les continentaux, sans compter que, même au sein de l’espace judiciaire continental, il y avait des différences non négligeables, par exemple sur le rôle du parquet et la place de la procédure accusatoire.
De la même façon, dans la préparation des directives prévues par le programme de Stockholm – seule une sur trois a déjà été rédigée –, le fait qu’un avocat puisse assister les personnes dès le début des poursuites semble faire consensus ; de ce point de vue, d’ailleurs, les Allemands sont en avance sur nous. Cependant, quand on demande aux Allemands ce qu’ils ont prévu en matière d’aide judiciaire, on réalise qu’ils n’ont quasiment rien prévu. Ainsi, par rapport à l’Allemagne, nous sommes en retard sur le plan de la procédure, mais nous sommes en avance sur le plan de la couverture sociale des personnes. Le problème n’est pas seulement de reconnaître des droits, mais aussi de s’assurer qu’ils peuvent être appliqués, ce qui est loin d’être le cas en Allemagne.
Madame la garde des sceaux, je pense donc qu’il y a du travail à faire pour que les différents États parlent des mêmes notions et pour que les procédures dans leurs détails soient mises en œuvre concrètement, non seulement sur le plan juridique mais aussi sur le plan administratif et même social.
Troisièmement, en ce qui concerne l’article 17 bis du projet de loi, que la commission des lois n’a pas cru devoir maintenir, je tiens à répondre à ceux qui demandent la suppression du délit d’offense au chef de l’État.
Je rappelle, notamment à nos collègues du RDSE, que ce délit appartient à la tradition républicaine. Lorsqu’il a été instauré, en 1881, cela faisait moins d’un an que les républicains avaient remporté la majorité ici même et qu’un républicain avait été élu à la présidence de la République, ce qui est la moindre des choses. Aussi bien, ce délit n’a pas du tout été créé sur l’initiative de Mac Mahon et des défenseurs de la monarchie : il visait à protéger un président de la République républicain ! On a profité que la loi sur la liberté de la presse était en cours de préparation pour l’y introduire.
Bien sûr, autres temps, autres mœurs ; je comprends parfaitement qu’on veuille ne plus maintenir une disposition, certes républicaine et vénérable, mais qui n’est peut-être plus dans l’air du temps. Reste que, comme nous l’avons rappelé en commission des lois, étant donné que l’article 68 de la Constitution doit théoriquement être modifié, ce qui nous permettrait d’examiner le statut du chef de l’État, notamment son statut pénal, il serait préférable d’attendre ce débat pour envisager l’intégralité des dispositions relatives à ce statut. Peut-être alors fera-t-on un sort au délit d’offense au chef de l’État.
À ce propos, madame la garde des sceaux, je vous rappelle que nous tenons beaucoup à l’adoption de la loi organique qui permettrait une entrée en application complète des dispositions votées lors de la révision constitutionnelle du 23 février 2007, dont certaines ne sont toujours pas mises en œuvre, notamment en ce qui concerne la mise en accusation du Président de la République. À cet égard, je crois que la droite peut battre sa coulpe ! La procédure est toujours en cours et sénateurs et députés ont voté des textes différents. Il faudra bien un jour se mettre d’accord pour que ces dispositions entrent en vigueur !
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, il se trouve que, vendredi dernier, j’ai assisté, avec de nombreuses personnalités, à un colloque organisé pour les vingt ans de l’université ouverte de Franche-Comté. Le thème en était : l’avenir de l’Europe.
Évidemment, tout le monde a parlé de l’Union européenne et de ses difficultés. On s’est demandé où elle allait, si c’était nulle part ou peut-être dans un mur, et si les propositions de tel ou tel étaient de nature à nous sortir de l’ornière. Seulement, personne n’a parlé du Conseil de l’Europe, ni de l’Europe du droit ! Lorsque j’ai formulé cette remarque, les sommités présentes, qui étaient nombreuses, passé le premier étonnement, se sont rappelé qu’il existait bien un Conseil de l’Europe et une Cour européenne des droits de l’homme.
En vérité, mes chers collègues, je pense que, si l’Europe peut se réaliser plus concrètement, c’est bien par les progrès du droit, des droits de l’homme et de la démocratie. Ce n’est pas par la finance, ni par une monnaie unique, qui, sans Europe politique, ne peut absolument pas être un facteur d’intégration. L’histoire nous éclaire à satiété à cet égard : il suffit de considérer ce qui s’est passé, par exemple, en Yougoslavie. Ce n’est pas non plus par les politiques d’austérité et antisociales mises en place par les chefs d’État et de gouvernement lorsqu’ils se réunissent à Bruxelles ou ailleurs.
Souvenons-nous tout de même que, parmi les quarante-sept pays très différents qui composent le Conseil de l’Europe, où certes il y a encore beaucoup à faire, la peine de mort a été partout abolie. Il ne reste que les États-Unis, la Chine et quelques autres pays qui la pratiquent encore. Elle n’existe plus ni en Russie, ni en Turquie, ni en Ouzbékistan, ni même en Ukraine et en Géorgie. Bien sûr, tout n’est pas parfait ; mais il y a des progrès !
Aujourd’hui, Mmes les ministres nous demandent au nom du Gouvernement d’inscrire dans notre droit positif toute une série de dispositions pénales issues notamment de directives européennes, de conventions des Nations unies et d’arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme. Ce projet de loi va évidemment dans le bon sens. Du reste, je vous rappelle que l’Union européenne elle-même va signer la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales – les négociations à cet égard vont vraisemblablement aboutir –, se soumettant ainsi à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.
Par ailleurs, en ce qui concerne la traite des êtres humains et la torture, l’amorce d’une juridiction pénale internationale existe sous la forme d’une compétence internationale. C’est au nom de celle-ci qu’un juge espagnol a récemment inculpé, certes en son absence, un général irakien convaincu de torture et d’assassinat dans le camp d’Achraf, où se trouvent des réfugiés iraniens en Irak.
Nous progressons donc – il n’y a pas que des points négatifs –, d’autant qu’avec les traités d’Amsterdam et de Lisbonne le droit pénal et la procédure pénale ont commencé à être harmonisés dans les vingt-sept pays de l’Union européenne.
Sur ce texte, le rapporteur Alain Richard a fait un travail très intéressant. Au demeurant, nos collègues qui se sont exprimés avant moi ont dit ce qu’il y avait à dire. Je souhaite simplement commenter les trois points qui ont provoqué des discussions au sein de la commission des lois.
Concernant les articles 1 et 2, je retiens que les associations œuvrant contre la traite des êtres humains et l’esclavage auront désormais la possibilité de se constituer partie civile. Tel n’était pas le cas jusqu’à maintenant. En de telles matières, les victimes ne portent pas plainte. Il faut qu’elles aient derrière elles des associations qui les soutiennent pour aller devant les tribunaux et faire reconnaître leurs droits.
Sur l’article 2 bis, la commission a choisi de ne pas suivre la position adoptée par l’Assemblée nationale, ce qui me paraît sage. Les termes retenus soulevaient en effet certaines difficultés. Les incriminations étaient-elles vraiment clairement définies par rapport à ce qui existe déjà dans notre droit pénal ? Je n’en suis pas persuadé.
Le fait de transformer ces infractions en crimes était une erreur. Lorsque les juridictions européennes ou le Conseil de l’Europe se prononcent en faveur de la criminalisation d’un acte, cela ne veut pas dire qu’il faut en faire un crime au sens de notre droit procédural, mais qu’il convient simplement de le pénaliser. Selon moi, une telle disposition aurait été totalement contre-productive, parce que la procédure criminelle est très lourde et très longue à aboutir. En outre, je m’interroge sur la réaction des jurés lors de tels procès. Laissons donc ce genre d’infractions aux magistrats professionnels, qui, bien que souvent décriés, sont tout de même plus à même de se prononcer.
Nous approuvons également la proposition du rapporteur de limiter les pouvoirs du procureur national chargé d’Eurojust. On a dit beaucoup de bien et beaucoup de mal de cette institution. À mon avis, les progrès qu’elle permet sont encore à démontrer par rapport aux dépenses budgétaires qu’elle provoque. Quoi qu’il en soit, les magistrats appartenant à cet aréopage ne font en aucun cas partie de notre parquet. Pour le moment, celui-ci est organisé, même si le Sénat et l’Assemblée nationale examineront bientôt certaines procédures que vous vous apprêtez à nous soumettre, madame la garde des sceaux, et qui le désorganiseront peut-être, ce que je ne souhaite pas. Il convient donc de limiter, comme l’a fait le rapporteur, la portée des requêtes formulées par Eurojust aux parquets de France en matière de renseignement. Ce que fait Eurojust est très bien, mais prévoir que cette institution puisse donner des injonctions ou même ouvrir des informations judiciaires me paraît totalement aberrant.
Pour ce qui concerne le délit d’offense au chef de l’État, on a entendu tout et son contraire sur le sujet. À titre personnel, je rejoins l’opinion de mon collègue Hugues Portelli : il faut distinguer la personne et la fonction. La personne du chef de l’État peut être normale, anormale, ordinaire, extraordinaire ou intelligente, peu importe ! La fonction, c’est autre chose. Avec la Ve République, la France connaît un régime semi-présidentiel : le président de la République est élu au suffrage universel direct, il a des pouvoirs propres, il est l’élu de la nation et le socle de tout notre système institutionnel, sans lequel il n’y a rien. Nous l’avons bien vu lors des différentes réformes constitutionnelles destinées, paraît-il, à accroître les libertés du Parlement. Tant qu’il y aura un fait majoritaire et un président de la République élu au suffrage universel, ces réformes n’auront pas de sens, nous le savons bien.
Par conséquent, la fonction présidentielle doit être protégée en tant que telle. Certes, il faut que le titulaire de cette fonction n’en fasse pas un usage immodéré, comme cela a été peut-être le cas dans des années récentes, mais notre droit doit continuer de prévoir une protection du chef de l’État. Maintenir la disposition en question revient donc à lancer un appel : le Parlement doit se saisir calmement, presque unanimement, de la question relative au statut juridique du président de la République, que ce soit en matière pénale, civile ou administrative. La solution qui prévaut actuellement, on le voit bien, n’est guère satisfaisante. Pourtant, une proposition de loi déposée par MM. Badinter et Patriat avait été examinée par le Sénat. Dans le même temps, le gouvernement déposait à l’Assemblée nationale un projet de loi présentant certaines plages de convergence. Depuis, tout a été abandonné…
Monsieur le président de la commission, je vous laisserai le soin de parler abondamment de ces questions, comme vous savez d’ailleurs le faire, d’un point de vue aussi bien philosophique que juridique.
En faisant aujourd’hui le choix d’un dédit, nous appelons le Gouvernement et le Président de la République à proposer une réforme du statut juridictionnel du chef de l’État, ce qui nous permettrait d’évoquer calmement cette question en distinguant la personne et la fonction, qui sont intimement liées. En effet, lorsqu’on nous dit que le chef de l’État ne peut pas faire l’objet d’une procédure de divorce, il s’agit de sa personne, et cela soulève certaines questions.
Telles sont les quelques observations que je souhaitais formuler. Bien entendu, le groupe socialiste se félicite, madame la garde des sceaux, que la Chancellerie ait repris un texte déjà déposé auparavant, en l’enrichissant et en évitant un certain nombre de difficultés inhérentes à ce genre d’exercice. Nous le voterons, tel qu’il est issu des travaux de la commission des lois, qui l’a encore enrichi en adoptant des amendements de précision de notre rapporteur.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Je remercie Mme Maryvonne Blondin, rapporteur de la délégation aux droits des femmes, de son travail rigoureux, qui a permis de consolider ce texte. L’action transversale qu’elle a appelée de ses vœux, c’est précisément ce à quoi nous avons décidé de travailler avec la mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains : des hauts fonctionnaires venus à la fois de la Chancellerie, des ministères de la santé et de l’intérieur et du monde des collectivités locales veillent vraiment à prendre en compte toutes les dimensions de la protection des femmes victimes de violence.
Aussi, nous avons bien évidemment l’intention, comme vous nous y avez encouragés, madame la sénatrice, de suivre les recommandations du GRETA, sur lesquelles nous sommes en train de travailler. Vous le savez, un large plan de lutte contre la traite des êtres humains, qui prendra en considération les recommandations de cette instance, sera proposé en octobre prochain.
Surtout, vous nous avez demandé d’aller beaucoup plus loin en matière de formation des professionnels, notamment en termes de sensibilisation et d’observation des violences. Vous avez raison. C’est d’ailleurs l’une des décisions que nous avions retenues dans le cadre du Comité interministériel aux droits des femmes en novembre dernier. La MIPROF est pour partie chargée de cette mission, puisqu’elle est en train de rédiger le cahier des charges des formations pluridisciplinaires qui s’adresseront à la fois aux magistrats, aux policiers, aux enseignants, aux médecins et aux personnels de santé. Nous reviendrons sur le principe de cette formation systématique dans le projet de loi-cadre relatif au droit des femmes que je vous présenterai au mois de septembre prochain.
Je suis également très attentive aux propositions que vous formulez pour renforcer la lutte contre les mariages forcés. Comme je le disais précédemment, nous avons lancé avec Hélène Conway-Mouret un groupe de travail interministériel sur ce sujet, auquel on ne s’intéresse de si près que pour la première fois. Il s’agit à la fois de viser le monde diplomatique et consulaire et d’associer les établissements scolaires. Un travail de sensibilisation et de prévention important doit bien évidemment être conduit.
Pour répondre à votre question sur les interdictions de sortie du territoire, puisque c’était l’un des sujets que nous évoquions en aparté, sachez que la jeune fille menacée de mariage forcé peut d’ores et déjà être interdite de sortie du territoire par une ordonnance de protection.
Cette disposition figure dans la loi du 9 juillet 2010, comme le sait bien M. Courteau. Le coupable peut également être interdit de sortie du territoire dans le cadre de ce dispositif. Aujourd’hui, certaines associations demandent à ce qu’on pénalise ceux qui empêchent les filles de quitter les territoires des pays étrangers. Si cela pose pour le moment un certain nombre de problèmes d’extraterritorialité, c’est un sujet sur lequel nous travaillons. Nous y reviendrons prochainement.
Pour finir, je veux remercier tous les intervenants de l’attention qu’ils portent à la question de la protection des femmes victimes de violence.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Je joins mes remerciements à ceux de Mme la ministre des droits des femmes. Comme d’habitude, le débat mené au Sénat, comme à l’Assemblée nationale, est de grande qualité. Mais la Haute Assemblée veille avec un esprit encore plus méticuleux aux détails du droit et à la cohérence de notre système pénal.
Monsieur le rapporteur, sur le parquet, le Gouvernement travaille avec des débuts de résultats tout à fait satisfaisants sur l’application de l’article 86 du traité de Lisbonne. Il s’intéresse également à son article 85, relatif au renforcement d’Eurojust, comme en témoigne d’ailleurs ce texte.
Nous avons bien avancé, notamment avec l’Allemagne, qui est un partenaire essentiel. J’ai en effet cosigné avec ma collègue allemande un projet de texte que nous avons transmis à la Commission européenne. Par ailleurs, nous nous rapprochons de manière très encourageante de pays comme la Pologne, l’Italie ou l’Espagne, mais, je dois le reconnaître, essentiellement sur le parquet fiscal. Sur le parquet pénal, les choses sont plus compliquées, y compris avec l’Allemagne. Il n’en demeure pas moins que nous nous inscrivons dans une trajectoire positive. Dans ce contexte, les dispositions introduites par l’Assemblée nationale nous semblent quelque peu anticipatrices, et je partage votre avis quant à la nécessité de les moduler de nouveau.
Pour ce qui concerne l’ordre de transposition dans les codes, je dois reconnaître que votre observation est tout à fait pertinente. Il est toujours nécessaire de donner un peu plus de cohérence aux textes de loi, qui doivent être compris. La difficulté, c’est que l’élaboration de ce projet de loi était déjà très avancée. Il a en effet été conçu par le gouvernement précédent et soumis ainsi au Conseil d’État. En outre, même si nous avons pris de l’avance dans certains domaines, nous sommes sur la corde raide s’agissant des textes qui auraient dû être transposés en avril 2013 et nous n’avons pas entrepris ce travail de réécriture. Pour autant, concernant la réforme constitutionnelle modifiant le Conseil supérieur de la magistrature, nous avons veillé à réécrire l’ensemble de l’article 65 de la Constitution, pour y introduire une plus grande cohérence et homogénéité. Nous avons par anticipation satisfait à votre observation, monsieur le rapporteur, mais dans un autre texte.
J’ai noté les observations de Mme Benbassa, qui s’est réjouie que ce texte aille plus loin, notamment en matière de protection des mineurs et des victimes, en particulier étrangères, puisque leurs droits sont reconnus sur le territoire.
Monsieur Mazars, j’apprécie profondément l’accueil très favorable que vous faites au mandat d’arrêt européen. Cet instrument judiciaire essentiel facilite la coopération pénale et préfigure les reconnaissances mutuelles que nous inscrivons dans notre droit. Vous avez également montré votre intérêt pour les transfèrements.
Madame Blondin, Mme la ministre des droits des femmes a répondu pour l’essentiel aux observations que vous avez formulées, y compris à celles qui portaient sur les questions pénales. Pour ma part, je puis vous dire que la France a comme objectif sans cesse réaffirmé d’améliorer ses capacités à traiter ces diverses situations. Voilà deux jours, je recevais le directeur général de l'ONUDC, l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime, qui est notamment responsable de l’application de la convention de Palerme. Mes rencontres, mes entretiens bilatéraux ont pour objectif de nous permettre d'avancer de manière aussi efficace et satisfaisante que possible dans ce domaine.
