La séance, suspendue à douze heures trente, est reprise à quatorze heures trente.
La séance est reprise.
Par courrier en date du 31 mai 2013, M. le Premier ministre a fait part de sa décision de placer, en application de l’article LO. 297 du code électoral, M. Richard Yung, sénateur représentant les Français établis hors de France, en mission temporaire auprès de Mme Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur.
Cette mission portera sur l’amélioration de l’Union douanière en Europe.
Acte est donné de cette communication.
Nous reprenons la discussion du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.
Nous poursuivons l’examen de l’article 2.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous avons eu ce matin un débat intéressant sur la clause de compétence générale et sur la gouvernance, mais je vous confesserai que je n'y vois pas très clair.
Madame la ministre, vous avez déclaré hier : « La qualité de vie doit beaucoup à la clause de compétence générale. » Cela, c’est clair ! Cependant, j’ai retrouvé un document, …
… que vous aviez souhaité faire publier par une assemblée où nous siégions à l’époque tous les deux – c'est dire combien vous deviez penser que vos déclarations devant la mission Lambert méritaient une large publicité – et dans lequel vous expliquiez ceci :
« L’une des premières réflexions qui se pose à nous concerne cette clause de compétence générale. Ce principe est le facteur qui légitime l’intervention de tous les échelons institutionnels selon le principe territorial : “ce qui se passe sur mon territoire doit avoir mon soutien”. Cette clause générale, alliée aux quatre niveaux de collectivités territoriales ou, autrement dit, aux quatre “niveaux d’intérêt public local”, engendre… – notez bien ce qui suit, mes chers collègues –… confusion, conflits, concurrence territoriale, doublons administratifs et perte d’argent public. »
« La clause générale de compétence favorise un système de financements croisés dans lequel chaque collectivité chargée d’une activité sollicite le concours financier de toutes les autres. Le résultat est une dilution des responsabilités, la création de conflits entre collectivités, une multiplication des analyses techniques et administratives, qui engendrent des surcoûts de structure administrative […].
« L’élu local s’est transformé en un chasseur de subventions et non comme un moteur du développement de son territoire. »
« Il lui importe, objectivement plus d’aller se procurer un guide démocratique des aides plutôt que de chercher le développement de ses propres potentialités et de faire ses propres choix de fiscalité, en lien avec le projet envisagé.
« Le temps n’est-il pas venu de plaider pour la fin de ce principe et de proposer la mise en place de blocs exclusifs de compétences ? »
Madame la ministre, je voudrais savoir quelle est véritablement votre position sur la clause de compétence générale dans la mesure où vous semblez tenir deux discours selon les moments. Si votre position sur cette question a évolué, pourriez-vous nous en indiquer les raisons ?
À en juger par l’article 9 du projet de loi initialement déposé par le Gouvernement, article fort heureusement supprimé par la commission des lois, on voit à quel point vous êtes empêtrée dans vos contradictions. Cet article disposait en effet que « la région ne peut accorder aucune subvention d’investissement ou de fonctionnement aux projets de départements, de communes ou de groupements de collectivités territoriales qui ne respectent pas les orientations fixées par le schéma régional … ».
Au fond, les choses sont relativement simples : soit toutes les collectivités territoriales disposent de la clause de compétence générale, auquel cas elles sont trop nombreuses, soit on considère qu'il faut conserver chaque niveau de collectivité, et alors une simplification s’impose.
Madame la ministre, j'apprécierais que, afin de tenter d'éclairer mon vote, vous me précisiez votre position définitive sur la clause de compétence générale.
M. André Reichardt applaudit.
Cet article rétablit la clause de compétence générale pour les départements et aux régions, ce qui permettra de redonner à ces collectivités les capacités d’action dont elles ont besoin pour assurer le dynamisme de nos territoires. Je m’en félicite.
En revanche, je m’interroge sur le texte tel que l’a amendé la commission. En effet, la régionalisation à outrance me paraît parfois contestable, surtout si elle se fait au détriment des autres collectivités.
Cela fait maintenant trente ans que, sur l’initiative de Pierre Mauroy et de Gaston Defferre, le Parlement a supprimé la tutelle du préfet omnipotent et que les communes, les départements et les régions s’administrent librement à travers des conseils élus. Ce principe de libre administration n’est plus contesté : la décentralisation s’est imposée. Aussi, je m’étonne de la volonté de certains de vouloir régionaliser certaines compétences des collectivités.
Cette tentation me semble dangereuse et ne doit pas être affirmée sous cette forme dans la loi. La véritable garantie de la libre administration réside dans la suppression de toutes les formes de tutelle : celle de l’État, bien sûr, mais également celle d’une collectivité territoriale sur une autre. Or l’article 2, dans la rédaction qui nous est soumise, semble au moins permettre cette subordination.
Au-là du fait que, en contradiction avec le principe de subsidiarité, cet article laisse entendre que les compétences doivent être exercées de manière optimale à l’échelon régional, la commission propose de donner à une seule collectivité le pouvoir de fixer les modalités de l’action commune, instaurant ainsi une certaine forme de tutelle, contraire au partenariat librement consenti que le texte est censé promouvoir.
Si certains souhaitent faire en sorte que la région ait la faculté de choisir, parmi les compétences exercées par les communes et les départements, celles qu’elle voudra exercer, il faut en conclure que leur conception des conseils communaux et départementaux est, au moins implicitement, une conception résiduelle : ne resterait à ceux-ci que ce qui n’aurait pas été choisi par la région.
Pouvons-nous souscrire à une conception des collectivités territoriales en vertu de laquelle celles-ci exerceraient des prérogatives et des compétences à dimension variable ?
Ces considérations me conduiront, avec plusieurs collègues du groupe socialiste élus départementaux, à soumettre au Sénat des amendements portant sur deux thèmes importants : la consultation des élus départementaux sur les changements qu’il serait proposé d’apporter à leur géographie territoriale ; l’affirmation législative de la légitimité des conseils généraux sur les solidarités et la cohésion territoriales dans l’édifice institutionnel.
Madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais vous faire part d'un double regret au sujet du titre Ier de ce projet de loi.
Premièrement, je regrette qu'il ait été rédigé dans le patois des bureaux. §Pourtant, son objet était clair : d’une part, rétablir la clause de compétence générale – c’est l’objet du chapitre Ier –, d’autre part, organiser la coordination entre les différents échelons – c’est l’objet du chapitre II, que nous aborderons plus tard.
Deuxièmement, j’avais déposé un amendement sur l’article 2, mais j'ai été frappé par le Grand Inquisiteur chargé de faire respecter l'article 40.
Vous pourriez dire cela, mon cher collègue, s’il faisait son boulot correctement !
La Constitution, mon cher collègue, elle est faite pour être appliquée correctement ! La preuve, c’est qu’il existe un Conseil constitutionnel ! En l’espèce, c'est quelqu'un qui, tout seul dans son coin – si tant est que ce soit lui ! –, décide ce qu'il pense devoir décider, même si cela ne correspond pas du tout à la réalité.
Jugez-en !
Dans mon amendement, je proposais tout simplement de dire que « le conseil départemental règle par ses délibérations les affaires du département » – c’est la définition de la clause de compétence générale –, que « le département a en charge la solidarité sociale et territoriale », que « la mission centrale de la région est stratégique et de préparation de l’avenir. » Extraordinaire, n’est-ce pas ?
Ensuite, je proposais d’introduire un certain nombre de dispositions – qui, à mon avis, pouvaient trouver place ailleurs – portant sur le transfert éventuel des compétences plus ou moins résiduelles de l'État. Je précisais que « ce transfert fait l'objet d'une compensation ».
S’il vous plaît, mes chers collègues, abstenez-vous de dialogues particuliers !
J’en reviens à mon propos principal.
Si cet article avait été rédigé de façon plus compréhensible pour tout le monde, cela aurait été aussi bien et l’on aurait clairement compris, d’une part, que la clause de compétence générale était rétablie, d’autre part, qu’un certain nombre de compétences étaient plus spécifiquement attribuées, les unes à la région, les autres au département.
Moi, je reste très défavorable à la clause de compétence générale pour les régions.
Je suis un défenseur constant de la régionalisation. Et, en Île-de-France, je l’ai déjà dit hier, j’aurais préféré que l’on donne les compétences à la région plutôt qu’à la métropole, d’autant qu’il s’agit de la même population.
Lorsqu’on a créé les régions, voilà à peine plus de vingt ou vingt-cinq ans, les textes avaient prévu qu’elles seraient des collectivités de missions et non pas des collectivités de gestion. Il était clair qu’il devait y avoir, d’un côté, les communes et les départements, collectivités de gestion ayant compétence générale, et, d’un autre côté, les régions, collectivités de missions, intervenant sur l’investissement, donc sur des opérations précises.
Progressivement, les élus se sont emparés de sujets divers : c’est le jeu de la démocratie ! Et les régions, de collectivités de missions, tournées vers l’investissement, sont devenues des collectivités comme les autres, où le fonctionnement est majoritaire par rapport à l’investissement. Progressivement, les régions ont perdu cette coloration dominante d’instances de soutien à des opérations lourdes conduites par les communes et les départements pour se muer en collectivités qui font finalement comme les communes et les départements.
Aujourd’hui, par exemple, le budget de la région d’Île-de-France s’élève à quelque 5 milliards d’euros par an, sans compter les 7 milliards d’euros du syndicat des transports. Si vous retranchez les crédits affectés aux domaines du bloc des compétences initiales, c’est-à-dire les transports, les lycées, l’apprentissage, le développement économique et touristique, il reste entre 1 milliard et 1, 5 milliard d’euros consacrés, sinon à de la distribution de subventions, en tout cas à des dépenses autres que celles qui relèvent du bloc de compétences qu’on avait imaginé à l’origine.
Il m’arrive de parler au président Huchon, car, moi, je suis un opposant normal et, lorsque l’intérêt général est en jeu, je peux avancer. Quoi qu'il en soit, quand je dis à Jean-Paul Huchon : « Franchement, ça suffit ! On emprunte, on s’endette, et tout cela pour financer des dépenses qui ne relèvent pas de nous ! », il me répond : « Oui, mais comment faire autrement ? Lorsqu’un représentant d’un syndicat hospitalier m’explique que je ne peux tout de même pas refuser quelque argent pour rénover les services des urgences des hôpitaux, cela me touche, et je donne ! Et c’est pareil lorsque je reçois les délégués d’une maternité… »
Eh bien, les choses se passent comme cela parce que nous avons cette clause de compétence générale ! On n’a pas su protéger les régions, qui auraient dû rester des collectivités de missions.
Aujourd’hui, parce qu’elles font la même chose et interviennent sur les mêmes thématiques que les départements, on constate une multiplication des financements croisés ! Pour ma part, je suis favorable aux financements complémentaires, de manière que les collectivités travaillent entre elles et réalisent les investissements au mieux.
Cette multiplication des financements croisés fait que la région est devenue une espèce de guichet. Elle vous accorde 20 % du montant de la dépense engagée pour tel projet, 25 % ou 30 % pour tel autre. Et moi, président de la commission des finances, je me contente de faire voter en masse les dizaines, les centaines de millions d’euros qui défilent pour financer des opérations qui, en réalité, ne relèvent pas de la politique régionale.
Il faut distinguer les communes et les départements, qui obéissent à des systèmes de gestion anciens, et les régions, à qui l’on doit rendre leur vraie vocation. Faisons en sorte qu’elles redeviennent des collectivités d’investissement, de soutien aux opérations des communes et des départements. Libérons les collectivités régionales de ces sortes de pressions que subissent les élus, et que je comprends, mais qui font que, dans la pratique, les régions remplissent mal les missions qui sont les leurs au profit d’une gestion de plus en plus diversifiée.
Madame la présidente, je ne sais pas si mon intervention doit être considérée comme un rappel au règlement ou comme une parole sur l’article. En effet, je souhaite, en cet instant, revenir sur l’application de l’article 40, me réservant de reprendre la parole lors de l’examen des amendements pour m’exprimer sur la clause de compétence générale.
Mes chers collègues, je forme le vœu que, dans la suite du débat, on cesse de prendre à partie la commission des finances d’une manière qui va au-delà du raisonnable. On met en cause les personnes, on évoque le réflexe du chien de Pavlov…
Que le parlementarisme rationalisé de la V République ne vous plaise guère, monsieur Collombat, nous l’avons compris. Je considère toutefois que, si vous vous exprimiez dans des termes qui ne soient pas offensants, nous ne nous en porterions pas plus mal.
Voilà quelque temps, la commission des finances a mis en place une procédure destinée à lever toute contestation sur l’application de l’article 40. La décision n’est pas prise sur un coin de table ! Elle peut plaire ou pas, mais sachez en tout cas que nous nous efforçons d’appliquer la Constitution.
M. Pierre-Yves Collombat s’exclame.
Tant que cette procédure ne sera pas modifiée, elle doit être respectée. En tout état de cause, de grâce, formulez votre avis en d’autres termes !
J’ai, moi aussi, été frappé par l’article 40. C’était quelques mois après mon arrivée au Sénat. Et l’on ne m’a jamais fourni d’explications de fond !
En l’espèce, mon amendement ne privait en rien l’État de rentrées financières. Mais j’ai cru comprendre que, politiquement, c’était un amendement inopportun de ma part...
J’en viens à la lisibilité des textes sur lesquels nous avons à nous prononcer. Celui-ci est assez complexe – j’ai même employé le mot « tourmenté ». Madame la ministre, il se peut que, entre l’article 2 et l’article 3, vous vous y retrouviez, mais je crois que Mme Michu ou M. Durand-Dupont aura des difficultés.
En effet, je ne suis pas persuadé que l’on améliore la lisibilité en rétablissant la clause de compétence générale, puis en désignant un chef de file. Qu’est-ce qui prévaudra : la clause de compétence générale, qui permet de tout faire, de s’occuper de tout, ou le chef de file, qui se concentre sur une action précise ? Le texte devient illisible, voire, pire, contradictoire.
Par ailleurs, j’essaie d’être cohérent avec moi-même. Je me souviens d’avoir voté le projet qui allait devenir la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales.
Moi non plus, je ne suis pas favorable à l’article 2, qui rétablit la clause de compétence générale pour toutes les collectivités territoriales.
Je souscris pour partie aux arguments avancés par M. Karoutchi, mais je vais plus loin que lui. Le rétablissement de la clause de compétence générale exige une coordination entre les différentes collectivités territoriales, Mme la ministre l’a d’ailleurs dit ce matin. Or c’est contraire à l’objectif de clarification des compétences, alors même que cette notion figure dans l’intitulé du titre Ier.
Il est surprenant et même incompréhensible que, sous un titre intitulé : « Clarification des compétences des collectivités territoriales et coordination des acteurs », on trouve un chapitre Ier intitulé : « Le rétablissement de la clause de compétence générale ». Dans cette affaire, il y a un bug !
C’est surtout contraire à la volonté du Président de la République de mettre en place un « choc de simplification ». Je m’étonne que le Gouvernement accorde aussi peu d’importance à cette volonté du Président de la République.
M. Roger Karoutchi s’esclaffe.
On veut donc rétablir la clause de compétence générale, mais, lorsque j’observe la manière dont on décline dans les articles suivants la notion de chef de filat, je n’y comprends vraiment plus rien !
J’espère avoir l’occasion de soutenir l’amendement que j’ai déposé à l’article 3. Dans un souci de cohérence, dès lors que l’aménagement numérique procède de l’aménagement et du développement durable du territoire, du développement économique, je dirai même de la complémentarité entre les modes de transport – la fibre optique permet de transférer des messages et d’autres données –, il me paraît nécessaire de procéder au transfert de la compétence de l’aménagement numérique du département vers la région.
Je ne comprends pas pourquoi on tient si peu compte de la notion de cohérence. Je ne comprends pas ce que l’on veut faire avec ce texte. Pourquoi rétablir la clause de compétence générale et soutenir le principe du chef de filat ? Il y a là une incohérence !
Enfin, et cela a été souligné, les départements et les régions n’ont plus les moyens d’assurer des compétences générales.
Notre collègue René-Paul Savary nous a expliqué ce matin que, du fait des moyens limités des collectivités, cette clause était peu utilisée et que l’on pouvait donc la maintenir sans danger. Je ne peux pas être d’accord avec cette vision des choses. Je ne vois pas du tout comment on peut demander la clause de compétence générale, pour le cas où, et ensuite ne pas l’assumer.
Il est temps de mettre en œuvre une véritable clarification, une réelle simplification. Ayons le courage de maintenir les dispositions de la loi du 16 décembre 2010, qui était, elle, porteuse de clarification, de simplification, en prévoyant un dispositif équilibré qui n’interdisait rien. Je ne comprends pas la nécessité de changer ce dispositif qui aurait à tout le moins pu être testé. Je ne doute pas une seconde qu’il aurait été bien meilleur que ce salmigondis auquel, personnellement, je ne comprends rien.
Excusez-moi d’être aussi direct, mais je ne pouvais pas m’exprimer autrement au moment où nous abordons l’examen de cet article.
Cette intervention sur l’article va me permettre de m’expliquer sur les propos que j’ai tenus ce matin.
Madame la ministre, je comprends d’autant mieux votre volonté de rétablir la clause de compétence générale que les finances se font rares : cela vous permet de solliciter les collectivités.
Ce matin, M. Favier a pris l’exemple des routes nationales, qui relèvent donc de l’État. Lorsqu’un département souhaite que des travaux soient réalisés sur une route nationale, il se tourne par conséquent vers l’État. Mais ce dernier lui répond : « Participez au financement, sinon, vous n’aurez rien. Si vous refusez, nous mettrons l’argent dans un autre département ! »
Ce discours n’est d’ailleurs pas spécifique au gouvernement actuel : ceux qui l’ont prédécédé tenaient le même. En tout cas, si les départements veulent que certains investissements soient réalisés sur leur territoire, ils doivent se plier à cette « invitation » de l’État.
Je suis membre du bureau de l’Assemblée des départements de France et je suis donc régulièrement les débats qui se déroulent au sein de cette instance, où cette question a été évoquée à maintes reprises. Je puis vous assurer que la grande majorité des présidents de conseils généraux, de droite comme de gauche – surtout de gauche, d’ailleurs – sont attachés à la clause de compétence générale. Elle leur permet d’intervenir dans des domaines dans lesquels, sinon, il ne se passerait rien.
Prenons l’exemple de la rénovation d’une université. Il faut une volonté affichée de toutes les collectivités, agglomérations, région, et même départements – ceux-ci, si leurs moyens financiers sont trop faibles, apportent au moins un soutien politique – pour espérer voir les travaux se réaliser. Il en est de même dans les domaines de compétence nationale, je viens de le dire.
Les départements ont aussi une mission de solidarité envers les communes. Il est bien évident qu’en période de disette budgétaire les départements orientent différemment leurs investissements. Ainsi, les conseils généraux sont amenés à construire moins de collèges ou, en tout cas, à lisser leurs projets, à moins intervenir sur les routes départementales, ou, là encore, à lisser leurs opérations d’investissement, pour aider davantage les communes afin de faire jouer l’effet de levier : chacun sait qu’une aide de 1 million d'euros d’aide aux communes induit – une péréquation est évidemment opérée selon la richesse des communes – entre 3 millions et 4 millions d'euros de travaux.
C’est à travers cette aide aux communes que les départements exercent leur mission de solidarité entre les territoires qui le composent.
Voilà pourquoi il est important d’avoir des marges de manœuvre, d’autant qu’elles ne sont pas utilisées de façon excessive, me semble-t-il, dans certains départements et dans certaines régions.
Bref, compte tenu de mon expérience, je peux vous assurer que nous utilisons à bon escient cette clause de compétence générale.
Il y va de la liberté des collectivités d’exercer leurs responsabilités pour répondre aux besoins de nos concitoyens. Ce n’est pas pour le plaisir que nous consentons des efforts supplémentaires et en demandons parfois à nos concitoyens ! Nous le faisons parce que nous savons qu’il y a des services dont nos concitoyens ont besoin, que certains investissements sont nécessaires pour dynamiser nos territoires.
C’est pourquoi je suis personnellement attaché à cette clause de compétence générale. Cela étant, ce n’est pas tout blanc ou tout noir : si nous en sommes privées, nous exercerons malgré tout notre droit d’initiative départementale - ou régionale – pour continuer à faire un certain nombre de choses. Donc, ne soyons pas dogmatiques : soyons pratiques.
Mais je ne suis pas certain que les propositions figurant dans le projet de loi clarifient les compétences. L’important, ce sont les moyens dont nous disposons pour exercer éventuellement nos missions de services à rendre à la population.
En cet instant, c’est une position strictement personnelle que j’exprimerai, non celle de mon groupe.
Pour ma part, je ne suis pas favorable au rétablissement de la clause de compétence générale de manière systématique, en raison des conséquences que cela ne peut qu’avoir.
Au-delà, soyons clairs, madame la ministre : en rétablissant la clause de compétence générale pour tout le monde, on fait plaisir à toutes les strates. Voilà la vérité !
Est-ce pour autant la bonne façon de gérer la République ? Je ne le crois pas, car tous les élus, quelle que soit leur sensibilité politique, en subissent les conséquences dans les départements et les régions. C’est sous la rubrique des « compétences facultatives » que des déficits considérables se sont creusés !
De surcroît, l’application de cette clause crée des enchevêtrements et des conflits dans l’attribution des financements.
