Intervention de Yves Pozzo di Borgo

Réunion du 2 novembre 2010 à 22h00
Débat sur la participation de la france au budget de l'union européenne

Photo de Yves Pozzo di BorgoYves Pozzo di Borgo :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la semaine dernière, le débat préalable au Conseil européen a permis au Sénat de mesurer l’ampleur des changements nécessaires pour tirer les leçons de la crise.

Tout en saluant les propositions franco-allemandes visant à renforcer la discipline et les sanctions, j’ai insisté sur le fait qu’il serait vain de vouloir instaurer une véritable gouvernance européenne sans réunir les conditions de la croissance.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que la croissance européenne ne dispose pas de la vigueur de la croissance des pays émergents ou, tout simplement, de celle des pays africains.

J’identifiais deux urgences, qui ne sont bien sûr pas les seules à devoir être traitées. La première est la convergence économique des États membres et, tout particulièrement, le rattrapage de la France par rapport à l’Allemagne. La seconde urgence est la recherche scientifique, puisqu’on sait aujourd’hui que le savoir est le moteur de la croissance.

Une semaine plus tard, aujourd’hui, nous débattons de la participation de la France au budget de l’Union européenne. Il s’agit en fait d’un seul et même débat : quel est l’avenir économique de l’Union et quels moyens sommes-nous prêts à mobiliser pour préparer cet avenir ?

Entre-temps, le Conseil européen s’est réuni jeudi et vendredi derniers. À cette occasion, les chefs d’État et de gouvernement ont souligné qu’il est essentiel que le budget de l’Union européenne tienne compte des efforts d’assainissement des États membres pour réduire leurs déficits et leur dette.

Comme le rapporteur spécial, je me félicite de la volonté de l’Union européenne de s’associer aux efforts de redressement des finances publiques nationales.

Mais je ne peux pas, un jour, défendre le volontarisme et, la semaine suivante, me faire le chantre de la rigueur. Aujourd’hui, je veux donc redire que le savoir est le principal moteur de l’économie et qu’il serait dangereux de l’ignorer.

Monsieur le président de la commission des finances, en ne finançant pas assez la recherche publique, en n’encourageant pas assez la recherche privée, la France et l’Europe s’affaiblissent.

La semaine dernière, j’illustrais l’importance de la recherche en prenant l’exemple de l’exploration spatiale. Ses retombées militaires, économiques, technologiques et scientifiques sont immenses et elle apporte des bénéfices concrets aux citoyens de l’Europe et du monde entier.

Les dépenses de recherche et développement sont inférieures à 2 % en Europe, alors qu’elles atteignent 2, 6 % aux États-Unis et 3, 4 % au Japon. Avec la stratégie Europe 2020, nous nous sommes engagés collectivement à investir 3 % du produit intérieur brut européen en recherche et développement en 2020.

Pour y arriver, il faut investir plus dans la recherche publique et encourager plus efficacement la recherche privée.

Au niveau national, nous y veillerons lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2011, puisque l’enseignement supérieur et la recherche restera la priorité budgétaire du Gouvernement.

À l’échelle européenne, il faut fournir le même effort : priorité à la recherche, d’une part, amélioration de l’efficacité de la dépense publique, d’autre part.

Je rejoins en ce sens la préoccupation du rapporteur spécial M. Denis Badré devant le phénomène européen qu’il appelle l’« agenciarisation ». En 2009, les agences européennes ont reçu plus de 560 millions d’euros de subventions et leurs effectifs, ayant doublé en cinq ans, s’établissaient à plus de 4 800 agents. Leur travail est-il évalué ? Ce serait la moindre des choses ! En outre, pour ne prendre qu’un exemple, quelle nécessité y a-t-il à créer l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne à Vienne, alors que le Conseil de l’Europe existe déjà ?

Aujourd’hui, nous confions plus de compétences à l’Union européenne, plus de responsabilités. Mais nous lui demandons aussi de faire un effort de rigueur budgétaire.

Nous avons besoin d’investir bien plus dans la recherche, mais nous ne voulons pas abandonner les politiques communes comme la PAC et nous refusons de réduire la politique européenne de cohésion, qui permet le rattrapage des nouveaux États membres.

Nous ne voulons pas augmenter nos contributions à l’Union européenne et nous ne voulons pas accroître ses ressources propres.

En somme, nous demandons plus d’Europe avec autant de ressources !

Dans l’immédiat, il faut donc rechercher des marges d’économies… et elles existent ! J’ai évoqué les agences. Il faut améliorer l’efficacité de la dépense publique européenne. Le sujet étant vaste, je me contenterai de rappeler que, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2007, je m’interrogeais sur le rôle et l’efficacité du Forum pour l’avenir de la démocratie. Quatre ans après, ce forum existe toujours et je m’interroge toujours !

Les exemples de gaspillages sont malheureusement nombreux.

À plus long terme, au-delà de la contrainte budgétaire, il faudra aborder une question de fond : le niveau adéquat des ressources propres de l’Union européenne.

Ce n’est pas une question idéologique ou de pères fondateurs, c’est une question d’efficacité. Il faut réfléchir au meilleur échelon pour agir en nous posant une question simple : où un euro de dépense publique est-il le mieux investi ? Au vu de cet examen, il faut donner à chaque échelon, national et communautaire, les moyens de ses ambitions.

Telles sont, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les quelques généralités dont je voulais vous faire part.

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