Monsieur le rapporteur, vous avez fait allusion aux repentis de manière générale. Vous le savez, la France travaille sur un statut des repentis. Un projet de décret est d’ailleurs dans les tuyaux depuis deux ou trois ans. En collaboration avec le ministère de l'intérieur, nous avons progressé – ce qui n’a pas été simple – sur la question de la responsabilité, de la durée et du coût de la prise en charge. C’est sur ce dernier point que tout se complique, et nous ne sommes pas encore parvenus à un accord avec le ministère des finances. Des arbitrages doivent être prochainement rendus.
Le statut des repentis intéresse plus particulièrement certains territoires, et dans un premier temps la Corse, au sujet de laquelle j'ai diffusé une circulaire de politique pénale. Ne voulant pas stigmatiser nos compatriotes insulaires, je m’empresse de préciser que ce statut sera probablement utile en d’autres lieux du territoire.
Monsieur Portelli, vos propos sur l'effectivité des droits sont tout à fait justes. Sachez que, dans le cadre des conseils Justice et affaires intérieures, la France se bat beaucoup sur cette question de l'effectivité des droits. De fait, à chaque texte de transposition du droit européen, nous sommes en permanence confrontés aux dissonances qui existent entre le droit continental et le droit anglo-saxon. Cette remarque vaut également pour plusieurs professions, notamment les professions réglementées.
Nous sommes en présence de deux conceptions divergentes, de vocabulaires différents, sans compter les traductions malheureuses. De fait, les transpositions sont un exercice certes acrobatique, mais généralement plutôt réussi, parce que si les notions et les concepts juridiques ne sont pas strictement identiques selon les pays, y compris, vous l'avez souligné, monsieur le sénateur, au sein même des pays de droit continental, nous parvenons malgré tout à respecter le texte d’origine avec toutes ses précisions, tout en nous conformant à notre loi fondamentale. Car c’est bien à cet équilibre que nous devons parvenir !
S’agissant de l'effectivité des droits, sachez que, dès le premier Conseil des ministres auquel j’ai participé, le 8 juin 2012, j'ai fait valoir que la France était favorable au respect des droits des justiciables et donc à la présence de l'avocat non seulement en garde à vue – c'était déjà le cas –, mais également dans le cadre des auditions libres. Ce faisant, j’ai fait remarquer qu'on ne pouvait pas se contenter de proclamer ainsi un nouveau droit sans prendre en considération les inégalités qui en résulteraient, sachant que seuls ceux qui en auraient les moyens pourraient s’attacher les services d’un avocat. C’est pourquoi la France demande, et même revendique, un instrument législatif européen sur l'aide juridictionnelle.
En juin, nous avons obtenu que la commission travaille sur un instrument – comment dire ? – juridique, législatif. Nous devons en effet parfois gérer des nuances sémantiques. Ainsi, lorsque j'ai demandé un instrument législatif, on m'a proposé une résolution visant un legal instrument, ce qui n'est pas tout à fait la même chose. Donc, je précise bien que nous avons obtenu non pas un instrument légal ou juridique, mais un instrument législatif portant sur l’aide juridictionnelle, et c’est ce sur quoi travaille la Commission.
Je le répète, il serait totalement absurde de créer en même temps un nouveau droit et de nouvelles inégalités, ce qui serait contraire à l’esprit du droit français. Je puis vous assurer que nous mettons tout en œuvre pour rendre ce droit effectif.
M Michel a fait des observations sur le coût d’Eurojust. Il a également évoqué le délit d’offense au chef de l'État ; je reviendrai sur ce point lors de la discussion des articles.
Enfin, je veux dire que la possibilité pour les associations de se constituer partie civile est une réelle avancée, et nous savons gré à l'Assemblée nationale d'avoir introduit cette disposition.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie tous de la très grande qualité de ce débat.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles du texte de la commission.
Chapitre Ier
Dispositions portant transposition de la directive 2011/36/UE du Parlement européen et du Conseil, du 5 avril 2011, concernant la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène ainsi que la protection des victimes et remplaçant la décision-cadre 2002/629/JAI du Conseil
(Non modifié)
Le code pénal est ainsi modifié :
1° L’article 225-4-1 est ainsi rédigé :
« Art. 225 -4 -1. – I. – La traite des êtres humains est le fait de recruter une personne, de la transporter, de la transférer, de l’héberger ou de l’accueillir à des fins d’exploitation dans l’une des circonstances suivantes :
« 1° Soit avec l’emploi de menace, de contrainte, de violence ou de manœuvre dolosive visant la victime, sa famille ou une personne en relation habituelle avec la victime ;
« 2° Soit par un ascendant légitime, naturel ou adoptif de cette personne ou par une personne qui a autorité sur elle ou abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions ;
« 2° bis Soit par abus d’une situation de vulnérabilité due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, apparente ou connue de son auteur ;
« 3° Soit en échange ou par l’octroi d’une rémunération ou de tout autre avantage ou d’une promesse de rémunération ou d’avantage.
« L’exploitation mentionnée au premier alinéa est le fait de mettre la victime à sa disposition ou à la disposition d’un tiers, même non identifié, afin soit de permettre la commission contre la victime des infractions de proxénétisme, d’agression ou d’atteintes sexuelles, de soumission à du travail ou des services forcés ou à de l’esclavage, de prélèvement de l’un de ses organes, d’exploitation de la mendicité, de conditions de travail ou d’hébergement contraires à sa dignité, soit de contraindre la victime à commettre tout crime ou délit.
« La traite des êtres humains est punie de sept ans d’emprisonnement et de 150 000 € d’amende.
« II. – La traite des êtres humains à l’égard d’un mineur est constituée même si elle n’est commise dans aucune des circonstances prévues aux 1° à 3° du I.
« Elle est punie de dix ans d’emprisonnement et de 1 500 000 € d’amende.
« III. –
Supprimé
2° L’article 225-4-2 est ainsi rédigé :
« Art. 225 -4 -2 . – I. – L’infraction prévue au I de l’article 225-4-1 du présent code est punie de dix ans d’emprisonnement et de 1 500 000 € d’amende lorsqu’elle est commise dans deux des circonstances mentionnées aux 1° à 3° du même article 225-4-1 ou avec l’une des circonstances supplémentaires suivantes :
« 1° À l’égard de plusieurs personnes ;
« 2° À l’égard d’une personne qui se trouvait hors du territoire de la République ou lors de son arrivée sur le territoire de la République ;
« 3° Lorsque la personne a été mise en contact avec l’auteur des faits grâce à l’utilisation, pour la diffusion de messages à destination d’un public non déterminé, d’un réseau de communication électronique ;
« 4° Dans des circonstances qui exposent directement la personne à l’égard de laquelle l’infraction est commise à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ;
« 5° Avec l’emploi de violences qui ont causé à la victime une incapacité totale de travail de plus de huit jours ;
« 6° Par une personne appelée à participer, par ses fonctions, à la lutte contre la traite ou au maintien de l’ordre public ;
« 7° Lorsque l’infraction a placé la victime dans une situation matérielle ou psychologique grave.
« II. – L’infraction prévue au II de l’article 225-4-1 est punie de quinze ans de réclusion criminelle et de 1 500 000 € d’amende lorsqu’elle a été commise dans l’une des circonstances mentionnées aux 1° à 3° du même article 225-4-1 ou dans l’une des circonstances mentionnées aux 1° à 7° du I du présent article. » ;
3° L’article 225-4-8 est ainsi rétabli :
« Art. 225 -4 -8 . – Lorsque les infractions prévues aux articles 225-4-1 et 225-4-2 sont commises hors du territoire de la République par un Français, la loi française est applicable par dérogation au deuxième alinéa de l’article 113-6 et la seconde phrase de l’article 113-8 n’est pas applicable. » ;
4° La section 3 du chapitre V du titre II du livre II est ainsi modifiée :
a) L’intitulé est complété par les mots : « et du travail forcé » ;
b) Après l’article 225-14, il est inséré un article 225-14-1 ainsi rédigé :
« Art. 225 -14 -1 . – Le fait, par la violence ou la menace, de contraindre une personne à effectuer un travail sans rétribution ou en échange d’une rétribution manifestement sans rapport avec l’importance du travail accompli est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 150 000 € d’amende. » ;
c) Au premier alinéa de l’article 225-15, la référence : « et 225-14 » est remplacée par la référence : « à 225-14-1 » ;
5° À la fin du 5° de l’article 225-19, les mots : « l’infraction prévue à l’article 225-14 » sont remplacés par les mots : « les infractions prévues aux articles 225-13 à 225-14-1 ».
L'amendement n° 2 rectifié, présenté par Mmes Cukierman et Assassi, M. Favier, Mme Gonthier-Maurin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 3
Supprimer les mots :
dans l'une des circonstances suivantes
II.- Alinéas 4 à 7, 10 et 11
Supprimer ces alinéas.
III. - Alinéas 13 à 22
Remplacer ces alinéas par onze alinéas ainsi rédigés :
2° L'article 225-4-2 est ainsi rédigé :
« Art. 225-4-2. - L'infraction prévue à l'article 225-4-1 est punie de dix ans d'emprisonnement et de 1 500 000 euros d'amende lorsqu'elle est commise :
« 1° À l’égard d'un mineur ;
« 2° À l’égard d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur ;
« 3° À l’égard de plusieurs personnes ;
« 4° À l’égard d'une personne qui se trouvait hors du territoire de la République ou lors de son arrivée sur le territoire de la République ;
« 5° Lorsque la personne a été mise en contact avec l'auteur des faits grâce à l'utilisation, pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, d'un réseau de communication électronique ;
« 6° Dans des circonstances qui exposent directement la personne à l'égard de laquelle l'infraction est commise à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ;
« 7° Avec l'emploi de menaces, de contraintes, de violences ou de manœuvres dolosives visant l'intéressé, sa famille ou une personne étant en relation habituelle avec lui ;
« 8° Par un ascendant légitime, naturel ou adoptif de la personne victime de l'infraction prévue à l'article 225-4-1 ou par une personne qui a autorité sur elle ou abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ;
« 9° Par une personne appelée à participer, par ses fonctions, à la lutte contre la traite ou au maintien de l'ordre public. »
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Le chapitre Ier transpose la directive du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2011 concernant la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène ainsi que la protection des victimes.
Cet amendement vise à appeler l’attention sur les conséquences en matière d’exploitation liées au proxénétisme que cet article impliquerait. Il vient en prolongement des travaux que la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, que je préside, a menés sur ce projet de loi de transposition et d’une recommandation proposée et adoptée par notre rapporteur, Maryvonne Blondin. En effet, la délégation aux droits des femmes du Sénat a adopté, comme recommandation n° 1, que « le fait de traite des êtres humains soit constitué dès lors que le but de l’exploitation est établi ».
Cet amendement reprend donc tout simplement cette recommandation. En effet, le basculement des circonstances aggravantes dans les éléments constitutifs peut rendre plus difficile l’établissement des infractions alors que, précisément, l’esprit de la loi est bien de le faciliter. Il est ainsi souligné que cette modification pourrait être interprétée « comme éloignant la France de son objectif abolitionniste en matière de prostitution et de proxénétisme ».
Ce projet de loi fait des moyens employés par l’auteur de la traite un élément constitutif de l’infraction, ce qui aura des conséquences non négligeables sur la charge de la preuve incombant aux victimes.
Nous pensons que l’action et le but visés par l’auteur de la traite doivent suffire à caractériser celle-ci. La traite serait ainsi définie comme « le fait par tous moyens de recruter une personne, de la transporter, de la transférer, de l’héberger ou de l’accueillir », dans le but de la mettre « à sa disposition ou à la disposition d’un tiers, même non identifié, pour permettre la commission contre la victime des infractions de proxénétisme, d’agression ou d’atteintes sexuelles, de soumission à du travail ou des services forcés ou à de l’esclavage, de prélèvement de l’un de ses organes, d’exploitation de la mendicité, de conditions de travail ou d’hébergement contraires à sa dignité, soit de contraindre la victime à commettre tout crime ou délit ».
Avec cette définition, plus protectrice des victimes, les moyens employés n’auraient pas à être prouvés par la victime, si ce n’est pour caractériser des circonstances aggravantes.
Il est également proposé dans notre amendement de supprimer, à l’article 225–4–1 du code pénal, la référence à une rémunération ou tout autre avantage ou à leur promesse.
Ces éléments, qui ne sont pas des circonstances aggravantes par nature, peuvent aussi être difficiles à prouver.
La commission n’a pas émis un avis favorable sur cet amendement, et ce pour deux raisons.
La première est que la définition proposée ne correspond pas à l’accord que nous transposons.
La seconde raison me permet de rappeler pourquoi nous devons être attentifs aux textes que nous adoptons en matière pénale.
Pour nous conformer à la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, nous devons veiller à définir précisément et strictement les motifs permettant d'appréhender et de sanctionner un individu. C’est pourquoi il nous semble logique et cohérent que l'infraction de traite ne soit pas définie pareillement selon qu’elle implique des mineurs ou des majeurs.
Je rappelle que, dans tous nos systèmes de droit, les personnes majeures sont présumées avoir une part d'autonomie et de volonté. Par conséquent, lorsqu'il est question d'une personne majeure, la traite, pour être caractérisée comme telle, implique l'emploi de certains moyens. On ne peut pas simplement se contenter de constater qu'une personne est sous dépendance pour prononcer la culpabilité de l’individu qui l'a placée sous cette dépendance ; il faut des circonstances précises.
Rappelons-nous le premier texte de droit pénal que nous avons examiné après l'alternance politique survenue l'année dernière. À force de vouloir réduire les éléments constitutifs d'un délit, on a fini par en donner une définition tautologique. En l'occurrence, il avait été dit que le délit de harcèlement consistait à harceler ! À la suite de quoi le Conseil constitutionnel nous a tout simplement rappelé que la Déclaration des droits de l'homme imposait, lorsqu’on crée une infraction, de fixer précisément les circonstances de sa réalisation.
C’est pour l’ensemble de ces raisons que la commission a considéré que l'équilibre qui résultait à la fois de notre engagement européen et du projet de loi dans sa rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale n'avait pas à être modifié.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement, pour les mêmes raisons que celles avancées par M. le rapporteur.
J'entends vos préoccupations, madame la sénatrice, mais aucun élément objectif et tangible ne permet de justifier votre crainte que la France ne s’éloigne de son objectif abolitionniste. La convention de 1960 que notre pays a ratifiée n’est nullement remise en cause.
Par ailleurs, comme vient de le rappeler M. le rapporteur, nous sommes tenus par le principe de légalité des délits et des peines. C’est pourquoi nous devons veiller à rédiger nos textes avec une grande rigueur. À défaut, cela pourrait nous coûter cher. Aujourd'hui, grâce aux questions prioritaires de constitutionnalité, tout justiciable qui souhaite introduire une contestation peut faire appel au Conseil constitutionnel. De fait, notre droit pénal est véritablement passé au crible. Nous avons donc encore plus qu'auparavant un devoir de rigueur dans l'écriture.
Dans le cas présent, il s'agit d'une transposition en droit français d'instruments juridiques européens ou internationaux. Cela veut dire que nous sommes tenus par la signature de la France. Dans le cadre de la coopération pénale, et même simplement de l'entraide judiciaire ou administrative, les incriminations doivent être précisément définies. Si la France veut pouvoir coopérer avec ses partenaires, elle doit pouvoir lancer des commissions rogatoires internationales, il faut que le mandat d'arrêt européen soit reconnu et exécutoire, il faut que l'extradition soit une procédure reconnue et partagée. Ces différents instruments nous obligent à rédiger très précisément nos textes de loi.
Je le répète, j’entends vos préoccupations, mais je ne partage pas votre inquiétude quant à la position de la France en matière d’exploitation liée au proxénétisme, même si – soyons scrupuleux – je ferai vérifier ce point.
M. le rapporteur a prononcé un mot essentiel : « présumées ». Une personne adulte est en effet présumée jouir d’un minimum d'autonomie. Pour autant, nous savons bien que certains adultes sont entièrement placés sous la coupe d'autres personnes, qui les tiennent par la violence ou par d’autres moyens. Je pense notamment aux sectes. Aussi serait-il intéressant de creuser cette question pour voir comment faire évoluer les choses, tout en sachant que cela prendra du temps et que nous sommes effectivement liés par des conventions internationales.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 3, présenté par M. Richard, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 8
1° Après le mot :
afin
insérer les mots :
soit de la réduire en esclavage,
2° En conséquence, supprimer les mots :
ou à de l’esclavage
La parole est à M. le rapporteur.
Nous avons déjà expliqué pourquoi la commission avait décidé de ne pas inscrire le délit ou le crime d’esclavage ou de mise en esclavage dans le projet de loi. Reste que nous sommes tenus de faire usage du mot « esclavage » dans la définition de la traite. La rédaction actuelle ne nous semblant pas cohérente, l’amendement que je présente est donc rédactionnel.
L'amendement est adopté.
Je souhaiterais de quelques mots prolonger l’échange que nous avons initié avec Mme la garde des sceaux sur le thème de la protection des victimes de la traite, qui est distinct de la question des repentis.
Nous observons, à travers un certain nombre d’instances pénales, la situation d’extrême dépendance dans laquelle se trouvent les victimes – souvent des jeunes femmes ou des enfants – de prostitution et de mendicité forcées. Nous mesurons tous la prise de risque que représente pour elles la décision d’échapper à l’emprise d’un groupe ou d’une bande où règnent une violence et une cruauté indicibles. Des événements récents ont montré à quel point ceux qui dirigent ces réseaux sont dépourvus de scrupules.
