La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt-deux heures cinq, sous la présidence de Mme Bariza Khiari.
La séance est reprise.
M. le président du Sénat a reçu, en application de l’article 2 du décret du 17 janvier 2006, le rapport du comité interministériel de prévention de la délinquance pour 2012.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
Il a été transmis à la commission des lois.
que le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche (n° 614, 2012-2013), dont la commission de la culture, de l’éducation et de la communication est saisie au fond, est renvoyé pour avis, à sa demande, à la commission des affaires économiques.
Mme la présidente. M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 30 mai 2013, que, en application de l’article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les articles L. 225-27 et L. 225-28 du code du commerce
direction et administration des sociétés anonymes
Le texte de cette décision de renvoi est disponible à la direction de la séance.
Acte est donné de cette communication.
Nous reprenons la discussion du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme la ministre déléguée.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens avant toute chose à vous adresser des remerciements sincères, au nom de Marylise Lebranchu et en mon nom propre, pour la très grande qualité des interventions que nous avons entendues au cours de la discussion générale. Les orateurs ont su garder la mesure et la sérénité qui leur permettent d’être entendus. L’esprit critique n’a pas pour autant était absent, mais il s’est toujours manifesté de façon constructive.
Mme Lebranchu et moi-même remercions de manière appuyée le rapporteur et les trois rapporteurs pour avis, ainsi que le président de la commission des lois. Je n’oublie pas Jacqueline Gourault, la présidente de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, qui est absente ce soir pour les raisons tristes que nous connaissons.
Mesdames, messieurs les sénateurs – j’ai failli dire « mes chers collègues », car j’ai l’impression d’être encore un peu parmi vous –, …
… certains d’entre vous ont regretté que les projets de loi, au lieu de former un ensemble, comme au moment de leur présentation, aient été « tronçonnés ». C’est un mot que je récuse : le texte est simplement examiné en trois temps distincts, …
… pour répondre à trois objectifs particuliers. Nous considérons qu’il s’agit de trois actes, mais pas de l’acte III de la décentralisation. Si nous écartons cette expression, c’est parce que nous concevons les projets du Gouvernement beaucoup moins comme un nouveau temps de réforme de la décentralisation que comme le prolongement d’un mouvement déjà existant, auquel nous souhaitons apporter des améliorations pour le rendre plus opérant dans nos collectivités territoriales.
Nous avons parfois entendu des mots un peu violents pour dénoncer un manque de souffle ou la complexité que nous ajouterions. Dans le même temps, à vous entendre les uns et les autres vous exprimer avec passion, nous avons bien remarqué que le projet de loi avait suscité votre attention.
Ce soir, je veux d’abord m’attacher à ce qui nous réunit. Élus locaux et membres du Gouvernement, nous sommes tous des gens de terrain et nous avons la même volonté de simplifier, de clarifier et de maîtriser les dépenses. M. Patriat a d’ailleurs eu raison d’insister sur ces trois objectifs, qui sont pour nous prioritaires.
Dans son intervention, Mme Lebranchu a donné un certain nombre d’informations. Permettez-moi de revenir sur l’une d’entre elles, qui a rencontré une satisfaction sur vos travées : le projet de loi sur le statut de l’élu local et le projet de loi sur les normes seront examinés à la fin du mois de juin et au début du mois de juillet, à des dates qui restent à préciser. Ces textes répondent au souhait exprimé par le Président de la République lors des états généraux de la démocratie territoriale.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai constaté que nous partagions certains objectifs, et d’abord celui de faire confiance aux élus locaux. Comme le Président de la République l’a indiqué, nous souhaitons un pacte de confiance pour instaurer un vrai dialogue entre nous. C’est ce qui s’est passé, et je crois que les interventions d’aujourd’hui en sont véritablement la preuve et la concrétisation.
Ensuite, nous sommes attachés à l’idée d’un pacte de solidarité entre toutes les collectivités territoriales. Nous ne voulons pas fixer des périmètres distincts entre les types de collectivités ou entre les niveaux de collectivités. Comme de nombreux orateurs l’ont souligné avec force et détermination, il n’y a pas un périmètre pour les collectivités en zone rurale et un autre pour les collectivités en zone urbaine. Plusieurs d’entre vous ont insisté sur les zones périurbaines, une véritable richesse qui permet de donner corps et dynamisme à nos territoires, qui n’appartiennent donc pas exclusivement à l’une ou à l’autre des catégories.
Enfin, vous avez insisté, à la suite de Marylise Lebranchu, sur l’unité de nos territoires en même temps que sur leur diversité. Unité et diversité : ces deux principes sont indissociables. Nous reconnaissons tous l’unité de la République ; elle n’est pas une unicité, elle repose sur la diversité de nos territoires, une diversité dont nous voulons tenir compte. À cet égard, vous avez donné, les uns et les autres, des exemples tout à fait probants.
Nous avons entendu également des critiques, notamment contre les conférences territoriales de l’action publique, que vous avez trouvées complexes. Vous vous êtes interrogés sur leur fonctionnement et leur utilité, vous demandant aussi si elles permettraient de trouver des accords.
Si le Gouvernement a proposé de créer ces conférences, c’est parce qu’elles sont le contrepoint obligatoire de la liberté donnée aux collectivités territoriales avec le rétablissement de la clause de compétence générale. Elles seront le lieu où les élus, en qui nous avons confiance, pourront débattre des conditions dans lesquelles seront réparties les fameuses compétences.
Vous avez également évoqué le pacte de confiance et de responsabilité, qui, avec l’ensemble des schémas prévus, sera à vos yeux quelque chose de bien lourd, alors que, peut-être, des formes de conventionnement auraient été plus simples. Sur tous ces points, le Gouvernement est prêt à vous écouter, …
… afin de trouver des solutions permettant de répondre à vos attentes.
Monsieur le rapporteur pour avis de la commission des finances, vous avez évoqué les problèmes financiers de nos collectivités, citant des montants qui ont de quoi nous émouvoir. Notre direction générale des collectivités locales a beaucoup travaillé pour essayer de vous apporter le plus rapidement possible des informations fiables sur les données budgétaires et financières dont nous disposons. Si elles ne vous ont pas été communiquées intégralement, c’est parce que nous sommes encore en train d’y travailler. Nous reviendrons bien entendu vers vous de la façon la plus transparente qui soit.
Mesdames, messieurs les sénateurs, ce texte porte à la fois sur la gouvernance et le fait métropolitain. Au sujet de Paris, Lyon et Marseille, nous avons entendu la force et la conviction avec laquelle vous avez évoqué les problématiques de ces trois métropoles.
Nous avons entendu les difficultés qu’elles pouvaient rencontrer. Nous savons que la commission des lois a travaillé avec la volonté de faire aboutir ces métropoles, pour qu’elles apportent un service cohérent aux citoyens. Là encore, l’objectif n’est peut-être pas parfaitement atteint. Des améliorations peuvent être apportées, vous l’avez dit avec flamme.
Parallèlement à ces remarques plutôt critiques, des observations solides, concrètes et pragmatiques ont été formulées par bon nombre d’entre vous.
M. Gaudin nous a parlé de Marseille, de ce territoire élargi et solidaire. Il l’a fait avec beaucoup de conviction, et l’intervention de Mme Ghali, qui a interrogé le Gouvernement sur les possibilités de financement et le fonctionnement de la nouvelle métropole marseillaise, a fait écho à ses propos.
M. Edmond Hervé a beaucoup insisté, et je l’en remercie, sur la définition des compétences obligatoires, les précisions à apporter concernant le chef de file, notamment pour ce qui concerne sa définition, qu’il nous faut reprendre en nous fondant sur les décisions du Conseil d’État et sur la Constitution.
M. Collomb, avec beaucoup de force et de conviction, a présenté la nouvelle organisation et le fonctionnement exceptionnel de Lyon, en précisant toutefois qu’il ne s’agit pas d’un modèle que l’on peut généraliser. La situation lyonnaise correspond, Michel Mercier l’a dit aussi, à un travail qui a été mené pendant plusieurs années. Il aura fallu s’apprivoiser, dialoguer longuement avant de parvenir à un accord.
MM. Nègre et Ries ont évoqué tous deux le problème de la dépénalisation du stationnement. Nous les avons entendus. C’est un sujet quelque peu difficile techniquement et juridiquement. Le Gouvernement écoutera leurs arguments avec une oreille très attentive, tout en approfondissant probablement les études juridiques qu’il estime nécessaires.
Enfin – comment ne pas le souligner ? –, vus avez, les uns et les autres, apporté la preuve que les collectivités territoriales ont à traduire dans un texte un très bel enjeu, qui correspond à la volonté et aux besoins des citoyens. Je le répète une nouvelle fois, ce texte n’a de sens que dans la perspective d’apporter un meilleur service aux citoyens.
Soyez tous pleinement remerciés du rôle que vous acceptez d’assumer. Soyez assurés que, tout au long de la discussion qui s’annonce, nous veillerons à travailler avec chacun d’entre vous avec la même sérénité et la même volonté d’avancer.
Applaudissements sur de nombreuses travées.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des motions.
Je suis saisie, par Mlle Joissains, d'une motion n° 263 rectifiée.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l'article 44, alinéa 2, du règlement, le Sénat déclare irrecevable le projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (n° 581, 2012-2013).
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d’opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à Mlle Sophie Joissains, pour la motion.
Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, vous le savez tous, je suis contre la métropole que l’on veut imposer à la Provence.
Bien que le Gouvernement, en la personne de Mme Marylise Lebranchu, qui nous a reçus de multiples fois et n’a pas compté son temps, se soit montré très obligeant, aucune des démarches que nous avons entreprises n’a abouti, aucune des propositions que nous avons formulées ne s’est transformée en sujet de négociation. Pourtant, 109 communes qui font des propositions, ce n’est pas chose négligeable, du moins quand on respecte, comme, je le pense, Mme Lebranchu, la démocratie locale et les libertés qui s’y attachent.
Le point constitutionnel que je vais évoquer à présent reflète totalement notre analyse de la situation : pour Paris, on discute ; pour Lyon, tout le monde est d’accord ; pour Marseille, on passe en force !
L’article 30 du projet de loi vise à imposer la création, à compter du 1er janvier 2015 – le 1er janvier 2016 dans le texte de la commission –, d’un nouvel établissement public de coopération intercommunale, regroupant « l’ensemble des communes membres de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole, de la communauté d’agglomération du Pays d’Aix-en-Provence, de la communauté d’agglomération Salon Étang de Berre Durance, de la communauté d’agglomération du Pays d’Aubagne et de l’Étoile, du syndicat d’agglomération nouvelle Ouest Provence et de la communauté d’agglomération du Pays de Martigues ».
Cette création doit s’imposer en faisant disparaître les établissements publics de coopération intercommunale existants, sans consultation de ces établissements ni des communes appelées à devenir membres du nouvel établissement public de coopération intercommunale. Elle s’accompagne de nombreux transferts de compétences, au-delà de ceux qu’avaient consentis les communes aux établissements publics de coopération intercommunale existants. Pour ceux qui ne comprendraient pas bien ce mécanisme, je vais l’expliquer en quelques mots.
