Madame la ministre, nous partageons votre souci de transposer les textes européens dans les temps – il est vrai que la France paie des millions d’euros de pénalités pour ses retards de transposition, notamment de directives en matière environnementale –, néanmoins l’examen d’un texte comme celui-ci, très technique et très dense pour des délais si serrés, est frustrant pour les législateurs que nous sommes, Odette Herviaux l’a souligné avant moi.
Je reviendrai sur quelques points éclairant les amendements déposés par le groupe écologiste.
Il nous a semblé très important de saisir l’opportunité de la transposition de la directive Seveso III pour proposer des mesures allant dans le sens d’un renforcement des dispositifs d’information du public et de prévention des risques. Je proposerai ainsi de renforcer le principe de réduction des risques à la source dans les plans de prévention des risques technologiques, ou PPRT, trop peu présent dans nos textes, qui s’attachent davantage aux mesures d’atténuation des effets des accidents. Cette logique préventive permettrait pourtant de faire des économies : en diminuant les risques à la source, on diminue mécaniquement les coûts liés à la prise en compte des risques.
J’ai également essayé d’apporter des réponses à des problèmes que nous rencontrons sur le terrain, notamment en Loire-Atlantique, département très concerné par les PPRT. Aujourd’hui, en plus de vivre dans une zone à risques, les propriétaires, souvent de condition modeste, se trouvent obligés de procéder à un certain nombre de travaux. Un accord a été trouvé entre les communes et les exploitants sur une prise en charge à hauteur de 50 % de ces travaux, divisée en deux parts égales. Avec le crédit d’impôts à 40 %, 10 % restent à la charge des propriétaires.
D’expérience, nous nous apercevons que beaucoup de petits propriétaires ont de grandes difficultés à prendre en charge ces travaux, d’où notre proposition de faire passer de 50 % à 60 % le financement des travaux obligatoires dans le cadre des PPRT par les collectivités territoriales et les exploitants. Frappé en plein vol par l’impitoyable article 40, cet amendement ne sera pas discuté aujourd’hui. Je souhaite néanmoins, madame la ministre, que nous trouvions un nouveau dispositif législatif, ou en tout cas une solution financière et technique, pour répondre à cette situation. C’est, je le répète, une vraie difficulté que nous rencontrons sur le terrain.
Concernant les dispositions portant sur la police administrative et la police judiciaire du code de l’environnement, nous nous félicitons de l’adoption par la commission du développement durable de notre amendement sur le champ de compétences des agents commissionnés et assermentés des réserves naturelles que les associations appelaient de leurs vœux, et qui se justifiait par la présence de plusieurs imprécisions dans l’ordonnance. Ces modifications représentent une avancée réelle pour les réserves naturelles et pour les défenseurs de la biodiversité de notre pays. Je tiens à remercier Mme le rapporteur Odette Herviaux pour son soutien sur ce point.
Je proposerai également de créer une sanction de la criminalité organisée du trafic d’espèces protégées, mesure considérée comme une urgence absolue par les écologistes. Il me semble, madame la ministre, que vous partagez notre préoccupation de lutter résolument contre ce fléau.
J’aurais également de nombreux points à relever sur le volet « énergie » du projet de loi, dont certains seront détaillés lors de la discussion des amendements. J’insiste en particulier sur notre proposition de ne pas ratifier l’ordonnance de codification du code de l’énergie. Cette ratification intervient en effet ou trop tôt ou trop tard. Le débat national sur la transition énergétique est en cours. Il devrait déboucher sur une loi avant la fin de l’année 2013, loi qui aura forcément pour conséquence de modifier le code de l’énergie. Aussi, dans une logique d’efficacité et de clarté de la loi, proposons-nous d’attendre la loi qui conclura le débat sur la transition énergétique pour codifier le code de l’énergie, qui s’en trouvera très probablement modifié.
Les écologistes s’étaient réjouis de l’article créé à l’Assemblée nationale visant à remplacer le terme « biocarburants » par celui de « agrocarburants » dans tous nos textes de loi. Cet article ayant malheureusement été supprimé en commission au Sénat, nous avons tenu à déposer un amendement visant à le rétablir – en espérant que la nuit porte conseil… Nous en débattrons un peu plus tard, en revenant brièvement sur l’étymologie de ces termes, car cette question sémantique ne tient pas que du symbole.
On ne doit plus laisser penser que ces technologies, qui sont responsables de la destruction de forêts et de l’habitat de nombreuses espèces, ainsi que de la mise en danger de la sécurité alimentaire - dans leur version de première génération, nous en sommes d’accord - ont quoi que ce soit de «bio » ! Peut-être retrouverons-nous demain un vocable « biocarburants », mais il devra être réservé à des carburants vraiment respectueux du climat et de la biodiversité. L’Assemblée nationale avait éclairci le débat en changeant de dénomination.
Enfin, j’ajoute une remarque sur l’ordonnance relative au système européen d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre sur la période 2013-2020. Une très mauvaise nouvelle pour la politique climatique de l’Union a suivi nos débats de mars dernier, avec ce vote du Parlement européen contre les propositions de la commissaire Connie Hedegaard. Le chemin qui reste à parcourir pour parvenir à une véritable communauté européenne de l’énergie souhaitée par le Président de la République s’annonce encore long ; le climat en fait partie.
Cependant, la France, particulièrement dans la perspective des négociations climatiques de 2015, peut et doit mener la marche pour une planification européenne sur le climat et l’énergie. Écologistes et grands patrons se rejoignent sur ce point, fait suffisamment rare pour être souligné.
Ce projet de loi porte tout de même des avancées, et son adoption est nécessaire, comme l’a dit Mme le rapporteur. C’est le sens du vote unanime de la commission en faveur de ce texte. Nous voterons pour ce texte, que nous espérons encore améliorer, dans la soirée voire dans la nuit, sur plusieurs points.