En définitive, pour qu’une République fonctionne de façon satisfaisante, il faut poser des limites, énoncer des règles et définir les orientations à suivre. A contrario, ce n’est pas avec des formules floues, permettant tout et son contraire, qu’on pourra, me semble-t-il, vraiment avancer. Je le dis comme je le pense, cette solution n’est pas bonne chose. Mais, encore une fois, ces propos n’engagent que moi au sein du groupe RDSE. §
Je m’exprimerai également en mon nom personnel, car la position de mon groupe est un peu différente de la mienne.
Pour ce qui est de la clause de compétence générale, on peut distinguer deux périodes : la période des vaches grasses et celle des vaches maigres.
Durant la période des vaches grasses, l’attribution des aides ne répondait à aucune logique ni à aucune exigence de lisibilité. Souvent, il faut le reconnaître, la compétence générale permettait à la région et au département de régler de petits conflits financiers existant entre eux, par exemple au sujet d’une école, en procédant à des échanges de bons procédés.
Ces pratiques ayant entraîné des dérives électoralistes condamnables, le législateur a décidé, à une époque, de supprimer la clause de compétence générale.
Pendant la période des vaches maigres, la situation est tout à fait différente.
La suppression de la clause de compétence générale serait un coup très dur porté à la ruralité. Je le dis spécialement à l’intention de nos collègues écolos, qui disent volontiers que les départements, c’est fini ! Pourtant, ils doivent aimer la partie verte de la France… C’est qu’ils oublient la différence énorme existant entre les milieux urbains et la campagne, et que le conseil général est le dernier bastion pour défendre la ruralité. Le département est, par excellence, la collectivité de proximité en milieu rural ! En fait, chers collègues Verts, en condamnant le département, vous mettez en péril la France verte !
Personne n’est obligé d’utiliser la clause de compétence générale, et il ne faut pas en abuser. Du reste, dans le contexte financier actuel, tout abus sera impossible ! Mais, si l’on en a besoin, elle sera là.
Je citerai des exemples très précis.
Si une commune a des difficultés pour acheter un engin de déneigement, comment le département, ne disposant plus de la clause de compétence générale, fera-t-il pour l’aider à financer cette dépense ? La commune n’achètera pas l’engin et le ramassage scolaire n’aura pas lieu…
Si la sécheresse sévit une année, les éleveurs demanderont une aide pour le transport de la paille. Comment pourrons-nous les soutenir ?
Si un sinistre a détruit une école, comment le conseil général pourra-t-il apporter son concours au maire pour la reconstruction du bâtiment ?
Nous condamnons la ruralité si nous condamnons la clause de compétence générale. Nous devions certainement y apporter des ajustements, car elle était devenue l’outil de dérives électoralistes sur le terrain. Mais, en période de vaches maigres, alors que l’argent fait défaut, cette clause sera essentielle pour agir en faveur de ceux qui en auront besoin.
Veuillez me pardonner de m’exprimer avec un peu de véhémence, mais ce sujet me tient à cœur. Tous ceux de nos concitoyens qui vivent dans le tissu rural doivent penser comme moi. §
Je dirai d’abord qu’on aurait tort d’opposer de manière pavlovienne la loi de 2010 à celle que nous essayons d’élaborer. C’est d’ailleurs un travers dans lequel je m’emploie à ne pas tomber depuis hier. Il faut en effet rendre justice à l’effort de rationalisation de l’exercice des compétences qui a été accompli en 2010.
Peut-être consentirez-vous à reconnaître, chers collègues, que cet effort pour définir des compétences exclusives ménageait néanmoins des exceptions notables.
Rappelons le droit d’initiative, qu’a évoqué M. Savary, reconnu au département et à la région quand la loi ne prévoit pas à titre exclusif la dévolution de telle ou telle compétence.
Souvenez-vous aussi de la réaction de Mme Létard qui, lors de l’examen du texte, s’inquiétait de ce que le sport, la culture, le tourisme ne soient plus subventionnés par la région et le département. Selon elle, on ne devait pas permettre cela, car un secteur entier de l’économie s’en trouverait affecté… §
Je dis cela pour que chacun ait bien présent à l’esprit la situation réelle. Sur le papier, la clause de compétence générale avait disparu, mais en réalité, des brèches étaient ouvertes, et de tels doutes sont apparus, monsieur Karoutchi, que le législateur a décidé de reporter l’application de la mesure au 1er janvier 2015.
Dans le présent dispositif, la clause de compétence générale redevient un élément identifiant, même si je comprends que certains y voient plus un marquage idéologique qu’une réalité pratique. Je respecte les convictions des uns et des autres, mais, à mon sens, il est important de rétablir cette faculté.
Pour illustrer mon propos, je prendrai un exemple très juridique.
Lyon, si vous le décidez, ne sera plus un établissement public de coopération intercommunale, une communauté urbaine soumise au principe de spécialité ayant besoin d’une compétence décernée explicitement par un texte selon une liste limitative ; elle sera désormais titulaire d’une compétence générale.
Par ailleurs, c’est un élément fondamental de sauvegarde de l’autonomie communale, et vous l’avez tous dit. Mais reconnaissez avec moi que la jurisprudence du Conseil d’État est explicite. Ainsi, dans sa décision du 29 juin 2001, Commune de Mons-en-Barœul, ce dernier a jugé que cette clause était limitée, pour reprendre l’expression de la Direction générale des collectivités locales, à « l’interstitiel » que la loi laisse. En d’autres termes, la compétence générale des collectivités n’est pas démesurée.
En revanche, le rétablissement de la clause de compétence doit s’accompagner, Mme la ministre l’a très bien expliqué, de la reconnaissance, pour certaines compétences, d’un chef de file.
Mais j’insiste sur le fait que la commission des lois a vraiment été un gardien vigilant. Quand il y a compétence partagée, il y a nécessité d’un chef de file. Cependant, le chef de file a, de par la Constitution et la décision du Conseil constitutionnel du 24 juillet 2008, pour seule prérogative de réunir les différents titulaires de la compétence, qu’il ne dessaisit d’aucune de leurs attributions. Il organise une discussion sur la manière la plus rationnelle – les restrictions financières favorisent d’ailleurs la rationalité ! – d’exercer ces attributions.
Je tenais dire cela pour que nous évitions de nous enliser dans un débat franco-français qui fait beaucoup rire en Europe. §
Après la brillante intervention de M. le rapporteur, je souhaite répondre à ceux d’entre vous qui se sont exprimés sur l’article.
M. Favier a attiré notre attention sur l’étude d’impact.
Certes, la clause de compétence générale ouvre peu de droits puisqu’elle est cantonnée à l’interstitiel, mais il faut garder à l’esprit que toutes les décisions jurisprudentielles reposent avant tout sur les compétences régaliennes de l’État. Autrement dit, ce n’est pas parce qu’il existe une clause de compétence générale qu’une collectivité peut intervenir en matière de défense, de police, etc. De même, une collectivité peut construire un établissement scolaire, mais non décider de la manière dont l’enseignement sera délivré.
Bref, la jurisprudence prend en compte les compétences de l’État. À cet égard, nous devrions peut-être établir un document accompagnant ce projet de loi, afin de décrire avec précision les missions régaliennes de l’État ainsi que ses missions de service public, afin que nos concitoyens en aient bien conscience.
Je voulais ainsi vous rassurer sur la portée de la clause de la compétence générale, car elle est de toute façon limitée par le champ des compétences régaliennes.
Monsieur Dominique de Legge, dans le compte rendu d’une réunion du conseil régional de Bretagne ayant eu lieu en 2002, me semble-t-il, vous trouverez la réponse à la question que vous venez de poser. Mais vous avez dû oublier ma réponse, car de l’eau a coulé sous les ponts…
Au sein de la mission Lambert qui avait pour tâche de préparer le rapport du comité Balladur, j’avais posé la question de la pertinence de la clause de compétence générale, position qui m’avait alors valu d’être louée pour mon courage.
À l’époque, la notion de chef de file n’existait pas, et comme je l’ai dit, M. Jean-Pierre Raffarin avait trouvé, avec le groupe qu’il animait à l’époque, un début de réponse à nos interrogations ; pour cela, nous pouvons lui rendre hommage aujourd’hui.
La clause de compétence générale ouvrait la voie à des doublons, à des cofinancements, à des champs immenses d’intervention, si bien que les collectivités territoriales étaient chargées de l’action publique, quelle qu’elle soit. Il revenait ensuite à chacune de s’organiser ! C’était le grand débat au sein de la commission Lambert.
Nous avons donc un peu refermé la clause de compétence générale.
Cela étant, la question reste posée, car elle est totalement transpartisane.
Souvent, lorsque nous débattons avec les uns et les autres dans les différents territoires, nous arrivons avec une position bien affirmée. Et puis, nous ressortons de la discussion un peu déstabilisés...
Je vous incite à relire les rapports de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation : il y a des mesures que vous aviez votées à l’unanimité, mais que vous critiquez vivement aujourd’hui.
Nous évoluons tous ; j’ai moi aussi évolué, monsieur de Legge, et j’espère que j’aurai la possibilité d’évoluer encore longtemps… Sait-on jamais ! §
À l’époque, monsieur Dominique de Legge, vous aviez beaucoup critiqué ma position. §Si, monsieur le sénateur ! Nous pourrons relire ensemble, au cours d’une suspension, le procès-verbal de la séance en question : je l’ai avec moi, car je savais que vous alliez m’interpeller à ce sujet ; c’est la quatrième fois que vous le faites !
À l’époque, monsieur de Legge, j’étais vice-présidente du conseil régional, chargée de l’aménagement du territoire – je vois que M. Karoutchi sait très bien à quoi je fais allusion. Vous m’aviez tancée en arguant de la profonde antinomie entre mon opposition à la clause de compétence générale et les politiques que je défendais, notamment la contractualisation entre la région Bretagne et les pays.
Monsieur le sénateur, vous comme moi, nous avons beaucoup changé depuis lors, et ce avec raison. Quoi qu’il en soit, nous restons des êtres raisonnables.
Monsieur Cazeau, j’entends bien votre plaidoyer pour le département. Si l’on relit attentivement les débats de 2010, mais aussi tous ceux qui se sont déroulés dans les territoires – quelques-uns, particulièrement remarquables, ont fait l’objet d’une publication –, on constate que l’échelon départemental avait effectivement suscité beaucoup de questions. Cela dit, votre position est totalement défendable, même si elle n’est pas majoritaire.
Je crois me souvenir que c’est M. Collombat qui est intervenu au sujet de l’article 40… §
Pour ma part, je n’ai pas de jugement à porter sur les décisions prises par la commission des finances. Je suis membre du Gouvernement et ce n’est pas mon rôle.
Toutefois, monsieur Collombat, s’il le faut, il m’appartiendra éventuellement de reprendre, au nom du Gouvernement, certains amendements qui ne sont pas parvenus jusqu’à la commission pour avoir été frappés par l’article 40. Nous verrons au fil du débat si certaines de ces propositions méritent d’être introduites dans le présent texte : comme je l’ai déjà dit à M. le rapporteur et à M. le président de la commission des lois, je ne suis fermée à aucune proposition !
Peut-être faudra-t-il alors solliciter une suspension de séance pour débattre entre nous de l’amendement en question et décider si je peux, ou non, le déposer au nom du Gouvernement, puisque je serai la seule à disposer de cette faculté.
Par ailleurs, vous pointez du doigt une rédaction peu compréhensible, et vous n’êtes pas le premier. Il me semble que, pour nos concitoyens, ces dispositions sont, en tout état de cause, difficiles à comprendre. C’est, à mon sens, un grand sujet d’inquiétude.
Au terme des débats que j’ai animés dans nos territoires, je me suis engagée à écrire un texte « populaire », au sens magnifique du terme, pour expliquer comment l’action publique se décline dans les faits, depuis le Président de la République jusqu’aux maires. Ce travail reste à faire. Naturellement, je le mènerai après le vote du Parlement, car le Gouvernement ne peut pas s’ériger en maître de tout ce qui va se passer dans cet hémicycle au cours des jours à venir.
Monsieur Karoutchi, permettez-moi d’esquisser un sourire à votre intention, car vous vous êtes absenté un instant : si vous supprimez la clause de compétence générale, vous n’aurez plus de raison de quitter cet hémicycle pour passer des coups de téléphone !
Sourires.
Vous nous avez expliqué ce matin que tout pouvait se régler par un coup de téléphone aux maires. Sans doute faudrait-il vous coordonner différemment !
Mme Catherine Procaccia. On enverra des courriels tout en restant en séance !
Nouveaux sourires.
Cela étant, j’entends votre remarque concernant les missions des conseils régionaux. J’ajoute que vous avez une collègue élue régionale, Mme Ségolène Royal, qui a tout récemment émis une opinion strictement identique à la vôtre. Sans doute ne vous retrouvez-vous pas souvent, …
Nouveaux sourires.
… mais vous êtes, en l’espèce, d’accord à mille pour cent !
Par ces réflexions, Mme Royal rejoint du reste ce que j’avais tenté de proposer, à travers la conférence territoriale, pour l’animation de la compétence de développement économique : selon elle, la région aurait dû rester, avant tout, une administration de missions.
Monsieur Karoutchi, tout a basculé le jour où on a confié les personnels TOS aux régions.
À compter de ce jour, cette collectivité de missions est devenue une collectivité de gestion, avec une administration. Par exemple, la région où j’ai le grand plaisir de vivre – comme quelques-uns d’entre vous – et de pratiquer le cyclisme – n’est-ce pas, cher Edmond Hervé ? – a dû multiplier ses personnels par trois, créer des fonctions supports de paye, etc. D’où le basculement que j’évoquais et sur lequel il est difficile de revenir.
Néanmoins, nous pouvons faire sorte que la loi permette aux collectivités territoriales de garantir, au fil des conventions ou accords qu’elles passeront entre elles – remarquez que je ne parle plus de « pactes de gouvernance » –, d’adapter les modalités d’exercice de telle ou telle compétence, et de s’adapter en même temps aux différents accords européens, même s’ils sont parfois très critiqués, aux évolutions technologiques, bref, à tous les changements du monde.
Dans ce monde qui bouge, pourquoi ne pas nous poser d’autres questions, par exemple au sujet des cités scolaires ?
En l’espèce, rien n’empêcherait une région de s’accorder, par convention, avec un département ou avec une ville, afin qu’une cité scolaire soit désormais gérée par une seule collectivité territoriale.
Cette solution permettrait de simplifier la situation des TOS, qui en ont assez d’avoir affaire à trois hiérarchies distinctes – la région, le département et l’État, via l’intendance. De semblables pistes pourraient être étudiées pour nous permettre de sortir, un jour, de cette complexité.
D’ici là, laissons le temps agir : confions aux exécutifs locaux la responsabilité de débattre de ce type d’évolutions, que l’adoption du présent texte rendra possible à travers de nouveaux aménagements de compétences.
Monsieur Dallier, j’ai déjà répondu sur l’application de l’article 40, mais je vous confirme que votre intervention relevait plutôt d’un rappel au règlement. J’ai ouvert une porte ; nous verrons ensuite s’il faut mettre le pied pour l’empêcher de se refermer.
MM. Mézard et Reichardt ont abordé la question de la clause de compétence générale de deux manières extrêmement différentes. Aujourd’hui, en prenant le temps nécessaire, nous pourrions tous écrire l’argumentaire de l’un et celui de l’autre ! Pour ma part, je propose de conserver la clause de compétence générale et de faire confiance aux collectivités.
Monsieur Reichardt, vous affirmez que cette clause n’est pas adaptée à votre territoire. J’en prends acte ! Mais je ne vous apprendrai pas qu’en Alsace l’aménagement numérique fait l’objet de deux schémas distincts, l’un départemental, l’autre régional. Chacun reconnaît qu’il fallait absolument mener ces deux chantiers parallèles. Je comprends vos arguments comme ceux de M. Mézard, mais j’observe, dans chacun des deux cas, les mêmes contradictions et les mêmes difficultés.
De même, au niveau de votre agglomération, vous avez tous ensemble décidé de promouvoir le dossier « Strasbourg, ville européenne », jusqu’à ce que nous nous engagions, de notre côté, sur une sorte de « contrat de siège » au sujet du Parlement européen. Sans clause de compétence générale, une telle initiative n’aurait pas non plus été possible !
Je le répète, il s’agit d’un sujet complexe.
J’entends bien l’argument de M. Mézard : l’enjeu est également symbolique. Pour avoir relu les comptes rendus des débats de 2010, et pour avoir pris part aux discussions à l’Assemblée nationale à l’époque, je constate que l’on faisait déjà largement appel au symbole de la clause de compétence générale. Il s’agissait d’une demande de responsabilisation des élus et d’une invitation à leur faire confiance.
Comme l’a souligné M. Roche il y a quelques instants, certaines communes rurales, certaines communautés de communes ont besoin, en moyenne, d’un nouvel équipement tous les dix ans ! Le département ne pourrait prendre part à ces investissements sans clause de compétence générale. Est-ce le rôle du conseil général que de mener de telles actions ? On peut se poser la question. Quoi qu’il en soit, il s’agit d’une réalité et, à mon sens, il faut composer avec les réalités.
Enfin, j’entends l’argument de l’unité de la République, au nom de laquelle certains exigent des compétences exclusives. Toutefois, force est de constater que la France n’est pas uniforme : la France est diverse. On ne peut pas raisonner exactement de la même manière pour une région composée de communautés de communes et de départementaux ruraux, et pour une région comptant une ou deux métropoles. Les enjeux n’y ont ni la même portée ni le même sens !
Nous nous sommes inspirés à la fois des travaux menés dans le cadre des états généraux de la démocratie territoriale et des nombreux rapports rédigés par l’Association des maires de France. En effet, la plus forte demande est venue de ceux qui détenaient la clause de compétence générale. Les communes en sont dotées, de manière forte et claire, et l’AMF s’est beaucoup émue de son éventuelle suppression, particulièrement dans le monde rural : dans ces territoires où il y a peu de ressources et peu de population, l’aide du conseil général, hors de ses compétences strictes, peut permettre de réaliser un équipement important.
Je dois prendre en compte ces réalités, même si, en tant qu’être très rationnel et très républicain, j’entends tout argument s’opposant à la clause de compétence générale. Toutefois, en tant que ministre réaliste, parcourant régulièrement des territoires extrêmement divers, je constate que nous devons nous adapter aux réalités du terrain : je fais confiance aux élus pour user au mieux de cette clause de compétence générale.
Lorsque je sollicite de la coopération et de la coordination, je veux aussi signifier que nous ne disposons pas de moyens de cofinancement infinis. Nous ne pouvons pas multiplier éternellement les doublons. D’ailleurs, certains ont résolu le problème, nous le constaterons au cours de nos débats.
Je le répète, faisons un effort de coordination, de coopération et de gouvernance. Assumer une compétence, c’est répondre à deux types d’obligations : bien sûr, rendre service à une population, notamment en assurant une création d’activité ; mais aussi garder à l’esprit le souci de maîtriser la dépense publique.
Monsieur Karoutchi, vous me disiez hier que la région d’Île-de-France dépensait 240 millions d’euros pour le logement et, souhaitant qu’elle puisse continuer à le faire, vous me demandiez de ne pas « fermer » la zone dense parisienne. Mais que feriez-vous sans la clause de compétence générale ? De fait, le logement ne relève pas de la compétence des conseils régionaux. Nous sommes tous placés face à des situations de cette nature. Vous, au conseil régional de l’Île-de-France, vous faites partie de ceux qui défendent l’intervention en matière de logement et, lorsque, sur ce point précis, vous invoquez la clause générale de compétence, on vous suit !
L'amendement n° 255 rectifié, présenté par M. Maurey, Mmes Morin-Desailly et Jouanno et MM. Détraigne, Guerriau, J. Boyer, Dubois, Marseille, Capo-Canellas, Delahaye et Arthuis, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Vincent Delahaye.
L’article 2 rétablit donc une clause de compétence générale qui, en fait, n’a pas encore été réellement supprimée puisque la loi du 16 décembre 2010 prévoyait que cette suppression n’interviendrait qu’au 1er janvier 2015.
Il y a quelques instants, M. le rapporteur affirmait que l’Europe se riait de nous. Elle a bien de quoi : nous supprimons une mesure qui n’a pas encore été mise en œuvre ! Faire et défaire, c’est toujours travailler, diront certains, mais, pour ma part, je ne saisis pas !
Ce que je comprends, c’est l’inquiétude qu’inspire à Mme la ministre la perspective de devoir expliquer la nouvelle loi à nos concitoyens ! Force est de le reconnaître, même après avoir lu, relu et étudié ce texte, nous sommes nombreux à nous y perdre un peu. Le « choc de simplification » est très loin ! Pourtant, nous avons besoin de simplification dans nos territoires. En particulier, il nous faut identifier clairement les responsabilités de chacun.
Dans ce cadre, la clause de compétence générale a pour effet de diluer les responsabilités.
J’entends bien que, de temps à autre, la ruralité a besoin d’une intervention conjointe et qu’il faut répondre, ici ou là, à des problèmes particuliers. Néanmoins, j’entends également que certains exécutifs ont du mal à satisfaire des demandes, qui semblent pourtant légitimes. Or, quand elles sont présentées dans les règles, et parfois avec force, il est difficile de dire non ! C’est donc à nous, législateur, de donner à nos collectivités les armes pour résister, le cas échéant, à ces requêtes, afin qu’elles n’aillent pas trop loin.