Les communes avaient délégué aux intercommunalités qu’elles avaient choisies ou qui étaient les leurs un certain nombre de compétences. Cependant, pour ce qui concerne les compétences optionnelles déléguées aux différents EPCI, le schéma n’était pas identique pour toutes les communes. Le Gouvernement, probablement animé d’une bonne intention, à savoir rester au plus près des territoires, a décidé de transférer au nouvel EPCI l’ensemble des compétences déléguées, ce qui oblige évidemment certaines communes, qui avaient conservé leurs compétences, à les déléguer, contrairement à leur choix initial.
L’article 30 du projet de loi est donc contraire au principe de libre administration des collectivités territoriales consacré par l’article 72 de la Constitution et à la Charte européenne de l’autonomie locale.
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 30 janvier 2013 et le 8 mars 2013 de deux questions prioritaires de constitutionnalité posées respectivement par les communes de Puyravault et de Couvrot portant sur la conformité à la Constitution, pour l’une, du paragraphe II de l’article 60 de la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, qui définit la procédure de modification de périmètre des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, pour l’autre, du paragraphe III de l’article 60 de la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, qui définit la procédure de fusion des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre. Ces deux paragraphes font partie des dispositifs temporaires d’achèvement et de rationalisation de l’intercommunalité.
Le Conseil constitutionnel a déclaré les paragraphes II et III de l’article 60 de la loi du 16 décembre 2010 conformes à la Constitution, dans ses décisions n° 2013-303 QPC du 26 avril 2013 et n° 2013-315 QPC du 26 avril 2013, mais en faisant état dans ses considérants des garanties apportées aux communes préalablement à la modification de périmètre ou à la fusion des établissements publics à fiscalité propre.
Comme le relève le Conseil constitutionnel, les décisions de modification de périmètre ou de fusion ne peuvent intervenir qu’après, premièrement, consultation des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre intéressés et des communes incluses dans le projet de périmètre, objet de la modification ou de la fusion ; deuxièmement, consultation de la commission départementale de coopération intercommunale, pour permettre la consultation des élus locaux, dont il convient de rappeler qu’elle comprend 40 % de représentants des communes du département, 40 % de représentants des établissements publics de coopération intercommunale, 5 % de représentants des syndicats mixtes et des syndicats de communes, 10 % de représentants du conseil général et 5 % de représentants du conseil régional dans la circonscription départementale ; troisièmement, consultation de tout maire qui en fait la demande par la commission départementale de coopération intercommunale.
Or l’article 30 du projet de loi conduit à une fusion forcée, sans comporter aucune des garanties attachées au principe de libre administration des collectivités territoriales, alors que la création de la métropole d’Aix-Marseille-Provence doit s’accompagner de transferts supplémentaires de compétences par rapport aux établissements publics existants.
Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a considéré que ces garanties devaient s’appliquer dans le cas d’extension de périmètre ou de fusion concernant une ou quelques communes. Dans le cas qui nous occupe, c’est le cas de 109 communes sur 118. Avec l’article 30 de ce texte, il s’agit de fusionner six établissements publics de coopération intercommunale existants et, selon le périmètre et non plus selon l’échelle des Bouches-du-Rhône, leurs 90 communes, en créant un nouvel établissement public doté de nombreuses compétences antérieurement exercées par les communes.
En outre, l’article 30 du projet de loi est contraire à l’article 9-6 de la Charte européenne de l’autonomie locale, dont l’approbation a été autorisée par la loi n° 2006-823 du 10 juillet 2006, et dont la publication a été assurée par le décret n° 2007-679 du 3 mai 2007. L’article 9-6 de la Charte dispose en effet que « les collectivités locales doivent être consultées, autant qu’il est possible, en temps utile et de façon appropriée, au cours des processus de planification et de décisions pour toutes les questions qui les concernent directement ». Il est incontestable qu’un texte visant à fusionner des établissements publics de coopération intercommunale existants, en regroupant des communes dans un nouvel établissement, lequel doit bénéficier de transferts supplémentaires de compétences par rapport aux établissements fusionnés, « concerne directement » les communes de son périmètre.
Par comparaison, la création de la métropole de Paris – et c’est pour cette raison que le schéma est différent – doit être précédée par l’achèvement de la carte intercommunale de l’unité urbaine de Paris. À cette occasion, conformément à l’article 11 du projet de loi, une procédure d’établissement du schéma régional de coopération intercommunale doit être mise en œuvre avec l’obligation de consulter les communes et la commission régionale de coopération intercommunale.
Ainsi, au surplus, la loi établit une différence de traitement entre Paris et Aix-Marseille-Provence, en privant ce dernier territoire des garanties constitutionnelles relatives à la libre administration des collectivités territoriales. En ne prévoyant aucune procédure de consultation des communes concernées par le nouvel établissement public, le texte méconnaît la Charte européenne de l’autonomie locale.
Le projet de loi étant contraire à la Constitution, je vous demande, mes chers collègues, de le rejeter.
Madame la présidente, mesdames les ministres, messieurs les rapporteurs, la première remarque que je voudrais faire, mes chers collègues, c’est que la procédure d’irrecevabilité qui vient de nous être présentée par Mlle Joissains ne se focalise que sur un seul aspect du projet de loi dont nous discutons aujourd’hui : la création de la métropole Aix-Marseille-Provence.
Je comprends évidemment, ma chère collègue, que vous soyez très attachée à cet aspect du texte, mais l’état d’esprit qui me paraît régner sur les différentes travées de notre Haute Assemblée me semble fort différent. Certes, nous pouvons porter des appréciations diverses sur tel ou tel point de la réforme, nous pouvons même avoir des divergences selon nos sensibilités. Toutefois, nous partageons tous, me semble-t-il, une conviction commune, la conviction que nous ne pouvons rester immobiles et qu’il nous faut changer. Changer parce que le monde bouge, changer parce que la France a bougé, parce que l’architecture institutionnelle que nous a léguée notre passé doit être amendée si nous voulons relever les défis qui sont ceux de notre pays et de nos territoires.
Cette volonté de changement, c’est celle qui animait déjà Gaston Defferre lorsque, le 27 juillet 1981, il présentait son premier projet de loi sur la décentralisation. Vous le rappeliez ce matin, madame la ministre, voici ce que déclarait alors celui-ci : « Ouvrons les yeux, regardons autour de nous, en quelques années, tout a changé. » C’était en 1981, mes chers collègues, mais depuis lors, le mouvement du monde n’a fait que s’accélérer. Tous les dix ans, nous vivons une ou deux révolutions technologiques, notre monde est en pleine mutation, des pays émergents qui, hier, n’étaient même pas dans notre champ de vision, s’imposent aujourd’hui comme des puissances économiques incontournables. Et nous, nous resterions immobiles, figés dans une organisation dont nous voyons tous les limites ? Qui peut le croire ?
Alors oui, il faut aller de l’avant, dépasser nos contradictions, faire surgir la modernité. La volonté de prendre en compte les changements ne date pas d’aujourd’hui. Elle s’est déjà exprimée à l’occasion de la réforme territoriale de 2010. Je me souviens que, dépassant nos sensibilités, nous avions réussi, avec André Rossinot, Jacques Pélissard, avec l’Association des maires de France, à faire surgir la notion nouvelle de pôle métropolitain. Depuis, il s’en est créé vingt-cinq dans notre pays.
Aujourd’hui, mesdames les ministres, c’est une nouvelle étape que vous nous proposez avec ce texte tel que vous l’avez écrit, mais aussi tel que l’a modifié la commission des lois, avec un grand esprit d’ouverture. Ce texte prévoit un certain nombre d’avancées, mais est aussi soucieux d’équilibre entre les territoires, entre les différentes collectivités locales. Vous le rappeliez, ce texte en appelle d’autres. Il affirme la métropole comme une réalité et comme un modèle d’organisation. Construction technocratique, disent certains ? Construction théorique ? Non, mes chers collègues, le fait métropolitain est aujourd’hui le fait majeur de notre époque ; il marque évidemment notre pays comme il marque le monde. C’est la réalité dans laquelle vivent des dizaines de millions de nos concitoyens.
Et si, parfois, ils subissent des conditions difficiles, c’est précisément parce que, dans ces aires métropolitaines, le manque de gouvernance adaptée est à l’origine de tous ces problèmes : celui du logement, celui de la fracture sociale, qui est avant tout une fracture spatiale, celui du manque de transports en commun à la bonne échelle, celle des bassins de vie. C’est de là que naissent doute et rancœur chez nos concitoyens, perte de confiance à l’égard d’élus qui se révèlent incapables de répondre aux besoins de la vie quotidienne, non pas par manque d’envie, mais par manque de moyens et de structures adaptées. Or quand naît le doute, c’est la démocratie et la République qui se fragilisent.
Ce texte fait surgir les métropoles, mais, nous l’avons déjà dit, il n’y a pas d’opposition entre cette affirmation du rôle des métropoles et le développement de tous les autres territoires. Vous le rappeliez, madame la ministre, ce texte n’est en effet que le premier maillon d’une nouvelle organisation qui permettra la mise en synergie de tous les territoires : les territoires ruraux et les territoires urbains, les petites villes et les grandes métropoles, les communes et les intercommunalités, les départements et les régions.
C’est sans doute parce que chacun, ici, est conscient qu’il faut poursuivre l’analyse et le dialogue sur des textes aussi fondamentaux que votre motion, mademoiselle Joissains, ne vise qu’un seul aspect, celui qui concerne la métropole Aix-Marseille-Provence. Et sur cette question elle-même, mes chers collègues, je pense que nous partageons la même analyse, sur quelque travée que nous siégions : Marseille connaît des problèmes, des problèmes économiques, des déséquilibres sociaux, une accentuation des inégalités entre les territoires et donc, au final, nous le voyons trop souvent hélas, une montée des violences urbaines.
Pourquoi ces problèmes ? Manque d’attention ? Manque de financement de l’État ? Je comprends que Jean-Claude Gaudin ait mis l’accent sur ces questions, mais, mes chers collègues, quand je regarde les financements du projet Euroméditerranée, ou, plus récemment, de Marseille-Provence 2013, capitale européenne de la culture, il ne me semble pas que Marseille ait fait partie des territoires qu’on laisse à l’abandon.
Je veux bien qu’on compare la masse de fonds publics dont ont bénéficié Marseille et l’agglomération lyonnaise…
Non, ce qui, dès le départ, a été le point de faiblesse de ce territoire, c’est qu’il a été pensé depuis le début dans des conditions trop étroites, qu’il n’est devenu une communauté urbaine que très récemment, et encore, vu l’étroitesse du territoire, une communauté urbaine « réduite aux acquêts ».
Mes chers collègues, quand je compare avec la communauté urbaine de Lyon, c’est bien cela qui fait la différence. Le Grand Lyon, ce sont cinquante-huit communes ; ce sont, réunis dans un même ensemble, les territoires tertiaires du centre-ville et les grandes zones industrielles de la périphérie, le rassemblement des universités, des centres de recherche, des pôles de compétitivité, les grandes villes et les petites communes de nos zones rurales. Sur le plan social, ce sont les territoires les plus riches et les plus fragilisés réunis dans un même espace, et donc la possibilité de mener des politiques qui permettent de recréer une mixité sociale, qui rendent vivante et crédible la volonté de vivre ensemble.
Alors oui, je crois que Marseille ne pourra rebondir que si elle parvient à élargir son horizon, que si elle parvient à se rassembler avec les intercommunalités voisines dans une grande métropole comme celle qui nous est proposée dans ce texte, une métropole qui pourra définir des stratégies globales sur le plan économique comme sur le plan social.