Il existe des dispositifs matériels et sociaux permettant d’accompagner et de protéger les victimes, qui sont également des auxiliaires essentiels de la justice pour confondre les chefs de gangs. Cependant, nous n’avons pas voulu adopter un nouveau dispositif législatif, qui aurait créé des obligations à l’égard de l’exécutif, avant d’en avoir mesuré toutes les répercussions.
En attendant, nous encourageons le Gouvernement à poursuivre son action en faveur de la protection des victimes. Le faible nombre de poursuites qui aboutissent en raison du règne de la loi du silence et de la terreur en démontre la nécessité.
Monsieur le rapporteur, le Gouvernement partage entièrement votre préoccupation.
Lors d’une précédente législature, des dispositions en faveur des victimes, notamment en ce qui concerne leur accompagnement matériel, avaient été adoptées. Cependant, le texte avait été appauvri pendant son parcours législatif et, au bout du compte, il n’était pas tout à fait satisfaisant.
Nous allons faire le point avec la ministre des droits des femmes sur ce sujet. Il faudra probablement que nous reprenions ce texte et que nous y apportions des améliorations.
L'article 1 er est adopté.
(Non modifié)
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° A Après l’article 2-21, il est inséré un article 2-22 ainsi rédigé :
« Art. 2 -22 . – Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, dont l’objet statutaire comporte la lutte contre la traite des êtres humains, peut exercer les droits reconnus à la partie civile, en ce qui concerne les infractions de traite des êtres humains réprimées par les articles 225-4-1 à 225-4-9 du code pénal. Toutefois, l’association n’est recevable dans son action que si elle justifie avoir reçu l’accord de la victime. Si celle-ci est un mineur ou un majeur protégé, l’accord doit être donné par son représentant légal. » ;
1° Au premier alinéa de l’article 706-47, après le mot : « sexuelles », sont insérés les mots : «, de traite des êtres humains à l’égard d’un mineur » et, après la référence : « 222-31, », sont insérées les références : « 225-4-1 à 225-4-4, » ;
2° Au début de l’article 706-53, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« À tous les stades de la procédure, le mineur victime d’un crime ou d’un délit peut, à sa demande, être accompagné par son représentant légal et, le cas échéant, par la personne majeure de son choix, sauf s’il a été fait application de l’article 706-50 ou sauf décision contraire motivée prise par l’autorité judiciaire compétente. » –
Adopté.
Chapitre Ier bis
(Division et intitulé supprimés)
(Supprimé)
Chapitre II
Dispositions portant transposition de la directive 2010/64/UE du Parlement européen et du Conseil, du 20 octobre 2010, relative au droit à l’interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales
(Non modifié)
Le III de l’article préliminaire du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Si cette personne ne comprend pas la langue française, elle a droit, dans une langue qu’elle comprend et jusqu’au terme de la procédure, à l’assistance d’un interprète et à la traduction des pièces essentielles à l’exercice de sa défense et à la garantie du caractère équitable du procès qui doivent, à ce titre, lui être remises ou notifiées en application du présent code. » ;
2° À la première phrase du troisième alinéa, les mots : « cette personne » sont remplacés par les mots : « la personne suspectée ou poursuivie ».
L'amendement n° 4, présenté par M. Richard, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéas 2 et 3
Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :
1° Après le deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« S’il existe un doute sur la capacité de la personne suspectée ou poursuivie à comprendre la langue française, l’autorité qui procède à son audition ou devant laquelle cette personne comparaît vérifie que la personne parle et comprend cette langue.
« Si cette personne ne comprend pas la langue française, elle a droit, dans une langue qu’elle comprend et jusqu’au terme de la procédure, à l’assistance d’un interprète, y compris pour les entretiens avec son avocat ayant un lien direct avec tout interrogatoire ou toute audience, ainsi qu’à la traduction des pièces essentielles à l’exercice de sa défense et à la garantie du caractère équitable du procès qui doivent, à ce titre, lui être remises ou notifiées en application du présent code. À titre exceptionnel, une traduction orale ou un résumé oral de ces pièces peut être effectué. La personne suspectée ou poursuivie ne peut renoncer à la traduction de ces pièces essentielles qu’expressément, après avoir été informée des conséquences de sa décision. » ;
La parole est à M. le rapporteur.
À la différence de l’Assemblée nationale, il nous semble qu’il faut élever au niveau législatif quatre exigences : un mécanisme permettant de vérifier que la personne suspectée ou poursuivie maîtrise la langue française ; le droit à un interprète lors des entretiens de la personne suspectée ou poursuivie avec son avocat ; la possibilité, à titre certes exceptionnel, d’une traduction orale des pièces essentielles, ce qui est très important pour éviter de retarder l’action pénale ; enfin, le fait que la personne ne peut renoncer expressément à la traduction qu’après avoir été informée des conséquences de cette décision.
Introduire ces dispositions dans la loi plutôt que les transposer par voie réglementaire protégera mieux les victimes. Le Gouvernement émet donc un avis favorable.
L'amendement est adopté.
L'article 3 est adopté.
Chapitre III
Dispositions portant transposition de la directive 2011/93/UE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2011, relative à la lutte contre les abus sexuels et l’exploitation sexuelle des enfants, ainsi que la pédopornographie et remplaçant la décision-cadre 2004/68/JAI du Conseil
Le titre II du livre II du code pénal est ainsi modifié :
1° La section 3 du chapitre II est complétée par un article 222-22-2 ainsi rédigé :
« Art. 222 -22 -2 . – Constitue également une agression sexuelle le fait de contraindre une personne par la violence, la menace ou la surprise à subir une atteinte sexuelle de la part d’un tiers.
« Ces faits sont punis des peines prévues aux articles 222-23 à 222-30 selon la nature des atteintes subies et selon les circonstances mentionnées à ces mêmes articles.
« La tentative du délit prévu au présent article est punie des mêmes peines. » ;
2° L’article 222-29 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « imposées », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « à une personne dont la particulière vulnérabilité due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse est apparente ou connue de son auteur. » ;
b) Les 1° et 2° sont abrogés ;
3° Après l’article 222-29, il est inséré un article 222-29-1 ainsi rédigé :
« Art. 222-29-1 . – Les agressions sexuelles autres que le viol sont punies de dix ans d’emprisonnement et de 150 000 € d’amende lorsqu’elles sont imposées à un mineur de quinze ans. »
4° L’article 225-11-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Il en est de même dans le cas où l’un des crimes mentionnés aux articles 225-7-1, 225-8 ou 225-9 a été commis sur un mineur hors du territoire de la République par un étranger résidant habituellement sur le territoire français. » ;
5° L’article 227-22 est ainsi modifié :
a) À la seconde phrase du premier alinéa, les mots : « lorsque le mineur est âgé de moins de quinze ans ou » sont supprimés ;
b) Le deuxième alinéa est complété par les mots : « ou d’assister en connaissance de cause à de telles réunions » ;
c) Le dernier alinéa est complété par les mots : « ou à l’encontre d’un mineur de quinze ans » ;
6° L’article 227-23 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque l’image ou la représentation concerne un mineur de quinze ans, ces faits sont punis même s’ils n’ont pas été commis en vue de la diffusion de cette image ou représentation. » ;
b) Le quatrième alinéa est supprimé ;
c) Au cinquième alinéa, après le mot : « habituellement », sont insérés les mots : « ou en contrepartie d’un paiement » et, après les mots : « disposition une telle image ou représentation », sont insérés les mots : «, d’acquérir » ;
d) Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La tentative des délits prévus au présent article est punie des mêmes peines. » ;
7° Au premier alinéa de l’article 227-27, les mots : « et non émancipé par le mariage » sont supprimés et les mots : « deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € » sont remplacés par les mots : « trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € » ;
8° L’article 227-27-2 est ainsi rétabli :
« Art. 227 -27 -2 . – La tentative des délits prévus aux articles 227-25, 227-26 et 227-27 est punie des mêmes peines. » –
Adopté.
I. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1°A §(nouveau) À la première phrase de l’article 2-3, les mots : «, y compris incestueuses, » sont supprimés ;
1° Le second alinéa de l’article 356 est supprimé ;
2° La deuxième phrase du premier alinéa de l’article 706-50 est supprimée.
II §(nouveau) . – Le code pénal est ainsi modifié :
1° À l’article 222-31-2, les mots : « incestueux » et « incestueuse » sont supprimés ;
2° À l’article 227-27-3, le mot : « incestueuse » est supprimé. –
Adopté.
Chapitre IV
Dispositions portant transposition de la décision-cadre 2009/299/JAI du Conseil, du 26 février 2009, portant modification des décisions-cadres 2002/584/JAI, 2005/214/JAI, 2006/783/JAI, 2008/909/JAI et 2008/947/JAI, renforçant les droits procéduraux des personnes et favorisant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux décisions rendues en l’absence de la personne concernée lors du procès
Le chapitre IV du titre X du livre IV du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° L’article 695-17 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la personne arrêtée est recherchée aux fins d’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privative de liberté et que, ayant été condamnée en son absence, elle demande que lui soit communiquée la décision de condamnation, le ministère public, dès qu’il est informé de cette demande, transmet une copie de la décision à l’autorité judiciaire de l’État membre d’exécution pour qu’elle la remette à l’intéressé. » ;
2° Après l’article 695-22, il est inséré un article 695-22-1 ainsi rédigé :
« Art. 695 -22 -1 . – Lorsque le mandat d’arrêt européen est émis aux fins d’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privative de liberté, son exécution est également refusée dans le cas où l’intéressé n’a pas comparu en personne lors du procès à l’issue duquel la peine ou la mesure de sûreté a été prononcée sauf si, selon les indications portées par l’État membre d’émission dans le mandat d’arrêt européen, il se trouve dans l’un des cas suivants :
« 1° Il a été informé dans les formes légales et effectivement, de manière non équivoque, en temps utile, par voie de citation ou par tout autre moyen, de la date et du lieu fixés pour le procès et de la possibilité qu’une décision puisse être rendue à son encontre en cas de non-comparution ;
« 2° Ayant eu connaissance de la date et du lieu du procès, il a été défendu pendant celui-ci par un conseil, désigné soit par lui-même, soit à la demande de l’autorité publique, auquel il avait donné mandat à cet effet ;
« 3° Ayant reçu signification de la décision et ayant été expressément informé de son droit d’exercer à l’encontre de celle-ci un recours permettant d’obtenir un nouvel examen de l’affaire au fond, en sa présence, par une juridiction ayant le pouvoir de prendre une décision annulant la décision initiale ou se substituant à celle-ci, il a indiqué expressément qu’il ne contestait pas la décision initiale ou n’a pas exercé dans le délai imparti le recours qui lui était ouvert ;
« 4° La décision dont il n’a pas reçu signification doit lui être signifiée dès sa remise lors de laquelle il est en outre informé de la possibilité d’exercer le recours prévu au 3° ainsi que du délai imparti pour l’exercer. » ;
3° L’article 695-27 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le mandat d’arrêt européen a été émis aux fins d’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privative de liberté et que la personne se trouve dans le cas prévu au 4° de l’article 695-22-1 et n’a pas été informée dans les formes légales de l’existence des poursuites pénales ayant abouti à la décision de condamnation, elle peut demander à recevoir copie de celle-ci avant la remise. Le procureur général informe de cette demande l’autorité compétente de l’État membre d’émission. Dès que cette autorité lui a adressé copie de la décision, le procureur général la communique à l’intéressé. Cette communication est faite pour information. Elle ne vaut pas signification de la décision et ne fait courir aucun délai de recours. » –
Adopté.
(Non modifié)
Le 7° de l’article 713-20 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :
« 7° Si, selon les indications portées dans le certificat, l’intéressé n’a pas comparu en personne lors du procès à l’issue duquel la confiscation a été prononcée sauf si, selon ces indications, il se trouve dans l’un des cas prévus aux 1° à 3° de l’article 695-22-1 ; ». –
Adopté.
Chapitre V
Dispositions relatives à l’application de la décision 2009/426/JAI du Conseil, du 16 décembre 2008, sur le renforcement d’Eurojust et modifiant la décision 2002/187/JAI instituant Eurojust afin de renforcer la lutte contre les formes graves de criminalité
(Non modifié)
La section 3 du chapitre II du titre X du livre IV du code de procédure pénale est ainsi modifiée :
1° L’article 695-4 est ainsi modifié :
a) Les mots : « d’un représentant » sont remplacés par les mots : « du membre » ;
b) Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« L’unité Eurojust peut également, avec l’accord des États membres concernés :
« 1° Coordonner l’exécution des demandes d’entraide judiciaire émises par un État non membre de l’Union européenne lorsque ces demandes se rattachent à des investigations portant sur les mêmes faits et doivent être exécutées dans deux États membres au moins ;
« 2° Faciliter l’exécution des demandes d’entraide judiciaire devant être exécutées dans un État non membre de l’Union européenne lorsqu’elles se rattachent à des investigations portant sur les mêmes faits et émanent d’au moins deux États membres. » ;
2° L’article 695-5 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « de ses représentants nationaux » sont remplacés par les mots : « du membre national » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« L’unité Eurojust agissant par l’intermédiaire du membre national peut, en outre, demander au procureur général de faire prendre toute mesure d’investigation particulière ou toute autre mesure justifiée par les investigations ou les poursuites. » ;
3° Après l’article 695-5, il est inséré un article 695-5-1 ainsi rédigé :
« Art. 695 -5 -1 . – L’unité Eurojust, agissant en tant que collège, peut adresser au procureur général ou au juge d’instruction un avis écrit et motivé sur la manière de résoudre un conflit de compétences ou sur des difficultés ou refus récurrents rencontrés dans l’exécution de demandes présentées ou de décisions prises en matière de coopération judiciaire en application, notamment, d’instruments fondés sur le principe de reconnaissance mutuelle.
« Le procureur général ou le juge d’instruction peuvent faire état auprès du collège d’Eurojust des difficultés ou refus mentionnés au premier alinéa et solliciter de celui-ci qu’il rende un avis écrit et motivé à ce sujet. » ;
4° L’article 695-6 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après le mot : « demande », sont insérés les mots : « ou à un avis » ;
b) Le second alinéa est ainsi rédigé :
« Toutefois, cette motivation n’est pas obligatoire lorsqu’elle peut porter atteinte à la sécurité de la Nation ou compromettre la sécurité d’une personne. » ;
5° L’article 695-7 est ainsi modifié :
a) Les mots : « d’entraide » sont remplacés par les mots : « présentée ou une décision prise en matière de coopération judiciaire en application, notamment, d’un instrument mettant en œuvre le principe de reconnaissance mutuelle » ;
b) Le mot : « représentant » est remplacé par le mot : « membre » ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« En cas d’urgence, la demande de coopération peut être adressée au dispositif permanent de coordination d’Eurojust. » –
Adopté.
La section 4 du chapitre II du titre X du livre IV du même code est ainsi modifiée :
1° À l’intitulé, les mots : « représentant national auprès » sont remplacés par les mots : « membre national » ;
2° Au premier alinéa de l’article 695-8, le mot : « représentant » est remplacé par le mot : « membre » et le mot : « trois » est remplacé par le mot : « quatre » ;
3° Après l’article 695-8, sont insérés des articles 695-8-1 à 695-8-5 ainsi rédigés :
« Art. 695 -8 -1 . – Pour les nécessités liées à l’accomplissement de sa mission, le membre national de l’unité Eurojust a accès, dans les mêmes conditions que les magistrats du ministère public, aux données contenues dans tout traitement automatisé de données à caractère personnel.
« Art. 695 -8 -2 . – I. – Le membre national est informé par le procureur général, le procureur de la République ou le juge d’instruction des investigations ou procédures en cours ainsi que des condamnations relatives à des affaires susceptibles d’entrer dans le champ de compétence d’Eurojust, lorsque :
« 1° Elles ont donné lieu ou sont susceptibles de donner lieu à la transmission à au moins deux États membres de demandes ou de décisions en matière de coopération judiciaire en application, notamment, d’instruments fondés sur le principe de reconnaissance mutuelle ;
« 2° Elles portent sur une infraction punissable, dans l’un au moins des États membres concernés, d’une peine ou d’une mesure de sûreté privative de liberté égale ou supérieure à cinq ans, lorsque l’une des conditions suivantes est remplie :
« a) L’infraction entre dans l’une des catégories suivantes :
« – traite des êtres humains ;
« – exploitation sexuelle des enfants et pédopornographie ;
« – trafic de drogue ;
« – trafic d’armes à feu, de leurs éléments et munitions ;
« – corruption ;
« – fraude portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union européenne ;
« – contrefaçon de l’euro ;
« – blanchiment de capitaux ;
« – attaques visant les systèmes d’information ;
« b) Les éléments du dossier font apparaître l’implication d’une organisation criminelle ;
« c) Les éléments du dossier font apparaître que, par leur ampleur ou leur incidence transfrontalière, les faits sont susceptibles d’affecter gravement l’Union européenne ou de concerner des États membres autres que ceux directement impliqués.
« Le membre national est, en outre, informé par le procureur général, le procureur de la République ou le juge d’instruction des investigations, des procédures et des condamnations relatives aux infractions terroristes qui intéressent, ou sont susceptibles d’intéresser, au moins un autre État membre.