Bien sûr, je comprends les objections qui peuvent être émises par certains présidents de conseils généraux. À cet égard, nous pourrions éventuellement préciser, par une rédaction légèrement différente, les conditions d’une intervention ponctuelle, permettant de satisfaire les véritables besoins des localités.
Mais pourquoi rétablir cette clause de compétence générale pour tout le monde et dans tous les domaines, alors que ce dont nous avons besoin, c’est non pas de schémas supplémentaires, mais de sous ? Or, ces sous, on ne les a pas !
Beaucoup de départements, dont le mien, se sont lancés dans un certain nombre de politiques, mais disent maintenant aux communes – et si je peux en témoigner, c’est bien grâce au cumul des mandats, qui permet tout de même d’avoir une certaine expérience – qu’ils n’ont plus les moyens de continuer et qui se retirent des actions en question. Résultat : les communes restent seules face à la dépense ! Or ces politiques ont été développées en partenariat avec le conseil général alors qu’elles ne ressortissaient pas à son strict domaine de compétences. Les maires se retrouvent donc le bec dans l’eau, face à de lourdes charges et face à des électeurs qui leur disent : « Mais, monsieur le maire, vous allez tout de même maintenir ce service, non ? »
Gouverner, c’est choisir. Donc, à un moment donné, il faut décider. Or on a le sentiment que le présent texte n’opère pas de choix. Il ajoute encore une couche de schémas, de plans, de conférences et des pactes. À mon sens, les conséquences seront dramatiques pour la démocratie locale comme pour les finances locales.
Voilà pourquoi, au nom de mes nombreux collègues du groupe UDI-UC qui ont cosigné le présent amendement, je propose la suppression de l’article 2.
Mes chers collègues, n’abusons pas de la notion de complexité ! Nous vivons dans une société complexe : les régimes de sécurité sociale sont complexes, notre système fiscal, notre organisation scolaire ou universitaire sont complexes. Un effort de simplification est sûrement nécessaire, mais le législateur doit assumer une responsabilité pédagogique essentielle. Méfions-nous donc de la répétition de ces accusations de complexité, parce que, en fin de compte, elles entretiennent un certain populisme et une certaine hostilité à l’égard des élites et des décideurs.
En ce qui concerne la clause de compétence générale, je dois avouer qu’il y a un raisonnement dont la logique m’échappe.
Nous sommes unanimes, sachant que la France de même que nos collectivités sont très diverses, à plaider la cause de la différenciation et de l’adaptation. Madame la ministre, je suis en plein accord avec vous : si nous cherchons à permettre des adaptations, de manière à prendre en compte les différences, il faut que les collectivités aient la possibilité d’exercer un choix. C’est la clause de compétence générale qui leur permet d’adapter leur action, de sélectionner des politiques.
Par ailleurs, je suis d’accord avec M. Delahaye : la clause de compétence générale n’emporte aucune obligation et son usage est strictement facultatif. On peut, à partir de là, établir des politiques spécifiques. Lorsqu’une demande de subvention est présentée, il est tout à fait possible de la refuser ! Dans un tel cas, les élus font un choix politique et, si leur refus est motivé par des raisons objectives, il n’y a pas de recours pour excès de pouvoir qui puisse prospérer !
Hervé Maurey et moi-même, ainsi qu’un certain nombre d’autres collègues, avons longtemps hésité avant de nous associer à cet amendement de suppression.
En vérité, cet amendement a déjà suscité le débat avant même que Vincent Delahaye ne le présente, avec le talent qu’on lui connaît.
Pour résumer ce débat, je dirai que nous sommes en présence de deux positions très voisines, qui ne se distinguent que par des nuances très ténues. Selon les uns, il faut rétablir la clause de compétence générale pour ne pas l’utiliser ; selon les autres, il vaut mieux y renoncer afin de permettre une vraie clarification.
Une seule chose est sûre pour tout le monde : nous n’avons plus les moyens de développer des politiques qui s’écartent trop de nos compétences obligatoires. En même temps, Gérard Roche l’a expliqué, dans certains cas, comme en secteur rural, il faut savoir « arranger les bidons », comme on dit !
Le texte de 2010 ouvrait quelques issues de secours, car cette réforme n’était pas aussi systématique que certains l’ont prétendu. Elle partait de l’idée qu’il fallait supprimer la clause de compétence générale, mais permettre des ajustements.
Le président Mézard a très bien exposé ce qui fonde notre raisonnement : évidemment, il n’est pas simple de supprimer cette clause de compétence générale, mais cette suppression a déjà eu lieu. En 2010, une réforme difficile – un peu « chirurgicale », avouons-le – a été votée après de longs débats. Au moment où l’on nous dit que le pays doit être réformé et qu’il faut faire des efforts, il est paradoxal de revenir sur cette réforme douloureuse, qui avait la vertu de clarifier la situation.
Je n’intenterai à personne un procès en complexité, car nous pouvons nous renvoyer indéfiniment cet argument. Comme l’a dit Mme la ministre, si l’on rétablit la clause de compétence générale, il faut l’assortir de dispositifs d’accompagnement qui, bien que la commission des lois ait tenté de les décomplexifier, ne sont pas d’une grande simplicité.
Voilà pourquoi nous en sommes parvenus à la conclusion que la réforme de 2010 avait le mérite d’une certaine clarté, ce qui nous a conduits à proposer la suppression de l’article 2.
Je suis d’accord avec Mme la ministre et M. Hervé : notre société est complexe et il ne faut pas essayer de tout faire entrer dans des cases.
J’évoquais tout à l’heure le cas de la région Île-de-France ; j’y reviens quelques instants. La clause de compétence générale a fait que la région est intervenue dans des domaines où, à mon sens, elle n’aurait pas dû intervenir. On me répondra que ce n’est pas grave si ces interventions, en matière de services d’urgence, de logement, etc., ont eu pour résultat d’apporter des améliorations dans la vie quotidienne de nos concitoyens. Il reste que, son budget n’étant pas extensible et les dotations de l’État n’augmentant pas, la région s’est trouvée à court d’argent : elle a dû emprunter, et donc s’endetter, ce qui l’amène aujourd’hui à limiter les crédits dans les domaines qui relèvent de ses compétences premières.
Quand je hurle, avec tous mes collègues du conseil régional, sur l’état des transports franciliens, le président Huchon me répond qu’il investit au maximum des capacités de la région.
Je ne dis pas que nous avons tort d’intervenir dans un certain nombre de domaines, madame la ministre. J’insiste seulement sur le fait que nos budgets sont très contraints : nous ne pouvons pas accroître notre budget parce que nous n’avons quasiment plus de ressources propres et qu’il ne nous reste pratiquement plus que des dotations. Comme ces dotations sont en baisse, le budget de la région diminue ! Si nous avons de plus en plus de dettes et de plus en plus de difficultés à rembourser nos emprunts, nous réduisons nos interventions à peu près dans tous les domaines, et d’abord dans ceux qui relèvent de nos compétences premières. C’est un vrai sujet de préoccupation !
Si vous demandez aux Franciliens ce qu’ils pensent des transports publics, ils expriment leur mécontentement. Pourtant, je reconnais que la région fait des efforts – car mes critiques sont plus modérées que la moyenne –, mais ceux-ci demeurent insuffisants au regard des besoins. Pourquoi ? Parce que la région ne dispose plus de marges de manœuvre financières.
La loi de 2010, en supprimant la clause de compétence générale, permettait malgré tout certaines initiatives dans l’« interstitiel », selon l’expression désormais consacrée. Des solutions auraient pu être trouvées, sans placer les élus sous la pression permanente des demandes venant de toutes parts. En effet, ils sont à l’écoute des citoyens et des associations qui expriment des besoins, et cette écoute est normale et légitime.
À quoi sert-il d’avoir des communes, des intercommunalités, des départements, des régions, si tous les niveaux doivent répondre à toutes les demandes ? Nous n’avons plus la capacité financière de le faire. Donc, si je demande que l’on ne maintienne pas la clause de compétence générale pour les régions, c’est pour les protéger ! Protégez-nous de la pression extérieure ! Nous ne pouvons pas assumer nos responsabilités si nous avons des budgets en baisse et si nous continuons de subir toutes sortes de pressions !
Mme Cécile Cukierman s’exclame.
Je voterai l’amendement de nos collègues centristes.
Madame la ministre, à l’origine, votre texte obéissait à une logique précise, que vous nous avez expliquée dans votre propos liminaire. Le rétablissement de la clause de compétence générale était équilibré par le fameux pacte de gouvernance, assorti de sanctions si les collectivités locales ne se mettaient pas d’accord. Nous étions dans une logique de « donnant-donnant », avec un moyen de contrainte fort à l’égard des collectivités territoriales.
La commission des lois a estimé que ce pacte de gouvernance n’était pas bon et l’a supprimé. La logique devrait donc vous amener, madame la ministre, à reconsidérer votre position sur cette clause de compétence générale.
En 2010, les débats avaient été difficiles dans cet hémicycle, mais nous avions, me semble-t-il, trouvé un bon compromis. Aujourd’hui, nous pourrions chercher à améliorer le texte de 2010. Au lieu de cela, vous voulez rétablir la clause de compétence générale, peut-être parce qu’elle relève du symbole, mais vous envoyez ainsi un mauvais signal et je ne suis pas certain que nos concitoyens le comprendront.
En effet, si je me méfie, comme nous y a invité notre collègue Edmond Hervé, des populistes qui voudraient rendre les élus locaux responsables de tous les maux du pays – on a parfois entendu des propos malheureux à cet égard –, il n’en reste pas moins que 95 % de nos concitoyens ne comprennent rien à notre système ! Conserver la clause de compétence générale ne peut que conforter les jugements négatifs portés sur les collectivités locales.
Une clarification s’impose : voyons s’il faut ajuster les dispositions de 2010 en fonction des territoires, mais revenir à l’ancien système serait une erreur.
Ce débat est très intéressant et met en évidence les difficultés que soulève cette question. Je tiens cependant à attirer l’attention de mes collègues sur le fait que, si chaque collectivité se recentre sur ses propres compétences, il n’est pas sûr que nous obtiendrons un résultat cohérent en termes d’aménagement du territoire ou de politique de solidarité entre territoires.
Si les communes n’ont plus les moyens d’entretenir leur voirie communale, c’est évidemment embêtant ! Mais si elles en ont les moyens et que les routes communales débouchent sur des routes départementales mal entretenues, ce n’est pas très cohérent ! Et si les routes départementales sont belles, comme je l’ai parfois vu sur certains territoires, nettement plus belles que les routes nationales, qui voient passer 20 000 véhicules par jour, sans avoir été élargies à deux fois deux voies, le résultat n’est pas non plus cohérent, et nos concitoyens comprennent encore moins !
Prenons l’exemple des transports scolaires : si les départements veulent faire des économies, leur mission se limite à la seule organisation de ces transports. Ils en ont également assumé le financement jusqu’à présent parce qu’ils en avaient les moyens. Demain, s’ils ne peuvent plus financer le transport des élèves des écoles maternelles et élémentaires ni celui des lycéens, ils enverront la note aux communes ou à la région ! La complémentarité entre les niveaux de collectivités est donc évidente, d’où naît nécessairement une certaine complexité.
Madame la ministre, vous avez évoqué le sujet des cités scolaires. Je souscris à votre analyse ainsi qu’à celle de M. Karoutchi. J’ai été conseiller régional et conseiller général pendant dix-huit ans : cela m’a permis de comparer comment fonctionnaient les deux collectivités.
À l’origine, les régions jouaient véritablement un rôle de réflexion et d’orientation stratégique : elles s’occupaient de la formation professionnelle, des grands équipements, de la recherche, de l’enseignement supérieur.
On a commencé par leur confier les lycées, ce qui représentait déjà une mission de réalisation, d’investissement.
On peut se demander si les départements, qui s’étaient vu attribuer la responsabilité des collèges, n’auraient pas pu s’occuper également des lycées, dans un souci de rationalisation, et à condition de leur en donner les moyens, bien sûr !
Dans un second temps, on a confié les TOS aux régions, et cela a effectivement tout fait basculer, cela a totalement dénaturé leur vocation. Avant cette réforme, ma région n’employait que 200 personnes et 80 % du budget étaient consacrés à des dépenses d’intervention, les 20 % restants suffisant à couvrir le fonctionnement. Aujourd’hui, la structure du budget des régions est similaire à celle des budgets des départements !
En outre, la logique du transfert de cette compétence n’a pas été menée à son terme puisque les gestionnaires d’établissement dépendent toujours de l’éducation nationale, et non de leur collectivité de rattachement : ils sont donc soumis à une double hiérarchie. Où est la rationalisation ?
Madame la ministre, vous avez pointé des sujets sur lesquels il pourrait y avoir de véritables évolutions, mais, là, il faut absolument faire bouger les lignes !
Nous aurions pu vous suivre si vous nous aviez présenté une clarification des différentes missions, en fonction des ambitions de chaque niveau de collectivité. Je n’ai malheureusement pas l’impression que nos débats vont remédier fondamentalement à la complexité du système !
Il faut distinguer la clause de compétence générale de la possibilité pour une collectivité de financer quelque chose qui est décidé par une autre collectivité. Ce sont deux notions tout à fait différentes, et il ne faut pas les confondre si l’on veut tant soit peu avancer.
Par exemple, l’État se débrouille fort bien pour obtenir des financements d’autres collectivités : alors qu’il est compétent pour construire des universités, il lui arrive de demander à la région, au département ou à la commune d’apporter leur contribution. Qu’il y ait clause de compétence générale ou pas, cela ne change rien du tout. ! Si l’on a envie de financer ceci ou cela, on le finance ! Si l’on n’en a pas envie, on ne verse rien !
La clause de compétence générale est une notion juridique qui désigne le pouvoir de commencer. Si les départements financent beaucoup d’équipements communaux, des constructions d’écoles, notamment, ce n’est pas au titre de la clause de compétence générale. Un département a ainsi le sentiment de participer à l’aménagement du territoire.
La confusion entre les deux notions donne surtout l’occasion de faire des colloques ! Et puis, pendant qu’on parle, on ne pense pas aux malheurs… Voilà la réalité ! Tant qu’on glose sur la clause de compétence générale, qu’on passe des heures à s’étriper sur ce thème, on oublie les mauvais moments, ceux où l’on constate que la caisse est vide ! Alors, on parle, on parle, la journée se termine, et on peut recommencer le lendemain ! (.)
Mme Cukierman peut vous le dire : il arrive au département du Rhône de financer des petites choses dans le département de la Loire, au titre de la compétence générale. Mais, au titre de l’utilité générale, c’était quelque chose de bien plus important.
Voilà ! Je suis heureux de vous avoir un peu chatouillée, madame Cukierman. Cela marche bien, et il n’y a pas de raison de s’en priver ! (M. Roger Karoutchi pouffe.)
Les membres du groupe CRC ne voteront pas l’amendement visant à supprimer la clause de compétence générale pour les départements et pour les régions.
Je vois dans cette clause de compétence générale un acte de confiance à l’égard des élus et je pense que, dans la période présente, les élus attendent aussi de la part du Gouvernement cet acte de confiance et de respect de leur liberté qu’est la possibilité de faire les choix de gestion qui leur semblent importants. Ces choix sont souvent le résultat de débats qui mettent en relief les besoins des populations.
Il ne s’agit pas de tout faire, mais nos concitoyens attendent parfois de nous des réponses à des problèmes extrêmement importants qui ont été complètement délaissés par l’État.
Il en va ainsi pour le logement, qui ne relève pas de la compétence du département. Dans le Val-de-Marne, où je suis élu, des logements sociaux ont parfois été mal entretenus, faute de moyens. Il a donc fallu engager des programmes de rénovation urbaine, souvent, d’ailleurs, à l’incitation du Gouvernement. À l’époque, c’était Jean-Louis Borloo qui nous y avait poussés, dans le cadre des programmes ANRU. Notre département s’y est engagé, à côté de l’État, à hauteur de 120 millions d’euros.
Si nous l’avons fait, c’est pour éviter à des dizaines de milliers de familles de continuer à vivre dans des conditions inacceptables, dans des logements qui se dégradaient. Mais nous étions en mesure de le faire ! Or il était très important de parvenir à corriger ainsi des inégalités sociales à l’échelon du territoire et de répondre à des besoins fondamentaux.
Nos collègues Savary et Roche ont montré, à l’aide d’exemples très concrets, combien il est aujourd’hui important de pouvoir apporter ces réponses.
Nous butons, il est vrai, sur des problèmes financiers qui, au bout du compte, risquent de nous priver, malgré notre volonté, de la possibilité de faire jouer la clause de compétence générale, pour nous cantonner à nos seules compétences obligatoires. À terme, cela conduirait à enfermer nos collectivités dans des politiques très encadrées, voire à devenir de simples guichets. On en viendrait à se demander si le niveau de collectivité considéré est bien utile !
Derrière cette clause de compétence générale, c’est donc aussi la question de l’avenir des collectivités elles-mêmes qui est posée. C’est la raison pour laquelle nous nous réjouissons, pour notre part, que la commission et le Gouvernement proposent le rétablissement de la clause de compétence générale pour les régions et les départements.
Pour les multiples raisons que j’ai indiquées tout à l’heure, je soutiendrai l’amendement de nos collègues centristes.
Madame la ministre, je reconnais que, si l’on faisait deux colonnes retraçant les « plus » et les « moins » de la clause de compétence générale, elles seraient certainement d’une longueur à peu près équivalente.
Néanmoins, il faut aussi appliquer ce que l’on appelle en allemand la Realpolitik. À ce titre, la première question qui se pose est celle des moyens dont nous disposons. Nous devons évidemment tenir compte de la nécessité actuelle de maîtriser la dépense publique. Or j’ai le sentiment que la clause de compétence générale ne milite pas en ce sens. Nous allons bien le voir : si, demain, cette clause de compétence générale est réintroduite dans les départements et les régions, comme le disait tout à l’heure mon collègue et ami René-Paul Savary, elle ne sera guère utilisée, et je pense même qu’elle risque de ne pas l’être du tout !
Enfin, je ne vois pas pourquoi, madame la ministre, avec des blocs de compétences très explicitement fléchés pour les différentes strates de collectivités, il ne serait pas possible, demain, d’avoir, pour Strasbourg, un contrat de « ville européenne ». Les Alsaciens sont si attachés à la vocation européenne de Strasbourg que, j’en suis intimement persuadé, chacune des strates ne manquerait pas, dans le cadre de son bloc de compétences, de contribuer à l’élaboration d’un futur contrat triennal. C’est, en effet, en additionnant ces diverses actions, ces divers projets, que nous obtiendrions la cohérence de ce contrat.
Pardonnez-moi de vous le dire aussi directement, madame la ministre, mais cet argument ne tenait pas.
La clause de compétence générale ne doit pas faire oublier qu’il existe aussi des compétences particulières bien précises, déjà affirmées, et que la population connaît, pour peu qu’on l’en informe.
Pour moi, la clause de compétence générale est liée au suffrage universel et à l’importance des choix politiques affirmés pour la collectivité, à partir des projets qui sont présentés au sein d’un programme lorsque s’engage une campagne électorale : ce sera le cas avec les prochaines élections municipales.
Les candidats aux élections cantonales ou régionales présentent un projet d’avenir pour le conseil départemental ou le conseil régional. Parmi les choix proposés, certains vont concerner les compétences obligatoires et d’autres porteront sur des sujets qui relèvent de la compétence générale. Il faut aussi prendre ses responsabilités et assumer ce que l’on va choisir de faire ou de ne pas faire.
Nous y refusons-nous ? Je crois que non ! C’est quand même le fond de la démarche politique à laquelle nous voulons faire participer nos concitoyens. Sans clause de compétence générale, les conseils généraux deviendraient, en quelque sorte, des agences destinées à mettre en œuvre des politiques définies à l’échelon national. Est-ce ce que nous cherchons ? Je ne le pense pas ! Si l’on veut garder à notre démocratie ce lien avec le territoire, si l’on veut préserver cette capacité d’agir au sein de cette importante vie locale dans laquelle le citoyen doit reprendre toute sa place, il faut véritablement garder la compétence générale pour l’ensemble de nos collectivités.
Je mets aux voix l'amendement n° 255 rectifié.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Je rappelle que la commission et le Gouvernement sont défavorables à cet amendement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 247 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisie de huit amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 872, présenté par M. Vandierendonck, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéas 2 à 4
Rédiger ainsi ces alinéas :
1° L’article L. 3211-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 3211-1. - Le conseil général règle par ses délibérations les affaires du département.
« Il statue sur tous les objets sur lesquels il est appelé à délibérer par les lois et règlements et sur tous les objets d’intérêt départemental dont il est saisi. » ;
La parole est à M. le rapporteur.
Il s’agit d’un amendement rédactionnel, visant à sécuriser la définition des compétences du conseil général.
Dans un même souci, je vous proposerai tout à l’heure un amendement tendant à sécuriser les compétences du conseil régional, même s’il n’a pas été examiné en commission.
Les trois amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 240 rectifié bis est présenté par MM. Cazeau, Mazuir et Boutant, Mmes Bonnefoy et Nicoux, MM. Daudigny et Jeannerot, Mme Blondin, MM. Marc, Le Menn, Chastan, Miquel, Eblé, Mirassou, Auban, Rainaud, Vairetto, Krattinger, J. Gillot et Lozach, Mme Durrieu, MM. Rome, Camani et Labazée et Mme Bataille.