Élargir le territoire, se donner une gouvernance globale, est-ce pour autant nier la diversité des territoires ? Je peux comprendre les craintes, mais je ne peux les partager. Permettez-moi de vous dire que l’expérience de l’agglomération lyonnaise me prouve le contraire – et ce qu’a dit tout à l’heure notre collègue Louis Nègre à propos de la métropole de Nice vient confirmer ma pensée. Mes chers collègues, quand la communauté urbaine de Lyon fut créée en 1966, au temps du général de Gaulle, elle ne put l’être que par un décret. À l’époque, cette décision ne suscita que des oppositions, hormis chez le maire de Lyon et celui de Villeurbanne.
Il y avait la même difficulté à appréhender le futur que celle qui aujourd’hui me semble être celle de votre région. Les questions qui étaient posées étaient les mêmes que celles qui le sont aujourd’hui du côté de Marseille, d’Aix, de Fos-sur-Mer ou d’Aubagne.
À ce jour, s’agissant du Grand Lyon, aucune commune ne voudrait revenir en arrière. Mieux, les communes voisines demandent à adhérer à la communauté urbaine parce qu’elles y voient un facteur de développement, d’équilibre social, et ce quelle que soit la couleur politique des élus. Ceux-là mêmes dont les partis peuvent, au niveau national, exprimer des craintes sur le risque pour les communes de perdre leur autonomie dans l’intercommunalité font campagne sur leur territoire pour adhérer au Grand Lyon !
De ces interrogations, vous avez pris conscience, madame la ministre. C’est pourquoi vous avez proposé dans votre texte une intercommunalité, une métropole intégrée, certes, mais dérogeant néanmoins aux modalités d’organisation des métropoles de droit commun pour permettre un mode de fonctionnement plus déconcentré, avec des conseils de territoires, qui, dans la métropole Aix-Marseille-Provence, soient non pas de simples organes consultatifs, mais de vraies circonscriptions d’exercice de compétences territoriales, avec une conférence métropolitaine des maires qui ait de véritables prérogatives.
Cette volonté d’équilibre entre métropole et territoire, entre métropole et communes, la commission des lois a voulu la renforcer, par l’intermédiaire de son président et de notre rapporteur. La création de la métropole d’Aix-Marseille-Provence a été reportée d’un an, au 1er janvier 2016, alors que la conférence métropolitaine des maires sera mise en place dès la promulgation de la loi. Une déconcentration de la procédure d’élaboration du PLU a été prévue à l’échelon des territoires, la métropole vérifiant simplement leur compatibilité avec le schéma de cohérence territoriale.
Vous le savez, mademoiselle Joissains, le président de la commission, notre collègue Jean-Pierre Sueur, était prêt à aller encore plus loin. Il voulait montrer à quel point la commission des lois et derrière elle, je le crois, la grande majorité des membres de cette assemblée, souhaitaient qu’il soit possible de progresser ensemble sur le sujet de la métropole d’Aix-Marseille-Provence.
Mademoiselle Joissains, j’admire votre enthousiasme, votre détermination, mais il est indispensable de poursuivre l’examen de ce texte qui n’a évidemment rien d’inconstitutionnel. Inconstitutionnel, dites-vous, parce que le chef de filat organiserait la tutelle d’une collectivité sur les autres ?
Si vous aviez des craintes, le texte adopté par la commission des lois est de nature à vous rassurer. Inconstitutionnel parce que le texte créerait la métropole d’Aix-Marseille-Provence en contradiction avec la libre administration des collectivités locales ? Je vous ai rappelé les conditions de la création de la communauté urbaine de Lyon, mais aussi de celle de Lille, de Strasbourg et de Bordeaux. Jamais il n’a été question d’inconstitutionnalité.
Inconstitutionnel parce que la charte sur l’autonomie locale prescrit un processus approfondi de concertation ? Mais je ne crois pas que les réunions avec le Gouvernement aient manqué à Marseille ou que nos commissions aient dédaigné d’examiner l’ensemble de vos observations.
Mademoiselle Joissains, je suis de ceux qui aiment les femmes et les hommes de conviction, et vous en êtes. Mais si nous voulons progresser, si nous voulons prendre en compte votre volonté d’articuler la stratégie globale de la métropole et les communes, il nous faut aller plus loin dans l’examen du texte. Si nous voulons pouvoir examiner les positions qui peuvent être celles de nos amis écologistes sur l’articulation entre les aires urbaines et leur environnement, il faut aller plus loin dans l’étude du texte. Si nous voulons mieux prendre en compte les préoccupations de nos collègues communistes sur le rôle des communes dans les intercommunalités, il nous faut, là aussi, aller plus loin dans l’examen du texte, avec l’esprit d’ouverture qu’ont montré les rapporteurs, avec l’esprit d’ouverture qui est celui de notre Assemblée et, je le crois, des ministres.
Mes chers collègues, pour toutes ces raisons, je vous demande donc de bien vouloir vous prononcer pour le rejet de la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité. §
La commission est défavorable à cette motion. Elle a d’ailleurs relevé des décisions récentes du Conseil constitutionnel et du Conseil d’État sur des sujets analogues.
Mademoiselle Joissains, nous avons écouté avec la plus grande attention les arguments qui vous ont conduit à présenter cette motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité. Permettez-moi d’insister sur les raisons juridiques qui motivent l’avis défavorable du Gouvernement.
Vous avez pris des exemples, fait des comparaisons avec Paris qui achève son schéma départemental d’intercommunalité, mais, en fait, il n’y a rien de comparable. Dans le cas de Marseille, il s’agit d’une création par la loi d’une intercommunalité, d’un établissement public nouveau.
En droit pur, d’une façon générale, le projet de loi s’inscrit pleinement dans le respect des principes constitutionnels qui régissent le droit des collectivités territoriales. C’est la base de l’article 34 de la Constitution qui détermine les principes fondamentaux, vous le savez, de la libre administration des collectivités territoriales. Il ne me paraît pas utile de vous rappeler les termes de la décision du Conseil constitutionnel, vous les connaissez. Le Conseil constitutionnel stipule également, et c’est le principe qui en découle, l’interdiction de la tutelle d’une collectivité territoriale sur une autre. Dans tous les cas, dans le schéma qui est le nôtre, ces deux principes sont scrupuleusement respectés.
De même, est respecté le principe, qui a été bien défendu dans l’après-midi, de la notion de chef de file, avec une définition très précise qui utilise le verbe « organiser » et non pas un autre verbe qui reviendrait à imposer ou à décider à la place.
En ce qui concerne plus particulièrement la métropole d’Aix-Marseille-Provence, l’article 30 du projet de loi ne va pas au-delà de ce que permet la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Celui-ci a admis que ne portait pas atteinte au principe de libre administration l’obligation faite à des collectivités territoriales d’adhérer à un établissement public. Il a reconnu que le législateur pouvait prévoir l’adhésion obligatoire de trois collectivités à un syndicat dès lors que les obligations mises à la charge de ces collectivités étaient définies de manière suffisamment précise.
Je terminerai par les réponses aux deux questions prioritaires de constitutionnalité, que vous avez me semble-t-il évoquées. Dans ces deux réponses, le Conseil constitutionnel rappelle les principes posés par les articles 34 et 72 de la Constitution. Il considère que ces articles permettent de porter atteinte au principe de libre administration des collectivités dès lors que cette atteinte répond à des fins d’intérêt général. Ce sont ces mots qui sont aujourd’hui importants.
Pour toutes ces raisons, madame la sénatrice, je le répète, le Gouvernement ne peut en aucun cas donner un avis favorable à votre motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.
On pourrait être tenté de donner suite à cette motion. Toutefois, je considère qu’il faut aller plus loin dans l’examen du texte, et pas forcément pour les raisons évoquées par notre collègue Gérard Collomb. Il faut aller plus loin, notamment pour replacer les départements dans la sphère territoriale, alors que l’on a longuement évoqué aujourd’hui la place des métropoles, qui sont en effet le cœur de ce texte.
Pour autant, il convient de ne pas oublier le travail que font les départements au titre de la solidarité : solidarité entre les hommes, bien sûr, avec une action sociale bien définie, mais solidarité aussi entre les territoires. Nous mesurons bien l’importance de leur rôle, qu’ils soient ruraux ou urbains, par rapport à celui d’autres collectivités.
Par ailleurs, il faut bien distinguer la tutelle et l’autorité. Ainsi, madame la ministre, c’est bien l’autorité de l’État que nous subissons en ce qui concerne, par exemple, la gestion du RSA. Il s’agit là d’une tâche difficile. Dans mon département, le nombre de demande du RSA augmente de 2 % par mois. Or, 200 bénéficiaires supplémentaires du RSA représentent un coût d’un million d’euros, non compensés, qui sont dépensés au détriment d’autres actions !
Aussi, lorsque l’on entend le Premier ministre déclarer que le nombre des allocataires du RSA augmentera de 10 % sur cinq ans, sans consultation préalable des conseils généraux, on est interpellé ! Il y a non seulement une progression du nombre des bénéficiaires, mais aussi une valorisation de l’allocation, que l’on peut certes comprendre, mais dont on ne précise pas le financement. Si le Gouvernement veut véritablement restaurer la confiance avec les collectivités territoriales, peut-être doit-il s’y prendre un peu différemment.
L’Association des départements de France est, je le rappelle, favorable à une clarification des compétences. D’ailleurs, dans les travaux que nous avions réalisés, nous nous étions rendu compte qu’il n’y avait de compétences croisées qu’à hauteur de 10 % de nos propres compétences. Il suffit de les clarifier dans différents domaines : sport, culture, loisirs, environnement, tourisme. Nous pourrons y revenir lors de la discussion, et c’est une des raisons pour lesquelles il faut continuer nos travaux sur ce texte.
Il y a 10 % de compétences croisées, mais cela ne représente pas 10 % de notre budget. Nous devons donc réfléchir avec pragmatisme, et c’est pourquoi nous vous proposerons un certain nombre d’amendements susceptibles de clarifier la situation. La meilleure confiance que nous puissions avoir, c’est une confiance relationnelle et des moyens attribués aux collectivités territoriales de sorte qu’elles puissent assurer leurs missions. Les collectivités ne cherchent pas à empiéter sur le domaine de leur voisin. Elles veulent simplement trouver la complémentarité pour rendre le meilleur service possible à l’usager au meilleur coût.
La deuxième partie de la motion de notre collègue Sophie Joissains portait sur l’article 30, plus précisément sur la question de la constitutionnalité. Vous y avez répondu, madame le ministre.
Dans mon département, une commune est concernée, c’est celle de Couvrot. Permettez-moi un rappel historique. La loi de 2010 a permis l’élaboration de schémas de coopération intercommunale et toutes les communes, même isolées, doivent adhérer à une intercommunalité. La commune de Couvrot, sur le territoire de laquelle est implantée une cimenterie, n’avait pas encore adhéré. On mesure sans peine les enjeux et les difficultés que cachent ces répartitions. C’est pourquoi il est légitime de veiller à ce que l’intérêt général prime dans l’approche de tels dispositifs et dans les répartitions à la fois de compétences et de schémas territoriaux.
Pour conclure, nous ne soutiendrons pas, ma chère collègue, malgré toute la sympathie que nous éprouvons à votre égard, cette motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité. Notre groupe, dans sa majorité, votera contre, car nous souhaitons apporter notre pierre à l’édifice que l’on essaie de construire en ce qui concerne le système relationnel entre nos différentes collectivités territoriales.