« II. – Le membre national est également informé par le procureur général, le procureur de la République ou le juge d’instruction :
« 1° De la mise en place des équipes communes d’enquête et des résultats de leurs travaux ;
« 2° De la mise en œuvre d’une mesure de surveillance de l’acheminement ou du transport des objets, biens ou produits tirés de la commission d’une ou plusieurs infractions ou servant à les commettre, lorsque la mesure concerne au moins trois États dont au moins deux États membres ;
« 3° Des conflits de compétences avec un autre État membre et des difficultés ou refus récurrents d’exécution de demandes présentées ou de décisions prises en matière de coopération judiciaire en application, notamment, d’instruments fondés sur le principe de reconnaissance mutuelle.
« III. – Le procureur général, le procureur de la République ou le juge d’instruction n’est pas tenu de communiquer à l’unité Eurojust les informations mentionnées aux I et II lorsque cette communication serait de nature à porter atteinte à la sécurité de la Nation ou à compromettre la sécurité d’une personne.
« Art. 695 -8 -3. – Le membre national est compétent pour recevoir et transmettre au procureur général compétent des informations relatives aux enquêtes de l’Office européen de lutte antifraude dont il est destinataire.
« Art. 695 -8 -4 . – En qualité d’autorité nationale compétente, le membre national peut recevoir et transmettre, selon le cas, aux autorités compétentes des autres États membres ou aux autorités judiciaires françaises toutes demandes présentées ou toutes décisions prises par les unes ou les autres en matière de coopération judiciaire en application, notamment, d’instruments fondés sur le principe de reconnaissance mutuelle. Il peut assurer le suivi de ces demandes et décisions et en faciliter l’exécution. Lorsqu’il fait usage de ces prérogatives, le membre national en avise dans les plus brefs délais l’autorité judiciaire compétente.
« Lorsqu’une demande ou une décision en matière de coopération judiciaire a fait l’objet, de la part des autorités judiciaires françaises, d’une exécution partielle ou insuffisante, le membre national peut demander à ces autorités l’accomplissement des mesures complémentaires qui lui paraissent nécessaires.
« Art. 695 -8 -5 . – I. – Le membre national peut, en qualité d’autorité nationale, à la demande ou avec l’autorisation de l’autorité judiciaire compétente, présenter des demandes ou prendre des décisions en matière de coopération judiciaire en application, notamment, d’instruments fondés sur le principe de reconnaissance mutuelle.
« La demande ou l’autorisation de l’autorité judiciaire compétente prévue au premier alinéa est écrite et ne peut porter que sur un ou plusieurs actes déterminés. Dès l’exécution de l’acte mentionné dans la demande ou l’autorisation, le membre national en informe cette autorité et lui adresse les pièces d’exécution, en original ou en copie selon la décision de celle-ci.
« À tout moment, l’exécution de l’acte peut être interrompue par l’autorité judiciaire l’ayant demandé ou autorisé.
« II. – Le membre national peut proposer au procureur général ou au procureur de la République de procéder aux actes suivants ou de requérir qu’il y soit procédé :
« 1° Actes nécessaires à l’exécution des demandes présentées ou des décisions prises en matière de coopération judiciaire par un autre État membre en application, notamment, d’instruments fondés sur le principe de reconnaissance mutuelle ;
« 2° Actes d’investigation qui ont été considérés, à l’issue d’une réunion de coordination organisée par l’unité Eurojust, comme nécessaires pour l’efficacité d’investigations conduites sur le territoire de plusieurs États membres ;
« 3° Opération de surveillance de l’acheminement ou du transport des objets, biens ou produits tirés de la commission d’une ou plusieurs infractions ou servant à les commettre ;
« Le représentant du ministère public fait connaître dans les meilleurs délais au membre national d’Eurojust la suite qu’il entend donner à sa proposition. » ;
4° L’article 695-9 est ainsi rédigé :
« Art. 695 -9 . – Avec l’accord de l’autorité judiciaire compétente, le membre national peut participer, en tant que représentant d’Eurojust, à la mise en place et au fonctionnement des équipes communes d’enquête. Il est invité à y participer lorsque l’équipe commune d’enquête bénéficie d’un financement de l’Union européenne. »
L'amendement n° 5, présenté par M. Richard, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéas 6 à 9
Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :
« Art. 695 -8 -2. – I. – Le membre national est informé par le procureur général, le procureur de la République ou le juge d’instruction des investigations ou procédures en cours ainsi que des condamnations relatives à des affaires susceptibles d’entrer dans le champ de compétence d’Eurojust, lorsqu’elles ont donné lieu ou sont de nature à donner lieu à la transmission à au moins deux États membres de demandes ou de décisions en matière de coopération judiciaire en application, notamment, d’instruments fondés sur le principe de reconnaissance mutuelle et lorsque l’une des conditions suivantes est remplie :
« a) Elles portent sur une infraction punissable, dans l’un au moins des États membres concernés, d’une peine ou d’une mesure de sûreté privative de liberté égale ou supérieure à cinq ans et l’infraction entre dans l’une des catégories suivantes :
La parole est à M. le rapporteur.
Cet amendement vise à proposer une nouvelle rédaction des premiers alinéas relatifs à l’intervention du membre national d’Eurojust, nouvelle appellation malheureuse alors qu’il s’agit pourtant d’un représentant participant à une collégialité.
Le membre national doit être informé dans trois circonstances : lorsqu’une infraction peut faire l’objet de sanctions d’une certaine gravité dans l’un au moins des États membres concernés, lorsqu’une organisation criminelle est impliquée, lorsque le dossier a une incidence transfrontalière grave.
Or, dans le projet de loi tel qu’il nous a été transmis par l’Assemblée nationale, la condition imposant que l’infraction soit punissable d’une peine égale ou supérieure à cinq ans est cumulative, au lieu d’être alternative. Cet amendement vise donc à proposer une rédaction plus conforme à ce que prévoit la décision européenne.
Le Gouvernement est favorable à cette correction bienvenue.
L'amendement est adopté.
L'article 8 est adopté.
Chapitre VI
Dispositions portant transposition de la décision-cadre 2008/909/JAI du Conseil, du 27 novembre 2008, concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements en matière pénale prononçant des peines ou des mesures privatives de liberté aux fins de leur exécution dans l’Union européenne
Le titre II du livre V du code de procédure pénale est complété par un chapitre VI ainsi rédigé :
« Chapitre VI
« De l’exécution des décisions de condamnation à une peine ou à une mesure de sûreté privative de liberté en application de la décision -cadre 2008/909/JAI du Conseil, du 27 novembre 2008, concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements en matière pénale prononçant des peines ou des mesures privatives de liberté aux fins de leur exécution dans l’Union européenne
« Section 1
« Dispositions générales
« Art. 728 -10. – Les dispositions du présent chapitre déterminent les règles applicables, en vue de faciliter la réinsertion sociale de la personne condamnée, à la reconnaissance et à l’exécution, dans un État membre de l’Union européenne, des condamnations pénales définitives à une peine ou à une mesure de sûreté privative de liberté prononcées par les juridictions françaises ainsi qu’à la reconnaissance et à l’exécution en France de telles condamnations prononcées par les juridictions d’un autre État membre.
« L’État sur le territoire duquel a été prononcée la décision est appelé État de condamnation. L’État auquel est demandée l’exécution de cette décision sur son territoire est appelé État d’exécution.
« Art. 728 -11 . – Une décision de condamnation prononcée par une juridiction française ou une juridiction d’un État membre peut être transmise, selon le cas, par l’autorité française compétente aux fins de reconnaissance et d’exécution dans l’État d’exécution ou à cette autorité aux fins de reconnaissance et d’exécution en France si la personne condamnée se trouve sur le territoire français ou celui de l’autre État membre et dans les cas suivants :
« 1° La personne condamnée est une ressortissante de l’État d’exécution et a sa résidence habituelle sur le territoire de cet État ou, lorsque la France est l’État d’exécution, est une ressortissante française et a sa résidence habituelle sur le territoire français ;
« 2° La personne condamnée est une ressortissante de l’État d’exécution ou, lorsque la France est l’État d’exécution, une ressortissante française et fait l’objet, en vertu de la décision de condamnation ou de toute autre décision judiciaire ou administrative, d’une mesure d’éloignement vers le territoire de l’État dont elle est ressortissante, applicable à sa libération ;
« 3° La personne condamnée, quelle que soit sa nationalité, ainsi que l’autorité compétente de l’État d’exécution ou, lorsque la France est État d’exécution, l’autorité compétente française consentent à l’exécution de la décision de la condamnation faisant l’objet de la transmission.
« Dans le cas prévu au 3°, le consentement de la personne condamnée n’est pas requis lorsqu’elle s’est réfugiée sur le territoire de l’État d’exécution ou, lorsque la France est l’État d’exécution, sur le territoire français ou y est retournée en raison de sa condamnation ou des investigations et des poursuites ayant abouti à celle-ci.
« Dans le cas prévu au 3° et lorsque la France est État d’exécution, l’autorité compétente ne peut consentir à l’exécution de la peine sur le territoire français que lorsque la personne condamnée réside régulièrement sur le territoire national de façon ininterrompue depuis au moins cinq ans.
« Art. 728 -12 . – §(Non modifié) Toute décision de condamnation transmise en application du présent chapitre aux fins de reconnaissance et d’exécution sur le territoire français ou sur celui d’un autre État membre ou toute demande de transit est accompagnée d’un certificat précisant notamment :
« 1° La désignation de l’État de condamnation et de la juridiction ayant rendu la décision de condamnation ;
« 2° L’identité de la personne à l’encontre de laquelle la décision de condamnation a été rendue, l’adresse de son ou ses derniers domiciles connus et l’indication qu’elle se trouve dans l’État de condamnation ou dans l’État d’exécution ;
« 3° La date de la décision de condamnation et celle à laquelle cette décision est devenue définitive ;
« 4° Les motifs de la transmission de la décision de condamnation au regard de l’article 728-11 ;
« 5° La date, le lieu et les circonstances dans lesquels la ou les infractions ont été commises ainsi que la nature, la qualification juridique et une description complète des faits ;
« 6° La nature de la peine ou de la mesure de sûreté privative de liberté à exécuter, sa durée totale, la part déjà exécutée et la date prévue de fin d’exécution ;
« 7° L’indication, le cas échéant, du consentement de la personne condamnée à la transmission de la décision de condamnation ;
« 8° Les observations éventuelles de la personne condamnée sur la transmission de la décision de condamnation.
« Le certificat est signé par l’autorité compétente de l’État de condamnation, qui atteste l’exactitude des informations y étant contenues.
« Art. 728 -13 . – §(Non modifié) Le retrait du certificat vaut retrait de la demande de reconnaissance et d’exécution et fait obstacle à la mise à exécution de la peine ou de la mesure de sûreté privative de liberté en application du présent chapitre.
« Art. 728 -14. – §(Non modifié) La transmission de la décision de condamnation, de la demande de transit, du certificat et de toutes les pièces relatives à l’exécution de la condamnation ainsi que tout échange relatif à celle-ci s’effectuent directement, selon le cas, avec les autorités compétentes de l’État de condamnation ou celles de l’État d’exécution, par tout moyen laissant une trace écrite et dans des conditions permettant au destinataire de vérifier l’authenticité des pièces transmises.
« Section 2
« Dispositions relatives à l’exécution, sur le territoire des autres États membres de l’Union européenne, des condamnations prononcées par les juridictions françaises
« Paragraphe 1
« Transmission de la demande par le ministère public
« Art. 728 -15 . – §(Non modifié) Le représentant du ministère public près la juridiction ayant prononcé la décision de condamnation est compétent pour transmettre à l’autorité compétente d’un autre État membre de l’Union européenne, aux fins qu’elle reconnaisse cette décision et la ramène à exécution, une copie de celle-ci et, après l’avoir établi et signé, le certificat prévu à l’article 728-12.
« Il peut procéder à cette transmission d’office ou à la demande de l’autorité compétente de l’État d’exécution ou de la personne condamnée.
« Il peut décider la transmission lorsque les conditions prévues à l’article 728-11 sont réunies et qu’il a acquis la certitude que l’exécution de la condamnation sur le territoire de l’autre État membre facilitera la réinsertion sociale de l’intéressé.
« Art. 728 -16 . – §(Non modifié) Avant de procéder à la transmission de la décision de condamnation et du certificat, le représentant du ministère public peut consulter l’autorité compétente de l’État d’exécution afin de déterminer, notamment, si l’exécution de la condamnation sur le territoire de celui-ci est de nature à faciliter la réinsertion sociale de la personne condamnée. Une telle consultation est obligatoire dans les cas autres que ceux visés aux 1° et 2° de l’article 728-11.
« Art. 728 -17 . – §(Non modifié) Lorsque la personne condamnée se trouve sur le territoire français, le représentant du ministère public procède ou fait procéder à son audition aux fins de recueillir ses observations orales ou écrites sur la transmission envisagée. Il recueille son consentement lorsque celui-ci est requis en application du 3° de l’article 728-11. Si la personne condamnée est mineure ou si elle fait l’objet d’une mesure de protection, il procède ou fait procéder, en outre, à l’audition de la personne chargée de la représenter ou de l’assister. Il est dressé procès-verbal des auditions. Le cas échéant, la personne chargée d’assister ou de représenter le mineur ou la personne faisant l’objet d’une mesure de protection peut faire part de ses observations orales ou écrites, qui sont jointes au dossier.
« Lorsque la personne condamnée ou la personne chargée de la représenter ou de l’assister en raison de sa minorité ou d’une mesure de protection se trouve sur le territoire de l’État d’exécution, le ministère public demande à l’autorité compétente de cet État de procéder aux auditions prévues au premier alinéa.
« Art. 728 -18 . – §(Non modifié) Si le représentant du ministère public décide de transmettre la décision de condamnation et le certificat à l’autorité compétente de l’État d’exécution, il en informe la personne condamnée dans une langue qu’elle comprend. Il l’informe en outre :
« 1° Que, en cas d’exécution de la condamnation sur le territoire de cet État, l’exécution de la peine sera régie par sa législation qui déterminera ainsi, notamment, les conditions d’une libération anticipée ou conditionnelle ;
« 2° Que la période de privation de liberté déjà subie au titre de la condamnation sera déduite de la peine restant à exécuter ;
« 3° Que l’autorité compétente de l’État d’exécution peut décider d’adapter la peine ou la mesure de sûreté privative de liberté prononcée si, par sa durée ou sa nature, elle est incompatible avec la législation de cet État ;
« 4° Que l’adaptation de la peine ou de la mesure de sûreté privative de liberté par l’État d’exécution ne peut avoir pour effet de l’aggraver.
« Il est dressé procès-verbal de la formalité prévue au présent article.
« Si la personne condamnée se trouve sur le territoire de l’État d’exécution, le représentant du ministère public demande à l’autorité compétente de cet État de procéder à cette formalité.
« Art. 728 -19 . – §(Non modifié) Le représentant du ministère public transmet à l’autorité compétente de l’État d’exécution une copie certifiée conforme de la décision de condamnation ainsi que l’original ou une copie du certificat mentionné à l’article 728-12 et, le cas échéant, une copie du procès-verbal d’audition de la personne condamnée et du procès-verbal d’audition de la personne chargée de la représenter ou de l’assister.
« Il transmet, en outre, à cette autorité une traduction du certificat soit dans la langue officielle ou dans l’une des langues officielles de l’État d’exécution, soit dans l’une des langues officielles des institutions de l’Union européenne acceptées par cet État. Sur demande de l’autorité compétente de l’État d’exécution, il fait établir et transmet la traduction, dans les mêmes conditions, de la décision de condamnation ou des parties essentielles de cette décision.
« Sur demande de l’autorité compétente de l’État d’exécution, la copie certifiée conforme de la décision de condamnation et l’original du certificat lui sont adressés dans les meilleurs délais.
« Art. 728 -20 . – Lorsque la personne condamnée se trouve sur le territoire de l’État d’exécution, le ministère public peut demander à l’autorité compétente de cet État, lors de la transmission de la décision de condamnation et du certificat, de procéder à l’arrestation provisoire de la personne condamnée ou de prendre toute mesure permettant d’assurer son maintien sur le territoire de cet État dans l’attente de la décision de reconnaissance et d’exécution.
« En cas d’urgence, si le représentant du ministère public n’est pas en mesure d’adresser le certificat à l’autorité compétente de l’État d’exécution, il lui transmet les informations mentionnées aux 1° à 6° de l’article 728-12.
« Art. 728 -21 . – §(Non modifié) Lorsque le représentant du ministère public est consulté par l’autorité compétente de l’État d’exécution sur une reconnaissance partielle de la décision de condamnation, il examine, après avoir envisagé en lien avec cette autorité les modalités possibles d’une telle solution, si un accord peut être trouvé.
« L’exécution partielle de la décision de condamnation ne peut avoir pour conséquence d’accroître la durée de la peine ou de la mesure de sûreté privative de liberté.
« S’il approuve les modalités d’exécution partielle envisagées, le représentant du ministère public donne son accord. Dans le cas contraire, il retire le certificat.
« Art. 728 -22 . – §(Non modifié) Tant que l’exécution de la peine n’a pas commencé, le représentant du ministère public peut, à tout moment, décider de retirer le certificat. Il indique à l’autorité compétente de l’État d’exécution le motif de ce retrait.
« Le certificat est retiré, notamment, lorsque :
« 1° L’autorité compétente de l’État d’exécution ayant émis, postérieurement à la transmission de la décision de condamnation, un avis motivé selon lequel l’exécution de la condamnation ne contribuerait pas à faciliter la réinsertion sociale de la personne condamnée, le représentant du ministère public estime cet avis fondé ;
« 2° L’autorité compétente de l’État d’exécution l’ayant informé de l’adaptation qui serait apportée à la peine prononcée, le représentant du ministère estime, au vu de cette information, ne pas devoir maintenir la demande aux fins de reconnaissance et d’exécution ;
« 3° L’autorité compétente de l’État d’exécution ayant communiqué, d’office ou à la demande du représentant du ministère public, les dispositions applicables dans cet État en matière de libération anticipée ou conditionnelle, celui-ci estime, au vu de cette information, ne pas devoir maintenir la demande aux fins de reconnaissance et d’exécution.
