Aussi, nous pourrions imaginer de remplacer ces schémas multiples et qui parfois s’opposent par une convention fixant une position commune sur les grands projets et sur les objectifs que les collectivités se donnent pour la durée d’une mandature, qui correspond généralement à la durée d’un contrat de projet et à l’utilisation des fonds structurels européens.
Dans quelles circonstances les communes rurales ont-elles droit à la parole en ce qui concerne l’utilisation de ces fonds, y compris s’agissant du deuxième pilier de la politique agricole commune ? À quel moment discute-t-on, ensemble, de l’affectation des crédits ?
Je le répète, M. Delahaye a raison : si l’on supprime la clause de compétence générale, il n’y a pas de difficulté. Pour chaque chapitre, il y aura des crédits d’État ou des crédits européens.
Si, comme le propose le Gouvernement, on rétablit la clause de compétence générale, il faut aussi prévoir des cadres dans lesquels les collectivités territoriales pourront échanger sur ce type de choix. Diminuer le nombre de schémas et conclure des conventions sur les sujets essentiels, c’est le souhait du Gouvernement !
En ce qui concerne la présence de l’État, j’ai constaté que celle-ci choquait. Si nous l’avons prévue, c’est parce que nous voulons qu’une région, le plus souvent, mais aussi un département ou une agglomération, puisse demander la délégation d’une compétence indépendamment des autres collectivités.
Nous avons volontairement renoncé à l’expérimentation pour une raison simple : la Constitution prévoit que si la compétence a été mal gérée par la collectivité, l’idée du transfert est abandonnée ; dans le cas contraire, le transfert doit être généralisé. Ce n’est pas ce que souhaitent les régions, les départements et les agglomérations de France.
Monsieur de Legge, la Bretagne a demandé la délégation de compétence de l’eau. C’est une décision complexe, car elle aura des conséquences importantes pour les communautés de communes rurales, notamment en ce qui concerne les périmètres de captage, et pour certaines formes d’exercice agricole, par exemple dans les ZES, les zones d’excédent structurel. Elle implique aussi qu’un certain nombre de collectivités qui prélevaient leur eau potable sur le bassin de l’Orne seront obligées de la prélever ailleurs. Tout cela a un impact sur les communes.
Si aucun lieu de rencontre n’est prévu entre la région et les communautés de communes, surtout rurales, dans quel cadre discutera-t-on de la stratégie de la politique de l’eau, qui est aujourd’hui gérée par l’agence de bassin et par l’État ?
Certains, notamment des présidents de région, me répondent : nous irons voir le ministre et nous lui parlerons de la délégation de compétence, de l’outil universitaire, du centre d’innovation ou du centre de transfert de technologie que nous souhaitons.
Soit, mais à quel moment le président de la collectivité concernée informera-t-il l’ensemble des collectivités de son territoire que la délégation d’une compétence de l’État va affecter les politiques, créant une nouvelle donne ? C’est la raison pour laquelle nous avons eu cette idée.
Le rapport Faire confiance à l’intelligence territoriale de Claude Belot, Yves Krattinger, Jacqueline Gourault, Pierre-Yves Collombat et Rémy Pointereau nous a également beaucoup inspirés, dans la mesure où il traite longuement de la question de la cogestion ou cogouvernance des compétences. Dans ce rapport, voté à l’unanimité par la mission commune d’information, on peut lire, au sein d’une rubrique « Propositions de la mission » : « Faire figurer dans les compétences du conseil régional des exécutifs les sujets relatifs à l’exercice négocié de compétences ou nécessitant une coordination (politique d’investissement, articulation des schémas locaux avec les schémas régionaux). »
Vous aviez donc proposé une conférence des exécutifs, dont le rôle, justement, devait être de discuter de la mise en cohérence des schémas que je viens d’évoquer. Peut-être y a-t-il un problème sémantique, monsieur le président de la commission des lois, à l’instar de celui que nous rencontrons avec le mot « pacte ». Par ailleurs, si la mission a pu se tromper, elle l’a fait de façon totalement transpartisane. Si vous avez d’autres solutions, je suis prête à les accepter et à les porter.
Enfin, je sens bien que le mot « sanction » choque, et je reviendrai sans doute sur ce point.
La majorité sortante avait supprimé la clause de compétence générale, accompagnant cette mesure d’un excellent exposé sur la façon d’éviter les cofinancements, qui coûtent trop chers à la France.
Je dis simplement que nous la rétablissons aujourd'hui, en veillant à encadrer des aspects que vous avez longuement développés, notamment les cofinancements, qui sont parfois injustes, l’autofinancement d’une communauté d’agglomération étant toujours plus important que celui d’une communauté de communes rurales.
Parfois, dans le cadre de tel ou tel type de subvention – je prends toujours l’exemple le plus simple, celui de l’immobilier d’entreprise –, on oublie que telle communauté d’agglomération pourrait porter la moitié du financement, alors que la communauté de communes rurales ne peut participer qu’à hauteur d’un faible pourcentage.
Selon moi, nous avons à apporter des solutions sur l’ensemble des questions soulevées par le cofinancement. Sans doute un accord est-il préférable à un coup de fil, évoqué tout à l’heure par M. Karoutchi en souriant, qui permet parfois de financer à 85 % un équipement destiné à un stade de football. Au fond, l’argent public doit-il servir à subventionner à ce point ? Bref, nous avons de nombreuses questions à nous poser collectivement.
Je l’entends, notre cheminement à partir du rapport Faire confiance à l’intelligence territoriale n’était pas le bon. Au demeurant, au fur et à mesure de l’examen du texte par la commission, celle-ci a trouvé les moyens d’éviter la multiplication des schémas. Sans doute est-il souhaitable de ne conserver qu’un schéma régional, un SCOT et un PLU. Qu’on cesse de multiplier cette source non pas de normes, mais de travail, et qu’on puisse dire ensemble que la dépense publique est utile, mais qu’il faut l’encadrer.
En effet, si les cofinancements d’une compétence partagée – je pense à l’école, au sport ou à la culture dans une petite commune –, sont trop importants, nous ne pourrons plus aider financièrement cette commune, faute de ressources.