Après avoir écouté les débats de cet après-midi, je mesure ma chance, en tant que porte-parole du groupe écologiste, de pouvoir m’appuyer sur une position unanime du mouvement et de ma fédération d’élus. Toutes les fédérations d’élus n’ont pas réussi à avoir une position commune sur ce projet de loi.
Le groupe écologiste votera évidemment contre la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité. Nous sommes maintenant entrés dans le débat : l’après-midi a été dense, de nombreux arguments ont été échangés, des positions assez diverses se sont exprimées. Je pense que nous sommes nombreux à considérer qu’il ne faut pas clore la discussion, qui devrait d’ailleurs durer encore une bonne semaine.
Les élus Europe Écologie-Les Verts de Marseille, Aix, Aubagne et de la totalité de cette future grande métropole ont pris position pour une métropole à large périmètre multipolaire et solidaire. Ils sont allés assez loin – cela ne fera probablement pas consensus – en proposant la disparition des intercommunalités existantes et même celle du conseil général des Bouches-du-Rhône. Si nous nous plaçons dans ce cadre, c’est que nous considérons que nous sommes au cœur de l’intérêt général et que la métropole pourrait nous aider à dépasser un certain nombre de problèmes, notamment de la vie quotidienne.
Nous ne sommes pas les seuls à être unanimes, c’est aussi le cas, me semble-t-il, des communistes, même s’il existe quelques petites divergences d’analyses…
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, nous voterons contre cette motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.
Nous comprenons tout à fait les raisons qui ont motivé le dépôt de cette motion par Mlle Joissains, mais nous ne la voterons pas, car nous souhaitons que le débat puisse se poursuivre au Sénat, même si nous aurions préféré qu’il se tienne dans d’autres conditions, en fonction d’un ordre du jour nous permettant d’y consacrer plus de temps – j’y reviendrai tout à l’heure.
Nous ne pourrons pas non plus voter contre cette motion, puisque certains des 109 élus des Bouches-du-Rhône qui s’élèvent contre ce texte font partie de notre formation politique. J’aime à le rappeler, en 2010, c’était notre camarade, le maire de Gardanne, qui avait créé les conditions d’une riposte à la réforme des collectivités territoriales de Nicolas Sarkozy.
Je m’étendrai plus sur cette question lorsque j’exposerai les raisons pour lesquelles nous souhaitons le renvoi en commission du texte et non son retrait. Pour l’heure, nous nous abstiendrons sur la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.
Le groupe du RDSE ne votera pas cette motion, car nous considérons qu’il est utile et nécessaire que le débat se poursuive au fond sur un texte concernant directement les collectivités territoriales, dont le Sénat, aux termes de l’article 24 de la Constitution, assure la représentation.
Dans la mesure où nous discutons du texte de la commission des lois du Sénat, et non de celui du Gouvernement, ...
... il ne serait pas bon de voter cette motion et de laisser l’Assemblée nationale s’emparer directement de ce dossier. Nous avons eu quelques expériences en la matière, et nous savons les conséquences qui peuvent en résulter.
Je souhaiterais formuler deux autres observations.
En premier lieu, il a été fait référence à plusieurs reprises à l’excellent travail du gouvernement Mauroy, en particulier de M. Gaston Defferre entre 1981 et 1983. Une différence fondamentale doit être relevée avec ce qui se passe aujourd’hui : dès juillet 1981, Gaston Defferre présentait des textes qui étaient prêts à la discussion. Qu’il y ait eu un débat au cours duquel l’opposition s’est beaucoup battue contre ce texte, c’est un fait ! Mais ces projets témoignaient, comme d’autres, d’un long travail en amont avant les élections. Nous ne sommes malheureusement pas dans ce cas de figure, comme en témoignent le débat et l’historique de ce texte. À cet égard, je l’ai rappelé ce matin, le Gouvernement doit prendre ses responsabilités.
En outre, je ne peux pas manquer d’adresser un message à nos ministres ici présentes. Vous avez de la chance, mesdames les ministres, car siègent en ce moment les maires de Marseille et de Lyon, qui, par leur discours, leur conviction, leur expérience, montrent l’utilité, pour le Sénat, de compter des maires en exercice. §J’espère que vous ne l’oublierez pas dans les mois qui viennent. Sans ces élus, le débat aurait sans doute pris une autre tournure.
Je mets aux voix la motion n° 263 rectifié, tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.
Je rappelle que son adoption entraînerait le rejet du projet de loi
La motion n'est pas adoptée.
Je suis saisie, par Mlle Joissains, d'une motion n°649.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (n° 581, 2012-2013).
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d’opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à Mlle Sophie Joissains, pour la motion.
Je suis très insistante ce soir, mais il est vrai que ce texte motive beaucoup les élus des Bouches-du-Rhône.
Je voudrais reparler des visites de Mme la ministre Marylise Lebranchu dans notre département. Même si nous sommes profondément contre ce texte, contre le fait de ne pas avoir la liberté de décider ce que nous pensons être le mieux pour notre territoire, nous avons tout de même beaucoup apprécié ses déplacements chez nous. Si les choses n’ont pas été simples pour nous, nous savons qu’il en a été de même pour vous mais vous ne nous avez pas entendus.
Je voudrais maintenant rendre hommage à M. le président de la commission des lois, qui a été absolument extraordinaire.
Non, c’est vrai, car vous avez fait preuve d’une écoute inattendue, avec une disponibilité totale et un désir très profond de favoriser l’évolution de la situation. Monsieur le rapporteur, je ne vous oublie pas ! Vous avez manifesté, vous aussi, beaucoup d’écoute, surtout dans un premier temps avec un peu d’emballement au sujet de la liberté d’administration des collectivités, puis vous avez été plus réservé, dans un second temps, au fur et à mesure des auditions…
Globalement, la commission des lois nous a beaucoup aidés, en reportant d’un an le calendrier défini à l’origine et en assouplissant le régime des plans locaux d’urbanisme, dont l’élaboration sera effectuée par les conseils de territoire. C’est une réalité.
De façon générale, le projet de loi ne nous est pas apparu, aux uns et aux autres, très clair. En outre, le vocable de « métropole » recouvre plusieurs régimes distincts, à savoir les trois régimes dérogatoires et un autre, qui devient systématique au-delà d’un certain seuil. Nous en sommes profondément perturbés, car ce caractère systématique remet en cause notre conception des libertés locales. Les maires des communes rurales et moyennes en ont même été ulcérés.
Permettez-moi de citer quelques propos prononcés lors de leurs auditions.
M. Vanik Berberian, président de l’Association des maires ruraux de France, a déclaré : « Les présidents d’intercommunalités gardent la main sur l’urbanisme et le maire est en charge de... la qualité de l’air, autant dire qu’il brassera du vent. »
M. Jean-Claude Villemain, président de la Fédération des maires des villes moyennes de France, a tenu les propos suivants, que je partage : « Le projet reflète un darwinisme politique : il favorise une forme de sélection des territoires en rendant plus forts les plus puissants et en affaiblissant les plus petits… » Et de poursuivre : « les plus petites communes n’auront pas voix au chapitre : qu’elles n’acceptent pas le pacte, et elles n’auront pas les financements croisés. [...] Ce texte éloigne les centres de décision des citoyens ».
De nombreuses idées qui ont été exposées cet après-midi ont recueilli un large assentiment. S’agissant de la métropole de Lyon, en revanche, tout le monde veut que le texte soit voté avec la plus grande célérité !
Dans son analyse sur l’opérationnalité des métropoles, l’Assemblée des communautés de France a indiqué que la différence n’était pas importante avec la loi de 2010. C’est pourquoi nous sommes aujourd’hui quelque peu dubitatifs sur le vote de cette loi quant au statut de la commune, rejoignant en cela Jean-Jacques Hyest, qui a évoqué à son propos une idée ancienne, dépassée, ...
... commune dont on peut parler avec une certaine tendresse ou de la nostalgie… Ce qui n’était finalement qu’un sympathique ex-voto. Nous ne sommes pas d’accord avec cela.
Il faut le reconnaître, certains sont grisés par ce mot de « métropole » qui apparaît moderne, européen et rappelle les grandes cités outre-Atlantique. Mais, dans le même temps, et Gaston Defferre avait raison sur ce point, l’élu local n’est pas simplement une personne attachée à un pré carré ou à un petit pouvoir ; il est vraiment le représentant des habitants d’une collectivité, comme l’a affirmé à juste titre Roland Povinelli tout à l’heure. En cas de problème, dans les petites communes tout au moins, c’est leur maire que les citoyens consultent à propos de pavés mal joints, d’une haie qu’il faut tondre, de l’enfant à marier, voire, dans certains villages, pour demander au curé de baptiser un enfant tel jour, etc.
L’élu local s’occupe de tout, y compris évidemment de l’urbanisme, qui est aussi le rêve de la cité pour les citoyens : sans l’appui de leur maire, sans sa vision, ils sont perdus. On ne peut pas décider de l’urbanisme à des kilomètres de l’endroit où vivent les gens, car la vision qui en résultera sera automatiquement décalée, différente de la leur. Cet aspect est très important. Notre objectif, dans la démocratie locale, dans les libertés locales, c’est de faire en sorte que la démocratie soit partagée : la population doit pouvoir choisir un représentant qui appliquera les décisions désirées par la majorité. Or une trop grande distance rend ce processus impossible.
La loi de 2010 avait, certes, beaucoup de défauts – elle a suscité de nombreuses critiques dans le département –, mais au moins laissait-elle le choix, à tel point que 109 communes des Bouches-du-Rhône sur 119, en dépit de leur révolte contre ce texte, ont, pour échapper à la métropole, voté le pôle métropolitain. Ces communes étaient de toutes tendances politiques : certaines étaient communistes, sur des terres minières, d’autres socialistes, centristes ou proches de l’UMP. Nous avons réussi, ce qui est un exploit dans nos démocraties, à nous unir autour d’une idée commune de notre territoire : nous avons décidé de voter le pôle métropolitain et d’y travailler de concert.
Je comprends d’ailleurs que le maire de Marseille, en bon père de famille, veuille réunir tout le monde pour créer une métropole – je reviendrai ultérieurement sur les problèmes qu’une telle idée peut susciter. Si tous les futurs présidents de métropoles étaient comme Jean-Claude Gaudin, certains pourraient en France reconsidérer la question, mais ce n’est vraiment pas le cas ! Il suffit de se souvenir du député des Bouches-du-Rhône que nous avons auditionné – je ne citerai pas son nom. Avec son attitude intimidante, il a tenté de couper court à toute réplique et n’a cessé de s’auto-congratuler. Cet exemple prouve à lui seul que tout le monde n’a pas les qualités de démocratie et d’affectivité dont témoigne Jean-Claude Gaudin.
Madame la ministre, il y a quelques instants, vous avez qualifié la métropole marseillaise de « porte de la Méditerranée ». Mon sentiment est quelque peu mitigé à ce propos. Comme beaucoup d’habitants des Bouches-du-Rhône, j’aime énormément Marseille : cette ville symbolise beaucoup de choses, à la fois l’enfance, le soleil, la plage... Toutefois, il faut garder à l’esprit que la Provence est multipolaire. Sans totalement être inexacte, l’expression « porte de la Méditerranée » n’est que partiellement juste. Certes, la métropole marseillaise représente les trois quarts des Bouches-du-Rhône, mais ce département ne se résume pas au littoral.