« Paragraphe 2
« Transfèrement et transit
« Art. 728 -23 . – §(Non modifié) Dès que l’autorité compétente de l’État d’exécution a fait connaître qu’elle accepte de reconnaître la condamnation et de la mettre à exécution sur son territoire, le représentant du ministère public, si la personne condamnée se trouve sur le territoire français, prend les mesures nécessaires afin qu’elle soit transférée sur le territoire de l’État d’exécution.
« Le transfèrement, dont la date est arrêtée conjointement par le ministre de la justice et l’autorité compétente de l’État d’exécution, a lieu au plus tard trente jours après la décision d’acceptation de l’État d’exécution. S’il est impossible d’y procéder dans ce délai en raison de circonstances imprévues, le transfèrement intervient dès que ces circonstances n’y font plus obstacle, à une nouvelle date arrêtée conjointement et, au plus tard, dans les dix jours de cette date.
« Art. 728 -24 . – §(Non modifié) Le ministre de la justice transmet une demande de transit accompagnée d’une copie du certificat à l’autorité compétente de chaque État membre traversé à l’occasion du transfèrement. À la demande de cette autorité, il fournit une traduction du certificat dans la langue officielle ou dans l’une des langues officielles de l’État concerné ou dans l’une des langues officielles des institutions de l’Union européenne acceptées par cet État.
« Art. 728 -25 . – §(Non modifié) Si l’État membre auquel le transit est demandé ne peut garantir que la personne condamnée ne sera pas poursuivie ou soumise à une mesure privative ou restrictive de liberté sur son territoire pour des faits ou condamnations antérieurs à son départ du territoire français, le ministre de la justice retire la demande de transit.
« Art. 728 -26 . – §(Non modifié) Aucune demande de transit n’est requise lorsque le transfèrement s’effectue par un moyen de transport aérien sans escale prévue. Toutefois, en cas d’atterrissage fortuit sur le territoire d’un État membre de l’Union européenne, le ministre de la justice fournit à l’autorité compétente de cet État le certificat mentionné à l’article 728-12 dans un délai de soixante-douze heures.
« Paragraphe 3
« Consentement à l’exercice de poursuites ou à l’exécution d’une condamnation à raison d’une autre infraction
« Art. 728 -27 . – §(Non modifié) Lorsque, avant ou après le transfèrement de la personne condamnée, l’autorité compétente de l’État d’exécution demande au représentant du ministère public qu’il soit consenti à ce que celle-ci puisse être poursuivie, condamnée ou privée de liberté dans l’État d’exécution pour une infraction qu’elle aurait commise avant son transfèrement, autre que celle pour laquelle la demande aux fins de reconnaissance et d’exécution a été présentée, la chambre de l’instruction est saisie de cette demande.
« Lorsque la demande est présentée après le transfèrement, la chambre de l’instruction compétente est celle dans le ressort de laquelle siège la juridiction ayant prononcé la condamnation dont l’exécution a donné lieu au transfèrement.
« La chambre de l’instruction statue sans recours après s’être assurée que la demande comporte les renseignements prévus à l’article 695-13 et avoir, le cas échéant, obtenu des garanties au regard de l’article 695-32, dans le délai de trente jours à compter de la réception de la demande.
« Le consentement est donné lorsque les agissements pour lesquels il est demandé constituent l’une des infractions mentionnées à l’article 695-23 et entrent dans le champ d’application de l’article 695-12.
« Paragraphe 4
« Exécution de la peine
« Art. 728 -28 . – §(Non modifié) L’exécution de la peine est régie par le droit de l’État sur le territoire duquel elle est exécutée.
« Art. 728 -29 . – §(Non modifié) Lorsque la condamnation fait l’objet d’une amnistie, d’une grâce, d’une révision ou de toute autre décision ou mesure ayant pour effet de lui retirer, immédiatement ou non, son caractère exécutoire, le représentant du ministère public en informe sans délai l’autorité compétente de l’État d’exécution.
« Art. 728 -30 . – §(Non modifié) Le ministère public recouvre la faculté de faire exécuter la décision de condamnation sur le territoire français dès que l’autorité compétente de l’État d’exécution l’informe de la non-exécution partielle de cette décision en raison de l’évasion de la personne condamnée ou du fait que celle-ci ne peut être trouvée sur le territoire de cet État.
« Section 3
« Dispositions relatives à l’exécution sur le territoire français des condamnations prononcées par les juridictions des autres États membres de l’Union européenne
« Paragraphe 1
« Motifs du refus de reconnaissance et d’exécution
« Art. 728 -31 . – §(Non modifié) La reconnaissance et l’exécution sur le territoire français d’une décision de condamnation prononcée par la juridiction d’un autre État membre ne peuvent être refusées que dans les cas prévus aux articles 728-32 et 728-33.
« La décision de refus est motivée par référence à ces mêmes articles.
« Art. 728 -32 . – §(Non modifié) L’exécution de la décision de condamnation est refusée dans les cas suivants :
« 1° Le certificat n’est pas produit, est incomplet ou ne correspond manifestement pas à la décision de condamnation et n’a pas été complété ou corrigé dans le délai fixé ;
« 2° La personne condamnée ne se trouve ni en France, ni dans l’État de condamnation ;
« 3° Les conditions prévues à l’article 728-11 ne sont pas remplies ;
« 4° La décision de condamnation porte sur des infractions pour lesquelles la personne condamnée a déjà été jugée définitivement par les juridictions françaises ou par celles d’un État autre que l’État de condamnation, à condition que la peine ait été exécutée, soit en cours d’exécution ou ne puisse plus être mise à exécution selon la loi de l’État de condamnation ;
« 5° La condamnation est fondée sur des faits qui ne constituent pas des infractions selon la loi française ;
« 6° La personne condamnée bénéficie en France d’une immunité faisant obstacle à l’exécution de la condamnation ;
« 7° La personne condamnée n’a pas comparu en personne au procès qui a mené à la décision, sauf dans les cas visés aux 1° à 3° de l’article 695-22-1 ;
« 8° La prescription de la peine est acquise selon la loi française à la date de la réception du certificat ;
« 9° La condamnation a été prononcée à l’encontre d’un mineur de treize ans à la date des faits ;
« 10° La peine prononcée comporte une mesure de soins psychiatriques ou médicaux ou une autre mesure de sûreté privative de liberté qui ne peut être exécutée en application des règles du système juridique ou de santé français ;
« 11° Il est établi que la personne a été condamnée en raison de son sexe, de sa race, de sa religion, de son origine ethnique, de sa nationalité, de sa langue, de ses opinions politiques ou de son orientation ou identité sexuelle, ou qu’il peut être porté atteinte à la situation de cette personne pour l’une de ces raisons.
« Le motif de refus prévu au 5° n’est pas opposable lorsque la décision de condamnation concerne une infraction en matière de taxes et d’impôts, de douane et de change, en raison de ce que le droit français n’impose pas le même type de taxes ou d’impôts ou ne contient pas le même type de réglementation en matière de taxes, d’impôts, de douane et de change que le droit de l’État de condamnation.
« Art. 728 -33 . – §(Non modifié) L’exécution de la décision de condamnation peut être refusée dans les cas suivants :
« 1° La décision de condamnation est fondée sur des infractions commises en totalité, en majeure partie ou pour l’essentiel sur le territoire français ou en un lieu assimilé ;
« 2° La durée de la peine restant à exécuter est inférieure à six mois à la date de réception du certificat ;
« 3° L’État de condamnation a refusé de donner son consentement à ce que la personne condamnée puisse être poursuivie, condamnée ou privée de liberté en France pour une infraction commise avant son transfèrement, autre que celle ayant motivé celui-ci.
« Paragraphe 2
« Réception et instruction par le procureur de la République de la demande aux fins de reconnaissance et d’exécution
« Art. 728 -34 . – §(Non modifié) Le procureur de la République reçoit les demandes tendant à la reconnaissance et à l’exécution sur le territoire français des décisions de condamnation prononcées par les juridictions des autres États membres. Il peut également demander à l’autorité compétente d’un autre État membre de lui transmettre une demande tendant à la reconnaissance et à l’exécution sur le territoire français d’une décision de condamnation prononcée par une juridiction de cet État.
« Il peut procéder ou faire procéder à tout complément d’information qu’il estime utile.
« Art. 728 -35 . – §(Non modifié) Le procureur de la République compétent est celui dans le ressort duquel se situe la dernière résidence connue de la personne condamnée, le lieu de détention de celle-ci ou le lieu de l’infraction lorsque les faits ont été commis pour partie sur le territoire français. À défaut, le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris est compétent.
« Si le procureur de la République auquel la demande a été adressée par l’État de condamnation aux fins de reconnaissance et d’exécution n’est pas compétent, il la transmet sans délai au procureur de la République compétent. L’autorité compétente de l’État de condamnation est informée de la transmission.
« Art. 728 -36 . – §(Non modifié) Lorsque, avant de transmettre la décision de condamnation et le certificat, l’autorité compétente de l’État de condamnation consulte le procureur de la République, celui-ci l’informe sans délai, dans le cas où, en application du 3° de l’article 728-11, la reconnaissance de la décision est subordonnée au consentement de l’État d’exécution, de sa décision de consentir ou non à la transmission de la décision de condamnation et du certificat.
« Lorsqu’il est consulté par l’autorité compétente de l’État de condamnation avant la transmission de la décision de condamnation et du certificat, le procureur de la République peut indiquer à l’autorité compétente de l’État de condamnation, dans un avis écrit et motivé, si l’exécution en France de la condamnation lui paraît de nature à favoriser la réinsertion sociale de la personne condamnée.
« S’il n’a pas été consulté et que, ayant reçu la décision de condamnation et le certificat, il estime que l’exécution de la condamnation en France n’est pas de nature à favoriser la réinsertion sociale de la personne condamnée, le procureur de la République transmet d’office à l’autorité compétente un avis écrit et motivé en ce sens.
« Art. 728 -37. – §(Non modifié) Lorsque l’autorité compétente de l’État de condamnation lui en fait la demande, le procureur de la République procède à l’audition de la personne condamnée ou de la personne chargée de l’assister ou de la représenter en raison de sa minorité ou d’une mesure de protection, si elle se trouve sur le territoire français. Le cas échéant, il recueille le consentement de la personne condamnée. Le cas échéant, la personne chargée d’assister ou de représenter le mineur ou la personne faisant l’objet d’une mesure de protection peut faire part de ses observations orales ou écrites, qui sont jointes au dossier.
« Art. 728 -38 . – §(Non modifié) Lorsqu’il reçoit la demande d’un État membre aux fins de reconnaissance et d’exécution en France d’une décision de condamnation à une peine ou à une mesure de sûreté privative de liberté prononcée par une juridiction de cet État, le procureur de la République s’assure de la transmission, par l’autorité compétente de l’État de condamnation, de la décision de condamnation ou d’une copie certifiée conforme de celle-ci ainsi que du certificat mentionné à l’article 728-12 et de sa traduction en langue française.
« Le procureur de la République peut, s’il juge le contenu du certificat insuffisant pour prendre une décision sur la demande de reconnaissance et d’exécution, demander que la décision de condamnation ou les parties essentielles de celle-ci, désignées par lui en concertation avec l’autorité compétente de l’État de condamnation, fassent l’objet d’une traduction en langue française. Il peut également, s’il apparaît que le certificat est incomplet ou inexact, demander à cette autorité qu’il soit complété ou rectifié.
« Art. 728 -39 . – §(Non modifié) Le procureur de la République peut demander à l’autorité compétente de l’État de condamnation si elle consent à ce que la personne condamnée puisse être poursuivie, condamnée ou privée de liberté en France pour une infraction commise avant son transfèrement. La demande doit comporter les renseignements prévus à l’article 695-13 et être traduite selon les modalités prévues à l’article 695-14.
« Art. 728 -40 . – §(Non modifié) Lorsqu’il envisage d’opposer l’un des motifs de refus prévus aux 1° à 4°, 7°, 10° et 11° de l’article 728-32 ou au 1° de l’article 728-33, le procureur de la République en informe l’autorité compétente de l’État de condamnation afin de lui permettre de fournir, le cas échéant, toutes informations supplémentaires.
« Art. 728 -41 . – §(Non modifié) Sur la demande de l’autorité compétente de l’État de condamnation, le procureur de la République lui donne connaissance des dispositions applicables en matière de libération conditionnelle ou anticipée.
« Paragraphe 3
« Décision sur la reconnaissance et l’exécution et recours
« Art. 728 -42 . – §(Non modifié) Lorsqu’il est en possession des informations nécessaires, le procureur de la République décide, dans un délai maximal de huit jours, s’il y a lieu de reconnaître la décision de condamnation à une peine ou à une mesure de sûreté privative de liberté comme étant exécutoire sur le territoire français.
« Art. 728 -43 . – §(Non modifié) Le procureur de la République reconnaît la décision de condamnation comme étant exécutoire sur le territoire français en l’absence de l’un des motifs de refus prévus aux articles 728-32 et 728-33.
« Dans le cas où, en application du 3° de l’article 728-11, le consentement de l’autorité compétente de l’État d’exécution est requis, le procureur de la République apprécie s’il y a lieu de le donner en considérant, notamment, l’intérêt de sa décision pour la réinsertion sociale de la personne condamnée.
« Dans le cas où le consentement de la personne condamnée est requis en application du même 3°, le procureur de la République constate expressément, dans la décision reconnaissant la décision de condamnation comme exécutoire, qu’il a été donné.
« La décision du procureur de la République refusant de reconnaître la décision de condamnation comme exécutoire sur le territoire français est motivée.
« Art. 728 -44. – §(Non modifié) Si la décision de condamnation peut être reconnue comme étant exécutoire en France, le procureur de la République apprécie s’il y a lieu de procéder à l’adaptation de la peine ou de la mesure de sûreté privative de liberté prononcée.
« Lorsque la durée de la peine ou de la mesure de sûreté privative de liberté prononcée est supérieure à celle qui aurait pu être légalement prononcée par une juridiction française pour les mêmes faits, le procureur de la République propose de la réduire au maximum légal encouru selon la loi française pour l’infraction correspondante. Lorsque la condamnation porte sur plusieurs infractions, il se réfère au maximum légal encouru pour l’infraction correspondante la plus sévèrement sanctionnée.
« Lorsque, par sa nature, la peine ou la mesure de sûreté privative de liberté est incompatible avec la loi française, le procureur de la République propose de lui substituer la peine ou la mesure de sûreté privative de liberté encourue selon cette loi à moins que cette substitution n’ait pour conséquence d’aggraver la condamnation.
« Art. 728 -45 . –
Suppression maintenue
« Art. 728 -46 . – Lorsque la décision de condamnation est prononcée pour plusieurs infractions et que, pour l’un des motifs prévus aux articles 728-32 ou 728-33, elle ne peut être reconnue et exécutée en tant qu’elle porte sur l’une de ces infractions ou certaines d’entre elles, le procureur de la République consulte l’autorité compétente de l’État de condamnation afin de déterminer si une exécution partielle de la décision, du chef des seules infractions pouvant justifier la reconnaissance et l’exécution, est possible.
« L’exécution partielle ne peut être décidée qu’avec l’accord de l’État de condamnation. Elle ne peut avoir pour effet d’accroître la durée de la peine ou de la mesure de sûreté privative de liberté.
« Dans le cas prévu au premier alinéa du présent article, si une seule peine ou mesure de sûreté privative de liberté a été prononcée pour l’ensemble des infractions, la durée de la peine mise à exécution ne peut excéder, dans la limite de la durée de la peine prononcée, ni le maximum légalement applicable, selon la loi de l’État de condamnation, à l’infraction pouvant autoriser l’exécution de la décision en France, ni le maximum légalement applicable, selon la loi française, à l’infraction correspondante. Lorsque plusieurs des infractions ayant fait l’objet de la condamnation peuvent justifier la reconnaissance et l’exécution, l’infraction la plus sévèrement sanctionnée selon la loi de l’État de condamnation est prise en compte pour la détermination de la durée maximale de la peine susceptible d’être mise à exécution.
« Art. 728 -47 . – §(Non modifié) Lorsque le procureur de la République propose d’adapter la peine en application de l’article 728-44, il saisit sans délai le président du tribunal de grande instance ou le juge délégué par lui aux fins d’homologation de la proposition d’adaptation.
« Il communique au président du tribunal de grande instance ou au juge délégué par lui l’ensemble des pièces de la procédure.
« Art. 728 -48 . – §(Non modifié) Dans les cinq jours de sa saisine, le président du tribunal de grande instance ou le juge délégué par lui décide, au vu des pièces qui lui ont été communiquées, s’il y a lieu d’homologuer la proposition d’adaptation formulée par le procureur de la République.
« L’ordonnance par laquelle il refuse l’homologation est motivée.
« Art. 728 -49 . – La décision du procureur de la République mentionnée à l’article 728-43 et, le cas échéant, l’ordonnance homologuant ou refusant d’homologuer la proposition d’adaptation de la peine ou de la mesure de sûreté privative de liberté mentionnée à l’article 728-48 sont notifiées sans délai à la personne condamnée. Celle-ci est informée par une mention portée dans l’acte de notification que, si elle n’accepte pas cette décision, elle dispose d’un délai de dix jours pour saisir la chambre des appels correctionnels d’une requête précisant, à peine d’irrecevabilité, les motifs de droit ou de fait de sa contestation et qu’elle a la possibilité de se faire représenter devant cette juridiction par un avocat de son choix ou, à défaut, par un avocat commis d’office par le bâtonnier de l’ordre des avocats.
