Moi, je reste très défavorable à la clause de compétence générale pour les régions.
Je suis un défenseur constant de la régionalisation. Et, en Île-de-France, je l’ai déjà dit hier, j’aurais préféré que l’on donne les compétences à la région plutôt qu’à la métropole, d’autant qu’il s’agit de la même population.
Lorsqu’on a créé les régions, voilà à peine plus de vingt ou vingt-cinq ans, les textes avaient prévu qu’elles seraient des collectivités de missions et non pas des collectivités de gestion. Il était clair qu’il devait y avoir, d’un côté, les communes et les départements, collectivités de gestion ayant compétence générale, et, d’un autre côté, les régions, collectivités de missions, intervenant sur l’investissement, donc sur des opérations précises.
Progressivement, les élus se sont emparés de sujets divers : c’est le jeu de la démocratie ! Et les régions, de collectivités de missions, tournées vers l’investissement, sont devenues des collectivités comme les autres, où le fonctionnement est majoritaire par rapport à l’investissement. Progressivement, les régions ont perdu cette coloration dominante d’instances de soutien à des opérations lourdes conduites par les communes et les départements pour se muer en collectivités qui font finalement comme les communes et les départements.
Aujourd’hui, par exemple, le budget de la région d’Île-de-France s’élève à quelque 5 milliards d’euros par an, sans compter les 7 milliards d’euros du syndicat des transports. Si vous retranchez les crédits affectés aux domaines du bloc des compétences initiales, c’est-à-dire les transports, les lycées, l’apprentissage, le développement économique et touristique, il reste entre 1 milliard et 1, 5 milliard d’euros consacrés, sinon à de la distribution de subventions, en tout cas à des dépenses autres que celles qui relèvent du bloc de compétences qu’on avait imaginé à l’origine.
Il m’arrive de parler au président Huchon, car, moi, je suis un opposant normal et, lorsque l’intérêt général est en jeu, je peux avancer. Quoi qu'il en soit, quand je dis à Jean-Paul Huchon : « Franchement, ça suffit ! On emprunte, on s’endette, et tout cela pour financer des dépenses qui ne relèvent pas de nous ! », il me répond : « Oui, mais comment faire autrement ? Lorsqu’un représentant d’un syndicat hospitalier m’explique que je ne peux tout de même pas refuser quelque argent pour rénover les services des urgences des hôpitaux, cela me touche, et je donne ! Et c’est pareil lorsque je reçois les délégués d’une maternité… »
Eh bien, les choses se passent comme cela parce que nous avons cette clause de compétence générale ! On n’a pas su protéger les régions, qui auraient dû rester des collectivités de missions.
Aujourd’hui, parce qu’elles font la même chose et interviennent sur les mêmes thématiques que les départements, on constate une multiplication des financements croisés ! Pour ma part, je suis favorable aux financements complémentaires, de manière que les collectivités travaillent entre elles et réalisent les investissements au mieux.
Cette multiplication des financements croisés fait que la région est devenue une espèce de guichet. Elle vous accorde 20 % du montant de la dépense engagée pour tel projet, 25 % ou 30 % pour tel autre. Et moi, président de la commission des finances, je me contente de faire voter en masse les dizaines, les centaines de millions d’euros qui défilent pour financer des opérations qui, en réalité, ne relèvent pas de la politique régionale.
Il faut distinguer les communes et les départements, qui obéissent à des systèmes de gestion anciens, et les régions, à qui l’on doit rendre leur vraie vocation. Faisons en sorte qu’elles redeviennent des collectivités d’investissement, de soutien aux opérations des communes et des départements. Libérons les collectivités régionales de ces sortes de pressions que subissent les élus, et que je comprends, mais qui font que, dans la pratique, les régions remplissent mal les missions qui sont les leurs au profit d’une gestion de plus en plus diversifiée.