Il y a Marseille, avec son rayonnement très particulier : au-delà de son image noire, presque napolitaine, cette ville reste très proche de Pagnol, …
… avec sa tendresse, son affect, sa naïveté et la forfanterie qu’elle représente. Marseille, c’est tout cela à la fois.
À côté, il y a également Aix-en-Provence §
Je ne parlerai pas uniquement d’Aix, car je suis sénateur et non simplement élue locale. La Provence, qu’a immortalisée le peintre Cézanne, ...
... est plus terrienne, plus sobre et historiquement intellectuelle : Aix était jadis la capitale de toute la Provence, avec le palais comtal, où logeait le bon roi René, …
M. Jean Germain, rapporteur pour avis. Mais pourquoi est-il parti à Roubaix ?
Nouveaux sourires.
… le parlement de Provence et toute une tradition incarnée d’abord par la noblesse de robe, puis par les professeurs et les juristes. La ville d’Aix a une mentalité totalement différente de celle de Marseille ; ce sont deux mondes distincts.
Puis, plus loin, se trouve la Provence mistralienne, autour d’Arles. Il s’agit d’un territoire encore plus brut, profondément terrien, dont la culture et les traditions sont solidement ancrées. Aujourd’hui, dans cette Provence, on assiste toujours aux fêtes et aux farandoles. Ce sont des événements très importants : pour les habitants de cette région, ce n’est pas du folklore, c’est de la tradition !
Ces trois Provence constituent trois mondes, trois univers que j’aime profondément mais que l’on ne peut pas réduire à un seul. Il faut véritablement garder cette réalité à l’esprit. Une fois ces trois mondes brossés à grands traits, il faut souligner que chacun d’entre eux est très indépendant, très autonome. Ainsi, leur annoncer l’hégémonie de l’un sur les deux autres, plus petit que les autres, cela ne marche pas, cela ne colle pas ! De tels propos sont d’autant plus blessants qu’ils sont martelés. Ils sont ressentis comme une profonde injustice.
Je me souviens de la visite de Jean-Marc Ayrault lors de l’inauguration de Marseille-Provence 2013. Cette manifestation a presque tenu du miracle : à l’exception du maire de Fos-sur-Mer, nous avons réussi à nous asseoir tous ensemble autour de la table pour donner un élan culturel à l’ensemble de notre territoire. La règle européenne exige que l’événement prenne le nom d’une ville et d’un territoire : nous avons choisi Marseille et la Provence. Toutefois, dans son discours, M. le Premier ministre a fait une gaffe monumentale.
Sans doute ulcéré par la résistance à l’œuvre contre l’EPCI qu’il souhaitait créer, M. Ayrault n’a parlé que de Marseille : il n’a salué aucun des territoires associés !
Madame la ministre, je me souviens d’ailleurs que vous étiez présente ce jour-là ! Nous, élus provençaux, sommes tous partis furieux et blessés. Lorsqu’un seul coup est porté, on se dit que ce n’est pas grave, mais lorsque les blessures sont récurrentes, …
… on finit par se demander si elles ne signifient pas quelque chose. Dès lors, elles prennent du sens.
Or aujourd’hui, avec le projet de métropole, nous éprouvons le même sentiment : celui de ne plus exister. Nous qui sommes si fiers de nos identités respectives, nous qui sommes si fiers d’appartenir à cette terre si particulière de France, nous sommes soudainement effacés d’un coup de gomme ! C’est fini ! C’est comme si notre histoire, si riche, si diverse et si ancienne n’existait plus aux yeux du monde. Nous ne pouvons pas l’accepter !
À ce titre, je ne peux manquer de lire un bref paragraphe d’un discours de Gaston Defferre, même si ce texte a déjà été abondamment cité aujourd’hui. Je poursuis sur la lancée : « Le gouvernement de François Mitterrand et de Pierre Mauroy a confiance dans les Français, dans leur capacité de choisir leurs élus, des élus majeurs et responsables, des élus libres d’agir sans tous ces contrôles a priori, sans que leurs décisions soient remises en cause, retardées, déformées par des fonctionnaires ou des ministres lointains qui connaissent mal leurs problèmes, et que rien n’habilite à décider à leur place. »
Madame la ministre, citer ce texte, ce n’est pas vous faire injure. Je connais vos bonnes intentions. Mais je sais aussi que vous êtes Bretonne et que vous n’habitez pas la Provence !
C’est bien dommage, car chez moi il pleut !
Quoi qu’il en soit, il faut vivre dans un lieu pour en percevoir toutes les subtilités. Parfois, les schémas grossiers qui peuvent apparaître à nous ne sont que des paravents derrière lesquels se cachent d’autres trésors, d’autres clefs, d’autres chemins à suivre. Tel est le message que je souhaite délivrer ce soir : nous, élus provençaux, quelles que soient nos étiquettes politiques, nous avons, tous ensemble, pris résolument un autre chemin. J’y viendrai dans un instant : nous avons réellement formulé trois propositions distinctes ; la dernière d’entre elles réside dans les divers amendements déposés, quels qu’ils soient, qu’ils viennent du groupe CRC, du groupe socialiste, ou de l’UMP !
En résumé, Marseille a beaucoup d’atouts : c’est une ville chatoyante, pleine d’affect et de tendresse, parfois brutale également, marquée par des poches de pauvreté. Au-delà de cet aspect pécuniaire parfois misérable, Marseille a aussi ses défauts. Nous en avons tous ! Mais les travers de Marseille ont quelque peu influé sur les services publics : le mono-syndicalisme qui règne dans la ville a paralysé le port pendant trente ans.
Mlle Sophie Joissains. Globalement, le mono-syndicalisme a perturbé le fonctionnement de tous les services publics.
Protestations sur les travées du groupe CRC.
Si, précisément, chère collègue !
La collecte des ordures ménagères a parfois subi des grèves durant près d’un mois, entraînant toutes les nuisances que l’on imagine. En outre, les équipements publics sont parfois très difficiles à manier, lorsque ceux qui entrent travailler ont besoin que le papa, la maman, …
… le frère, la sœur, la nièce ou le neveu entrent également ! Cette situation paralyse complètement les services publics.
Que voulons-nous aujourd’hui ? Nous souhaitons que Marseille bénéficie d’un financement de l’État équivalent en proportion aux crédits consacrés à Paris. À nos yeux, c’est un élément essentiel. Vous voulez organiser de 7 000 à 8 000 transferts de fonctionnaires, comment ce mouvement pourrait-il être mené à bien ?
J’ai déjà évoqué la question du PLU. Je voudrais à présent mentionner les schémas que nous avons conçus, à commencer par la création du pôle métropolitain, que la loi nous imposait. Nous avons mené ce chantier de concert, pour échapper à la métropole. Nous avons proposé un syndicat mixte, auquel nous souhaitons associer la Camargue, au moins pour les transports, car cette région ne doit pas rester isolée dans le département des Bouches-du-Rhône.
À ce titre, nous avons émis la proposition suivante : laissez-nous mettre en place ce syndicat mixte, tout en maintenant une épée de Damoclès suspendue au-dessus de nos têtes. Si, passé deux ans, le bilan est mauvais – et nous sommes prêts à le soumettre au Parlement ! –, nous accepterons le statut de métropole fixé par l’article 30 du présent texte.
Madame la ministre, j’en fais le serment : si vous acceptez de nous laisser mener cette expérimentation, nous aurons tellement peur que nous travaillerons comme des fous, et qu’il n’y aura pas besoin de métropole ! J’espère que nous pourrons nous en tenir à cette proposition ! §
Madame la présidente, mesdames les ministres, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs, chers collègues, Mlle Joissains a adressé des compliments très éclectiques, à Mme la ministre, au président de la commission des lois, aux rapporteurs, à Jean-Claude Gaudin, à Gaston Defferre et à d’autres.
La discussion ne doit pas s’arrêter là !
Pour ma part, je pourrais vous répondre en témoignant de l’affection que j’éprouve pour une région bien connue, sœur des coteaux d’Aix par le vin. Je songe à la fois à la Bourgogne du sud, à la Bourgogne du nord, celle de Chablis, …
… au Tonnerrois, au Sénonais, à la Puisaye, à la Bourgogne de Cluny, à celle de Vézelay, de Fontenay, de Pommard ou encore de Gevrey-Chambertin, où je suis né, ainsi qu’à la Bourgogne d’Époisses, le pays de ma mère ! Il faut dire que je suis moi-même un véritable produit d’appellation d’origine contrôlée – garantie d’origine et non gage de qualité ! Toutefois, vous le comprendrez, je n’en parlerai pas, par souci de gagner du temps. Du reste, je n’aurais ni le talent ni la sensibilité dont vous avez fait preuve.
Mes chers collègues, je me contenterai de souligner que nous devons poursuivre nos discussions. En effet, comme beaucoup d’entre nous l’ont compris, il est nécessaire de consacrer à ce sujet un débat en séance publique. Adopter une telle motion reviendrait, pour le Sénat, à fuir sa responsabilité. Notre assemblée doit apporter sa voix à la discussion d’un texte déterminant pour les collectivités locales. Chacun s’est exprimé abondamment sur ce sujet au cours de l’après-midi.
En premier lieu, nous nous devons de poursuivre ce débat au regard des travaux menés par le Sénat au cours des dernières années, en amont des états généraux de la démocratie territoriale clôturés en octobre 2012 par le chef de l’État.
Ces réflexions ont été mentionnées au cours de la discussion générale. Je songe au rapport de Jacqueline Gourault et de Didier Guillaume, publié en 2011, Rénover le dialogue entre l’État et les collectivités territoriales : une nécessité pour une démocratie apaisée. Je pense également au rapport d’Yves Krattinger et de Jacqueline Gourault, datant de 2009, auquel j’ai pris part avec d’autres collègues présents ce soir, et qui était intitulé Faire confiance à l’intelligence territoriale. Depuis 2009, près de quarante rapports d’information divers ont été rédigés au sujet des collectivités territoriales, de la répartition de leurs compétences et de l’organisation institutionnelle de l’Île-de-France, en passant par des bilans divers et variés des précédentes lois de décentralisation. Le temps de la décision est aujourd’hui venu, et le débat au Sénat en est le corollaire indispensable.
En 1981, j’étais dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale lorsque Gaston Defferre a présenté ses projets de loi de décentralisation. Je me souviens encore des arguments invoqués par un quarteron de jeunes députés de l’opposition, déjà promis à un grand avenir. Ces propos étaient à peu près les mêmes que ceux que j’ai entendus ce soir !
Cher Jean-Pierre Sueur, je me souviens également de ce jour où vous êtes venu inaugurer les deux premières communautés de communes de France, ...
… en territoire rural, fédérant des chefs-lieux de canton de 1 500 habitants et vingt-cinq communes de moins de 200 habitants. Nous étions en 1992, et le discours que nous entendions alors était exactement le même que celui d’aujourd’hui ! Cette initiative faisait suite à la loi relative à l’administration territoriale de la République, dite loi ATR, que j’avais votée le 6 février 1992.
Du reste, Gérard Collomb a évoqué ce souvenir cet après-midi avec plus de talent que moi.
Plus récemment, les états généraux de la démocratie territoriale, organisés sur l’initiative du président du Sénat, Jean-Pierre Bel, et conclus en octobre 2012, ont donné lieu à une vaste concertation entre les élus locaux. Comme l’a indiqué M. le rapporteur il y a quelques instants – et je l’en remercie – ces travaux ont contribué à ce que le présent projet de loi s’inspire largement de la pensée du Sénat en matière de décentralisation.