« Toutefois, la personne condamnée n’est pas recevable à saisir la chambre des appels correctionnels en cas de refus d’exécution opposé dans le cas prévu au 3° de l’article 728-11.
« Art. 728 -50 . – §(Non modifié) En cas de refus d’homologation de la proposition d’adaptation qu’il a formulée, le procureur de la République peut soit saisir le président du tribunal de grande instance ou le juge délégué par lui d’une nouvelle requête lui soumettant une autre décision ou la même décision autrement motivée ou fondée sur des éléments nouveaux, soit, dans les dix jours de l’ordonnance refusant l’homologation, saisir la chambre des appels correctionnels pour qu’elle statue sur la reconnaissance et l’exécution de la décision de condamnation.
« La personne condamnée est aussitôt informée de la saisine de la chambre des appels correctionnels et de son objet. Elle est invitée à faire connaître sans délai si elle entend se faire représenter devant cette juridiction par un avocat de son choix ou, à défaut, par un avocat commis d’office par le bâtonnier de l’ordre des avocats.
« L’audience de la chambre des appels correctionnels ne peut se tenir moins de dix jours après que cette information a été fournie.
« Art. 728 -51 . – §(Non modifié) En cas de saisine de la chambre des appels correctionnels, la décision du procureur de la République et l’ordonnance du président du tribunal de grande instance ou du juge délégué par lui sont non avenues.
« Art. 728 -52 . – §(Non modifié) L’audience de la chambre des appels correctionnels est publique, sauf si la personne est mineure ou que la publicité est de nature à nuire au bon déroulement de la procédure en cours, aux intérêts d’un tiers ou à la dignité de la personne. Dans ce cas, la chambre des appels correctionnels, à la demande du ministère public, de l’avocat de la personne condamnée ou d’office, statue par un arrêt rendu en chambre du conseil qui n’est susceptible de pourvoi en cassation qu’en même temps que l’arrêt statuant sur la reconnaissance et l’exécution de la condamnation.
« Le ministère public et, s’il en a été désigné, l’avocat de la personne condamnée, sont entendus. La chambre des appels correctionnels peut décider d’entendre la personne condamnée ou de la faire entendre par l’autorité compétente de l’État de condamnation.
« La chambre des appels correctionnels peut, par une décision qui n’est susceptible d’aucun recours, autoriser l’État de condamnation à intervenir à l’audience par l’intermédiaire d’une personne habilitée par ce même État à cet effet. Lorsque l’État de condamnation est autorisé à intervenir, il ne devient pas partie à la procédure.
« Art. 728-53 . – Lorsqu’elle est en possession des informations nécessaires, la chambre des appels correctionnels décide, dans un délai maximal de quinze jours, s’il y a lieu de reconnaître la décision de condamnation à une peine ou une mesure de sûreté privative de liberté comme étant exécutoire sur le territoire français. Les articles 728-37 à 728-39, 728-43 et 728-44 sont applicables devant elle. Pour l'application de ces mêmes articles, la chambre des appels correctionnels exerce les attributions du procureur de la République.
« Si la demande de reconnaissance et d’exécution présentée par l’autorité compétente de l’État de condamnation entre dans les prévisions du 3° de l’article 728-11 et que le procureur général déclare ne pas consentir à l’exécution, la chambre des appels correctionnels lui en donne acte et constate que la peine ou la mesure de sûreté privative de liberté ne peut être mise à exécution en France.
« Lorsque la chambre des appels correctionnels envisage d’opposer l’un des motifs de refus prévus aux 1° à 4°, 7°, 10° et 11° de l’article 728-32 ou au 1° de l’article 728-33, il n’y a pas lieu d’informer l’autorité compétente de l’État de condamnation s’il a déjà été procédé à cette information par le procureur de la République en application de l’article 728-40.
« Art. 728 -54 . –
Supprimé
« Art. 728 -55 . – §(Non modifié) La décision de la chambre des appels correctionnels peut faire l’objet d’un pourvoi en cassation. L’article 568-1 et le premier alinéa de l’article 567-2 sont applicables.
« Art. 728 -56 . – §(Non modifié) Lorsque, dans des cas exceptionnels, la décision définitive relative à la reconnaissance et à l’exécution de la condamnation ne peut être prise dans les quatre-vingt-dix jours qui suivent la réception de la décision de condamnation et du certificat, le procureur de la République en informe sans délai l’autorité compétente de l’État de condamnation en lui indiquant les raisons du retard et le délai supplémentaire qu’il estime nécessaire pour que soit prise la décision.
« Dans le cas où le procureur de la République ou la chambre des appels correctionnels a demandé à l’autorité compétente de l’État de condamnation soit de compléter ou de corriger le certificat, soit de lui adresser une traduction complète ou partielle de la décision de condamnation, le cours du délai prévu au premier alinéa est suspendu à compter de la demande jusqu’à la transmission par l’État de condamnation des pièces demandées.
« Art. 728 -57 . – §(Non modifié) Le procureur de la République informe sans délai l’autorité compétente de l’État de condamnation de la décision définitive prise sur la reconnaissance et l’exécution de la décision de condamnation et, le cas échéant, sur l’adaptation de la peine ou de la mesure de sûreté privative de liberté. Lorsque la décision définitive consiste en un refus de reconnaissance et d’exécution de la décision de condamnation ou comporte une adaptation de la peine ou de la mesure privative de liberté, le procureur de la République informe également l’autorité compétente de l’État de condamnation des motifs de la décision.
« Lorsque, après adaptation de la peine ou de la mesure de sûreté privative de liberté et imputation sur la durée de celle-ci de la privation de liberté déjà subie, la décision de condamnation doit être regardée comme intégralement exécutée, le procureur de la République informe l’autorité compétente de l’État de condamnation que la personne condamnée ne pourra pas être écrouée en France en exécution de cette décision et que, en cas de transfèrement, elle sera mise immédiatement en liberté à son arrivée sur le sol français.
« Paragraphe 4
« Exécution de la peine
« Art. 728 -58 . – §(Non modifié) Dès que la décision de reconnaître la décision de condamnation comme exécutoire en France est devenue définitive, la peine ou la mesure de sûreté privative de liberté peut être ramenée à exécution dans les conditions prévues par la décision, pour la partie qui restait à subir dans l’État de condamnation.
« L’exécution de la peine est régie par le présent code.
« Art. 728 -59 . – §(Non modifié) Lorsque la décision de condamnation fait l’objet soit d’une amnistie ou d’une grâce en France ou dans l’État de condamnation, soit d’une suspension ou d’une annulation décidée à la suite de l’engagement d’une procédure de révision dans l’État de condamnation, soit de toute autre décision ou mesure ayant pour effet de lui retirer son caractère exécutoire, le ministère public met fin à son exécution.
« La condamnation prononcée à l’étranger ne peut faire l’objet d’une procédure de révision en France.
« Art. 728 -60 . – §(Non modifié) Si la personne condamnée ne peut être retrouvée sur le territoire français, le procureur de la République informe l’autorité compétente de l’État de condamnation de l’impossibilité d’exécuter la décision de condamnation pour ce motif.
« Art. 728 -61. – §(Non modifié) Le retrait du certificat par l’État de condamnation, pour quelque cause que ce soit, fait obstacle à la mise à exécution de la condamnation s’il intervient avant que la personne condamnée ait été placée sous écrou au titre de cette exécution.
« Art. 728 -62 . – §(Non modifié) Le ministère public informe sans délai l’autorité compétente de l’État de condamnation :
« 1° Des décisions ou mesures mentionnées à l’article 728-59, autres que celles prises par les autorités de l’État de condamnation, ayant retiré à la décision de condamnation son caractère exécutoire ;
« 2° De l’évasion de la personne condamnée ;
« 3° De la libération conditionnelle de la personne condamnée et de la date à laquelle cette mesure a pris fin ;
« 4° De ce que la peine ou la mesure de sûreté privative de liberté a été exécutée.
« Paragraphe 5
« Transfèrement
« Art. 728 -63 . – §(Non modifié) Si la personne condamnée se trouve sur le territoire de l’État de condamnation, elle est transférée sur le territoire français à une date fixée par le ministre de la justice en accord avec l’autorité compétente de cet État, au plus tard trente jours à compter de la date à laquelle la décision de reconnaître la condamnation et d’exécuter la peine ou la mesure de sûreté privative de liberté a acquis un caractère définitif.
« Si le transfèrement est impossible dans ce délai en raison de circonstances imprévues, le ministre de la justice et l’autorité compétente de l’État de condamnation conviennent d’une nouvelle date de transfèrement dès que ces circonstances ont cessé. Le transfèrement a lieu, au plus tard, dans les dix jours suivant cette nouvelle date.
« Art. 728 -64. – §(Non modifié) La personne transférée sur le territoire français pour la mise à exécution d’une condamnation à une peine ou à une mesure de sûreté privative de liberté prononcée par une juridiction d’un État membre ne peut être recherchée, poursuivie, condamnée ou détenue pour un fait quelconque antérieur à son transfèrement, autre que celui qui a motivé celui-ci, sauf si elle se trouve dans l’un des cas suivants :
« 1° Ayant eu la possibilité de le faire, elle n’a pas quitté le territoire national dans les quarante-cinq jours suivant sa libération définitive, ou y est retournée volontairement après l’avoir quitté ;
« 2° L’infraction n’est pas punie d’une peine ou d’une mesure de sûreté privative de liberté ;
« 3° Aucune mesure privative ou restrictive de liberté n’est appliquée durant la procédure suivie du chef de l’infraction reprochée ;
« 4° La personne condamnée n’est pas passible d’une peine ou d’une mesure privative de liberté en répression de cette infraction ;
« 5° Elle a consenti au transfèrement ;
« 6° Elle a renoncé expressément, après son transfèrement, devant le tribunal correctionnel du lieu d’exécution de la peine et dans les conditions prévues aux deux derniers alinéas de l’article 695-19, au bénéfice de la règle de la spécialité prévue au premier alinéa du présent article, sa renonciation étant irrévocable ;
« 7° L’autorité compétente de l’État de condamnation consent expressément à ce que cette règle soit écartée.
« Art. 728 -65 . – §(Non modifié) La demande de consentement mentionnée au 7° de l’article 728-64 est adressée par le ministère public à l’autorité compétente de l’État de condamnation. Elle doit comporter les renseignements prévus à l’article 695-13 et être traduite selon les modalités prévues à l’article 695-14.
« Paragraphe 6
« Arrestation provisoire
« Art. 728 -66 . – Lorsque la personne condamnée se trouve sur le territoire français et que l’autorité compétente de l’État de condamnation demande que, dans l’attente de la décision sur la reconnaissance et l’exécution de la décision de condamnation, la personne condamnée fasse l’objet d’une arrestation provisoire ou de toute autre mesure destinée à garantir son maintien sur le territoire français, le procureur de la République, s’il estime que la personne ne présente pas des garanties de représentation suffisantes, requiert qu’elle soit appréhendée et conduite devant lui dans les vingt-quatre heures. Pendant ce délai, les articles 63-2 et 63-3 sont applicables.
« Dans le cas où la demande mentionnée au premier alinéa du présent article a été présentée par l’autorité compétente de l’État de condamnation avant la transmission par celle-ci de la décision de condamnation et du certificat, la personne ne peut être appréhendée en application du même premier alinéa que si l’autorité compétente de l’État de condamnation a fourni au procureur de la République les informations prévues aux 1° à 6° de l’article 728-12.
« Art. 728 -67. – §(Non modifié) Lorsque la personne lui est présentée, le procureur de la République vérifie son identité et l’informe, dans une langue qu’elle comprend, de la décision de condamnation dont elle fait l’objet et de la demande de l’État de condamnation. Il l’avise qu’il envisage de demander son incarcération, son assignation à résidence avec surveillance électronique ou son placement sous contrôle judiciaire au juge des libertés et de la détention et qu’elle peut être assistée par un avocat de son choix ou, à défaut, par un avocat commis d’office par le bâtonnier de l’ordre des avocats, informé sans délai et par tout moyen. Il l’avise également qu’elle peut s’entretenir immédiatement avec l’avocat désigné.
« Art. 728 -68 . – §(Non modifié) La personne condamnée ne peut être placée en détention ou faire l’objet d’une assignation à résidence avec surveillance électronique en application de l’article 142-5 que si la durée de la peine restant à exécuter est supérieure ou égale à deux ans, sauf dans l’un des cas mentionnés à l’article 723-16.
« Art. 728 -69 . – La personne comparaît devant le juge des libertés et de la détention assistée le cas échéant de son avocat. L’audience est publique, sauf si la publicité est de nature à nuire au bon déroulement de la procédure en cours, aux intérêts d’un tiers ou à la dignité de la personne. Dans ce cas, le juge des libertés et de la détention, à la demande du ministère public, de l’avocat de la personne ou d’office, statue par une ordonnance rendue en chambre du conseil.
« Le juge des libertés et de la détention statue après avoir entendu le ministère public, la personne condamnée et son avocat. Si, saisi de réquisitions aux fins d’incarcération ou d’assignation à résidence avec surveillance électronique, il décide de ne pas y faire droit, il peut soumettre la personne à une ou plusieurs des obligations prévues à l’article 138.
« Art. 728 -70 . – À tout moment, la personne peut demander au juge des libertés et de la détention, selon les modalités prévues aux articles 148-6 et 148-7, sa mise en liberté ou la mainlevée du contrôle judiciaire ou de l’assignation à résidence avec surveillance électronique.
« Après avoir communiqué la demande mentionnée au premier alinéa du présent article au procureur de la République aux fins de réquisitions, le juge statue dans un délai de huit jours ouvrables par une décision motivée en considérant les garanties de représentation de la personne. Il peut, s’il l’estime utile, ordonner la comparution de la personne, assistée le cas échéant de son avocat. Les deux derniers alinéas de l’article 148 sont applicables. Pour l’application du dernier alinéa de ce même article, la chambre des appels correctionnels est compétente.
« Dans le cas prévu au second alinéa de l’article 728-66, la personne est mise d’office en liberté si, dans les huit jours suivant son incarcération, l’autorité compétente de l’État de condamnation n’a pas transmis la décision de condamnation et le certificat.
« Art. 728 -71 . – §(Non modifié) Les ordonnances rendues par le juge des libertés et de la détention en application des articles 728-69 et 728-70 peuvent faire l’objet d’un appel devant la chambre des appels correctionnels. Le troisième alinéa de l’article 194 et les deux derniers alinéas de l’article 199 sont applicables devant la chambre des appels correctionnels.
« Art. 728 -72 . – §(Non modifié) La personne est immédiatement mise en liberté et il est mis fin à l’assignation à résidence avec surveillance électronique ou au contrôle judiciaire si la mise à exécution de la décision de condamnation est refusée ou si l’État de condamnation retire le certificat.
« Section 4
« Dispositions relatives au transit sur le territoire français
« Art. 728 -73 . – §(Non modifié) Le ministre de la justice autorise le transit sur le territoire français des personnes transférées du territoire de l’État de condamnation à celui de l’État d’exécution.
« Art. 728 -74 . – §(Non modifié) La demande de transit est accompagnée du certificat mentionné à l’article 728-12 établi par l’autorité compétente de l’État de condamnation. Le ministre de la justice peut demander la traduction en français du certificat.
« Art. 728 -75 . – §(Non modifié) Lorsque le ministre de la justice ne peut garantir que la personne condamnée ne sera ni poursuivie, ni détenue, ni soumise à aucune autre restriction de sa liberté individuelle sur le territoire français, pour des faits ou condamnations antérieurs à son départ du territoire de l’État de condamnation, il en informe l’autorité qui a demandé le transit.
« Art. 728 -76 . – §(Non modifié) Le ministre de la justice se prononce dans les plus brefs délais et au plus tard une semaine après réception de la demande de transit. Lorsqu’une traduction du certificat est demandée, ce délai ne court qu’à compter de la transmission de cette traduction.
« Art. 728 -77 . – §(Non modifié) La personne condamnée ne peut être maintenue en détention que durant le temps strictement nécessaire au transit sur le territoire français.
« Art. 728 -78. – §(Non modifié) La présente section est applicable en cas d’atterrissage fortuit sur le territoire national au cours du transfèrement. »
L'amendement n° 6, présenté par M. Richard, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 106
Après les mots :
territoire français
Rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
, aux fins de recueillir ses observations écrites ou orales. Ces observations sont jointes au dossier. Le cas échéant, il recueille le consentement de la personne condamnée.
La parole est à M. le rapporteur.
Cet amendement bien que rédactionnel n’est pas anodin : il vise à mieux préciser les conditions dans lesquelles s’exercent les droits de la défense.
La défense a désormais la possibilité de présenter des observations lorsque sont en jeu des questions de transfert ou d’exécution de peine transnationale.
L'amendement est adopté.
L'article 9 est adopté.