L'amendement n° 392 est présenté par M. Fortassin.
L'amendement n° 433 est présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 3
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
...) Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Il a compétence pour promouvoir les solidarités et la cohésion territoriale sur le territoire départemental, dans le respect de l'intégrité, de l'autonomie et des attributions des régions et des communes. » ;
La parole est à M. Bernard Cazeau, pour présenter l’amendement n° 240 rectifié bis.
L'amendement n° 240 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 392 n’est pas défendu.
La parole est à M. Christian Favier, pour présenter l'amendement n° 433.
Cet amendement vise à souligner le rôle et la place du département.
Nous nous réjouissons du rétablissement de la clause de compétence générale, qui est une caractéristique essentielle des collectivités territoriales, permettant d’ailleurs de distinguer un EPCI d’une collectivité territoriale. C’est important, même si la loi de 2010 reconnaît que le conseil général comme le conseil régional peuvent « se saisir de tout objet d’intérêt départemental [ou régional] pour laquelle la loi n’a donné compétence à aucune autre personne publique ».
Je rappelle que la jurisprudence du Conseil constitutionnel reconnaît implicitement que la clause générale de compétence est une composante de la libre administration des collectivités territoriales, garantie par l’article 72 de la Constitution. Dotées d’attributions effectives, les collectivités locales doivent également conserver leur vocation générale.
Comme cela a été dit précédemment, l’institution départementale joue un rôle essentiel. Elle accompagne les communes dans leurs projets. Elle est le relais de la solidarité en faveur de nos concitoyens, qu’il s’agisse des enfants, des jeunes, des personnes âgées ou des personnes handicapées. Enfin, elle poursuit l’action de dynamisation de nos territoires. Telles sont les raisons pour lesquelles nous sommes particulièrement attachés au maintien de cet échelon territorial.
Cet amendement, en définissant un socle de compétences inaliénables, vise à réaffirmer, mais surtout à sécuriser, l’existence même des départements, car, contrairement à d’autres sénateurs, nous pensons, comme la majorité de nos concitoyens, que le département reste un échelon pertinent – pas uniquement dans les zones rurales – et qu’il contribue à renforcer la cohérence et l’attractivité territoriale malgré la compétition européenne. Chaque jour, dans nos départements, nous travaillons pour corriger les inégalités territoriales, notamment grâce à nos politiques d’investissement.
Aujourd’hui, le département est, avec la commune, l’échelon le mieux identifié. Il fait sens pour conforter des projets communaux et intercommunaux. Il permet le bien-vivre ensemble. Il est donc un échelon essentiel de la cohésion sociale.
Les départements, on le sait, ont réussi à fédérer les acteurs de la vie sociale et culturelle, à construire très souvent de véritables politiques de proximité dans les domaines de la culture, de la petite enfance, de l’éducation, de la préservation de l’environnement, du logement, des transports, mais aussi des « déplacements doux », du soutien aux associations, des coopérations décentralisées dans le secteur de la solidarité internationale en direction de telle ou telle région du monde, de la lutte contre les nuisances et les risques.
De fait, les départements sont bien devenus des services publics accessibles et cohérents à une échelle de territoire qui reste appréhendable par tout un chacun, mais également des partenaires privilégiés des communes.
Les quatre amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 180 rectifié ter est présenté par MM. Adnot, Savary, Sido, Détraigne, Béchu, Doligé, Laménie, P. Leroy, Dériot et Pointereau.
L'amendement n° 239 rectifié bis est présenté par MM. Cazeau, Mazuir et Boutant, Mmes Bonnefoy et Nicoux, MM. Miquel, Jeannerot et Daudigny, Mme Blondin, MM. Marc, Le Menn, Bérit-Débat, Eblé, Auban, Mirassou, Rainaud, Krattinger, J. Gillot et Lozach, Mme Durrieu, MM. Rome, Camani et Labazée et Mme Bataille.
L'amendement n° 391 rectifié est présenté par MM. Fortassin et Collombat.
L'amendement n° 440 rectifié est présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. René-Paul Savary, pour présenter l'amendement n° 180 rectifié ter.
Cet amendement vise à rétablir le dernier aliéna de l’article L. 3211-1 du code général des collectivités territoriales, aux termes duquel le conseil général « donne son avis sur tous les objets sur lesquels il est consulté en vertu des lois et règlements ou dont il est saisi par les ministres, et notamment sur les changements proposés aux limites territoriales du département, des arrondissements, des cantons et des communes et sur la désignation de leur chef-lieu ».
Ne pas rétablir cet alinéa serait contraire à la loi instituant le binôme, qui vient d’être adoptée, puisqu’elle prévoit clairement que les départements doivent être consultés dans le cadre du redécoupage des cantons. Cette loi précise même que les départements doivent se prononcer dans un délai de six semaines sur la proposition de découpage du ministère de l’intérieur.
Les départements sont le reflet des territoires. Ils établissent la solidarité des territoires entre eux. Ils ont contribué à la mise sur pied de la carte intercommunale.
Si nous voulons un redécoupage cohérent, qui prenne en compte les territoires, les bassins de vie et les intercommunalités créées, et non un redécoupage partisan, il est donc important que les départements soient consultés. Aucune commune ne pouvant désormais demeurer isolée, les communautés de communes ont une importance primordiale par rapport aux bassins de vie.
Cet amendement tend donc à rappeler que, compte tenu de l’instauration des binômes et d’un nouveau scrutin, compte tenu du redécoupage qui donnera naissance à des territoires beaucoup plus vastes que ceux qui existent actuellement et rassemblant des bassins de vie, il est essentiel que les départements soient consultés sur les limites territoriales.
La parole est à M. Bernard Cazeau, pour présenter l'amendement n° 239 rectifié bis.
Je m’associe évidemment à ce qui vient d’être dit.
Au moment où il va être procédé à des redécoupages, il est en effet important que les départements soient consultés. Il est même impensable que cela puisse ne pas être le cas.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour présenter l'amendement n° 391 rectifié.
La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l'amendement n° 440 rectifié.
Nous nous sommes suffisamment félicités du rétablissement de la clause de compétence générale, en particulier pour les départements, pour faire preuve de la plus grande vigilance sur les modalités de ce rétablissement. Celui-ci doit être intégral. Or le diable se cache parfois dans les détails…
En effet, la commission a supprimé, via un amendement rédactionnel, les dispositions prévoyant la consultation du département « sur les changements proposés aux limites territoriales du département, des arrondissements, des cantons et des communes et sur la désignation de leur chef-lieu ».
Dès lors, nous ne pouvons que nous interroger sur les raisons pour lesquelles cette consultation, paraît-il redondante, figurait dans un alinéa de l’article L. 3211-1 du code général des collectivités territoriales.
Surtout, cette suppression nous paraît malvenue aujourd'hui et, à la veille d’un nouveau redécoupage des cantons, peu respectueuse de la démocratie.
Enfin, elle est dangereuse si l’on considère, comme nous, que ce projet de loi porte en germe la disparition, à terme, des départements. Compte tenu de ce que prévoient certains articles relatifs à la création de métropoles, que nous examinerons ultérieurement, nous estimons que l’existence des départements serait vraiment menacée si cette suppression du dernier alinéa de l’article L. 3211-1 du CGCT était maintenue.
J’ai très concrètement présent à l’esprit l’avenir du département du Rhône, dont le projet de loi prévoit de transférer les compétences à la métropole. Qu’importeront alors les limites territoriales d’un département dont le conseil général n’exercera plus que de maigres compétences sur une portion réduite de son territoire ?
Certains considèrent que les départements ne constituent plus aujourd’hui un échelon territorial pertinent. Ils seraient trop petits pour représenter une cohérence territoriale dans la compétition européenne et trop grands pour tenir leur rôle d’institution de proximité.
Nous sommes en total désaccord avec l’abandon d’un échelon important de la représentation des populations au niveau d’un territoire.
La commission émet un avis favorable sur les amendements n° 240 rectifié bis et 433.
Comme l’a dit Colette, on est écrivain par les mots qu’on refuse à sa plume. Je veux dire par là, concernant les amendements identiques n° 180 rectifié ter, 239 rectifié bis et 440 rectifié, que l’ambition de la commission des lois a été purement légistique : il s’agissait d’éviter qu’une disposition identique concernant les conditions d’intervention des conseils généraux sur les modifications des limites territoriales des départements et des arrondissements figure à deux endroits différents du texte. Nous ne supprimons donc rien, sinon une répétition dans le texte.
Sur l’amendement n° 872, l’avis est favorable.
Sur l’amendement n° 433, j’avais au départ émis un avis défavorable, car il était prévu de débattre du sujet en cause lors de l’examen des dispositions relatives aux collectivités chefs de file. Cependant, compte tenu de la position adoptée par la commission des lois, je m’en remets finalement à la sagesse du Sénat.
Sur les amendements identiques n° 180 rectifié ter, 239 rectifié bis, 391 rectifié et 440 rectifié, j’émets un avis favorable.
L'amendement est adopté.
En conséquence, les amendements n° 433, 180 rectifié ter, 239 rectifié bis, 391 rectifié et 440 rectifié n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 905, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
2° Les deux premiers alinéas de l’article L. 4221-1 sont ainsi rédigés :
« Le conseil régional règle par ses délibérations les affaires de la région.
La parole est à Mme la ministre.
Il s’agit d’un amendement de précision rédactionnelle, tendant à confirmer le rétablissement de la clause de compétence générale de la région.
L'amendement est adopté.
Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 434, présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
L’alinéa 10 de l’article 2, tend, comme le précise à juste titre dans son rapport notre collègue René Vandierendonck, à réintroduire la clause de compétence générale, supprimée par l’article 73 de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, cette suppression devant être effective à compter du 1er janvier 2015.
Avec nos collègues de la majorité sénatoriale, nous nous étions vivement opposés à cette suppression, considérant que, principalement dictée par des impératifs financiers et s’inscrivant dans la continuité des politiques d’austérité, elle aurait pour conséquence de réduire la capacité d’action des collectivités territoriales.
Cette capacité d’action est importante pour permettre aux collectivités de conserver leur dynamisme, mais aussi, et c’est notre préoccupation majeure, pour répondre aux besoins des populations. Il s’agit clairement pour nous, selon la formule de notre ancienne collègue Anne-Marie Escoffier, désormais ministre déléguée chargée de la décentralisation, de « chercher, avec les élus, l’endroit où le meilleur service sera rendu aux citoyens ».
La réintroduction de cette clause constitue donc une bonne mesure, et nous faisons confiance aux élus des collectivités territoriales pour imaginer, arrêter et mettre en œuvre les politiques publiques les mieux adaptées aux territoires et aux populations. Nous souhaitons d’ailleurs que ces actions non obligatoires fassent le plus souvent possible l’objet d’une concertation, voire d’une co-élaboration avec les citoyens.
Pour autant, l’alinéa 10 de cet article semble conférer un encadrement important au principe de la clause de compétence générale puisqu’il établit une liste de compétences sur lesquelles les conseils régionaux sont autorisés à délibérer et, par conséquent, à agir.
C’est une idée que vous aviez avancée, madame la ministre. Je cite vos propos : « Le retour vers une clause de compétence générale à tous les niveaux de collectivités paraît être la meilleure solution, sous réserve qu’il y ait une identification des compétences majeures qui serait une véritable colonne vertébrale. »
Autrement dit, la réintroduction de la clause de compétence générale ne serait possible qu’à la condition que cette clause soit, sinon réduite, au moins strictement encadrée. Elle serait même d’autant plus encadrée qu’en l’absence de l’adverbe « notamment » – le Sénat, je le sais, y est plutôt hostile ! – la liste paraît être exhaustive.
Aussi, afin de permettre la pleine réintroduction de la clause de compétence générale, et pour en revenir à la situation antérieure à 2010, nous proposons de supprimer l’alinéa 10 de cet article.
L’amendement n° 435, présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Supprimer les mots :
et pour assurer la préservation de son identité et des langues régionales
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
La rédaction de cet alinéa a pour effet de placer la préservation de l’identité régionale dans la liste des compétences dont l’attribution est clairement garantie aux régions. Certes, il ne s’agit pas là d’une compétence obligatoire, mais elle fait en quelque sorte partie du socle de compétences générales garanties aux régions, ce qui nous inquiète à plus d’un titre.
Tout d’abord, la notion d’« identité régionale » dont il est fait mention ici ne nous apparaît pas suffisamment définie pour que la loi y fasse explicitement référence.
Souvenons-nous du débat sur l’identité nationale. L’utilisation, de cette notion, pour ne pas dire son instrumentalisation, a montré combien l’absence de définition partagée rendait impossible le débat, chacun l’appréhendant de manière diverse, et même parfois radicalement différente, à tel point qu’il était impossible d’établir un consensus. Nous craignons qu’il en soit de même ici. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons supprimer la référence à cette notion.
Nous sommes d’autant plus inquiets que nous n’ignorons pas que cette notion s’inscrit dans une stratégie européenne de régionalisation, destinée à transformer l’échelon régional tel que nous le connaissons, c’est-à-dire un échelon démocratique de proximité, en un échelon d’abord et avant tout économique, qui serait continuellement placé en concurrence avec d’autres territoires nationaux ou européens, alors même qu’il n’existe aucune harmonisation fiscale ou sociale au sein de l’Union européenne.
Cette formulation était par ailleurs clairement mentionnée dans le projet de traité constitutionnel européen de 2005, rejeté par le peuple français par référendum. Elle figure également dans le traité de Lisbonne, dont personne ne peut nier qu’il a, avant tout, une portée économique.
Qui plus est, bien que contrasté, le vote récent des Alsaciens sur la fusion des deux conseils généraux et du conseil régional §doit nous inviter à relativiser cette notion d’identité régionale.
On voit bien que l’argument de l’identité régionale, largement mis en avant lors du débat qui a précédé ce référendum, n’a pas résisté face à la volonté des électeurs de conserver, à la fois, les échelons de proximité dans leur diversité et des structures en lien avec leurs aspirations et leurs besoins.
Pour toutes ces raisons, nous vous invitons, au moment de voter cet amendement, à mesurer combien cette question de l’identité régionale est aujourd’hui instrumentalisée par des mouvements régionalistes. Ceux-ci n’hésitent plus à en faire une revendication majeure qu’ils opposent, par ailleurs, à la solidarité nationale, fondement de notre République.
L’amendement n° 313 rectifié, présenté par MM. Mézard, Barbier et Chevènement, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Supprimer les mots :
et des langues régionales
Dans la droite ligne de mes précédents propos et de ceux que nous venons d’entendre, je vous propose, avec Jean-Pierre Chevènement, Gilbert Barbier, la suppression, à l’alinéa 10, des mots « et des langues régionales ».
L’article 2 de la Constitution dispose que « la langue de la République est le français ». Il nous paraît inutile et même dangereux d’inclure dans ce projet de loi la référence explicite aux langues régionales, avec les incertitudes qui peuvent découler de cette notion.
Fidèle à la tradition intellectuelle de mon groupe, je me devais de déposer et de défendre un tel amendement.
L’amendement n° 664 rectifié, présenté par MM. Patriat, Le Vern, Percheron et Besson, Mme Génisson, M. Fauconnier, Mme Espagnac, M. Anziani et Mme Herviaux, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Après les mots :
identité et
insérer les mots :
promouvoir le développement
Cet amendement n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements n° 434, 435 et 313 rectifié ?
Il est favorable sur l’amendement n° 434 et défavorable sur les amendements n° 435 et 313 rectifié.
Il est défavorable sur les trois amendements.
L'amendement est adopté.
En conséquence, les amendements n° 435 et 313 rectifié n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 616 rectifié bis, présenté par MM. Delahaye, Guerriau et Arthuis, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Rédiger ainsi cet alinéa :
4° Au quatrième alinéa de l'article L. 1111-4, les mots : « par priorité » sont remplacés par les mots : « au minimum à hauteur de 95 % de leur budget »
La parole est à M. Vincent Delahaye.
Je regrette que l’on n’ait pas supprimé l’article 2 et la clause de compétence générale. Cela aurait pourtant été cohérent – Mme la ministre l’a dit elle-même ce matin – avec la suppression du pacte de gouvernance territoriale, sans empêcher pour autant les collectivités de financer des actions ne ressortissant pas à leurs compétences.
Le présent amendement vise, par conséquent, à éviter la dispersion des interventions des collectivités du fait de la clause de compétence générale. Il est vrai que les ressources sont aujourd’hui plus rares et que cela tend à limiter quelque peu les envies des uns et des autres d’empiéter sur des compétences qui sont hors de leur champ.
Il s’agit de prévoir que le département et la région doivent consacrer au minimum 95 % de leur budget aux dépenses relevant des compétences dont ils sont chefs de file. Ces collectivités pourront ainsi se concentrer quasi exclusivement sur leurs compétences propres, tout en gardant une petite marge de manœuvre pour d’éventuelles interventions extérieures.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Madame la présidente, je souhaite que le Sénat examine par priorité l’amendement n° 684 rectifié ter.
La priorité est de droit.
L'amendement n° 684 rectifié ter, présenté par Mme Lipietz, MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 12
Insérer six alinéas ainsi rédigés :
6° Après l'article L. 1111-8, il est inséré un article L. 1111-8-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-8-1 – Sauf lorsque sont en cause des intérêts nationaux et dans les domaines prévus par la loi, l’État peut déléguer par convention à une collectivité territoriale ou à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre qui en fait la demande l’exercice de tout ou partie de ses compétences.
« Les compétences déléguées en application du présent article sont exercées au nom et pour le compte de l’État.
« Aucune délégation ne peut porter sur l’exercice de missions de contrôle confiées aux services de l’État par les lois et règlements.
« Les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre qui souhaitent bénéficier d’une délégation de compétence en font la demande auprès du représentant de l’État dans la région qui la transmet au ministre chargé des collectivités territoriales accompagnée de ses observations et de l’avis de la conférence territoriale de l’action publique prévue à l’article L. 1111-9-1.
« La délégation est décidée par décret. La convention prévue au premier alinéa en fixe la durée, définit les objectifs à atteindre, précise les moyens mis en œuvre ainsi que les modalités de contrôle de l’État sur la collectivité territoriale ou l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre délégataire. Les modalités de cette convention sont précisées par décret en Conseil d’État. »
La parole est à Mme Hélène Lipietz.
Examinons-nous l’acte III ou l’acte IV de la décentralisation ? Je l’ignore, mais je sais, pour l’avoir appris en cours de droit constitutionnel, que la décentralisation est un transfert de compétences de l'État vers les collectivités territoriales. Or il n'est nulle part écrit dans le présent projet de loi que l'État peut déléguer une partie de ses compétences.
L’amendement n° 684 rectifié ter vise donc à mettre en place des délégations de compétences de l'État vers les collectivités territoriales et à permettre une plus grande souplesse de l'exercice des compétences de l'État qui tienne compte des réalités des territoires. Bien sûr, ces délégations se feront à la demande des collectivités. Il s'agit non pas d’imposer à ces dernières des compétences dont elles ne veulent pas, mais, dans le cadre d'une expérimentation, de leur permettre de les exercer après un accord conclu avec l'État.
Bien entendu, le territoire qui nous semble le plus pertinent en termes de taille et de structure, c'est la région.
Les amendements n° 387 rectifié et 739 rectifié sont identiques.
L'amendement n° 387 rectifié est présenté par MM. C. Bourquin, Bertrand et Collombat.
L'amendement n° 739 rectifié est présenté par MM. Patriat et Eblé, Mmes Espagnac et Génisson, MM. Percheron, Besson, Le Vern et Fauconnier et Mme Herviaux.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 12
Rédiger ainsi cet alinéa :
5° L’article L. 1111-8 devient l’article L. 1111-8-1 et au premier alinéa, les mots : « qu’il s’agisse d’une compétence exclusive ou d’une compétence partagée » sont supprimés ;
II. – Après l’alinéa 12
Insérer six alinéas ainsi rédigés :
6° L’article L. 1111-8 est ainsi rétabli :
« Art. L. 1111-8. – Sauf lorsque sont en cause des intérêts nationaux et dans les domaines prévus par la loi, l’État peut déléguer à une collectivité territoriale ou à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre l’exercice de tout ou partie de ses compétences.
« Les compétences déléguées en application du présent article sont exercées au nom et pour le compte de l’État.
« Aucune délégation ne peut porter sur l’exercice de missions de contrôle confiées aux services de l’État par les lois et règlements.
« Les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre qui souhaitent bénéficier d’une délégation de compétences en font la demande auprès du représentant de l’État dans la région qui la transmet au ministre chargé des collectivités territoriales accompagnée de ses observations et de l’avis de la conférence territoriale de l’action publique prévue à l’article L. 1111-9-1.
« La délégation est décidée par décret. Elle est régie par une convention qui en fixe la durée, définit les objectifs à atteindre, précise les moyens mis en œuvre ainsi que les modalités de contrôle de l’autorité délégante sur l’autorité délégataire. Les modalités de cette convention sont précisées par décret en Conseil d’État. »
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour présenter l'amendement n° 387 rectifié.
Cet amendement a un objet quasi identique : il explore la possibilité de déléguer des compétences de l'État à la région. Cette disposition est tout à fait intéressante et j’espère que nous nous en souviendrons lorsqu'il sera question des transferts de compétences des départements ou des régions aux métropoles.