Tous ces travaux prouvent que le présent texte est imprégné, non de l’esprit de la Provence, mais bien de la pensée du Sénat ! Je le souligne à mon tour, avec beaucoup d’émotion. En outre, des travaux ont été menés sur les métropoles en amont de la discussion du présent projet de loi. Il y a eu de nombreuses consultations et des concertations avec l’ensemble des associations d’élus locaux, dans le cadre de trois cycles, en juillet 2012, en décembre 2012 et en février 2013. La discussion doit désormais se poursuivre en « terrain découvert », c'est-à-dire dans l’hémicycle. Il faut un débat.
Examinons à présent les conditions d’examen du projet de loi au Sénat. En commission des lois, près de 550 amendements ont été déposés, et les 188 qui ont été retenus émanaient, pour une part, du rapporteur, mais aussi de toutes les tendances politiques représentées au Sénat. Trois commissions ont été saisies pour avis, dont je remercie d’ailleurs les rapporteurs ici présents : la commission des finances, la commission du développement durable et la commission des affaires économiques, qui ont, elles aussi, organisé des débats internes et procédé à des auditions.
En séance publique, près de 900 amendements ont été déposés. La pluralité des propositions émises témoigne, là encore, d’un besoin de discussion. Nous allons y répondre. La discussion générale qui s’est tenue aujourd’hui pendant plus de trois heures trente traduit la diversité des positions qui irriguent chaque groupe politique, l’exemple de l’UMP n’étant pas le moins parlant.
Dès lors, considérer, en adoptant la présente motion tendant à opposer la question préalable, qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération reviendrait à amoindrir considérablement le rôle du Sénat, voire à nuire à l’institution elle-même, qui n’en a guère besoin en ce moment. Évitons de donner le sentiment que notre Haute Assemblée ne peut pas être le lieu du débat d’un texte d’initiative gouvernementale, voire qu’elle n’a pas de propositions propres à apporter ou, en cas de désaccord, d’autres solutions à défendre. D’ailleurs, les discussions en commission des lois ont montré que ce n’était pas le cas. La volonté de débattre est réelle.
J’en viens aux autres arguments avancés par Mlle Joissains. Ma chère collègue, vous affirmez que le nouveau régime des métropoles serait « quasiment identique » à celui de la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales. C’est faux ! Le présent projet de loi n’est pas la copie du texte de 2010.
D’abord, ce projet rétablit notamment la clause de compétence générale des départements et des régions, dont la disparition à compter de 2015 avait été actée par la loi de 2010. En complément de ce maintien, le texte désigne les collectivités locales « chefs de file » sur des listes de compétences partagées, et non exclusives. Ensuite, il crée des métropoles à statut particulier, adaptées aux réalités propres des trois premières aires urbaines du territoire, instaurées autour de Paris, Lyon et Marseille. Je n’y reviens pas.
Par ailleurs, j’ai écouté avec beaucoup d’attention le plaidoyer de Gérard Collomb sur la question spécifique de la métropole d’Aix-Marseille-Provence. Notre collègue a rappelé la nature du projet, en montrant à quel point il était bénéfique et attendu dans les territoires concernés.
De multiples réunions et auditions se sont tenues sur la problématique marseillaise. Vous les avez vous-même évoquées pour en saluer le climat et féliciter les participants, ma chère collègue. Le président de la commission des lois et le rapporteur René Vandierendonck ont organisé conjointement des réunions et procédé à des auditions officielles. Le 23 avril s’est tenue une table ronde avec les élus marseillais, maires et sénateurs ; M. Gaudin a été entendu le 14 mai et de nombreuses rencontres officieuses eurent lieu avec les sénateurs et les maires des Bouches-du-Rhône. Une réunion s’est également déroulée le 23 mai entre notre président de groupe, M. François Rebsamen, et les élus marseillais, sénateurs ou représentants des sénateurs et membres de l’Union des maires des Bouches-du-Rhône. En outre, Mme la ministre Marylise Lebranchu a effectué dix déplacements à Marseille et a tenu onze réunions spécifiques avec les opposants au projet de métropole, l’Union des maires des Bouches-du-Rhône.
Vous le voyez, le débat a déjà été largement engagé. Qu’il n’ait pas convaincu tout le monde, …
… je peux le comprendre, mais cela n’aurait aucun sens de l’interrompre parce qu’il n’y aurait pas de consensus sur une question locale. Si le consensus fait défaut, c’est qu’il reste à construire !
À mon sens, du travail remarquable effectué par la commission des lois peut surgir un débat intéressant de nature à marquer l’avenir de notre pays et des métropoles, en particulier de celle d’Aix-Marseille-Provence ! §
La question des compétences a beaucoup alerté les maires. J’ai indiqué tout à l’heure à quel point leurs remarques avaient été prises en compte. Les transferts de compétences à l’aire métropolitaine sont aujourd'hui extrêmement encadrés, malgré la complexité de la rédaction. J’ai également rassuré les élus locaux sur la dotation globale de fonctionnement et la dotation de solidarité communautaire.
Je pourrais vous parler de ma propre communauté d’agglomération, qui est à cheval sur le Trégor et le Léon, deux territoires aux cultures différentes, mais nous aurons sans doute l’occasion d’en discuter ailleurs.
Quoi qu’il en soit, il me semble important de pouvoir débattre des différents amendements portant sur la métropole d’Aix-Marseille-Provence. Vous avez raison de souligner la complexité pour les élus. Je partage d’ailleurs vos propos sur la porte du bassin méditerranéen. Simplement, à mon sens, ce grand et magnifique territoire, qui, cela a été rappelé, dispose de tant d’atouts, a besoin d’une organisation qui permette son développement. En effet, ni vous ni nous ne pouvons nous satisfaire de la situation du logement ou des transports, ou des difficultés rencontrées par les salariés et les étudiants. Il nous faut donc en débattre tranquillement.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur la présente motion tendant à opposer la question préalable.
Doit-on s’interdire de continuer à examiner le projet de loi parce qu’une question particulière, la métropole d’Aix-Marseille-Provence, ne fait pas consensus ? À titre personnel, je me serais bien passé de ce genre de propositions. Simplement, une série de textes issus de la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales pose de lourdes difficultés, peut-être pas spécialement à Marseille, mais aux collectivités territoriales en général.
Vous connaissez notre désir sincère de vous être agréable, ma chère collègue. Toutefois, je pense que nous devons poursuivre le débat. D’ailleurs, j’ai noté un certain nombre d’avancées par rapport au texte d’origine ; certaines mesures dont nous sommes saisis me semblent de nature à recueillir un plus large consensus que les propositions initiales. Ce n’est qu’un début, continuons le combat ! §
Toutefois, j’ai un peu tiqué : j’ai beau être breton moi aussi, je connais tout de même un peu la Provence et, sous couvert d’évoquer Pagnol et Mistral, ne nous a-t-on pas plutôt servi, comme c’est le cas dans certains films avec Fernandel, quelques « pagnolades » un peu caricaturales ?
Pour ma part, je préfère me souvenir de l’un des films tirés de l’œuvre de Pagnol, Manon des sources, qui se rapproche de l’univers de Giono.
En l’occurrence, nous sommes bien, nous aussi, en train de rappeler l’interdépendance des territoires, notamment en matière environnementale.
Au demeurant, cette année, nos deux villes sont des capitales : Marseille-Provence Métropole est capitale européenne de la culture et Nantes est capitale verte de l’Europe. Pour Nantes, cela a été plus simple : si nous avons gagné ce titre, c’est parce que nous avions dès le départ présenté une candidature d’agglomération totalement intégrée, avec des politiques urbaines à l’échelle de l’agglomération. La métropolisation de Nantes a donc été un facteur déterminant pour l’obtention d’une telle distinction.
Ma chère collègue, deux aspects au moins de votre discours portant sur des sujets environnementaux m’ont quelque peu surpris.
Premièrement, si je conçois que l’on ironise sur l’attribution aux maires de la compétence relative à la qualité de l’air, il y a tout de même des villes – j’imagine que ce doit être le cas à Marseille – avec des rues « canyon », où la pollution de l’air constitue un enjeu de santé et d’environnement extrêmement important. Or c’est souvent lié aux décisions de circulation de proximité. L’idée selon laquelle les maires ne devraient pas s’occuper de la qualité de l’air me semble donc très discutable.
Deuxièmement, et là, nous sommes au cœur des politiques publiques, confier la compétence en matière de PLU au seul maire sous prétexte qu’il est le seul à connaître son territoire en tant qu’élu de proximité – je ne pense pas caricaturer votre propos –, cela aboutit à un paysage plein de lotissements. Et le mitage détruit aussi la Provence. Par conséquent, dégager le maire du PLU permettra, me semble-t-il, de mieux prendre en compte la diversité des paysages et de lutter contre l’étalement urbain.
Enfin, en tant que léonard, je pense qu’avoir une identité aide toujours à mieux comprendre les identités des autres. S’ils avaient encore été de ce monde, je vous aurais suggéré de revoir le merveilleux spectacle où Yvan Audouard, le Provençal, et Pierre-Jakez Hélias, le Breton, certes cornouaillais, présentaient conjointement un ensemble de contes. C’était magnifique ; tous deux se comprenaient parfaitement !
L’agglomération du pays de Morlaix se compose à la fois des communes léonardes et des communes trégoroises : c’est la preuve que tout est possible ! Je ne vois donc pas pourquoi il y aurait des difficultés pour Aubagne, Aix-en-Provence et Marseille.
Je mets aux voix la motion n° 649, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que son adoption entraînerait le rejet du projet de loi.
La motion n'est pas adoptée.
Je suis saisie, par Mme Assassi, M. Favier, Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, d'une motion n° 58.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l’article 44, alinéa 5, du Règlement, le Sénat décide qu’il y a lieu de renvoyer à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d’administration générale, le projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (n° 581, 2012-2013).
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d’opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
Aucune explication de vote n’est admise.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour la motion.
Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, il est, j’en conviens, un peu tard pour présenter une motion, d’autant qu’il n’y a pas grand-monde dans l’hémicycle, ce qui est bien dommage.
Pour une fois, je suis d'accord avec vous, monsieur Nègre !
Selon nous, les conditions d’examen au Sénat du projet de loi dit « de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles » ne sont pas satisfaisantes.
Comme cela a été rappelé, depuis plusieurs mois, près de dix avant-projets ont circulé. Une fois finalisé, après consultation du Conseil d’État, le projet fut scindé – certains ont employé d’autres verbes ; moi, j’utilise celui-là – en trois textes avant son passage en conseil des ministres, faisant perdre une visibilité globale, s’agissant tant de la cohérence des contenus que du rythme d’examen par les assemblées.
La séparation en trois textes, qui s’est faite dans la précipitation, a abouti à de fortes incohérences dans le projet du Gouvernement. Ainsi, le premier texte fait référence au Haut conseil des territoires, un organe présenté comme essentiel par François Hollande lors des États généraux, mais qui ne sera créé que dans le troisième texte ! Je pourrais mentionner également les chefs de filat créés en faveur de certaines collectivités sur des compétences qui ne leur sont pas encore attribuées, comme la qualité de l’air pour les communes…
Par-delà ces désordres rédactionnels, ces textes, chacun le sait, soulèvent beaucoup d’interrogations – nous l’avons encore vu aujourd’hui –, d’inquiétudes, voire de colère ou de désarroi, et suscitent l’opposition de très nombreux acteurs de la vie locale.
