Intervention de Gérard Collomb

Réunion du 30 mai 2013 à 22h00
Modernisation de l'action publique territoriale et affirmation des métropoles — Exception d'irrecevabilité

Photo de Gérard CollombGérard Collomb :

Madame la présidente, mesdames les ministres, messieurs les rapporteurs, la première remarque que je voudrais faire, mes chers collègues, c’est que la procédure d’irrecevabilité qui vient de nous être présentée par Mlle Joissains ne se focalise que sur un seul aspect du projet de loi dont nous discutons aujourd’hui : la création de la métropole Aix-Marseille-Provence.

Je comprends évidemment, ma chère collègue, que vous soyez très attachée à cet aspect du texte, mais l’état d’esprit qui me paraît régner sur les différentes travées de notre Haute Assemblée me semble fort différent. Certes, nous pouvons porter des appréciations diverses sur tel ou tel point de la réforme, nous pouvons même avoir des divergences selon nos sensibilités. Toutefois, nous partageons tous, me semble-t-il, une conviction commune, la conviction que nous ne pouvons rester immobiles et qu’il nous faut changer. Changer parce que le monde bouge, changer parce que la France a bougé, parce que l’architecture institutionnelle que nous a léguée notre passé doit être amendée si nous voulons relever les défis qui sont ceux de notre pays et de nos territoires.

Cette volonté de changement, c’est celle qui animait déjà Gaston Defferre lorsque, le 27 juillet 1981, il présentait son premier projet de loi sur la décentralisation. Vous le rappeliez ce matin, madame la ministre, voici ce que déclarait alors celui-ci : « Ouvrons les yeux, regardons autour de nous, en quelques années, tout a changé. » C’était en 1981, mes chers collègues, mais depuis lors, le mouvement du monde n’a fait que s’accélérer. Tous les dix ans, nous vivons une ou deux révolutions technologiques, notre monde est en pleine mutation, des pays émergents qui, hier, n’étaient même pas dans notre champ de vision, s’imposent aujourd’hui comme des puissances économiques incontournables. Et nous, nous resterions immobiles, figés dans une organisation dont nous voyons tous les limites ? Qui peut le croire ?

Alors oui, il faut aller de l’avant, dépasser nos contradictions, faire surgir la modernité. La volonté de prendre en compte les changements ne date pas d’aujourd’hui. Elle s’est déjà exprimée à l’occasion de la réforme territoriale de 2010. Je me souviens que, dépassant nos sensibilités, nous avions réussi, avec André Rossinot, Jacques Pélissard, avec l’Association des maires de France, à faire surgir la notion nouvelle de pôle métropolitain. Depuis, il s’en est créé vingt-cinq dans notre pays.

Aujourd’hui, mesdames les ministres, c’est une nouvelle étape que vous nous proposez avec ce texte tel que vous l’avez écrit, mais aussi tel que l’a modifié la commission des lois, avec un grand esprit d’ouverture. Ce texte prévoit un certain nombre d’avancées, mais est aussi soucieux d’équilibre entre les territoires, entre les différentes collectivités locales. Vous le rappeliez, ce texte en appelle d’autres. Il affirme la métropole comme une réalité et comme un modèle d’organisation. Construction technocratique, disent certains ? Construction théorique ? Non, mes chers collègues, le fait métropolitain est aujourd’hui le fait majeur de notre époque ; il marque évidemment notre pays comme il marque le monde. C’est la réalité dans laquelle vivent des dizaines de millions de nos concitoyens.

Et si, parfois, ils subissent des conditions difficiles, c’est précisément parce que, dans ces aires métropolitaines, le manque de gouvernance adaptée est à l’origine de tous ces problèmes : celui du logement, celui de la fracture sociale, qui est avant tout une fracture spatiale, celui du manque de transports en commun à la bonne échelle, celle des bassins de vie. C’est de là que naissent doute et rancœur chez nos concitoyens, perte de confiance à l’égard d’élus qui se révèlent incapables de répondre aux besoins de la vie quotidienne, non pas par manque d’envie, mais par manque de moyens et de structures adaptées. Or quand naît le doute, c’est la démocratie et la République qui se fragilisent.

Ce texte fait surgir les métropoles, mais, nous l’avons déjà dit, il n’y a pas d’opposition entre cette affirmation du rôle des métropoles et le développement de tous les autres territoires. Vous le rappeliez, madame la ministre, ce texte n’est en effet que le premier maillon d’une nouvelle organisation qui permettra la mise en synergie de tous les territoires : les territoires ruraux et les territoires urbains, les petites villes et les grandes métropoles, les communes et les intercommunalités, les départements et les régions.

C’est sans doute parce que chacun, ici, est conscient qu’il faut poursuivre l’analyse et le dialogue sur des textes aussi fondamentaux que votre motion, mademoiselle Joissains, ne vise qu’un seul aspect, celui qui concerne la métropole Aix-Marseille-Provence. Et sur cette question elle-même, mes chers collègues, je pense que nous partageons la même analyse, sur quelque travée que nous siégions : Marseille connaît des problèmes, des problèmes économiques, des déséquilibres sociaux, une accentuation des inégalités entre les territoires et donc, au final, nous le voyons trop souvent hélas, une montée des violences urbaines.

Pourquoi ces problèmes ? Manque d’attention ? Manque de financement de l’État ? Je comprends que Jean-Claude Gaudin ait mis l’accent sur ces questions, mais, mes chers collègues, quand je regarde les financements du projet Euroméditerranée, ou, plus récemment, de Marseille-Provence 2013, capitale européenne de la culture, il ne me semble pas que Marseille ait fait partie des territoires qu’on laisse à l’abandon.

Je veux bien qu’on compare la masse de fonds publics dont ont bénéficié Marseille et l’agglomération lyonnaise…

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