En effet, la délégation permet aussi, sans dépecer les départements, surtout là où les métropoles ne s'imposent pas véritablement, de rationaliser la gestion sans porter atteinte aux collectivités territoriales qui exercent initialement ces compétences.
L'amendement n° 739 rectifié n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 387 rectifié ?
La commission est conquise par l'avancée que permettent ces amendements, singulièrement par la pertinence de l'amendement n° 684 rectifié ter, qui tend à faire figurer dans la future loi que la délégation intervient au nom et pour le compte de l'État, et à la demande de la collectivité. Par les temps qui courent, cette précaution est opportune !
Par conséquent, la commission vous demande, monsieur Collombat, de bien vouloir retirer l'amendement n° 387 rectifié au profit de l'amendement n° 684 rectifié ter, plus intégrateur et plus précis.
L'amendement n° 387 rectifié est retiré.
Quel est l’avis du Gouvernement sur l'amendement n° 684 rectifié ter ?
Le Gouvernement est tout à fait favorable à cet amendement, d'autant que, avant que nous n’entamions l'examen de l’article 2, j'ai expressément indiqué que le renoncement à l'expérimentation ne valait pas approbation de la délégation de compétences.
Cet amendement est très sympathique et je comprends la précipitation de la commission et du Gouvernement à l’approuver. Pourtant, au risque de déplaire à ses auteurs, je trouve qu'il y manque certains éléments sur la compensation.
Nous nous battons depuis des décennies pour savoir comment le transfert de compétences est compensé par l'État et nous ne cessons d'appeler à la vigilance à ce sujet. Là, il s'agit d'inverser la charge de la preuve et de préciser que la délégation doit faire l’objet d’une demande des collectivités.
J'aurais souhaité non seulement qu’il soit indiqué que cette demande doit être acceptée, mais aussi que soient prévues un certain nombre de garanties sur les équilibres et les compensations. Il faut notamment que ces dernières soient effectuées dans les mêmes conditions et par les mêmes opérateurs que lorsque c'est l'État qui demande un transfert.
En effet, la collectivité peut, pour des raisons de gestion, avoir besoin d'un transfert, sans forcément avoir une idée précise de son coût réel. Il faudrait en quelque sorte une étude d'impact.
Peut-on avoir des garanties en la matière ?
Ce mécanisme existe déjà ! Certaines dotations sont calculées annuellement en fonction des frais engagés. Ce dispositif me paraît moins périlleux que les transferts de compétences, car, en la matière, on sait très bien que les dépenses croissent en réalité plus vite que ce qui était estimé au moment où le transfert est décidé.
Il me semble que le principe d’une dotation tenant compte des dépenses réalisées par les collectivités pour l'exercice d'une compétence de l'État, dans le cadre, non pas d'un transfert, mais d’une délégation, est déjà appliqué.
À partir du moment où ce sont les collectivités qui sont à l'initiative de la demande de délégation, on peut supposer qu'elles savent ce qu’elles font et se sont interrogées avant de s’engager. Je fais confiance aux territoires.
Par ailleurs, cette délégation n'est pas sans garantie.
Ainsi, la convention fixe la durée de la délégation. Si, au terme des cinq années, la région ne peut assumer, elle n’en demandera pas le renouvellement.
Par ailleurs, la convention définit les objectifs à atteindre, précise les moyens mis en œuvre ainsi que les modalités de contrôle de l'État. En outre, les modalités de cette convention sont fixées par décret en Conseil d'État.
Tous ces éléments devraient rassurer M. Karoutchi !
Avec cet amendement, on est dans la même situation que lorsqu'on dit qu'une collectivité peut accorder un allégement d'impôt. C'est exactement pareil ! On ouvre la bonde : la collectivité peut, mais, ensuite, c'est elle qui paye !
J'avoue être assez sceptique. La délégation de compétence en matière de logement dans les territoires accordée aux collectivités se traduit par une baisse importante des dotations de l'État et par une compensation financière de plus en plus importante des intercommunalités ! En d'autres termes, on est en train d'ouvrir la porte à l’abandon progressif par l'État de ses compétences régaliennes.
Je ne partage pas du tout l'optimisme de ma collègue sur cette question et ne suis pas favorable à l’amendement n° 684 rectifié ter.
Les questions que posent mes collègues sont importantes et je tiens à les rassurer.
Existe-t-il aujourd'hui des délégations de ce type ? La réponse est « oui », mais seulement entre collectivités territoriales.
Quel est l’objet de cet amendement ? Il s’agit de généraliser cette possibilité et de prévoir des délégations entre l'État et les collectivités.
Quelles précautions faut-il prendre pour se prémunir du risque d'un transfert de charges ? Du fait de la nature de la délégation, la collectivité continue à agir au nom et pour le compte du délégant.
Par conséquent, les garanties existent. Elles sont même supérieures à celles qui sont prévues pour les appels à projet, ce dispositif pernicieux qui se développe et qui consiste à dire : « Je décide et vous payez une partie. »
Je préfère de loin la clarté de la mesure proposée. Elle a été discutée en commission et il faut la considérer comme un progrès majeur par rapport aux pratiques actuelles.
M. le rapporteur vient de répondre en partie aux interrogations que je souhaitais formuler.
Pour la clarté du débat, je pense que l'on gagnerait à « documenter » le sujet. Pour le rapporteur, il s'agit d'un renversement important. Quitte à choisir la voie du renversement ou de la révolution, faisons-le consciemment !
Sans doute cet amendement a-t-il une portée politique majeure, en tout cas une portée intramajoritaire qui n'a échappé à aucun d'entre nous. Dont acte. Cependant, il faut savoir ce qui change véritablement par rapport à la loi de 2010.
Je n'ai pas le sentiment que nous soyons particulièrement éclairés sur le champ des délégations que nous ouvrons.
Si nous ne pouvons qu'être favorables au fait que les collectivités puissent d'elles-mêmes avoir une faculté de propositions, au lieu de subir des transferts, il est tout de même nécessaire que le Parlement soit un peu plus renseigné qu’il ne l'est. Nous avons l'impression de délibérer vite et parfois à l’aveuglette.
Il faut faire confiance à l'intelligence territoriale !
De ce point de vue, l'amendement que nous examinons est remarquablement rédigé, puisqu'il est précisé que la délégation ne s’applique que lorsque la collectivité en fait la demande.
Je le répète, des garanties sont prévues. Il s'agit d'une délégation ; en d’autres termes, les collectivités continuent d'agir au nom et pour le compte de l'État. En outre sont exclus du champ de la délégation les domaines de prérogatives régaliennes non déléguables.
Par conséquent, faisons confiance aux collectivités, parce que toutes les précautions auront été prises pour que le dispositif en cause puisse fonctionner.
Je suis assez favorable à cette logique.
J’ai travaillé sur la délégation de la compétence d’attribution des aides à la pierre et du contingent préfectoral en matière de logement. Pour le contingent préfectoral, par exemple, la pratique a précédé la loi. Pourtant, une fois la loi adoptée, la délégation a été décidée à certains endroits et pas à d’autres...
Permettre la délégation, c'est bien. Mais quelle garantie a-t-on que l'application sera équitable sur tout le territoire ? Qu'il faille distinguer entre territoires de nature différente, je le comprends. Mais quid des territoires de nature équivalente ? Comment avoir la certitude qu’ils seront traités de la même manière ? Je m'interroge…
Il s'agit d'une délégation dans le cadre d'une convention et non d'un transfert obligatoire. Je ne peux pas imaginer, y compris après délibération en commission permanente, qu'un responsable d'exécutif signe une convention qui soit totalement défavorable à sa collectivité. La convention en question prévoit une double signature, donc une double garantie.
L'amendement est adopté.
L'article 2 est adopté.
L’amendement n° 614 rectifié bis, présenté par MM. Delahaye, Guerriau et Arthuis, est ainsi libellé :
Après l'article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La région ne peut participer au financement de l’activité d’une personne morale que pour un montant supérieur à 1 centime d'euro par habitant de la collectivité.
II. - Le département ne peut participer au financement de l’activité d’une personne morale que pour un montant supérieur à 1 centime d'euro par habitant de la collectivité.
La parole est à M. Vincent Delahaye.
Cet amendement, comme l’amendement n° 616 rectifié bis, a pour origine la volonté de la majorité de cet hémicycle de rétablir, à la demande du Gouvernement, la clause de compétence générale. Dans mon amendement précédent, je proposais de limiter les interventions réalisées à ce titre par les départements et les régions par référence à leur budget. Pour sa part, le présent amendement tend à éviter l’émiettement et le saupoudrage des subventions, et donc à aider les exécutifs à résister à la tentation, parfois légèrement clientéliste, de soutenir un peu tous les projets sans distinction.
L’idée est de fixer le plancher des participations de la région et du département au financement de l’activité d’une personne morale ou d’une association à un centime d’euro par habitant de la collectivité.
La définition d’une somme minimale devrait également permettre d’alléger la charge de travail des services administratifs des collectivités qui instruisent les dossiers de financement.
La commission est défavorable, l’amendement étant contraire au principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales.
J’ai toujours soutenu jusqu’à présent les amendements du groupe UDI-UC, mais, en l’occurrence, je ne comprends pas très bien le sens de celui que vous venez de présenter, monsieur Delahaye.
Mme Nathalie Goulet applaudit.
Parce que je souhaite en effet limiter la dispersion des subventions en tout genre, je n’ai pas envie que ma région ne puisse pas accorder d’aide inférieure à 1, 2 million d’euros. Cette règle inciterait tous ceux qui touchent moins à réclamer la revalorisation de leur subvention ! §
L'amendement n° 614 rectifié bis est retiré.
Chapitre II
Les collectivités territoriales chefs de file, la conférence territoriale de l’action publique et le pacte de gouvernance territoriale
Section 1
Les collectivités territoriales chefs de file
L’article L. 1111-9 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-9. – I. – La région est chargée d’organiser, en qualité de chef de file, les modalités de l’action commune des collectivités territoriales et de leurs établissements publics pour l’exercice des compétences relatives à l’aménagement et au développement durable du territoire, aux développements économique et touristique, à l’innovation et à la complémentarité entre les modes de transports.
« II. – Le département est chargé d’organiser, en qualité de chef de file, les modalités de l’action commune des collectivités territoriales et de leurs établissements publics pour l’exercice des compétences relatives à l’action sociale et à la cohésion sociale, à l’autonomie des personnes, à l’aménagement numérique et à la solidarité des territoires.
« III. – La commune, ou l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre auquel elle a transféré ses compétences, est chargée d’organiser, en qualité de chef de file, les modalités de l’action commune des collectivités territoriales et de leurs établissements publics pour l’exercice des compétences relatives à l’accès aux services publics de proximité, le développement local et l’aménagement de l’espace.
« IV. – Les modalités de l’action commune des collectivités territoriales et de leurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre pour l’exercice des compétences mentionnées aux alinéas précédents sont définies par la conférence territoriale de l’action publique, prévue à l’article L. 1111-9-1. »
Cet article met en place dans notre législation le chef de filat, prévu dans la Constitution comme étant une possibilité offerte au législateur de désigner par la loi une collectivité territoriale chef de file sur une compétence déterminée.
Cette faculté a été introduite dans notre texte fondamental à la suite des réformes menées par notre collègue Jean-Pierre Raffarin quand il était Premier ministre.
Il s’agit cependant d’un concept vide de portée juridique, car cette notion n’a jamais réellement été définie, pas plus hier qu’aujourd’hui dans le présent projet de loi qui pourtant la consacre. Si nous adoptons l’article 3 tel qu’il est actuellement rédigé, nous ne saurons pas ce qui sera mis en place au nom de cette notion de chef de file, notamment quel type de relation se nouera entre les collectivités.
Tous les risques sont donc devant nous.
De surcroît, le dictionnaire ne nous est pas d’une grande utilité, précisant, à propos du chef de file, qu’il s’agit de celui qui est à la tête d’un groupe ou d’un mouvement. Il n’indique pas son rôle. Or, pour nous, c’est la véritable question.
Il semble que cette notion ait aussi une origine financière : elle désigne alors l’établissement bancaire qui dirige une opération financière et assure les relations entre une entreprise cliente et les autres banquiers. Nous pourrions nous satisfaire d’une telle vision d’entremetteur, à condition, dans ce cas, qu’il revienne aux parties en présence de désigner leur chef de file. C’est pourquoi nous sommes opposés à ce que la loi opère cette désignation. Nous préfèrerions que ce soient les collectivités qui décident.
Toutefois, en lisant l’exposé des motifs du présent projet de loi, il ne semble pas que cette vision de coordonnateur soit celle du Gouvernement. En effet, cette notion est visée dans le cadre de la clarification des compétences de chacune des collectivités territoriales. Ce n’est donc pas au sens de la coordination que nous devons examiner le concept contenu dans l’article 3, mais bien au sens de la direction effective par une collectivité de l’action de chaque collectivité pour l’exercice d’une compétence définie. C’est l’option dirigiste qui doit être retenue pour comprendre la portée de cet article.
Il s’agit donc, selon nous, d’un encadrement renforcé de la libre administration des collectivités et, en quelque sorte, d’une forme de tutelle exercée par une collectivité sur les autres.
Dans ces conditions, vous comprendrez que nous ne puissions accepter le principe même de chef de filat. Cette notion n’étant pas définie et sa mise en œuvre n’étant pas encadrée, tout devient possible. Une collectivité pourrait non seulement interdire à d’autres d’intervenir dans un domaine, mais aussi les obliger à agir en son nom, sans aucun garde-fou, y compris les contraindre à effectuer des dépenses.
Aussi, chacun le comprend bien, sans définition et sans encadrement, il n’est pas possible que notre droit public intègre une telle notion, qui ouvrirait la porte à de nombreux conflits potentiels.
C’est pourquoi nous avons déposé un amendement tendant à supprimer le concept de chef de file. Si toutefois nous n’étions pas suivis, nous avons aussi déposé un amendement de repli visant à faire respecter le principe constitutionnel de non-tutelle d’une collectivité sur une autre.
En résumé, l’article 3 nous semble dangereux, sa portée normative faible et floue ouvrant la porte à de nombreux conflits.
À l’article 3 est proposée une nouvelle rédaction de l’article L. 1111-9 du code général des collectivités territoriales, qui désigne chaque niveau de collectivité comme chef de file pour la mise en œuvre de compétences nécessitant l’intervention de plusieurs collectivités territoriales d’échelons différents.
Pour ce qui concerne les départements, la commission des lois a souhaité supprimer le tourisme de la liste des compétences pour lesquelles le conseil général est chef de file, ayant estimé plus « opportun » de désigner la région en la matière.
Je m’interroge sur le qualificatif « opportun ». Dans son ouvrage Un amour, l’écrivain italien Dino Buzzati écrivait : « Un baiser donné en temps opportun épargne bien des salutations distinguées. » §Manifestement, la commission des lois aurait bien fait de s’inspirer de cette citation. Cette modification majeure du texte sur la compétence touristique a suscité un profond mécontentement chez les élus de terrain.
En effet, lors des auditions menées par M. le rapporteur, il avait été fait mention d’une discussion en amont au sujet de la meilleure coordination de certaines compétences régionales et départementales, et non d’une suppression de compétence de la deuxième collectivité au profit de la première. Le président de l’Assemblée des départements de France, l’ADF, Claudy Lebreton, s’était d’ailleurs déclaré favorable à un dialogue, qui semble refusé dans cet article. Une telle méthode n’est pas acceptable.
Les élus de proximité le regrettent très vivement, car ces décisions mettent clairement à mal l’avenir institutionnel du niveau de collectivité qui se trouve au cœur des solidarités humaines et territoriales, à savoir le département.
Nous ne prendrons que les deux exemples les plus significatifs : la désignation en tant que chef de filat, d’une part, de la région en matière de tourisme et, d’autre part, du bloc communal pour les politiques relatives à l’accès aux services publics de proximité, au développement local et à l’aménagement de l’espace.
De fait, par ce biais, vous reléguez quasi exclusivement les départements à l’exercice de leurs compétences sociales, alors qu’un consensus avait été trouvé avec le Gouvernement sur leur rôle essentiel d’aménageurs du territoire et d’acteurs dans le domaine de l’emploi de proximité. Où est désormais la cohérence avec les dispositions prévues, notamment, dans le deuxième projet de loi que nous examinerons après l’été ?
Pour notre part, nous estimons que la désignation d’un chef de file en matière de tourisme présente plus d’inconvénients que d’avantages. La recherche de synergies serait plus utile. Pourquoi trancher ici alors qu’il appartiendra aux collectivités d’organiser les structures en fonction de la réalité ? Dans le Nord-Pas-de-Calais et l’Alsace, le bon niveau de collectivité, c’est la région, mais tel n’est certainement pas le cas pour la Dordogne, l’Aisne, l’Aude le Calvados, le Lot, notamment.
Nous défendrons donc des amendements qui vont dans ce sens.
Sans relancer la discussion sur les principes constitutionnels, je voudrais à mon tour intervenir sur cette notion de chef de filat, qui soulève, selon moi, un problème de cohérence, de complexité, mais aussi un risque.
Il me semble tout d’abord incohérent de déléguer la responsabilité de chef de file à la région pour l’aménagement du territoire. Car le conseil général a lui aussi une responsabilité dans l’aménagement solidaire et équilibré d’un territoire rural. De surcroît, si, demain, nous allons vers la création de métropoles pour les agglomérations importantes – je suis plutôt favorable à cette évolution –, il est sûr que certaines collectivités vont devenir de véritables territoires ruraux. Dès lors, cette notion de solidarité dans l’aménagement équilibré du territoire va devoir très clairement s’exprimer. Malheureusement, on a instauré chef de filat la région et déshabillé le département. Cela pose un vrai problème, au-delà même du tourisme, dont vient de parler notre collègue Bernard Cazeau.
En revanche, on a désigné la commune comme chef de file pour ce qui concerne l’accès aux services publics. Je suis frappé de ce manque de responsabilité de l’État ! En effet, mis à part l’État, qui peut se porter garant de la solidarité nationale et faire en sorte que les services publics de proximité soient garantis aux citoyens dans les territoires les plus isolés ?
On ne peut pas demander à une commune isolée, dépourvue de moyens, d’assumer cette responsabilité, de conserver un bureau de poste alors que la fermeture de celui qui existe est d’ores et déjà décidée, une école sans instituteur, et de faire en sorte que les moyens de communication numériques arrivent jusqu’à son territoire.
Il y a là, me semble-t-il, une incohérence majeure et une vraie responsabilité de l’État à l’égard des territoires ruraux dans le domaine de l’aménagement et des services publics. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé un certain nombre d’amendements. Toutefois, ne sachant pas si je pourrai les défendre, je tenais à m’exprimer dès à présent sur le sujet.
Le flou, les difficultés et l’incohérence engendrés par les dispositions que nous examinons nous renvoient au débat que nous avions tout à l’heure : si l’on voulait donner davantage de liberté aux collectivités, il fallait oser créer un cadre. Car nous ne sommes véritablement libres que si nous savons dans quels domaines nous pouvons agir librement ; nul ne l’ignore.
Malheureusement, le Gouvernement ne prend pas cette responsabilité. Loin de créer le cadre, il met en place un système extrêmement complexe, qui orchestre en particulier l’abandon des territoires. On a éloigné le conseiller général, modifié l’élection dans les communes, laissé les territoires ruraux sans un responsable chargé de leur aménagement équilibré. En définitive, on les isole, ce qui constitue un vrai risque pour l’unité et l’unicité de nos territoires.
Cela étant, je ne suis pas un partisan de l’immobilisme, mais il convient d’avancer avec une ligne conductrice forte qui, je le déplore, fait défaut dans le présent projet de loi.
Le concept de chef de file est une invention sémantique judicieuse, pertinente, qui cache en réalité l’absence de décision de fond.
Nous avons péché, sous l’autorité du Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, et vous péchez aujourd’hui. À l’époque, j’étais président de l’Association des régions de France, je défendais la responsabilité régionale, quand d’autres défendaient légitimement celle des collectivités départementales.
Pour éviter de trancher et de répartir les responsabilités, on a retenu l’idée que chacun était compétent d’une façon universelle, mais que, l’universalité ayant ses limites, on demanderait à l’un ou à l’autre d’être plus responsable que les autres. Tous égaux, mais certains plus que d’autres : ainsi peut-on résumer le concept de chef de file.
Cette notion est issue – vous avez raison de le rappeler, monsieur Favier – de l’économie privée. Cependant, il existe une grande différence entre cette dernière et les collectivités territoriales en matière de répartition des responsabilités : l’argent. Je veux dire par là qu’un banquier est principal lorsqu’il est celui qui dépense le plus d’argent et prend le plus de risques. Le chef de file prenant plus de risques et s’engageant plus fortement, ses associés acceptent l’idée qu’il est plus compétent. Les banquiers subalternes économisent donc l’analyse du dossier et se réfugient derrière la compétence du banquier principal. Ils abandonnent leur responsabilité mais partagent les risques et les profits.
Pour ce qui concerne les collectivités territoriales, la logique est profondément différente. L’exemple du tourisme est très intéressant. Il peut y avoir à la fois une vision régionale du tourisme, pour certaines manifestations de communication, et des approches départementales ou infra-départementales, voire communales, pour la défense de telle ou telle réalisation, car l’effort touristique repose, au-delà de sa dimension rationnelle, sur l’implication d’élus représentant des territoires et souhaitant exprimer la force de ces territoires sans pour autant disparaître derrière un discours global.
