... alors qu'il faut du temps, du recul pour aborder ces sujets ?
Cette question de DCN met en cause, on l'a dit, le traité constitutionnel, la défense européenne, nos industries de défense, nos partenariats avec l'Allemagne, la Grande-Bretagne, les Etats-Unis, ou d'autres. Il ne s'agit pas d'une mince affaire ; à travers cette question, on touche véritablement à l'essentiel.
Ce débat n'est pas banal, madame la ministre. C'est pourquoi il est tout de même un peu étrange de devoir débattre de cette question ce soir.
Dans ces conditions, vous comprendrez que l'on s'interroge. Qu'y a-t-il derrière ce projet ? Quelles sont les motivations ? Que signifient les grandes manoeuvres autour de EADS ? Thales est-il derrière le rideau ? Quelque chose se prépare-t-il avec des partenaires allemands ?
Nous n'en savons rien. Pourtant, nous sommes les représentants de la nation et nous avons le même amour de notre pays et la même volonté de le défendre et de le porter le plus loin possible. §
Nous sommes surpris de constater que notre commission des affaires étrangères et de la défense ne participe pas réellement à ce débat. C'est aussi une source d'interrogation. Mais Hélène Luc a répondu sur ce point.
L'ouverture du capital de DCN n'est donc pas une mince affaire.
Presque toutes les raisons de s'opposer à ce projet ont été développées, et je ne trouverai probablement pas d'argument nouveau. Je remarque toutefois que vous justifiez très rapidement votre projet, madame la ministre.
Ainsi, vous le justifiez en affirmant que l'ouverture du capital de DCN est la seule voie qui permet des alliances, le seul moyen de consolider les entreprises en place.
Les projets d'alliance manquent néanmoins un peu de précision et de contenu. J'ai noté, dans votre intervention liminaire, une hésitation.
Vous avez commencé par dire : « je prends l'initiative d'ouvrir le capital de DCN sans attendre que soit finalisé un hypothétique accord ou un rapprochement entre DCN et Thales ». Quelques instants après, évoquant la nécessité de se rapprocher de nos partenaires européens, vous avez ajouté qu'avant d'aller dans cette direction il fallait d'abord régler la question des rapprochements au plan national, et vous avez alors cité de nouveau Thales et DCN. Mais dans quel ordre, finalement, tout cela se fera-t-il ? On a l'impression que l'exécution de ce schéma ressemblera à un jeu de poupées gigognes.
L'hésitation que j'ai relevée tout à l'heure dans votre intervention renforce donc notre conviction que ce projet, qui manque singulièrement de vision stratégique, aurait gagné à être nourri d'un grand débat, à côté duquel nous sommes passés ce soir.
Dès lors, madame la ministre, la justification de l'ouverture du capital de DCN apparaît, au fil des questions, pour ce qu'elle est, qu'elle n'est peut-être pas, mais qu'elle semble être en tout cas : une quête d'argent frais pour le budget.
Mais, derrière tout cela, ce que nous redoutons le plus, et cette crainte a été exposée par plusieurs intervenants, c'est le début d'une privatisation.
Vous vous êtes exprimée, vous avez fait état de ce qui figure dans ce projet de loi. Moi, j'ai la faiblesse de croire à la cohérence et à la logique des mécanismes quand ils sont mis en oeuvre. Avec l'ouverture du capital à des partenaires privés, se met en place une mécanique, qui a sa cohérence et qui peut, objectivement, en dehors de votre volonté, en dehors même de vos espérances, aboutir à une privatisation, que personne n'appelle de ses voeux, pas plus vous que nous, mais qui peut, je le crains, un jour se produire.
Plutôt que cette approche financière, il aurait été préférable - c'est le débat que l'on aurait aimé avoir - de mutualiser avec nos partenaires européens les besoins, les achats utiles à la défense navale. En choisissant cette démarche, on aurait fait la démonstration que, derrière le projet industriel, il y avait véritablement un projet politique partagé, qui nous engageait, et qui légitimait le cas échéant votre proposition.
L'Agence européenne aurait pu être l'instrument fédérateur de ces efforts, après recensement des besoins.
Je terminerai - vous le voyez, monsieur Mercier, je n'ai pas été très long -...