Cette profonde contestation du projet s’est d’ailleurs traduite par une réécriture importante, complexe du texte par la commission des lois, particulièrement par M. le rapporteur, dont je salue le talent et qui a su également développer des qualités d’écoute et de respect de la parole de chacun. Soyons néanmoins lucides, aucune réunion de la commission des lois n’a pu favoriser un échange de fond sur les enjeux de cette réforme.
Certains se plaisent à dire que la commission des lois a travaillé : c’est tout de même la moindre des choses ! §
Il s’agit d’un texte qui structurera non seulement la vie de nos institutions, mais surtout celle de nos concitoyens dont il est peu question depuis le début de l’après-midi.
De nombreuses interventions étaient désincarnées ; on ne parlait plus des gens, ce qui est tout de même un problème quand on traite de nos institutions. Voilà pourquoi, écoutant le propos de mon ami Christian Favier, je me suis dit : « enfin de l’humain ! »
Certes, nous avons travaillé, mais soyons humbles, pour ne pas dire très humbles. Rappelons-nous ce pour quoi nous avons été élus : nous sommes là pour travailler, pour réfléchir et pour construire une vision de notre société qui réponde, in fine, aux besoins et aux attentes de nos concitoyens.
Examiner des centaines d’amendements jusqu’à trois heures du matin, nous savons le faire.
Il s’agit d’un texte dont chacun désire se préoccuper. Or, à l’évidence, peu d’élus semblent vouloir y consacrer du temps, du travail et de la réflexion !
Bien sûr, mais, proportionnellement, vous en conviendrez, les élus de mon groupe sont présents.
Revenons-en au texte. Dans ces conditions, il a été difficile, pour ne pas dire impossible, aux sénateurs qui ont déposé des amendements d’en exposer les objets et de les défendre.
C’est donc finalement un nouveau texte, celui que nous examinons aujourd’hui, qui est sorti laborieusement des travaux de la commission des lois. Ce nouveau texte n’est disponible que depuis neuf jours, week-end de la Pentecôte compris. Les sénateurs de la commission, mais aussi tous les autres, n’ont eu alors qu’une toute petite semaine pour examiner ce nouveau texte et proposer des amendements pour la séance.
Monsieur le président de la commission des lois, le Président de la République dans son discours de Dijon, il y a quelques semaines, déclarait qu’il faisait confiance au Sénat pour réécrire, s’il le fallait, ce texte. C’est fait : reste à savoir si c’est bien fait…
De plus, le rapporteur et vous-même, monsieur le président de la commission des lois, expliquiez dès les premières auditions, devant la contestation soulevée par certaines parties du texte, que celui-ci allait être profondément modifié. Finalement, il avait été annoncé depuis plusieurs semaines que le texte serait réécrit, mais il n’a pas été prévu pour autant d’accorder des délais supplémentaires pour l’examiner. Le président du Sénat annonçait même l’ouverture d’une large concertation avant l’examen du projet de loi par la Haute Assemblée, rappelant les très intéressants États généraux des collectivités territoriales qui ont eu lieu à l’automne dernier.
En définitive, le Gouvernement n’a tenu compte d’aucune de ces propositions, les a balayées d’un respectueux revers de main et a inscrit cette réforme à l’ordre du jour du Sénat, à une date rapprochée, sans tenir compte des délais nécessaires à son examen. La nouvelle concertation annoncée, reprenant l’esprit des rencontres d’octobre, s’est en fait traduite par une simple multiplication d’auditions – soixante-dix au total – en un peu plus de trois jours par la commission des lois. Ce travail a débouché sur une réécriture du texte par le rapporteur, sans qu’aucune nouvelle consultation n’ait été possible ni même envisagée !
Sur le premier texte, soixante-dix auditions ont été conduites. Pourquoi n’avons-nous prévu aucune audition sur le deuxième texte ? Comme beaucoup de sénateurs dans cet hémicycle, j’ai rencontré les élus de mon département – lundi soir, pour ne rien vous cacher – et je leur ai parlé d’un texte dont ils ne savaient absolument rien. Ils ne connaissaient que le texte du Gouvernement, avant sa réécriture par la commission des lois du Sénat. C’est un problème démocratique !
L’idée très intéressante d’un aller-retour entre les élus, les citoyens et les associations d’élus, défendue par le président du Sénat, et que nous soutenions, a donc été abandonnée. La réalité fut tout autre. C’est une commission des lois réduite à sa portion congrue, en pleine nuit, qui a finalement débattu pour l’essentiel des propositions du rapporteur, aussi bonnes soient-elles, lequel a réécrit le texte.
Ce qui s’est produit va radicalement à l’encontre de l’esprit des États généraux des collectivités territoriales, qui furent le projet du président du Sénat et qui connurent une belle réussite démocratique à laquelle nous avons contribué, au Sénat comme dans nos départements. Notre assemblée n’a pas pu se saisir sérieusement de ce texte malgré sa mission de représentant des collectivités territoriales.
Mesdames les ministres, mes chers collègues, la démocratie est au cœur de la réflexion qui m’anime ce soir. Mon intention n’est pas de polémiquer. Ce projet fait débat ; sa profonde réécriture accentue encore un sentiment de précipitation et d’incertitude ressenti sur de nombreuses travées. Le nombre d’intervenants inscrits dans la discussion générale est, à cet égard, révélateur. Aussi, nous pensons qu’il faut prendre le temps de l’échange pour remettre cette réforme à l’endroit, en s’appuyant sur l’exigence démocratique qui croît considérablement dans notre pays.
Nous pensons que le Sénat n’est pas prêt à examiner ce projet de loi dans de bonnes conditions. Des expériences récentes en matière d’ordre du jour ont montré qu’il ne fallait pas confondre vitesse et précipitation. Rappelez-vous l’inscription à l’ordre du jour, dès le 5 septembre dernier, du projet de loi sur le logement, qui s’est soldé par une censure du Conseil Constitutionnel.
Cette motion tendant au renvoi en commission ne vise pas à reporter l’examen d’un texte, mais vise à créer de bonnes conditions pour l’examen d’un nouveau texte. Les éléments-clés de ce texte, qu’il s’agisse de la mise en place des conférences territoriales et de la création des métropoles, ont été profondément remaniés.
Alors que le rôle du Gouvernement est, à notre sens, de proposer une perspective d’organisation harmonieuse du territoire, nous assistons de manière détestable – j’ose le terme – à l’émergence d’un débat qui préfigure une France morcelée, éclatée entre quelques immenses collectivités drainant compétences, moyens financiers et capacités de développement au détriment de grandes zones en proie à la désertification.
Vu l’ampleur de l’enjeu pour l’avenir de notre pays et de nos concitoyens, cette réforme mériterait une tout autre réflexion qu’une simple réunion – ce qualificatif n’est pas péjoratif – de la commission des lois, dont je suis membre. Dans ces conditions, nous prenons le risque que chacun – cela s’est vu encore cet après-midi – défende son territoire, sa collectivité, son EPCI, sa métropole, centré sur sa conception, soucieux, en fait, de la pérennisation de véritables « baronnies », oublieux d’un développement harmonieux du territoire. Tout cela pourrait aboutir à accentuer la mise en concurrence de ces mêmes territoires. De ce point de vue, nos débats de cet après-midi étaient assez caricaturaux.
L’un n’exclut pas l’autre, monsieur le président de la commission !
Ainsi, l’objet de la mise en place de ces nouvelles grandes métropoles échappe à un nombre croissant de personnes, y compris sur nos travées. Si nous faisions une interrogation écrite, je ne suis pas sûre que mes collègues donneraient les bonnes réponses... En revanche, ce qui est compris par un nombre croissant d’élus, c’est le déficit démocratique que créera l’instauration d’une nouvelle strate territoriale singulièrement éloignée des citoyens. La complexité du concept de métropole, son absence de cohérence justifient pleinement la remise en chantier du projet de loi, d’autant que l’opposition monte considérablement parmi les élus locaux, et fort heureusement pas seulement à Marseille, mademoiselle Joissains.
L’autre point fort de notre demande de renvoi en commission est l’incohérence du découpage en trois textes du projet de loi initial du Gouvernement. Pour résumer, nous avons pris les choses à l’envers : je crois que M. le rapporteur partage ce constat.
Quoi qu’il en soit, à l’heure où je vous parle, nous ne savons strictement rien des modifications qui pourraient intervenir sur les deux autres textes : c’est incroyable ! Bref, nous avons perdu toute visibilité de l’ensemble de la réforme, au-delà même du calendrier surréaliste qui nous est proposé. Monsieur le rapporteur, il apparaît indispensable d’éclairer la commission sur votre vision globale de la réforme. À ce titre, j’aurais plusieurs questions à vous poser.
Quels outils donnerez-vous aux communes, par exemple, pour se protéger de l’influence écrasante des futures métropoles, tant pour celles qui en seront membres que pour toutes les autres, qui subiront leur mise en place ? Pouvez-vous, sans avoir cette vision globale, démentir solennellement aujourd’hui l’idée que les métropoles seront des outils de réduction des dépenses par la mutualisation des moyens, mais aussi par voie de conséquence des outils de réduction de l’offre de service public ? Les départements et les communes ne seront-ils pas cantonnés à un rôle de proximité, sans pouvoir décisionnel réel ?
Un autre élément important qui fonde notre demande de renvoi en commission est l’absence de visibilité sur les contrats de plan que le Premier ministre doit, selon ses propres dires, présenter d’ici à l’été.
En effet, une dépêche nous apprenait, mardi, que M. Ayrault avait déclaré, devant le groupe socialiste : « j’ai […] annoncé aux sénateurs socialistes que le Gouvernement travaillait à relancer les contrats de plan État, régions, grandes collectivités ». L’annonce est ainsi faite que l’État va dorénavant contracter non plus seulement avec les régions, mais aussi avec de « grandes collectivités », sans savoir lesquelles, ni dans quels domaines !
Autre question, est-il concevable de débattre aujourd’hui de la création d’une nouvelle strate institutionnelle, les métropoles, sans connaître leur place dans le dispositif annoncé ?
De même, nous avons appris le lancement, pour le mois de juin prochain – donc dans quelques semaines –, d’un « pacte de confiance » déterminant en particulier la répartition des dotations de l’État et un cadre rénové pour garantir l’autonomie financière et fiscale des collectivités, sans que les départements soient réellement assurés de la compensation totale du transfert des versements des allocations de solidarité nationale auquel ils doivent faire face.
Puisque vous semblez disposer de la réponse, le bon sens n’aurait-il pas voulu que le Sénat ait connaissance de ces perspectives financières avant de se lancer dans la réorganisation de l’architecture institutionnelle des territoires ?
Cette question de l’avenir des finances locales est au cœur d’une réforme décentralisatrice audacieuse, porteuse de progrès et de développement du service public. Or à notre sens, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission des lois, notre commission n’a pas éclairé le Sénat sur le réalisme de la réforme proposée dans le cadre de l’exigence de réduction des dépenses publiques souhaitée, voulue et, dirai-je, imposée par Bruxelles.
Je conclus, madame la présidente, mais certains de mes collègues ont usé de beaucoup plus de temps.
Je voudrais tout de même vous lire une des recommandations de M. Barroso.