Chapitre VII
Dispositions portant adaptation du droit pénal au protocole additionnel aux conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à l’adoption d’un signe distinctif additionnel (protocole III), adopté à Genève le 8 décembre 2005
I. – L’article 433-14 du code pénal est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° D’user de l’emblème ou de la dénomination de l’un des signes distinctifs définis par les conventions signées à Genève le 12 août 1949 et leurs protocoles additionnels. »
I bis
« Ces dispositions sont également applicables au fait, pour toute personne, de faire publiquement usage d’un emblème ou d’une dénomination présentant avec l’un des signes distinctifs des conventions signées à Genève le 12 août 1949 et leurs protocoles additionnels une ressemblance de nature à causer une méprise dans l’esprit du public. »
II. – §(Non modifié) L’article 3 de la loi du 24 juillet 1913 portant application des articles 23, 27 et 28 de la convention internationale signée à Genève le 6 juillet 1906 pour l’amélioration du sort des blessés et malades dans les armées en campagne et des articles 5, 6 et 21 de la convention internationale signée à La Haye le 18 octobre 1907 pour l’adaptation à la guerre maritime des principes de la convention de Genève est abrogé.
L'amendement n° 7, présenté par M. Richard, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
Ces dispositions
par les mots :
Les mêmes peines
La parole est à M. le rapporteur.
Cet amendement est purement rédactionnel : il tend à éviter une redite.
L'amendement est adopté.
L'article 10 est adopté.
Chapitre VIII
Dispositions portant adaptation de la législation française à la résolution 1966 (2010) du Conseil de sécurité des Nations Unies du 22 décembre 2010 instituant un mécanisme international chargé d’exercer les fonctions résiduelles des tribunaux pénaux
(Non modifié)
La loi n° 95-1 du 2 janvier 1995 portant adaptation de la législation française aux dispositions de la résolution 827 du Conseil de sécurité des Nations Unies instituant un tribunal international en vue de juger les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 est ainsi modifiée :
1° Après le premier alinéa de l’article 1er, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Il en est de même pour l’application de la résolution 1966 du Conseil de sécurité des Nations Unies du 22 décembre 2010 instituant un mécanisme international chargé d’exercer les fonctions résiduelles des tribunaux pénaux. » ;
2° Au dernier alinéa de l’article 2, après le mot : « international », sont insérés les mots : « et le mécanisme résiduel », les mots : « est informé » sont remplacés par les mots : « sont informés » et le mot : « sa » est remplacé par le mot : « leur » ;
3° Au premier alinéa de l’article 3, après le mot : « international », sont insérés les mots : « ou du mécanisme résiduel » ;
4° Le premier alinéa de l’article 4 est complété par les mots : « ou au mécanisme résiduel » ;
5° Le premier alinéa de l’article 5 est complété par les mots : « ou au mécanisme résiduel » ;
6° Au second alinéa de l’article 6, après le mot : « international », sont insérés les mots : « ou le mécanisme résiduel » ;
7° Au premier alinéa de l’article 7, après le mot : « international », sont insérés les mots : «, du mécanisme résiduel » et le mot : « son » est remplacé par le mot : « leur » ;
8° L’article 8 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est complété par les mots : « ou près le mécanisme résiduel » ;
b) Aux deux derniers alinéas, après le mot : « international », sont insérés les mots : « ou au mécanisme résiduel » ;
9° Au premier alinéa de l’article 9, après le mot : « international », sont insérés les mots : « ou par le mécanisme résiduel » et le mot : « son » est remplacé par le mot : « leur » ;
10° Au premier alinéa de l’article 15, après le mot : « international », sont insérés les mots : « ou du mécanisme résiduel » ;
11° L’article 16 est ainsi modifié :
a) La première phrase du premier alinéa est complétée par les mots : « ou du mécanisme résiduel » ;
b) Au second alinéa, après le mot : « international », sont insérés les mots : « ou le mécanisme résiduel » ;
12° L’article 16-1 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après la seconde occurrence du mot : « international », sont insérés les mots : « ou par le mécanisme résiduel » ;
b) La première phrase du second alinéa est complétée par les mots : « ou au mécanisme résiduel ». –
Adopté.
(Non modifié)
La loi n° 96-432 du 22 mai 1996 portant adaptation de la législation française aux dispositions de la résolution 955 du Conseil de sécurité des Nations Unies instituant un tribunal international en vue de juger les personnes présumées responsables d’actes de génocide ou d’autres violations graves du droit international humanitaire commis en 1994 sur le territoire du Rwanda et, s’agissant des citoyens rwandais, sur le territoire d’États voisins est ainsi modifiée :
1° Après le premier alinéa de l’article 1er, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Il en est de même pour l’application de la résolution 1966 du Conseil de sécurité des Nations Unies du 22 décembre 2010 instituant un mécanisme international chargé d’exercer les fonctions résiduelles des tribunaux pénaux. » ;
(Supprimé) –
Adopté.
Chapitre IX
Dispositions portant adaptation du droit pénal et de la procédure pénale à la convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, adoptée à New York, le 20 décembre 2006
(Non modifié)
Le code pénal est ainsi modifié :
1° Le 9° de l’article 212-1 est ainsi rédigé :
« 9° La disparition forcée ; »
2° Après le chapitre Ier du titre II du livre II, il est inséré un chapitre Ier bis ainsi rédigé :
« Chapitre I er bis
« Des atteintes à la personne constituées par les disparitions forcées
« Art. 221 -12. – Constitue une disparition forcée l’arrestation, la détention, l’enlèvement ou toute autre forme de privation de liberté d’une personne, dans des conditions la soustrayant à la protection de la loi, par un ou plusieurs agents de l’État ou par une personne ou un groupe de personnes agissant avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement des autorités de l’État, lorsque ces agissements sont suivis de sa disparition et accompagnés soit du déni de la reconnaissance de la privation de liberté, soit de la dissimulation du sort qui lui a été réservé ou de l’endroit où elle se trouve.
« La disparition forcée est punie de la réclusion criminelle à perpétuité.
« Les deux premiers alinéas de l’article 132-23, relatifs à la période de sûreté, sont applicables au crime prévu par le présent article.
« Art. 221 -13. – Sans préjudice de l’application de l’article 121-7, est considéré comme complice d’un crime de disparition forcée mentionné à l’article 221-12 commis par des subordonnés placés sous son autorité et son contrôle effectifs le supérieur qui savait, ou a délibérément négligé de tenir compte d’informations qui indiquaient clairement que ses subordonnés commettaient ou allaient commettre un crime de disparition forcée et qui n’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables qui étaient en son pouvoir pour en empêcher ou en réprimer l’exécution ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins d’enquête et de poursuites, alors que ce crime était lié à des activités relevant de sa responsabilité et de son contrôle effectifs.
« Art. 221 -14. – I. – Les personnes physiques coupables du crime prévu à l’article 221-12 encourent également les peines complémentaires suivantes :
« 1° L’interdiction des droits civiques, civils et de famille, selon les modalités prévues à l’article 131-26 ;
« 2° L’interdiction, suivant les modalités prévues à l’article 131-27, soit d’exercer une fonction publique ou l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise, soit d’exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d’administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d’autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale. Ces interdictions d’exercice peuvent être prononcées cumulativement ;
« 3° L’interdiction de séjour, selon les modalités prévues à l’article 131-31 ;
« 4° et 5°
Supprimés
« 6° La confiscation prévue à l’article 131-21.
« II. – En cas de condamnation pour le crime prévu à l’article 221-12, le prononcé des peines complémentaires suivantes est obligatoire :
« 1° L’interdiction de détenir ou de porter, pour une durée de quinze ans au plus, une arme soumise à autorisation ;
« 2° La confiscation d’une ou de plusieurs armes dont le condamné est propriétaire ou dont il a la libre disposition.
« Toutefois, la cour d’assises peut décider de ne pas prononcer ces peines, en considération des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur.
« Art. 221 -15. – Les personnes physiques coupables du crime prévu à l’article 221-12 encourent également le suivi socio-judiciaire selon les modalités prévues aux articles 131-36-1 à 131-36-13.
« Art. 221 -16. – L’interdiction du territoire français peut être prononcée dans les conditions prévues à l’article 131-30 soit à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus, à l’encontre de tout étranger coupable du crime prévu à l’article 221-12.
« Art. 221 -17. – Les personnes morales déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues à l’article 121-2, du crime défini à l’article 221-12 encourent, outre l’amende suivant les modalités prévues à l’article 131-38, les peines mentionnées à l’article 131-39.
« Art. 221 -18. – L’action publique à l’égard du crime défini à l’article 221-12 ainsi que les peines prononcées se prescrivent par trente ans. » –
Adopté.
(Non modifié)
Le chapitre Ier du titre IX du livre IV du code de procédure pénale est complété par un article 689-13 ainsi rédigé :
« Art. 689 -13. – Pour l’application de la convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, adoptée à New York, le 20 décembre 2006, peut être poursuivie et jugée dans les conditions prévues à l’article 689-1 du présent code toute personne coupable ou complice d’un crime défini au 9° de l’article 212-1 ou à l’article 221-12 du code pénal lorsque cette infraction constitue une disparition forcée au sens de l’article 2 de la convention précitée. » –
Adopté.
Chapitre X
Dispositions portant adaptation de la législation française à l’accord entre l’Union européenne et la République d’Islande et le Royaume de Norvège relatif à la procédure de remise entre les États membres de l’Union européenne et l’Islande et la Norvège, signé le 28 juin 2006, et à l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne en date du 5 septembre 2012
Le chapitre IV du titre X du livre IV du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Du mandat d’arrêt européen, des procédures de remise entre États membres de l’Union européenne résultant de la décision-cadre du Conseil de l’Union européenne du 13 juin 2002 et des procédures de remise résultant d’accords conclus par l’Union européenne avec d’autres États » ;
2° À l’article 695-14, les mots : « des Communautés européennes » sont remplacés par les mots : « de l’Union européenne » ;
3° Après le mot : « française », la fin du 2° de l’article 695-24 est ainsi rédigée : « ou réside régulièrement de façon ininterrompue depuis au moins cinq ans sur le territoire national et que la décision de condamnation est exécutoire sur le territoire français en application de l’article 728-31 ; »
4° À la première phrase du premier alinéa de l’article 695-26, après les mots : « Union européenne », sont insérés les mots : « ou d’un État lié à l’Union européenne par un accord mentionné à la section 5 du présent chapitre ; »
5° L’article 695-32 est ainsi rédigé :
« Art. 695 -32 . – Lorsque la personne recherchée est de nationalité française ou réside régulièrement sur le territoire national de façon ininterrompue depuis au moins cinq ans, l’exécution du mandat d’arrêt européen peut être subordonnée à la vérification qu’elle peut être renvoyée en France pour y effectuer la peine qui sera éventuellement prononcée par l’autorité judiciaire de l’État d’émission pour les faits faisant l’objet du mandat. » ;
6° Aux deux derniers alinéas de l’article 695-47, après le mot : « française », sont insérés les mots : « ou réside régulièrement de façon ininterrompue depuis au moins cinq ans sur le territoire national » ;
7° À l’article 695-51, après la première occurrence du mot : « européenne », sont insérés les mots : « ou par un État lié à l’Union européenne par un accord mentionné à la section 5 du présent chapitre. » ;
8° Est ajoutée une section 5 ainsi rédigée :
« Section 5
« Des procédures de remise résultant d’accords conclus par l’Union européenne avec d’autres États
« Art. 695 -52. – En l’absence de stipulation contraire de l’accord concerné, le présent chapitre s’applique aux demandes de remise entre la France et un État non membre de l’Union européenne dès l’entrée en vigueur d’un accord conclu par l’Union européenne avec cet État et instituant un mécanisme de remise sur la base d’un mandat d’arrêt.
« Pour l’application de la présente section, les mots : “mandat d’arrêt” sont entendus au sens de l’accord mentionné au premier alinéa.
« Art. 695 -53 . – La remise d’une personne qui a la nationalité française ou qui avait cette nationalité au moment des faits visés par le mandat d’arrêt émis par un État non membre de l’Union européenne est refusée.
« Art. 695 -54 . – Le transit d’une personne qui a la nationalité française ou qui avait cette nationalité au moment des faits visés par le mandat d’arrêt émis par un État non membre de l’Union européenne est refusé. Les deux derniers alinéas de l’article 695-47 ne sont pas applicables aux procédures de remise résultant d’accords conclus par l’Union européenne avec d’autres États.
« Art. 695 -55. – Les deuxième à dernier alinéas de l’article 695-23 ne sont pas applicables aux procédures de remise mentionnées à la présente section.
« Par dérogation au premier alinéa du même article 695-23, la remise d’une personne est exécutée sans contrôle de la double incrimination des faits reprochés lorsque les agissements considérés sont, aux termes de la loi de l’État non membre de l’Union européenne, punis d’une peine privative de liberté d’une durée égale ou supérieure à douze mois d’emprisonnement ou d’une mesure de sûreté privative de liberté d’une durée similaire et entrent dans l’une des catégories d’infractions suivantes :
« 1° Participation à un groupe de personnes agissant dans un but commun aux fins de commettre une ou plusieurs infractions relevant d’activités de terrorisme visées aux articles 1er et 2 de la convention européenne pour la répression du terrorisme, signée à Strasbourg, le 27 janvier 1977, ainsi qu’aux articles 1er à 4 de la décision-cadre, du 13 juin 2002, relative à la lutte contre le terrorisme (2002/475/JAI) ;
« 2° Trafic illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes ;
« 3° Homicide volontaire ;
« 4° Coups et blessures graves ;
« 5° Enlèvement, séquestration ou prise d’otage ;
« 6° Viol.
« Art. 695 -56 . – Pour la mise en œuvre du 2° de l’article 695-24, dans le cadre des procédures de remise prévues à la présente section, l’exécution du mandat d’arrêt peut être refusée si la personne recherchée pour l’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté n’est pas de nationalité française mais réside régulièrement de façon ininterrompue depuis au moins cinq ans sur le territoire national et que le procureur général s’engage à faire procéder à cette exécution sur le fondement d’une convention de transfèrement ou d’un accord international spécifique.
« Art. 695 -57 . – La remise n’est pas accordée à un État non membre de l’Union européenne si l’infraction à raison de laquelle elle est demandée a un caractère politique, sauf s’il s’agit d’une infraction mentionnée aux articles 1er et 2 de la convention européenne pour la répression du terrorisme, signée à Strasbourg, le 27 janvier 1977, de l’infraction d’association de malfaiteurs en vue de la commission de ces infractions, ou des infractions mentionnées aux articles 1er à 4 de la décision-cadre, du 13 juin 2002, précitée.
« Art. 695 -58 . – Pour l’application de l’article 695-46, dans le cadre des procédures de remise prévues à la présente section, le consentement est refusé à un État non membre de l’Union européenne si l’infraction à raison de laquelle elle est demandée a un caractère politique, sauf s’il s’agit d’une infraction mentionnée aux articles 1er et 2 de la convention européenne pour la répression du terrorisme, signée à Strasbourg, le 27 janvier 1977, de l’infraction d’association de malfaiteurs en vue de la commission de ces infractions, ou des infractions mentionnées aux articles 1er à 4 de la décision-cadre, du 13 juin 2002, précitée. » –
Adopté.
Chapitre XI
Dispositions portant adaptation de la législation française à la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, signée à Istanbul, le 11 mai 2011
Le titre II du livre II du code pénal est ainsi modifié :
1° A Le chapitre Ier est complété par un article 221-11-1 ainsi rédigé :
« Art. 221 -11 -1 . – Dans le cas prévu au 10° de l’article 221-4, peut être également prononcée l’interdiction, pour une durée de dix ans au plus, de quitter le territoire de la République. » ;
1° Après l’article 222-14-3, il est inséré un article 222-14-4 ainsi rédigé :
« Art. 222 -14 -4 . – Le fait, dans le but de contraindre une personne à contracter un mariage ou à conclure une union à l’étranger, d’user à son égard de manœuvres dolosives afin de la déterminer à quitter le territoire de la République est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende. » ;
1° bis Au second alinéa de l’article 222-47, après le mot : « mineurs, », sont insérées les références : « par le 6° bis des articles 222-3, 222-8, 222-10, 222-12 et 222-13, par l’article 222-14-4 » ;
2° La section 5 du chapitre III est complétée par un article 223-11 ainsi rétabli :
« Art. 223 -11. – La tentative du délit prévu à l’article 223-10 est punie des mêmes peines. » ;
3° Après l’article 227-24, il est inséré un article 227-24-1 ainsi rédigé :
« Art. 227 -24 -1 . – Le fait de faire à un mineur des offres ou des promesses ou de lui proposer des dons, présents ou avantages quelconques, ou d’user contre lui de pressions ou de contraintes de toute nature, afin qu’il se soumette à une mutilation sexuelle est puni, lorsque cette mutilation n’a pas été réalisée, de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende.
« Est puni des mêmes peines le fait d’inciter directement autrui, par l’un des moyens énoncés au premier alinéa, à commettre une mutilation sexuelle sur la personne d’un mineur, lorsque cette mutilation n’a pas été réalisée. »
Dans le domaine précis de la lutte contre les violences à l’égard des femmes en général, et plus particulièrement au sein des couples, le Sénat a su prendre à diverses reprises des initiatives permettant de lutter contre ce fléau. Je citerai – on me pardonnera de le rappeler – la loi du 4 avril 2006 ou la loi du 6 août 2012, qui a rétabli le délit de harcèlement sexuel, ou encore la loi du 9 juillet 2010. Certes, cette dernière a été initiée par l’Assemblée nationale, mais elle a largement été complétée au Sénat par plusieurs amendements, notamment dans le champ de la prévention.
On peut donc assurer que notre droit est largement conforme aux obligations découlant de la convention d’Istanbul, laquelle demande aux États signataires d’ériger en infractions pénales les violences physiques, psychologiques, sexuelles, le harcèlement sexuel, les mariages forcés, les mutilations génitales féminines, etc. Le code pénal répond donc aux préconisations de la Convention.