Cet effort de communication en l’espèce s’inscrit dans le cadre des règles d’intervention économique. La promotion du tourisme exige des investissements extrêmement lourds, par exemple en matière d’hôtellerie ou de parc de loisirs ou d’attractions. Ces investissements relèvent très clairement de la responsabilité économique, qui, en vertu de la tradition et peut-être même de la loi, appartient aux régions. Celles-ci sont parfaitement dans leur rôle de chef de file et de décideur des efforts qu’elles font en faveur de l’investissement touristique.
Cependant, l’investissement touristique ne se confond pas avec les volets promotion et animation de l’action touristique. En effet, si la promotion touristique suppose de l’argent, l’animation touristique suppose de surcroît, quant à elle, un engagement des populations en plus de l’argent. Nous sommes tous témoins d’initiatives musicales, théâtrales, de reconstitutions historiques, etc., qui animent le tourisme local. Or elles n’existent que grâce à l’implication des populations locales, soutenues par leurs élus locaux.
En conclusion, je me réjouis que tant d’amendements aient été déposés sur l’article 3, car nous allons enfin pouvoir approfondir la question de la complexité de l’action locale et rappeler que la mise en place du concept de chef de file revient en réalité à ne pas décider, alors qu’il eût peut-être été plus intelligent de découper l’action touristique en distinguant d'une part, le volet économique et l’investissement, d'autre part, le volet communication, enfin, le volet animation.
Tout cela est évidemment compliqué, mais, comme l’ont pertinemment rappelé de nombreux collègues, la France est compliquée parce qu’elle est diverse ; la richesse de cette diversité est d'ailleurs l’un des supports du tourisme.
Cela étant, le recours à la notion de chef de file ne nous exonérera pas de l’obligation d’abandonner un jour le principe d’une clause générale de compétence à tous les niveaux et de restituer à chacun de ces niveaux les responsabilités effectives que le bon sens et l’histoire récente conduisent à leur attribuer.
Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, je voudrais vous dire l’attachement au tourisme des départements et de l’Assemblée des départements de France. Je rappelle que le succès de la France en matière de tourisme repose sur la richesse et la diversité de ses territoires et de ses terroirs, qui lui permettent de disposer d’une variété de destinations touristiques que le monde entier lui envie, quoi qu’on en dise.
Convaincus de ces atouts et de l’importance des enjeux, les départements ont créé, avec leurs bras armés, les comités départementaux du tourisme et les agences de développement touristique, un réseau national des destinations départementales. Tous ces acteurs se sont efforcés de faire partager leur ambition et de promouvoir de nouveaux modèles de coopération entre collectivités territoriales, adaptés aux logiques de destination et misant sur l’intelligence territoriale. C’est le point que je souhaitais aborder.
Madame le ministre, les départements peuvent signer des contrats de destination avec l’État. Ces contrats visent à mettre en valeur une destination et souvent un terroir. Par exemple, les départements de l’Aube et de la Marne discutent localement de la destination Champagne. Cela correspond véritablement à une représentation territoriale, à laquelle l’Aisne est elle aussi associée. La Champagne n’est pas une destination régionale : la région Champagne-Ardenne est constituée de départements différents, avec des terroirs différents ; la Champagne est transrégionale, puisqu’elle est à cheval sur deux régions et quatre départements. Vous faites la promotion de ces contrats de destination, ce qui montre bien que les départements sont incontournables dans le domaine du tourisme.
Je tiens à rappeler que, dans mon département, le tourisme représente plus de 7 000 emplois directs et 12 000 emplois au total, 500 millions d'euros de chiffre d’affaires, 1 200 prestataires touristiques, 1, 7 million de nuitées et 6 millions de visites par an. Nous n’obtenons de tels résultats que parce que la compétence est organisée en plus d’être largement partagée.
Dans le domaine de la promotion, on peut très bien imaginer – je rejoins les propos de Gérard Longuet – de distinguer une promotion locale, sous l’égide des syndicats d’initiative ou des offices de tourisme, dont la compétence est reliée aux communes, une promotion nationale, confiée aux comités départementaux du tourisme, qui interviennent en appui, et une promotion internationale, mise en œuvre par les comités régionaux du tourisme, le tout encadré – nous n’y échapperons pas – par Maison de France et Atout France, qui assureraient la coordination et la cohésion des différentes politiques ; cela constituerait une avancée, une clarification.
Ce n’est pas la notion de chef de file qui va changer les choses. Je pense qu’il est plus important de répartir de manière pragmatique les différents thèmes, par exemple la promotion ou les investissements, afin de rendre l’ensemble plus cohérent. Cependant, il est également important de rappeler que les départements sont attachés au secteur du tourisme.
La commission a affirmé que le développement touristique pourrait être soutenu à différents niveaux et que chacun s’y retrouverait, mais j’éprouve quelques difficultés à la suivre. Il me semble qu’il existe une contradiction entre les articles 3 et 31 du projet de loi. En effet, l’article 3 précise que la région est chef de file en matière de « développements économique et touristique », mais l’article 31 mentionne la « promotion du tourisme » parmi les compétences des métropoles. Selon la commission, il n’y a pas d’inquiétude à avoir, chacun retrouvera ses petits ; mais, pour ma part, je ne les retrouve pas !
Dans ma région, plus particulièrement dans mon département, les Alpes-Maritimes, l’industrie touristique est une industrie lourde. En effet, ce département est, après Paris, le département français qui a le mieux magnifié le tourisme. Nous souhaitons donc continuer à posséder totalement la compétence en ce domaine.
Cela étant, j’ai besoin d’éclaircissements sur ce sujet.
Après avoir réintroduit la clause de compétence générale à l’article 2, nous nous apprêtons à atténuer et encadrer ce principe. Pourquoi pas ? Mais je voudrais tout de même faire quelques observations.
Quelle est la définition du chef de file ? Un doute ne subsisterait-il pas ? On précise, aux alinéas 2, 3 et 4 de l’article 3 que la région, le département et la commune agissent « en qualité de chef de file ». Je voudrais que nous réfléchissions ensemble. Quelle est la responsabilité du chef de file ? Quelles sanctions encourt-il s’il est défaillant dans sa mission d’organisation des modalités de l’action commune ?
Quant à l’alinéa 5, que je trouve contradictoire avec les alinéas 2, 3 et 4, il précise que « les modalités de l’action commune des collectivités territoriales et de leurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre pour l’exercice des compétences mentionnées aux alinéas précédents sont définies par la conférence territoriale de l’action publique ». Comment s’articule cet alinéa avec les précédents, qui disposent que la région, le département et la commune sont chargés « d’organiser, en qualité de chef de file, les modalités de l’action commune » ? Ces dispositions me semblent source non pas de simplification et de lisibilité, mais de complexité.
Par ailleurs, que se passera-t-il si la conférence territoriale de l’action publique, qui est chargée de définir les modalités de l’action commune, n’est pas en phase avec la région, le département ou la commune, qui sont chargés d’organiser les modalités de l’action commune ? Je souhaite obtenir quelques précisions sur ce point.
Enfin, vous avez rappelé qu’aucune collectivité territoriale ne pouvait – et c’est heureux – exercer de tutelle sur une autre, mais que se passera-t-il si une collectivité est en désaccord avec celle qui est chargée d’organiser les modalités de l’action commune ?
Avec cet article 3, nous sommes en train de faire la démonstration que ce projet de loi est empli de contradictions. Vous avez beau faire un concentré de ces contradictions dans l’article 3, cela ne règle pas les modalités pratiques de l’organisation et de la décision.
La tonalité de mon propos sera légèrement différente. Tout à l'heure, je me suis opposé à l’article 2. On sent bien que l’article 3 vise à nuancer l’article 2 : puisqu’on a rendu la clause de compétence générale à tout le monde, on précise quand même qui est chef de file et pour quoi. En clair, on vous donne la clause de compétence générale, mais n’en abusez pas ! Quelqu'un devra tenir les manettes.
Soyons francs : il n’y a pas de définition unique du chef de file. On s’empresse de dire que c’est non pas un chef, mais un organisateur, un coordonnateur de file. Ainsi, on ne gêne personne, ni les communes, ni les départements. Conservons les termes « chef de file », puisque nous nous sommes habitués à cette expression absolument abominable qu’est « chef de filat ». Je peux vous l’assurer, quand vous l’employez dans une réunion publique, vous faites un triomphe…
Je voudrais rappeler, même si on le répète depuis hier, que la coordination entre les collectivités se fait de manière assez simple. Même si on a déjà défini dans le passé la notion de chef de file, on pourrait recommencer, mais, à mes yeux, il s’agit vraiment d’un succédané à l’absence de définition de blocs de compétences, ce qui me semble un peu réducteur et limité.
En revanche, à partir du moment où la notion de chef de file est acceptée, je n’ai aucun état d’âme sur le sujet.
S’agissant du tourisme, je serais assez sur la même ligne que mon collègue Gérard Longuet. Si l’on voulait être courageux, on dirait que, en matière d’investissement et de dépenses lourdes, la région est chef de file, tandis que, pour ce qui concerne la promotion de projets locaux, le niveau local est plus adapté. Si l’on ne parvient pas à ce partage, mes chers collègues, et je m’adresse surtout aux présidents de conseils généraux, laissons faire la région. Mes chers collègues de la région capitale, excusez-moi de vous le dire, mais on vend non pas l’Île-de-France, …
… mais Paris ou la région parisienne, voire le Grand Paris un jour.
Ce qui est sûr, c’est que pour faire venir des dizaines de milliers de touristes du Japon, de Chine ou des États-Unis, il ne s’agit pas – je parle sous le contrôle de Jean-Vincent Placé – de leur parler de l’Essonne, car cela ne leur dit rien.
En réalité, c’est plus compliqué : les agences attirent les touristes avec Paris, puis les emmènent voir d’autres sites de la région. Il y a quelques points forts, tels que Versailles ou Eurodisney.
Cela dit, j’ai essayé de retrouver avec Gérard Longuet la date de création des organes décentralisés chargés du tourisme, qui doit remonter à une bonne quinzaine d’années. La loi a donc prévu des comités régionaux du tourisme, les CRT, et des comités départementaux du tourisme, les CDT. Les relations sont parfois compliquées entre ces organismes, mais elles démontrent une certaine coordination, des habitudes de travail.
Si l’on ne mène pas jusqu’au bout ce travail de partage, évoqué par Gérard Longuet, entre la promotion et l’investissement, je pense qu’il est préférable d’en rester à l’actuelle répartition entre le CRT et les CDT. Sinon, on risque de remettre en cause tout le dispositif.
Mes chers collègues, pour avoir étudié les derniers chiffres du tourisme à Paris, je peux vous dire qu’ils sont en baisse, alors que la capitale était largement en tête des grandes villes visitées. Le pôle de développement touristique de Paris est maintenant dépassé par celui de Londres et le sera probablement par d’autres si la situation perdure. Il me semble que le vrai sujet est là ! L’important n’est pas de savoir qui sera techniquement chef de file en matière de tourisme, mais d’avoir un accueil, une qualité de service qui permettent à notre pays de redevenir la première destination touristique d’Europe.
Je suis légèrement inquiet. En effet, une quarantaine d’amendements portent sur l’article 3 et sur la notion de chef de file. Seul problème : cette notion, un peu fumeuse, n’est pas définie juridiquement.
Est-ce vraiment la peine de se battre sur quarante amendements, alors que cette notion ne veut juridiquement rien dire ? D’ailleurs des recherches juridiques nous montrent qu’une seule décision du Conseil constitutionnel s’y rapporte.
Je n’ai pas dit que c’était vous. J’ai reconnu que cette création nous incombait.
Soit vous êtes meilleurs, et vous restez, soit vous êtes moins bons, et nous revenons aux affaires. Il faut choisir ! §Monsieur Sueur, si vous pensez être moins bons que nous, laissez-nous la place !
Il n’y a donc qu’une seule décision du Conseil constitutionnel, qui porte sur des cas individuels. Selon cette juridiction, lorsque plusieurs collectivités sont d’accord pour mener ensemble une politique, elles peuvent désigner un chef de file.
Mais ce n’est pas ce que prévoit l’article 3.
Mesdames les ministres, le Gouvernement a bien senti la difficulté, et je l’en félicite.
S’il est créé un vrai chef de file, nous nous heurtons tout de suite à un autre principe constitutionnel qui interdit à une collectivité d’exercer une tutelle sur une autre.
Le chef de file organise l’action commune – cette indication figure à plusieurs reprises dans le projet de loi –, ce qui nécessite d’avoir décidé au préalable que l’action sera commune. Ensuite, seulement, est désigné un chef de file.
On ne peut pas avancer ainsi, sans savoir si cette notion sert à quelque chose ou a un sens juridique. À défaut, on va faire comme on le sent, si je puis m’exprimer ainsi, et, un beau jour, il y aura bien un juge pour décider.
Est-ce le rôle du Parlement de laisser les chantiers inaboutis en attendant qu’un juge les termine ? Je ne le pense pas. Pourtant, c’est ce que nous sommes en train de faire, ce que je regrette un peu.
Je vais essayer de revenir sur un des secteurs pavés que j’avais bien identifié, convenez-en !
Monsieur Karoutchi, vous êtes d’une injustice flagrante…
… à l’égard du Premier ministre Jean-Pierre Raffarin et de la révision constitutionnelle qu’il avait initiée.
Je défends l’ancien Premier ministre, car, en 2009, la Cour des comptes avait estimé que la notion de chef de file était apparue « comme un instrument d’ordre et de mise en cohérence qui permet de remédier à l’éclatement des compétences décentralisées et à l’intangibilité de leur répartition ».
Pour que vous ayez les bonnes informations, je tiens à souligner que le débat s’est déroulé en 2010 avec la même intensité. Or je me souviens que vous l’aviez conclu en plaçant le tourisme, avec le sport et la culture, dans le domaine où vous aviez admis un partage des rôles.
Je n’aurai pas l’audace de vous rappeler que le juge constitutionnel a dit avec force qu’un chef de file n’a ni qualité ni titre pour exercer une quelconque autorité à l’égard des collectivités territoriales qui exercent une partie de la compétence. C’est logique : il n’y aurait pas de chef de file si la compétence n’était pas partagée.
Effectivement, ce domaine méritait qu’on essayât de le clarifier. La position de sagesse – ce qui ne signifie pas que la navette ne se poursuit pas –, arrêtée lors de la dernière réunion de la commission des lois, qui, je le rappelle, a duré une quinzaine d’heures, est que, en matière de tourisme, on n’identifie pas de chef de filat.
Ensuite, il a été admis que le problème méritait d’être approfondi à l’occasion de la navette, non pas pour revenir sur ce que je viens de dire, mais pour décider s’il convenait en plus, comme le suggère non sans pertinence M. Longuet, d’identifier des fonctions plus précisément.
En lisant assidûment Le Télégramme de Brest ces derniers temps – je parle sous le contrôle de Mme la ministre et de M. de Legge –, j’ai pu me rendre compte que la marque « Bretagne » était reprise par des centaines d’entreprises.
Je vois bien que la promotion internationale repose sur des stratégies de développement économique portées par le conseil régional concerné.
Par ailleurs, je n’ignore rien – à cet égard, je tiens à rendre hommage à M. Cazeau pour la qualité de son intervention – de ce que cela représente pour les départements.
Pour éviter de passer des heures à discuter de ce sujet pour rien comme nous l’avons fait en 2010, je réaffirme avec force la position de la commission des lois : nous ne retirons rien, y compris à Nice, des compétences actuellement exercées, à quelque échelon que ce soit, puisque la compétence est partagée par nature !
De plus, nous avons choisi, comme pour le sport et la culture, sur le modèle de ce qui avait été fait en 2010, de ne pas identifier de chef de filat en matière de tourisme, afin de donner une preuve surabondante du fait qu’il n’existe pas de risque de modification du partage des compétences. §
Si vous aviez un peu d’indulgence pour votre rapporteur, vous pourriez dès lors considérer que mes explications contribuent à vous satisfaire, donc à faire tomber quelques amendements, ce qui nous permettrait d’avancer dans la discussion.
Quoi qu’en ait dit notre rapporteur, il me semble néanmoins que, dès lors qu’une collectivité est nommée chef de file, nous devons à nos concitoyens de gagner en clarté, en lisibilité, en visibilité.
Encore une fois, je ne vais pas vous apprendre, mes chers collègues, que nos concitoyens se désintéressent manifestement de la chose publique car ils n’y comprennent rien.
Il faut donc que nous gagnions en simplicité, j’oserais dire en simplification. Rappelez-vous le choc dont parlait le Président de la République. À cet égard, permettez-moi de militer très sincèrement en sa faveur.
J’examinerai maintenant très rapidement les trois strates de collectivités et la façon dont elles sont traitées dans l’article 3.
Pour ce qui concerne la région, je donne un satisfecit à la commission des lois et, en premier lieu, à son rapporteur, car j’ai le sentiment que nous sommes arrivés à déterminer un bloc de compétences assez lisible. À la suite de M. Vandierendonck, je tiens à préciser que le développement touristique, qui constitue un axe fort du développement économique, mérite assurément d’être traité en même temps. Comme l’ont déjà indiqué certains orateurs, notamment M. Karoutchi, il est évident qu’il faut prendre en compte ce flux dans le cadre des richesses d’une région.
Quant au bloc de compétences du département, constitué principalement de l’action sociale, de la cohésion sociale, de l’autonomie des personnes et de la solidarité des territoires, j’accorderai à peu près le même satisfecit.
En revanche, je suis plus circonspect – ce point fera d’ailleurs l’objet d’un amendement que j’ai déposé – pour ce qui concerne l’aménagement numérique du territoire.
Par souci de cohérence, n’aurait-il pas mieux valu placer cette compétence avec celles qui sont relatives à l’aménagement et au développement durable du territoire, aux développements économique et touristique, et ne pas l’attribuer au département, comme le prévoit le texte ?
Pour une raison thématique, il serait souhaitable que l’aménagement numérique relève du niveau régional, qui me semble plus adapté. En effet, est-il bien opportun qu’il y ait un schéma des infrastructures numériques à l’échelon départemental ?
Je me souviens que, en Alsace – on va encore me reprocher une vision propre à ma région –, les deux départements ont eu une approche différente dans un passé assez récent : l’un a pris position pour la fibre optique, tandis que l’autre a fait le choix de la technologie WiMAX. Imaginez-vous ce qui se passe pour des plates-formes d’activités à cheval sur les deux départements confrontés à un vrai souci ? Je proposerai donc que l’on transfère cette compétence vers la région, sans priver pour autant le département de la possibilité de s’intégrer dans les grands axes de ce schéma régional et de procéder ensuite par capillarité. Mais il revient à la région d’élaborer, de concevoir et de financer les grandes orientations de ce schéma.
En Alsace, c’est facile, on est en train de réaliser un fishbone, une arête dorsale, du nord au sud. Les départements se chargent de capillariser et les communautés de communes font le reste. Je ne peux pas imaginer ce processus se dérouler autrement.
Enfin, s’agissant des communes, j’accorderai un nouveau satisfecit au rapporteur de la commission des lois. Malgré les difficultés qui ont d’ores et déjà été énoncées tout à l'heure, un bloc de compétences relativement homogène se dessine, regroupant l’accès aux services publics de proximité, le développement local et l’aménagement de l’espace, même si sur ce dernier domaine, je suis un peu plus réservé, parce qu’il recouvre de nombreux sujets.
Cela étant, mes chers collègues, pour terminer, je soulignerai que la rédaction actuelle de l’article 3 est tout de même bien meilleure que sa première version, qui évoquait les compétences de la commune en matière de qualité de l’air et de mobilité durable ! §
Pendant dix-huit ans, j’ai été maire d’une commune de 8 000 habitants dont le nom est imprononçable :…
… Souffelweyersheim. Si j’avais dû intervenir dans le domaine de la qualité de l’air, madame la ministre, je me serais trouvé en grande difficulté !
Évitons de nous faire peur ! Tous, nous exerçons déjà un rôle de chef de file au sens le plus fort. Dans le cadre, par exemple, de la réalisation d’un équipement qui nécessite la participation de différents acteurs publics ayant la personnalité morale, que ce soit l’État ou les collectivités, que faisons-nous, la plupart du temps ? Nous désignons contractuellement un maître d’ouvrage !
Cet acte correspond à la fonction du chef de filat dans sa version la plus extrême, il se trouve même quasiment au-delà de l’organisation. Nous pratiquons cela tous les jours ! Pourquoi instaurer un décalage entre un texte et ce que nous faisons déjà ? §
Mes chers collègues, nos concitoyens ont besoin, au moins autant que de visibilité, de se sentir soutenus dans leurs projets. Je me passerais bien de cette notion de chef de file, mais elle ne mérite ni cet excès d’honneur ni cette indignité.
De quoi est-il question ? Dans un certain nombre de domaines, différents niveaux d’intervention se justifient. Dans le secteur du tourisme, qui est assez représentatif de ce point de vue, c’est à l’échelon des départements que les dépenses, la coordination et la densité des interventions sont les plus fortes. On ne va quand même pas s’en passer ! En revanche, la promotion internationale de la France sera plutôt du ressort de la région. Les touristes de New-York viennent visiter non pas la Bourgogne ou les châteaux de la Loire, mais la France, tandis que ceux de Pékin viennent plutôt visiter l’Europe, et, accessoirement, Bruxelles, Paris, Rome, etc.