Il y est question de l’acte III de la décentralisation et, pardonnez-moi, monsieur le président, c’est un peu ce qui nous occupe depuis ce matin. Que dit M. Barroso ? « À cet égard, l’examen en cours des dépenses publiques (modernisation de l’action publique) qui concerne non seulement l’administration centrale, mais aussi les administrations des collectivités locales et de la sécurité sociale devrait indiquer comment améliorer encore l’efficacité des dépenses publiques. Il est également possible de rationaliser davantage les différents niveaux et compétences administratifs afin d’accroître encore les synergies, les gains d’efficacité et les économies. La nouvelle loi de décentralisation prévue – c’est bien ce dont nous parlons – devrait traiter de cette question ».
Cet extrait est tiré d’une lettre de M. Barroso ; je ne l’ai pas inventé. Il serait donc intéressant que nous puissions aussi discuter de ces différents points à l’occasion du débat qui va nous occuper dans les prochains jours. Compte tenu de tous ces éléments, la commission, nous semble-t-il, doit réexaminer le texte et ses propres propositions, à l’aune des injonctions de la Commission européenne.
J’aurais encore beaucoup à dire, madame la présidente, mais j’ai bien conscience d’abuser de mon temps de parole. J’en termine donc pour laisser la parole à M. le président de la commission des lois qui, j’en suis certaine, va se faire un plaisir de nous répondre.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC. – M. le rapporteur applaudit également.
Mon groupe m’a demandé de m’exprimer sur cette motion, ce que je fais volontiers, et M. le rapporteur donnera l’avis de la commission.
J’ai bien écouté votre propos, madame Assassi, et permettez-moi de vous dire en toute sincérité que je vous ai parfois, même souvent, trouvée plus convaincante. En effet, quel est le sujet ? Nous sommes saisis par le Gouvernement de trois projets de loi, en l’espèce d’un projet de loi qui a été inscrit à l’ordre du jour, conformément à la Constitution, par la conférence des présidents.
Vous avez déclaré que nous n’avions pas parlé des gens dans le débat. C’est votre appréciation. Pour ma part, j’ai été très intéressé par notre discussion de cet après-midi, ainsi que par les échanges en commission. J’ai senti battre le cœur de la démocratie, des collectivités locales, et j’ai remarqué que, quelles que fussent les positions, les collègues se sont exprimés avec beaucoup de sincérité et de conviction. Le débat a été riche. Nous avons notamment évoqué la solidarité ; j’ai parlé de l’emploi et de l’économie, s’agissant des régions, parce que j’y crois beaucoup.
J’en viens maintenant à la manière dont nous avons travaillé, car nous avons déjà abordé le débat de fond et nous aurons l’occasion de le poursuivre pendant tout le temps réservé à l’examen de ce projet de loi. Je précise en outre que le Gouvernement n’a pas engagé la procédure accélérée – encore heureux sur un tel texte ! – et qu’il y aura donc un débat à l’Assemblée nationale, suivi d’un nouveau débat au Sénat. Ce processus prendra quelques mois, et c’est bien ainsi. Pendant ce temps, nous aurons le loisir de nous exprimer, de suivre l’actualité et de poursuivre notre dialogue avec les élus.
Dès que le texte nous est parvenu, nous avons désigné le rapporteur en commission et celui-ci s’est mis au travail. Au mois d’avril, nous avons procédé à l’audition publique télévisée de cinquante élus du pays, ce qui d’ailleurs a eu un certain écho. Puis, nous avons poursuivi le travail et notre rapporteur a rencontré encore une cinquantaine d’élus dans une série d’auditions ouvertes à tous les membres de la commission des lois.
À ce stade, je remercie les administrateurs de la commission parce que nous avons absolument tenu à respecter une règle qui, trop souvent, ne l’est pas au Sénat. Nous avons laissé un intervalle de quinze jours entre la séance au cours de laquelle nous avons établi le texte de la commission et la séance consacrée à l’examen des amendements dits extérieurs. Ainsi, le texte de la commission élaboré lors de la réunion du 15 mai a été, grâce à l’effort de tous, mis en ligne le 16 mai. Il y eut tout de même un temps suffisant pour produire des amendements, ce que confirme, me semble-t-il, le nombre élevé de ceux-ci.
Nous commençons à débattre du projet de loi alors que les amendements n’ont pas tous été examinés en commission !
Je vais y venir, madame Assassi…
Je ne veux pas compliquer ni allonger les débats à mon tour, mais je signale que la commission, lors de la séance d’établissement du texte, a adopté 188 amendements et, lors de la séance consacrée à l’examen des amendements extérieurs, en a retenu 104, portant à 292 le nombre d’amendements sur lesquels elle s’est prononcée favorablement.
Vous nous expliquez que le nombre d’amendements retenus et le fait que la commission propose un texte différent – sur certains points assez profondément – de celui du Gouvernement sont autant de signes de l’existence d’un problème, justifiant un retour en commission. Je ne suis pas du tout d’accord avec cette interprétation, je vous le dis avec sincérité ! Selon moi, le Sénat fait simplement son travail.
L’élaboration de la loi procède, en vertu de nos institutions, du Gouvernement et du Parlement. Lorsque nous décidons, parce que tel est notre travail, de faire évoluer assez profondément certains aspects d’un projet de loi, tout en maintenant le dialogue tout à fait nécessaire et fructueux avec le Gouvernement, nous remplissons notre mission.
Le fait que nous ayons affirmé fortement notre position et que nous ayons changé le texte ne justifie pas un renvoi en commission. Si tel était le cas, il faudrait renvoyer en commission chaque texte sur lequel nous faisons notre travail avec une certaine énergie et une certaine conviction ! Ce n’est pas normal. Peut-être faudrait-il plutôt l’envisager quand les sénateurs adoptent un texte pratiquement conforme, ce qui pourrait laisser supposer que quelques amendements ont échappé à leur sagacité...
Ce n’est pas de la mauvaise foi, madame Assassi, je vous dis les choses telles que je les vis ! Je pense vraiment que nous avons eu, en commission, un vrai débat. D’ailleurs, mes collègues peuvent témoigner qu’en commission des lois je demande toujours aux auteurs des amendements présents en réunion de les défendre. D’aucuns m’en font même le reproche, car cela fait durer les débats. Puis, nous entendons la parole du rapporteur et chacun peut s’exprimer. Vous savez très bien que nous avons eu des débats très approfondis.
Permettez-moi de citer encore un chiffre ou deux…
Je fais ce que je peux, madame Assassi.
La commission a donc siégé pendant douze heures trente pour établir le texte et, cette semaine, elle s’est également réunie pendant douze heures trente, ce qui fait un total de vingt-cinq heures, durant lesquelles nous avons été très heureux de travailler ensemble.
Je conclurai mon propos, madame Assassi, en signalant qu’en définitive votre vœu est exaucé. Comme vous l’avez justement fait remarquer, il nous reste encore quelques amendements à examiner. J’ai donc l’honneur de vous annoncer publiquement que la commission des lois sera conviée à poursuivre ses travaux lundi prochain, de quatorze heures à seize heures, et éventuellement mardi prochain, de neuf heures à dix heures.
Donc, quoi qu’il en soit, nous reviendrons en commission pour poursuivre notre intéressant travail sur ce projet de loi. Vous l’aurez compris, mes chers collègues, cette demande de renvoi en commission ne m’apparaît pas justifiée.
Nous vous donnons acte, madame Assassi, de votre assiduité et du caractère constructif de votre participation, et essayons de positiver. Nous voulons, comme vous, avoir un vrai débat, un débat organisé à partir du Sénat sans que le Gouvernement vienne, avec son inspiration maastrichtienne…
Vous voulez instaurer un vrai droit de participation, ce que vous appelleriez une coopérative d’élus et, si possible, le faire d’une manière non hémiplégique, avec la participation de toutes les sensibilités politiques ? C’est ce que nous vous proposons ! C’est ce que Mmes les ministres ont accepté !
Donc, n’insultons pas l’avenir : nous avons dix jours à passer ensemble ! Quelle joie ! Un vrai débat participatif ! Alors, madame Assassi, laissez-moi ma chance !
Rires et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Je suppose donc, monsieur le rapporteur, que votre avis est défavorable.
Madame Assassi, le Gouvernement a choisi une démarche simple, que je souhaite rappeler. Nous aurions pu déposer un projet de loi en juillet dernier – lequel aurait d’ailleurs été assez court –, puisque nous avions déjà travaillé sur cette question pendant des mois, je le dis à l’attention de M. Mézard, comme cela avait été le cas avant 1981.
Cependant, le Président de la République et le Premier ministre ont choisi, et je crois qu'ils ont eu raison, d'attendre la fin des États généraux de la démocratie territoriale organisés par le Sénat, lesquels se sont achevés le 5 octobre dernier. Pour préparer le projet de loi, nous nous sommes inspirés à la fois du résultat des États généraux et des 150 auditions que nous avons menées pour entendre toutes les associations d'élus, comme s’y étaient engagés le Président de la République et le Premier ministre.
Le texte que nous avions préparé a été jugé trop lourd par un certain nombre de sénateurs, aussi le président du Sénat a-t-il demandé au Gouvernement de scinder son projet en trois textes. Au fond, c'est la réponse à votre question, madame Assassi. Nous allons débattre d’abord d’un premier chapitre, puis d’un deuxième à l'automne si tout va bien, et enfin du troisième quand vous le voudrez. Nous aurons donc largement le temps de discuter de l'ensemble du projet.
Le reproche que vous adressez sur le temps accordé à la réflexion est complexe. Je sais bien que le Gouvernement n'a pas à commenter les travaux du Sénat, mais imaginez que le texte de la commission, qui n'est pas celui du Gouvernement - l'article 42 de la Constitution est parfaitement respecté – soit, comme vous le souhaitez, renvoyé à la commission des lois. Je fais de la politique-fiction, mais il se pourrait que la commission des lois, après réflexion, décide d’adopter un nouveau texte dans trois semaines. Il faudrait alors attendre encore avant de pouvoir rediscuter de ce texte, qui pourrait même ne jamais arriver en séance publique.
Je l'ai dit au président de la commission de la loi, au rapporteur et à tous ceux qui ont bien voulu travailler en amont sur ce projet de loi : Anne-Marie Escoffier et moi-même sommes prêtes à passer le temps qu'il faudra pour la discussion de ce premier chapitre et, bien entendu, à revenir pour le deuxième. Nous sommes à la disposition de tous les groupes politiques pour débattre des points très techniques et complexes.
Je terminerai mon propos en soulignant à quel point nous devons être attentifs à ce débat, car il porte non pas uniquement sur les institutions, mais sur les conditions de vie et de travail, sur les espoirs et l’avenir de nos concitoyens. Le Gouvernement ne peut donc être favorable à cette motion. §
La motion n'est pas adoptée.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, vendredi 31 mai 2013, à neuf heures trente, à quatorze heures trente et le soir :
Suite du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (n° 495, 2012 2013) ;
Rapport de M. René Vandierendonck, fait au nom de la commission des lois (n° 580, 2012 2013) ;
Texte de la commission (n° 581, 2012 2013) ;
Avis de M. Claude Dilain, fait au nom de la commission des affaires économiques (n° 593, 2012 2013) ;
Avis de M. Jean-Jacques Filleul, fait au nom de la commission du développement durable (n° 601, 2012 2013) ;
Avis de M. Jean Germain, fait au nom de la commission des finances (n° 598, 2012 2013).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée le vendredi 31 mai 2013, à zéro heure quinze.