Cependant, dans le cas de mariages forcés, il est vrai que notre droit ne permet pas d’appréhender le fait de tromper un adulte ou un enfant dans le but de le conduire dans un pays étranger et de le forcer à y contracter un mariage. Il y a là un vide juridique, et je regrette que nous n’ayons pas pu le combler en 2006 ou en 2010. En effet, nous ne sommes plus là dans la contrainte physique ou morale, nous sommes dans le champ des manœuvres dolosives. Il était donc important que de tels agissements soient également punis et qu’une peine d’interdiction de quitter le territoire puisse être prononcée contre l’auteur de telles manœuvres. Je vous remercie donc, madame la ministre des droits des femmes, d’avoir rappelé que la loi de 2010 permet d’interdire la sortie du territoire d’une personne ayant fait l’objet d’une ordonnance de protection dès lors qu’elle est menacée de mariage forcé.
Pourtant, vous le savez, cette ordonnance de protection n’est pas suffisamment utilisée, ni dans ce cas précis, ni dans d’autres d’ailleurs. Quand elle est délivrée, hélas ! cela intervient trop tardivement. Mais je crois savoir que nous allons prochainement nous attaquer à ce problème.
Par ailleurs, je suis tout à fait d’accord avec le fait d’incriminer l’incitation à subir une mutilation sexuelle ou le fait de tenter de pratiquer une interruption de grossesse sans le consentement libre et éclairé de la personne enceinte comme le demande la convention. J’apprécie donc l’ensemble des dispositions prises par cet article.
Je profite de l’occasion qui m’est donnée de m’exprimer ici pour féliciter nos ministres de l’ensemble de leurs actions, dans ce domaine précis comme dans celui du champ de l’égalité hommes-femmes. Je félicite particulièrement Mme la ministre des droits des femmes de la mise en place d’une mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains et l’installation récente du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
L'article 16 est adopté.
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Après l’article 40-4, il est inséré un article 40-5 ainsi rédigé :
« Art. 40-5 . – En cas d’évasion d’une personne, le procureur de la République informe sans délai de cette évasion la victime des faits ayant entraîné la détention ou sa famille, dès lors que cette évasion est susceptible de leur faire courir un risque ou un danger et sauf s’il ne paraît pas opportun de communiquer cette information au regard du risque qu’elle pourrait entraîner pour l’auteur des faits. »
2° Le 3° de l’article 706-3 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « française », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « ou les faits ont été commis sur le territoire national. » ;
b) Les deux derniers alinéas sont supprimés. –
Adopté.
L'amendement n° 1, présenté par Mmes Cukierman et Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
A. – Après l'article 17 :
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 26 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est abrogé.
II. – Au premier alinéa de l’article 1er de la loi du 11 juin 1887, la référence : « 26, » est supprimée.
B. – En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et son intitulé ainsi rédigés :
CHAPITRE XI bis
Dispositions abrogeant le délit d’offense au chef de l’État afin d’adapter la législation française à l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme du 14 mars 2013
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Cet amendement vise à abroger le délit d’offense au chef de l’État. Il s’agit de tirer les conséquences de l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme du 14 mars 2013, par lequel la Cour de Strasbourg a condamné la France pour violation de l’article 10 de la convention, qui garantit la liberté d’expression.
La Cour a estimé que la France a violé le principe de la liberté d’expression en condamnant pour offense à Nicolas Sarkozy l’homme qui, en 2008, lors d’une visite présidentielle à Laval, avait brandi une affichette sur laquelle était inscrite – vous vous en souvenez sans doute – la fameuse phrase « Casse toi pov’ con ! » Elle a jugé « disproportionné » le recours à une sanction pénale qui risque, selon elle, « d’avoir un effet dissuasif sur les interventions satiriques concernant des sujets de société qui peuvent elles aussi jouer un rôle très important dans le libre débat des questions d’intérêt général ».
Si le Président de la République mérite évidemment le respect de ses concitoyens, une telle disposition dérogatoire au droit commun n’apparaît plus justifiée et semble, au contraire, parfaitement contre-productive dans la mesure où l’utilisation de la répression pénale – 45 000 euros d’amende ! – est loin d’être le moyen le plus adéquat pour gagner le respect de ses concitoyens.
Au regard de ce qui est arrivé à M. Hervé Eon, qui a bataillé pendant quatre ans devant les tribunaux, nous vous demandons, comme l’a fait d’ailleurs l’Assemblée nationale, d’abroger cette survivance du passé qu’est le délit d’offense au chef de l’État et de considérer que cette décision était bel et bien complètement disproportionnée.
Dans ce débat assez médiatique, une partie des interventions n’échappe pas à cette préoccupation…
La commission des lois a estimé, à une large majorité, qu’il n’était pas exact de dire que la Cour européenne, dans l’arrêt Eon de mars 2013, aurait déclaré contraire à la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales l’existence du délit d’offense au chef de l’État. Je cite cet arrêt : « […] après avoir pesé l’intérêt de la condamnation pénale pour offense au chef de l’État dans les circonstances particulières de l’espèce et l’effet de la condamnation à l’égard du requérant, la Cour juge que le recours à une sanction pénale par les autorités compétentes » – c’est-à-dire par la justice – « était disproportionné au but visé ».
C’est une décision de justice spécifique dans un cas d’espèce qui a été déclarée non conforme à la convention par la Cour européenne et absolument pas l’article du code pénal instaurant, dans certaines circonstances majeures, le délit d’offense au chef de l’État. J’en profite pour indiquer aux amateurs que la lecture de l’arrêt de la Cour, qui comporte des observations sur cet épisode assez particulier de la vie politique française, mérite de passer aux heures de grande écoute.
Sourires.
Plus sérieusement, la question est de savoir si, comme l’a rappelé Jean-Pierre Michel dans la discussion générale, le Président de la République doit avoir le droit d’être protégé contre les injures personnelles au même titre que tout citoyen et si sa qualité de Président de la République et les missions qu’il exerce au nom du peuple français ne méritent aucune autre protection.
Depuis qu’il existe un État, a fortiori depuis qu’il est républicain, les détenteurs de toutes les charges d’autorité de ce pays, qu’il s’agisse des représentants de la force publique, des magistrats ou des parlementaires, bénéficient, au titre de leur position institutionnelle, d’une protection particulière afin de pouvoir exercer pleinement cette charge. L’immunité parlementaire n’est rien d’autre que cela.
Il me semblerait donc aventureux que des parlementaires, au détour d’un texte dont ce n’était nullement l’objet, se prononcent sur cette question sans examiner, comme le disait Hugues Portelli, l’ensemble du tableau, c’est-à-dire quelles sont les règles qui permettent de mettre en cause la responsabilité du chef de l’État dans l’exercice de ses fonctions et quelles sont, au contraire, celles qui doivent lui permettre de les assumer pleinement.
Dans le cadre d’une conversation, on peut considérer que le sujet est choquant, mais nous sommes ici dans le cadre du droit.
Nous disposons d’un arsenal juridique au sein duquel la loi de 1881, notamment ses articles 31 et 48, définit des protections particulières non seulement pour les membres du gouvernement et les parlementaires, mais aussi pour tout citoyen ayant en charge un mandat public. Les fonctionnaires, par exemple, sont eux aussi protégés. Cela signifie que, en supprimant toute protection au chef de l’État, on place ce dernier dans une situation inférieure à celle d’un citoyen titulaire d’un mandat public.
Il faut donc soit supprimer le délit d’offense au chef de l’État et introduire dans la loi de 1881 une protection qui soit au moins équivalente à celle des détenteurs de l’autorité publique ou d’un mandat public, soit conserver ce délit et peut-être le reconsidérer, comme l’a indiqué M. Portelli et vient de le rappeler M. le rapporteur, dans le cadre plus général du statut juridictionnel du chef de l’État.
Je ne dis pas que la disposition que vous proposez, madame Didier, est un cavalier législatif, car son objet n’est pas très éloigné du texte dont nous discutons. Toutefois, un projet de loi de transposition ne constitue pas le meilleur cadre pour traiter un tel sujet. Vous aurez certainement d’autres opportunités pour le faire.
En tout état de cause, nous ne faisons pas les lois pour un quinquennat, mais pour consolider nos institutions dans la durée. La réforme constitutionnelle de 2008 a permis aux justiciables de saisir directement le Conseil supérieur de la magistrature. Si la réforme constitutionnelle est adoptée, nous renforcerons ce dispositif. De même, la question prioritaire de constitutionnalité permet aujourd’hui au justiciable de saisir le Conseil constitutionnel, via le Conseil d’État ou la Cour de cassation, afin de vérifier le caractère constitutionnel de nos lois. Au moment où nous facilitons l’accès à la justice pour le citoyen ordinaire, nous ne pouvons pas totalement exposer le chef de l’État.
Telles sont les raisons pour lesquelles je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.
J’ai trop d’estime pour notre collègue Richard pour me permettre de lui dire que ses interventions visent à attirer l’attention des médias. Ce n’est pas du tout notre objectif !
Dans cette histoire, nous avons assisté à une véritable disproportion dans la peine prononcée. Si cela est arrivé, c’est bien parce que notre loi le permet ! Bien sûr, sans ce qui s’était passé auparavant il n’y aurait peut-être jamais eu cette pancarte. C’est un autre élément à considérer…
Cela étant, les explications que j’ai reçues sont tout à fait pertinentes. Je retire donc l’amendement. J’aimerais simplement que l’on n’oublie pas ce que cet homme a subi. Il faut certes protéger le chef de l’État et toutes les personnes qui occupent des fonctions officielles, mais il faut aussi qu’elles soient respectables et fassent preuve de dignité en toutes circonstances.
(Supprimé)
Chapitre XII
Dispositions diverses et transitoires
(Non modifié)
L’article 113-8-1 du code pénal est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) Après les mots : « dont l’extradition », sont insérés les mots : « ou la remise » ;
b) Sont ajoutés les mots : «, soit que l’extradition ou la remise serait susceptible d’avoir, pour la personne réclamée, des conséquences d’une gravité exceptionnelle en raison, notamment, de son âge ou de son état de santé. » ;
2° La seconde phrase du second alinéa est supprimée. –
Adopté.
(Non modifié)
I. – Au second alinéa de l’article 213-4-1 du code pénal, la dernière occurrence du mot : « ou » est remplacée par le mot : « et ».
II. – Au 4° de l’article 706-55 du code de procédure pénale, les mots : « et l’association de malfaiteurs » sont remplacés par les mots : «, l’association de malfaiteurs et les crimes et délits de guerre » et la référence : « et 450-1 » est remplacée par les références : «, 450-1 et 461-1 à 461-31 ». –
Adopté.
(Non modifié)
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Au second alinéa de l’article 716-4, après la référence : « 712-19 », est insérée la référence : «, de l’article 728-69 » ;
2° L’article 721-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En cas d’exécution sur le territoire de la République d’une peine prononcée à l’étranger, les réductions de peines accordées antérieurement à la mise à exécution de la peine en France restent acquises à la personne condamnée en tant qu’elles ont été accordées à raison de la durée de détention subie à l’étranger. La personne condamnée bénéficie d’un crédit de réduction de peine en application du présent article, calculé sur la durée de détention restant à subir en France à compter de son arrivée sur le territoire national, déduction faite des réductions de peine déjà accordées à l’étranger pour la période qui restait à exécuter. » ;
3° Le second alinéa de l’article 728-2 et le dernier alinéa de l’article 728-3 sont supprimés. –
Adopté.
(Non modifié)
Après l’article 20-10 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante, il est inséré un article 20-11 ainsi rédigé :
« Art. 20 -11 . – Lorsque la personne concernée était mineure à la date des faits, le tribunal pour enfants exerce les attributions du tribunal correctionnel pour l’application des articles 728-4 à 728-7 du code de procédure pénale et le juge des enfants exerce les attributions du président du tribunal de grande instance et du juge des libertés et de la détention pour l’application des articles 728-47 et 728-69 du même code. » –
Adopté.
(Non modifié)
I. – Le chapitre VI du titre II du livre V du code de procédure pénale est applicable aux demandes de reconnaissance et d’exécution de décisions de condamnation reçues ou adressées par la France postérieurement à la date de publication de la présente loi.
II. – Les conventions internationales ou leurs stipulations relatives au transfèrement des personnes condamnées ou à l’exécution des condamnations pénales demeurent applicables dans les relations avec les États membres ayant procédé à la déclaration prévue à l’article 28 de la décision-cadre 2008/909/JAI du Conseil, du 27 novembre 2008, concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements en matière pénale prononçant des peines ou des mesures privatives de liberté aux fins de leur exécution dans l’Union européenne lorsque la décision de condamnation prononcée, en France ou dans l’autre État, est antérieure à la date fixée dans cette déclaration.
III. – Conformément au paragraphe 5 de l’article 6 de la décision-cadre 2008/909/JAI du Conseil, du 27 novembre 2008, précitée, l’exécution en Pologne des décisions de condamnation prononcées par les juridictions françaises et l’exécution sur le territoire français des décisions de condamnation prononcées par les juridictions polonaises sont subordonnées, lorsque ces décisions ont été prononcées avant le 5 décembre 2016, au consentement de la personne condamnée, y compris dans le cas où cette personne est ressortissante de l’État d’exécution et réside de manière habituelle sur le territoire de cet État.
Toutefois, dans le cas prévu au premier alinéa du présent III, le consentement de la personne condamnée n’est pas requis soit lorsque l’exécution de la condamnation est décidée en application du 2° de l’article 695-24 du code de procédure pénale, dans sa rédaction résultant du 3° de l’article 15 de la présente loi, soit lorsque la personne s’est soustraite à l’exécution de la peine en s’enfuyant vers le pays dont elle est ressortissante.
La dérogation prévue au premier alinéa du présent III cesse d’être applicable à compter de la notification par la Pologne au secrétariat général du Conseil de l’Union européenne, en application du paragraphe 5 de l’article 6 de la décision-cadre 2008/909/JAI, du 27 novembre 2008, précitée, de son intention de ne plus en faire usage.
IV. – Dans les relations avec les États membres qui n’ont pas transposé la décision-cadre 2008/909/JAI du Conseil, du 27 novembre 2008, précitée, les dispositions du code de procédure pénale ainsi que les instruments juridiques existants en matière de transfèrement des personnes condamnées en vigueur antérieurement au 5 décembre 2011, notamment la convention sur le transfèrement des personnes condamnées, signée à Strasbourg, le 21 mars 1983, et son protocole additionnel, signé à Strasbourg, le 18 décembre 1997, ainsi que les articles 67 et 68 de la convention d’application du 19 juin 1990 de l’accord de Schengen, du 14 juin 1985, relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes restent applicables. –
Adopté.
I. – Les articles 695-11 à 695-58 du code de procédure pénale ne sont pas applicables aux demandes de remise adressées à la France par un État non membre de l’Union européenne et lié par un accord conclu par l’Union européenne et instituant un mécanisme de remise sur la base d’un mandat d’arrêt lorsque ces demandes concernent des faits commis avant la date indiquée dans la déclaration faite par le Gouvernement français au titre des dispositions transitoires.
II. – Les articles 695-11 à 695-58 du code de procédure pénale ne sont pas applicables aux demandes de remise adressées par la France à un État lié par un accord conclu par l’Union européenne et instituant un mécanisme de remise sur la base d’un mandat d’arrêt lorsque ces demandes concernent des faits commis avant la date indiquée dans la déclaration faite par cet État au titre des dispositions transitoires.
III. – §(Non modifié) Dans les cas mentionnés aux I et II ou lorsqu’un mandat d’arrêt tel que prévu par un accord conclu par l’Union européenne avec un État non membre de l’Union européenne instituant un mécanisme de remise sur la base d’un mandat d’arrêt ne peut être adressé ou reçu, pour quelque motif que ce soit, les articles 696 à 696-47 du code de procédure pénale sont applicables.
(Non modifié) Sous réserve des dispositions du I, lorsqu’une personne recherchée a été arrêtée sur la base d’une demande d’arrestation provisoire émanant d’un État non membre de l’Union européenne et lié par un accord conclu par l’Union européenne et instituant un mécanisme de remise sur la base d’un mandat d’arrêt et que la demande d’extradition y afférente n’est pas parvenue à la France avant la date d’entrée en vigueur de cet accord, la procédure applicable est celle prévue aux articles 696 à 696-47 du code de procédure pénale sauf si un mandat d’arrêt au sens dudit accord, en original ou en copie certifiée conforme, est reçu par le procureur général dans le délai prévu par la convention applicable avec l’État concerné à compter de l’arrestation provisoire de la personne recherchée. Dans ce cas, la procédure applicable est celle prévue aux articles 695-22 à 695-58 du même code et les délais mentionnés auxdits articles commencent à courir à compter de la réception du mandat d’arrêt. –
Adopté.
IV. – §
(Non modifié)
La présente loi est applicable sur l’ensemble du territoire de la République.
L'amendement n° 8, présenté par M. Richard, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
La présente loi est applicable à Wallis-et-Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.
La parole est à M. le rapporteur.
Il s’agit de respecter une obligation de forme.
Outre la disposition générale selon laquelle les lois de souveraineté – donc particulièrement celles concernant le droit pénal – s’appliquent sur l’ensemble du territoire de la République, il est nécessaire de mentionner explicitement les territoires régis par le principe dit de spécialité législative, à savoir Wallis-et-Futuna, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Abondance de bien ne nuit pas.
Sourires.
L'amendement est adopté.
En conséquence, l'article 24 est ainsi rédigé.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.
Le projet de loi est adopté.
Mes chers collègues, l’ordre du jour de cet après-midi étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à vingt-et-une heures.