Cela dit, l’idée, complémentaire, d’essayer d’inciter les différents acteurs d’un projet à se consulter, voire de charger l’un d’entre eux de la responsabilité d’organiser la coopération et la concertation afin de tenter de trouver un accord sur des projets communs n’est tout de même pas absurde !
Finalement, la commission a fait le choix d’organiser la concertation, de faire confiance aux acteurs pour s’entendre et pour essayer de rendre leurs actions le plus rationnel possible, tout en s’interdisant de leur imposer des contraintes et de les enfermer dans des schémas qui, à l’usage, se révéleraient contreproductifs. Pour ma part, j’ai l’intime conviction que plus on voudra préciser, plus on introduira de frictions et moins le système fonctionnera.
Il n’y a franchement pas de quoi se battre. La principale crainte, à savoir ne plus pouvoir agir, a été levée. Par conséquent, je crois que nous pouvons trouver un consensus.
Je resterai cohérent avec le vote que j’ai émis sur le rétablissement de la clause de compétence générale. Après l’avoir adopté, vous nous expliquez, mes chers collègues, qu’il faut préciser le rôle de chaque strate territoriale. C’est pour le moins original !
Que prévoit la Constitution ? Le cinquième alinéa de l’article 72 dispose : « Aucune collectivité territoriale ne peut exercer une tutelle sur une autre. »
Monsieur le président de la commission des lois, je sais cela, nous avons d’ailleurs eu un échange officieux tout à l'heure sur ce point !
Mais l’article 72 ne contient pas l’expression « chef de file ». Il indique clairement que « lorsque l’exercice d’une compétence nécessite le concours de plusieurs collectivités territoriales, la loi peut autoriser l’une d’entre elles ou un de leurs groupements à organiser les modalités de leur action ».
La rédaction de l’article 3 du présent projet de loi issue des travaux de la commission des lois constitue, certes, une évolution très positive. À l’instar du Gouvernement dans le texte initial, la commission a retenu le verbe « organiser », présent dans la Constitution, auquel elle a cependant ajouté « en qualité de chef de file », tandis que la Constitution s’arrête à « organiser ».
Peut-être est-ce le juriste qui s’exprime, madame la ministre, …
… mais vous rétablissez d’abord la clause de compétence générale, puis vous instituez un chef de file !
Je comprends bien votre intention cachée, je l’ai déjà indiqué très clairement : vous voulez faire plaisir à chaque strate ! Ce n’est toutefois pas la solution la plus simple et efficace, j’en suis tout à fait convaincu. Pour des raisons que nous connaissons tous et que nous avons un peu de mal à exprimer, on en arrive à ce système flou, qui ne provoquera, certes, pas de catastrophe, madame la ministre, car nous sommes des élus locaux et nous avons l’habitude gérer ce genre de choses ! Néanmoins, il s’agit d’une usine à gaz, je le maintiens, d’autant qu’est ajoutée la conférence territoriale de l’action publique. Encore faut-il que cette usine produise effectivement du gaz…
Vous vous acharnez à instaurer un chef de file, alors qu’une collectivité ne peut exercer de tutelle sur une autre et ne peut pas aller au-delà de l’organisation de l’action. En l’espèce, il faut de la concertation, mais si celle-ci échoue, il n’y a pas de solution, et une collectivité dite « de rang supérieur », refusera toute subvention à celle qui ne veut pas la suivre. Telle est la réalité !
Mlle Sophie Joissains applaudit.
Monsieur Nègre, monsieur Cazeau, je constate que vous souhaitez reprendre la parole. Or les sénateurs qui se sont déjà exprimés sur l’article 3 ne peuvent le faire de nouveau. Je vous invite donc à attendre l’examen des amendements pour intervenir une nouvelle fois.
La parole est à Mme Catherine Tasca, sur l'article.
Comme mon collègue Edmond Hervé, je ne partage pas du tout la défiance dont ont fait preuve certains collègues pendant ce très long débat à l’égard de la notion de chef de file.
Avec ce concept, le texte que nous examinons prend en compte la complexité et l’enchevêtrement des actions publiques menées sur le terrain. Or, très concrètement, il fallait bien trouver une solution pour porter, en quelque sorte, un certain nombre de politiques publiques, non pas isolément, mais à plusieurs. De mon point de vue, l’idée du chef de file ne répond qu’à cette préoccupation.
Il n’y a aucune subordination, aucune mise sous tutelle, voire sous curatelle : des collectivités s’engagent ensemble pour la réalisation d’une politique publique, ce qui est une nécessité aujourd’hui.
Peut-être faudra-t-il préciser juridiquement l’expression « chef de file », qui semble source de tant d’inquiétude. Cela dit, le choix opéré est justifié, et la commission des lois, comme le Gouvernement, a bien travaillé.
Permettez-moi un petit rappel historique : en 2000, mon collègue Michel Duffour, secrétaire d’État au patrimoine et à la décentralisation culturelle, et moi-même avions lancé des protocoles de décentralisation culturelle qui reposaient précisément sur cette notion de chef de file.
Même s’ils ont vécu fort peu de temps, je voudrais témoigner en cet instant qu’il s’agissait d’une méthode de travail tout à fait efficace, rassemblant plusieurs acteurs impliqués dans une politique publique.
Madame la présidente, cette prise de parole au titre d’un rappel au règlement me permet de revenir sur le déroulement de la discussion de l’article 2. Certains de nos collègues, que je ne nommerai pas, ont pris deux fois la parole. L’un d’entre eux a même répété la seconde fois ce qu’il avait dit la première !
Et certains ont dépassé leur temps de parole. J’accepte de me plier à la règle, madame la présidente, mais elle doit être la même pour tous !
Monsieur Cazeau, tel est le cas, et nos collègues qui sont intervenus une seconde fois lors de l’examen de l’article 2 l’ont fait à l’occasion de la discussion des amendements.
La parole est à M. le président de la commission.
(Sourires.) J’ai été sensible à cet adverbe, car je me suis fait une réflexion tout à fait amicale : nous avons examiné vingt-cinq amendements en six heures quarante-cinq !
Nouveaux sourires.
Monsieur Capo-Canellas, lors de votre intervention, que j’ai écoutée avec soin, vous avez indiqué que nous délibérions « vite ». §
Mais je connais les us et coutumes de cette assemblée, et je sais les accélérations qui se produisent parfois, une fois passés les pavés, chers à notre rapporteur, … jusqu’aux suivants !
Par ailleurs, je suis très attaché à la philosophie avec laquelle la commission des lois a abordé ce texte, qui diffère de l’approche qui a présidé à la rédaction de la version initiale. À cet égard, j’ai écouté avec attention l’intervention de M. de Legge.
Vous avez affirmé, mon cher collègue, que le texte qui vous est soumis est peu clair, contradictoire, part dans tous les sens. Mais il faut savoir ce que l’on veut !
Je soutiens fortement l’article 3, tel qu’il résulte des travaux de la commission des lois. Le dispositif proposé est très clair.
Il y a d’abord les compétences dont chaque collectivité dispose, qu’elle exerce.
Il y a ensuite les compétences – vous avez raison, M. Mézard – dévolues à une collectivité parce que la loi lui a conféré la capacité d’organiser les modalités de l’action commune. Toutefois, cette phrase étant un peu complexe, on a choisi une expression qui, il est vrai, n’est pas parfaitement appropriée. Par les termes « chef de filat », que je n’aime pas beaucoup, on désigne une collectivité dont la tâche consiste uniquement à organiser les modalités de l’action commune des collectivités territoriales.
S’agissant des autres compétences, les collectivités et les élus, dans la grande liberté qui est la leur, peuvent se mettre d’accord et passer des conventions.
La commission des lois a choisi – c’est l’un des points les plus importants du présent texte, sur lequel nous reviendrons ultérieurement – d’inscrire, d’une part, qu’il ne pouvait y avoir transfert du département vers une autre collectivité sans qu’il y ait convention et, d’autre part, qu’il ne pouvait y avoir changement du statut d’une collectivité sans qu’il y ait une décision volontaire.
Selon moi, il y a deux logiques : une logique simple, qui laisse une grande place à l’initiative des élus représentant les Français, et une autre, qui consiste à organiser des structures qui définissent les schémas, lesquels, décidés au sein de conférences, de conseils, aboutissent à des constructions.
Je veux répondre très cordialement à M. de Legge que s’il estime que la première logique n’est pas assez structurée, il peut revenir à la seconde. Mais la commission des lois a choisi, à l’unanimité, de suivre la première logique.
Je profite de cette occasion pour remercier M. Reichardt de sa contribution. J’indique que la commission a amélioré le texte quant à la répartition des compétences : chaque niveau de collectivité aura la responsabilité d’organiser les modalités de l’action commune.
Cher Bernard Cazeau, on voit très bien vers quoi on se dirige. Pour ce qui concerne le tourisme, tout a été dit par nos collègues, et ce d’une manière remarquable d’ailleurs. Tout le monde le comprend bien, les régions jouent un rôle important. Des entités comme la Bretagne, l’Alsace, les pays de la Loire sont connues dans le monde entier et attirent les Japonais ou encore les Chinois. Mais les départements, proches des réalités de terrain, ont aussi un rôle absolument irremplaçable. L’action des unes est plutôt tournée vers l’international, alors que celle des autres se fonde sur une solide expérience.
C’est vrai, monsieur Cazeau, ce qui a été fait pour la grotte de Lascaux, qui est connue et visitée par des touristes du monde entier, est très important pour le rayonnement international de la France. Il en est de même des nombreux festivals qui sont organisés.
Notre débat, quoiqu’un peu long, est passionnant. Il nous a permis de comprendre les choses de manière assez claire et porte en son sein les conclusions. Aussi, je tiens à remercier tous nos collègues qui y ont participé.
Je suis saisie de trente-sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 732 rectifié, présenté par M. Patriat, Mme Espagnac, MM. Le Vern, Besson et Percheron, Mme Génisson, M. Fauconnier et Mme Herviaux, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer cet alinéa par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 1111 -9. – I. – La région est chargée de déterminer les priorités et d’organiser, en qualité de chef de file, les modalités de l’action commune des collectivités territoriales et de leurs établissements publics pour l’exercice des compétences relatives :
« 1° Au développement économique, y compris l’innovation, l’internationalisation et les aides aux entreprises, le développement touristique, de l’artisanat et de l’économie sociale et solidaire ;
« 2° À l’orientation, la formation et l’accompagnement vers l’emploi ;
« 3° À l’aménagement et au développement durable du territoire, y compris l’aménagement numérique et la biodiversité ;
« 4° À l’organisation des transports.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 384 rectifié est présenté par MM. C. Bourquin, Bertrand et Collombat.
L'amendement n° 731 rectifié est présenté par M. Patriat, Mme Génisson, MM. Percheron et Le Vern, Mme Espagnac, MM. Fauconnier et Besson et Mme Herviaux.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 2
Remplacer les mots :
d’organiser, en qualité de chef de file, les modalités de l’action
par les mots :
, en qualité de chef de file, de déterminer les priorités et d’organiser l’action
II. – Alinéa 3
Remplacer les mots :
d’organiser, en qualité de chef de file, les modalités de l’action
par les mots :
, en qualité de chef de file, de déterminer les priorités et d’organiser l’action
III. – Alinéa 4
Remplacer les mots :
d’organiser, en qualité de chef de file, les modalités de l’action
par les mots :
, en qualité de chef de file, de déterminer les priorités et d’organiser l’action
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour présenter l’amendement n° 384 rectifié.
Cet amendement vise à instituer le département comme chef de file en matière de tourisme.
L’amendement n° 731 rectifié n’est pas soutenu.
L'amendement n° 436, présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 2 à 4
Remplacer les mots :
d’organiser, en qualité de chef de file, les modalités de l'action
par les mots :
de coordonner l'action
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
L’article 3 désigne parmi chaque catégorie de collectivités territoriales un chef de file pour la mise en œuvre de plusieurs compétences nécessitant l’intervention de plusieurs collectivités territoriales.
Avec la notion de « chef de file » – j’emploie cette expression, car je n’aime pas celle de « chef de filat » –, il s’agit d’établir qu’une collectivité exerce la mission d’autorité coordinatrice de la compétence identifiée par la loi.
Nous persistons à penser que cette conception particulièrement floue crée une ambiguïté entre la volonté de coopération et les relations autoritaires entre les collectivités. Cela entraîne des difficultés de compréhension et ouvre la voie à des pratiques variées sur le territoire national, rompant ainsi avec le principe de l’égalité républicaine. De plus, cela risque de créer des contentieux entre les collectivités.
Qui plus est, donner, dans ces conditions, à la région, au département ou à la commune la compétence d’organiser les modalités de l’action des autres collectivités territoriales dans certains domaines semble, malgré les affirmations du Gouvernement, contraire au principe de libre administration de celles-ci comme au principe constitutionnel de non-tutelle d’une collectivité sur une autre.
Aucune limite n’est définie dans la loi pour encadrer cette notion et éviter, dans la pratique, que des mécanismes autoritaires ne soient mis en œuvre.
Pour autant, nous le concédons, il est néanmoins nécessaire de coordonner les politiques publiques. Comme vous affirmez la volonté de définir une collectivité comme autorité organisatrice, nous considérons que c’est la notion de coopération, plus ouverte, qui doit être retenue dans la loi.
Eu égard aux compétences actuellement dévolues aux communes, aux départements et aux régions, il nous semble préférable de préciser que chacun de ces échelons coordonne ses actions avec celles des autres collectivités, sans apporter plus de précision, laissant ainsi les collectivités mettre elles-mêmes en place les modalités de la coopération et de la coordination qu’elles jugeront souhaitables dans les domaines dans lesquels des collectivités de niveaux différents sont appelées à intervenir.
Il s’agit, au final, de respecter pleinement le principe de compétence générale, rétabli dans ce projet de loi, pour l’ensemble des collectivités publiques.
En outre, en affirmant dans la loi le principe de libre coopération, nous instituons une vision souple des liens qui doivent unir les différentes collectivités territoriales, dans le respect des compétences de chacune.
L'amendement n° 233 rectifié bis, présenté par MM. Dubois, Maurey, Arthuis, J. Boyer, J.L. Dupont et Roche, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Après le mot :
territoire,
insérer les mots :
au soutien aux investissements des communes de plus de 20 000 habitants et des établissements publics de coopération intercommunale de plus de 50 000 habitants,
II. - Alinéa 3
Remplacer les mots :
et à la solidarité des territoires
par les mots :
, à la solidarité des territoires et au soutien aux investissements des communes de moins de 20 000 habitants et des établissements publics de coopération intercommunale de moins de 50 000 habitants
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 733 rectifié, présenté par MM. Patriat, Le Vern et Percheron, Mme Génisson, M. Besson, Mme Espagnac, M. Fauconnier et Mme Herviaux, est ainsi libellé :
Alinéa 2
après les mots :
du territoire
insérer les mots :
, y compris l’aménagement numérique et la biodiversité,
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 386 rectifié bis est présenté par MM. C. Bourquin et Bertrand.
L'amendement n° 666 rectifié bis est présenté par Mme Lipietz, MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2
Après le mot :
territoire
insérer les mots :
à la biodiversité,
L’amendement n° 386 rectifié bis n’est pas soutenu.
La parole est à M. Ronan Dantec, pour présenter l’amendement n° 666 rectifié bis.
Cet amendement vise à compléter les compétences accordées à la région en tant que chef de file en y ajoutant la biodiversité.
Conformément au Grenelle de l’environnement, il est aujourd'hui demandé à la région d’élaborer une trame verte et bleue, car la biodiversité ne respecte pas les frontières administratives départementales, intercommunales ou communales – je n’entrerai pas dans le débat concernant les différents niveaux de collectivité. Il importe que celle-ci ait une vision d’ensemble.
Aussi, il semble tout à fait logique d’ajouter la biodiversité aux compétences exercées par la région en qualité de chef de file.
L'amendement n° 685, présenté par Mme Lipietz, MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots:
développement durable du territoire,
insérer les mots :
à l'énergie et au climat,
La parole est à M. Ronan Dantec.
Cet amendement vise, lui aussi, à ajouter aux compétences de la région en tant que chef de file celles qui sont relatives à l’énergie et au climat.
Il n’est pas nécessaire de dire aujourd'hui à quel point les enjeux de la transition énergétique et de la lutte contre le changement climatique sont majeurs. Le groupe de travail « gouvernance » du débat national sur la transition énergétique que j’ai eu l’honneur de présider est parvenu à un consensus, y compris entre des personnes proches du MEDEF et de la CGT, sur les propositions soutenues par les réseaux de collectivités locales. Il a formulé des propositions très consensuelles.
C’est pourquoi nous vous proposerons un certain nombre d’amendements, sur lesquels nous reviendrons lors de la discussion sur les métropoles et les communautés urbaines. Nous plébiscitons aujourd'hui une organisation, à l’échelle régionale, du schéma régional climat air énergie, le fameux SRCAE, que la plupart d’entre vous connaissent, et aussi, à l’échelon du bloc communal, du plan climat-énergie territorial, le PCET.
Dans cette logique de consensus, portés par le travail collectif des réseaux de collectivités locales et les échanges que nous avons eus avec les autres acteurs engagés dans la transition énergétique, nous vous proposons, mes chers collègues, d’ajouter la compétence relative à l’énergie et au climat à celles que détient la région en qualité de chef de file.
L'amendement n° 314 rectifié, présenté par MM. Baylet, Mézard, Alfonsi, Barbier, Chevènement, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vendasi, Vall et Mazars, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Remplacer les mots :
aux développements économique et touristique
par les mots :
au développement économique
II. – Alinéa 3
Après les mots :
personnes,
insérer les mots :
au tourisme,
La parole est à M. Jacques Mézard.
Cet amendement, cher à notre collègue Jean-Michel Baylet, concerne les modalités d’organisation de la concertation entre les collectivités dans le domaine du tourisme.
La clause générale de compétence a été rétablie à tous les niveaux. Aujourd'hui, le département joue, bien sûr, un rôle évident et éminent dans le développement touristique. Dès lors que le présent projet de loi vise très clairement l’organisation des modalités d’action commune, nous considérons que, dans ce domaine, le département doit être chargé de cette organisation, car cela permettra de mieux structurer et coordonner la politique touristique au plus près des acteurs de ce secteur et des professionnels.
Nous pourrons trouver une solution, grâce à laquelle les choses resteront en l’état, ce qui est souvent le meilleur moyen de régler les problèmes. §
Nouveaux sourires.
L'amendement n° 826, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2
Remplacer les mots :
aux développements économique et touristique
par les mots :
au développement économique
II. - Alinéa 3
Après les mots :
à l'aménagement numérique
insérer les mots :
, au tourisme
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Cet amendement, qui rejoint celui que vient de présenter Jacques Mézard, vise à confier la responsabilité de chef de file en matière de tourisme au département. Les longs débats qui ont d’ores et déjà eu lieu sur ce sujet ont montré l’importance de clarifier le rôle du département dans le tourisme de proximité.
Je suis saisie de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 15 rectifié ter est présenté par MM. Adnot, Bernard-Reymond, Darniche, Huré, Pinton, Savary, Sido, Détraigne, Béchu, Bas, Retailleau, Doligé, Laménie, P. Leroy, Dériot et Pointereau.
L'amendement n° 241 rectifié ter est présenté par MM. Cazeau, Boutant, Mazuir, Jeannerot, Daudigny et Miquel, Mmes Nicoux et Bonnefoy, MM. Chastan, Bérit-Débat, Eblé, Mirassou, Auban, Rainaud, Vairetto, Le Menn et Marc, Mme Blondin, M. Lozach, Mme Durrieu, MM. Camani, Rome et Labazée et Mme Bataille.
L'amendement n° 248 rectifié est présenté par MM. Roche, Namy, Arthuis, Savary, Guerriau, J. Boyer, Lasserre et Dubois et Mmes Férat et Goy-Chavent.
L'amendement n° 438 est présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
aux développements économique et touristique
par les mots :
au développement économique
La parole est à M. René-Paul Savary, pour présenter l’amendement n° 15 rectifié ter.
La parole est à M. Bernard Cazeau, pour présenter l'amendement n° 241 rectifié ter.
La parole est à M. René-Paul Savary, pour présenter l'amendement n° 248 rectifié.
La parole est à M. Christian Favier, pour présenter l'amendement n° 438.
Eu égard au débat relatif à la difficulté de définir précisément quelle collectivité pourrait avoir la légitimité d’être chef de file en matière de tourisme, nous considérons que cette compétence doit être partagée entre la région, le département et les communes, chaque collectivité l’exerçant à son niveau, avec une dimension particulière.
Au même titre que pour la culture ou les sports, il ne nous semble pas forcément nécessaire de désigner un chef de file particulier. Nous préférons nous en tenir à une compétence partagée.
Pour autant, si l’amendement du Gouvernement visant à rétablir le texte initial pour ce qui concerne le tourisme était adopté, nous nous y rallierions.
L'amendement n° 385 rectifié, présenté par MM. C. Bourquin et Bertrand, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
aux développements économique et touristique
par les mots :
au développement économique, à l’orientation, la formation et l’accompagnement vers l’emploi, au développement touristique
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 367, présenté par M. Collombat, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2
Remplacer les mots :
économique et touristique
par les mots :
économiques et à l'emploi, à l'aménagement numérique
II. - Alinéa 3
Remplacer les mots :
à l'aménagement numérique
par les mots :
au tourisme
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
En matière de tourisme, nous considérons judicieux que le département soit chef de file. Toutefois, la proposition de la commission visant à ne désigner aucune collectivité paraît encore meilleure.
En revanche, la situation est différente pour ce qui concerne l’aménagement numérique. Si l’aménagement terminal pourrait être confié aux départements, les décisions stratégiques, majeures concernant les grandes autoroutes de l’information, l’équipement de secteurs économiques, pourraient relever de la compétence des régions.
L’aménagement numérique, assure certes un service – offrir une connexion de qualité pour les ordinateurs, par exemple –, mais joue aussi un rôle dans le développement économique. En la matière, la qualité des liaisons numériques est tout à fait essentielle.
L'amendement n° 735 rectifié, présenté par M. Patriat, Mme Génisson, MM. Percheron et Anziani, Mme Espagnac, MM. Le Vern et Fauconnier et Mme Herviaux, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
touristique
insérer les mots :
, à l’orientation, la formation et l’accompagnement vers l’emploi
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 734 rectifié, présenté par M. Patriat, Mme Génisson, MM. Percheron, Besson, Le Vern et Fauconnier, Mme Espagnac, M. Anziani et Mme Herviaux, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
touristique
insérer les mots :
, y compris l’internationalisation et les aides aux entreprises, le développement de l’artisanat et de l’économie sociale et solidaire,
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 736 rectifié, présenté par M. Patriat, Mme Génisson, MM. Percheron et Besson, Mme Espagnac, MM. Le Vern et Fauconnier et Mme Herviaux, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
à l’innovation
insérer les mots :
, à l’internationalisation des entreprises
Cet amendement n'est pas soutenu.
Au nom du Gouvernement, j’en reprends le texte, madame la présidente.
Je suis donc saisie d’un amendement n° 908, présenté par le Gouvernement, dont le libellé est strictement identique à celui de l’amendement n° 736 rectifié.
Vous avez la parole pour le défendre, madame la ministre.
Cet amendement tend à compléter la liste des compétences pour laquelle la région est chargée, en qualité de chef de file, d’organiser les modalités de l’action, et à ajouter l’internationalisation des entreprises, qui présente un enjeu extrêmement important. Le Gouvernement souhaite que cet amendement soit adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 632 rectifié est présenté par MM. Reichardt et Grignon, Mme Sittler, MM. Houel, J. Gautier et Gaillard, Mme Mélot et MM. Pointereau, Paul, Ferrand, Vial et Bordier.
L'amendement n° 671 est présenté par Mme Lipietz, MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. - Alinéa 2
Compléter cet alinéa par les mots :
, et à l'aménagement numérique
II. - Alinéa 3
Supprimer les mots :
, à l'aménagement numérique
L’amendement n° 632 rectifié n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Hélène Lipietz, pour présenter l'amendement n° 671.
Cet amendement vise à confier l’aménagement numérique à la région, en qualité que chef de file.
Nous n’en disconvenons pas, les départements ont fourni des efforts extraordinaires en la matière. La Seine-et-Marne a notamment été en pointe.
Mais l’actuel aménagement numérique correspond à celui qui a été effectué en 2010. Comme la loi ne doit pas varier tous les jours, nous devons anticiper les changements techniques qui interviendront à l’avenir. Ils seront peut-être coûteux, notamment eu égard à la nécessaire uniformisation.
Toutefois, afin que l’aménagement numérique du futur soit mis en œuvre le plus rapidement possible, il serait bon que les régions puissent coordonner les actions, inciter la prise de mesures adéquates.
L'amendement n° 675, présenté par Mme Lipietz, MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par les mots :
, et à la jeunesse
La parole est à Mme Hélène Lipietz.
Puisque la région dispose déjà de compétences en matière de gestion des lycées, de formation continue, d’apprentissage, notamment, il nous paraît judicieux que les compétences transversales liées à la jeunesse lui soient confiées, en sa qualité de chef de filat.
L'amendement n° 667, présenté par Mme Lipietz, MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La région établit un Agenda 21 régional tel que défini au IV de l'article L. 110-1 du code de l'environnement.
La parole est à Mme Hélène Lipietz.
L’Agenda 21, prévu par le code de l’environnement, comporte une forte dimension participative. Mais son élaboration, procédure lourde, nécessite que les collectivités territoriales organisent de nombreuses réunions, y consacrent beaucoup de temps. Désigner la région comme chef de file pourrait aider les plus petites d’entre elles. En effet, la région pourrait leur donner les éléments techniques procéduraux. Un tel accompagnement paraît particulièrement pertinent.
Je suis saisie de trois amendements identiques.
L'amendement n° 243 rectifié bis est présenté par MM. Cazeau, Mazuir et Boutant, Mmes Bonnefoy et Nicoux, MM. Miquel, Mirassou, Auban, Rainaud et Chastan, Mme Blondin, MM. Marc, Vairetto, Bérit-Débat, Daudigny, Jeannerot, Le Menn et Lozach, Mme Durrieu, MM. J. Gillot, Camani, Labazée et Rome et Mme Bataille.
L'amendement n° 393 rectifié est présenté par MM. Fortassin et Collombat.
L'amendement n° 439 est présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 3
Remplacer les mots :
à l'action sociale et à la cohésion sociale
par les mots :
à l'action sociale, au développement social et local
La parole est à M. Bernard Cazeau, pour présenter l’amendement n° 243 rectifié bis.
Outre l’action sociale, les départements sont chargés du développement social, comme le prévoyait d’ailleurs expressément le projet de loi initial. Par ailleurs, l’action sociale menée par les conseils généraux comprend également la préservation et le développement de l’économie sociale et solidaire des territoires, du petit commerce de proximité, de l’artisanat.
C’est pourquoi il convient de compléter les compétences confiées au département, au titre de chef de filat, en matière d’action sociale par celles qui concernent le développement social et local.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour présenter l'amendement n° 393 rectifié.
La parole est à M. Christian Favier, pour présenter l'amendement n° 439.
Je le retire, madame la présidente, car il est identique à celui qu’a défendu M. Cazeau.
L’amendement n° 439 est retiré.
L'amendement n° 827, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer les mots :
à la cohésion sociale
par les mots :
au développement social
La parole est à Mme la ministre.
Il s’agit de clarifier la nature de la compétence. Nous souhaitons distinguer l’aide aux individus, quelle qu’en soit la nature, certes extrêmement nécessaire, et le développement social, cette notion étant plus intégrante.
L'amendement n° 14 rectifié ter, présenté par MM. Adnot, Bernard-Reymond, Darniche, Huré, Pinton, Türk, Savary, Détraigne, Sido, Béchu, Bas, Retailleau, Doligé, Laménie, P. Leroy, Dériot et Pointereau, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Après les mots :
cohésion sociale
insérer les mots :
, ainsi qu'au développement local et au tourisme
La parole est à M. René-Paul Savary.
Le présent amendement vise à préciser que l’action sociale du département porte également sur la préservation et le développement de l’économie sociale et solidaire des territoires, du petit commerce de proximité, de l’artisanat.
Par ailleurs, il a pour objet de remettre la compétence touristique dans le périmètre de compétence du département, pour des raisons de proximité évidentes.
Il tend ainsi à compléter les compétences dévolues au département, au titre de chef de filat, en matière d’action sociale et de développement social, à ajouter la notion de développement local et à lui réattribuer la compétence en matière touristique.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 242 rectifié ter est présenté par MM. Cazeau, Boutant, Mazuir, Jeannerot, Daudigny, Miquel, Bérit-Débat et Chastan, Mmes Nicoux et Bonnefoy, MM. Auban, Mirassou, Rainaud, Vairetto, Le Menn, Krattinger et Lozach, Mme Durrieu, MM. Rome, Camani et Labazée et Mme Bataille.
L'amendement n° 249 rectifié est présenté par MM. Roche, Namy, Arthuis, Savary, Guerriau, J. Boyer, Lasserre et Dubois et Mmes Férat et Goy-Chavent.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 3
Après le mot :
personnes,
insérer les mots :
au tourisme,
La parole est à M. Bernard Cazeau, pour présenter l’amendement n° 242 rectifié ter.
Prenons le cas de la Dordogne. La principale richesse du département, avant l’agriculture, est le tourisme, alors qu’il s’agit d’un territoire essentiellement rural. Les problèmes de la vallée de la Dordogne, liés à la biodiversité, par exemple, sont-ils identiques à ceux du littoral basque ?
La notion de chef de file, exemplaire de ce point de vue, permet à chacun de trouver une organisation à l’égard de l’ensemble d’une compétence. C’est absolument essentiel. La raison l’emporte lors des discussions et chaque département et région trouvent avantage à l’action retenue.
La parole est à M. René-Paul Savary, pour présenter l'amendement n° 249 rectifié.
L'amendement n° 672, présenté par Mme Lipietz, MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer les mots :
solidarité des territoires
par les mots :
solidarité territoriale de proximité
La parole est à M. Ronan Dantec.
Nous abordons une question importante. Je suis assez gêné de voir attribuer au département un rôle de chef de file en matière de solidarité des territoires. Cette compétence me semble, en réalité, par définition partagée entre les collectivités. La région y participe à travers sa vision de l’aménagement du territoire régional. Le département, quant à lui, assure davantage une solidarité de proximité. Et les métropoles assument aussi des responsabilités en matière de solidarité territoriale, et ce au-delà de leur propre territoire.
Attribuer à une collectivité en l’espèce le rôle de chef de file pourrait laisser entendre que les deux autres niveaux impliqués ne sont pas responsables de la solidarité territoriale, ce qui ne correspond pas à la réalité.
Nous proposons donc de remplacer les termes « solidarité des territoires » par les mots « solidarité territoriale de proximité », car nous considérons que nous sommes tous solidaires des territoires.
L'amendement n° 234 rectifié bis, présenté par MM. Dubois, Maurey, Arthuis, J. Boyer, Capo-Canellas, J.L. Dupont et Roche, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
à l'accès aux services publics de proximité, le développement local et l'aménagement de l'espace
par les mots :
au développement local et à l'aménagement de l'espace
La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.
La commission des lois propose de confier aux communes un rôle de chef de file pour « l’exercice des compétences relatives à l’accès aux services publics de proximité ». Mais n’est-ce pas un cadeau empoisonné ?
Est-ce aux collectivités locales, notamment aux communes, de garantir l’accès aux services publics ? À nos yeux, cette compétence relève non pas des communes ou des départements, mais de l’État.
La mairie gère certes, de fait, un certain nombre de services de proximité. Mais la désigner comme chef de file pour l’accès aux services publics pourrait l’entraîner sur une pente curieuse. Nous craignons, en effet, que le maire ne soit alors tenu pour responsable de l’ensemble des dysfonctionnements. La fermeture du bureau de poste, par exemple, risquerait de lui être imputée. Les élus locaux se retrouveraient en première ligne.
Que la commune essaie de contribuer à l’accès aux moyens de communication, aux services de santé, cela paraît évident. Qu’elle y réussisse parfois, sans doute ! Toutefois, ce n’est pas forcément à elle d’organiser l’accès à ces services, sinon, pourquoi n’organiserait-elle pas également la répartition des commissariats et des gendarmeries ?
Par ailleurs, j’attire votre attention sur la complexité de cette proposition et sur sa cohérence avec les deux autres textes relatifs à la décentralisation qui nous seront présentés ultérieurement.
Le deuxième projet de loi que nous devrons examiner prévoit, à son article 19, que le schéma des services publics est établi par l’État et le département.
Dans le troisième texte, les maisons de services au public et les obligations de service public deviennent une compétence des communautés de communes.
In fine, il est bien difficile d’y voir clair. C’est pourquoi l’amendement n° 234 rectifié vise à ce que l’État continue d’être le chef de file dans le domaine de l’accès aux services publics.
Monsieur Sueur, permettez-moi une remarque quelque peu malicieuse. Lors de l’examen d’un amendement, il m’avait semblé percevoir une accélération de nos débats. Je reconnais très volontiers que cette impression de vitesse a été très fugace et qu’elle s’est rapidement dissipée.
Je suis saisie de trois amendements identiques.
L'amendement n° 244 rectifié bis est présenté par MM. Cazeau, Mazuir, Boutant, Daudigny, Krattinger, Jeannerot, Miquel et Marc, Mme Blondin, MM. Vairetto et Le Menn, Mmes Nicoux et Bonnefoy, MM. Mirassou, Auban, Rainaud, J. Gillot et Lozach, Mme Durrieu, MM. Camani, Labazée et Rome et Mme Bataille.
L'amendement n° 394 est présenté par M. Fortassin.
L'amendement n° 828 est présenté par le Gouvernement.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4
Supprimer les mots :
l’accès aux services publics de proximité, le développement local et
La parole est à M. Bernard Cazeau, pour présenter l’amendement n° 244 rectifié bis. .
Les communes ne cessent, dès lors qu’elles font face à une difficulté avec les services de proximité, de se tourner vers les départements. D’ailleurs le nombre de perceptions, de bureaux de poste, ou encore d’enseignants du primaire nécessite parfois l’élaboration de schémas, et c’est bien souvent le département qui se débat avec les représentants de l’État pour tenter de trouver des solutions.
Le présent article prévoit l’attribution de la compétence en cause à la commune. Même si certains départements seraient probablement satisfaits, cette disposition ne me semble pas bonne. Ne changeons pas les habitudes des communes !
L'amendement n° 394 n'est pas soutenu.
La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° 828.
Selon nous, la commune ne doit pas être désignée comme chef de file en matière d’accès aux services publics de proximité et de développement local. Dans notre esprit, c’est plutôt à partir de l’échelon départemental que les différentes communes et communautés de communes rurales doivent essayer de trouver la meilleure réponse aux problèmes d’aménagement du territoire.
L'amendement n° 668 rectifié, présenté par Mme Lipietz, MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 4
après le mot :
proximité
insérer les mots :
et à la mobilité de proximité, à la démocratie de proximité,
La parole est à M. Ronan Dantec.
Le mot « proximité » étant potentiellement supprimé à l’alinéa 4 de l’article 3, un petit exercice est nécessaire pour imaginer la formulation que nous proposons. Nous suggérons de compléter l’énumération des compétences pour lesquelles la commune est considérée comme le chef de file par la mention de la mobilité de proximité et de la démocratie de proximité.
S’agissant de la démocratie de proximité, on nous accuse régulièrement de vouloir rayer d’un trait de plume les communes. Mes chers collègues, vous pourrez vous convaincre que ce procès est tout à fait injuste en consultant le document de référence de la fédération des élus Verts et écologistes, qui expose la position commune à tous les élus de notre famille politique au sujet de cette réforme – permettez-moi de souligner avec un peu de malice que, à ma connaissance, peu de partis ont réussi à atteindre un tel consensus !
Nous continuons d’insister sur le rôle clé de la commune dans le domaine de la démocratie de proximité ; nous considérons que, sur ce plan, elle demeure un échelon tout à fait irremplaçable. Or c’est précisément pour rappeler ce rôle clé que nous présentons l’amendement n° 668 rectifié. Après cela, qu’on ne vienne pas nous faire de mauvais procès !
En outre, puisqu’il est question d’aménagement du territoire, il nous semble important d’insister également sur la mobilité de proximité.
Tout à l’heure, la qualité de l’air a été évoquée. L’idée de la confier aux maires suscite une ironie récurrente, comme si elle n’était pas sérieuse. Cette opinion est tout à fait erronée ! Un grand nombre d’enjeux liés à la santé et à l’environnement sont des enjeux de proximité, et c’est bien le maire qui doit s’en occuper ; c’est ainsi que, dans de nombreuses communes, il y a des rues canyons.
Oui, mes chers collègues, de nombreuses questions liées à la qualité de l’air se posent à l’échelle communale ! Je connais même, en Loire-Atlantique, des communes de quelques centaines d’habitants qui disposent d’un plan de déplacements piétons. C’est pourquoi nous considérons que la mobilité de proximité est un enjeu tout à fait important et qu’il doit en être fait mention dans le projet de loi.
La commission des lois est défavorable à l’amendement n° 384 rectifié, qui est contraire à la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
Elle est aussi défavorable à l’amendement n° 436, pour la même raison.
En revanche, la commission est favorable à l’amendement n° 666 rectifié bis.
Pour ce qui concerne l’amendement n° 685, j’y suis favorable à titre personnel mais, à une voix près, j’ai été mis en minorité par la commission. Mme la ministre a suggéré que les termes « à l’énergie et au climat » soient remplacés par les termes « à la transition énergétique » ; à titre personnel, je trouve cette proposition tout à fait pertinente et je souhaite que les auteurs de l’amendement n° 685 acceptent de le modifier en ce sens.
À propos de l’amendement n° 314 rectifié, je m’en tiens à l’avis de la commission que je suis chargé de représenter, lequel est défavorable. Comme je l’ai expliqué à M. Cazeau, la commission souhaite le respect des compétences des collectivités dans le domaine du tourisme et n’est pas favorable à un chef de filat.
La commission est défavorable à l’amendement n° 826, mais favorable aux quatre amendements identiques n° 15 rectifié ter, 241 rectifié ter, 248 rectifié et 438.
Chers collègues centristes, je me souviens d’avoir entendu M. Maurey souligner l’ampleur des investissements déjà réalisés en matière d’aménagement numérique. Cet aménagement est une revendication assez fondamentale du point de vue de l’égalité des territoires. J’ajoute qu’il ne faut pas oublier les enjeux liés aux usages, comme le président de l’Association des départements de France me l’a fait remarquer.
La commission a donc décidé de maintenir dans le projet de loi la mention de l’aménagement numérique. Aussi, chose rare, je ne puis pas soutenir la proposition de M. Collombat : j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 367.
La commission demandait le retrait de l’amendement n° 736 rectifié déposé initialement. Cependant, à titre personnel, je considère que l’internationalisation du développement économique relève de la région…
La commission est défavorable aux amendements n° 671 et 675, mais elle est favorable à l’amendement n° 667. Elle est défavorable aux deux amendements identiques n° 243 rectifié bis et 393 rectifié.
Elle est également défavorable à l’amendement n° 827. Pour travailler de longue date avec les départements, je sais très bien, monsieur Cazeau, quelle est l’ampleur des actions d’insertion qu’ils mènent. Simplement, mes chers collègues, je vous mets en garde : si vous introduisez dans le projet de loi l’expression « développement social », vous devez savoir que François Lamy sera après-demain matin dans votre bureau pour vous proposer de signer un contrat de développement social des quartiers… Faites attention, mais ne dites pas que je ne vous l’ai pas dit ! §Pour ma part, je trouve l’expression « cohésion sociale » plus claire.
La commission est défavorable à l’amendement n° 14 rectifié ter. Elle est aussi défavorable aux amendements identiques n° 242 rectifié ter et 249 rectifié, n’ayant pas fait le choix de désigner un chef de file dans le domaine du tourisme. Elle est encore défavorable à l’amendement n° 672.
La commission émet le même avis sur l’amendement n° 234 rectifié bis. À cet égard, permettez-moi d’insister sur l’état d’esprit dans lequel j’ai travaillé, avec Mme Gourault qu’un deuil cruel tient malheureusement éloignée de notre assemblée. Nous avons rencontré des représentants de l’Association des maires de France, qui a d’ailleurs fait paraître un communiqué de presse au sujet de notre entretien.
Pour nombre d’entre vous, le chef de filat est une expression impropre. Pour ma part, à l’heure où il s’agit de déterminer la compétence du bloc communal, je veux seulement m’assurer que les communes seront respectées pour ce qui concerne les besoins essentiels pour la population, par exemple quand il s’agit de savoir où l’on va construire une maison des services publics ou bien une permanence médicale de garde. S’agissant d’aménagement local, les maires se demandent quelles garanties ils ont, maintenant qu’ils sont dans une intercommunalité, que le projet local sur lequel ils se sont fait élire et leur droit d’initiative en matière de révision des PLU seront respectés.
La commission est défavorable aux deux amendements identiques n° 244 rectifié bis et 828.
Enfin, elle est défavorable à l’amendement n° 668 rectifié, car elle estime – je parle sous le contrôle du président Sueur – que la question soulevée par ses auteurs est tellement importante qu’elle mérite une réflexion en soi. Il nous a semblé que, pour débattre des mécanismes de consultation et de concertation, des enquêtes publiques, des conférences citoyennes, bref de toute la panoplie de la démocratie de proximité, il fallait attendre que la navette avance un peu.
Le Gouvernement est défavorable aux amendements n° 384 rectifié et 436.
Sur l’amendement n° 666 rectifié bis, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée, car je suis gênée par la mention des milieux aquatiques.
Madame la présidente, je souhaite entendre les explications complémentaires de Mme Lipietz.
Madame la ministre, cette mention figurait dans une version antérieure de notre amendement ; rectifié deux fois, il ne fait plus référence qu’à la biodiversité.
Dans ces conditions, j’émets un avis favorable.
S’agissant de l’amendement n° 685, j’y suis favorable, à condition que ses auteurs acceptent la modification proposée par M. le rapporteur.
Nous l’acceptons d’autant plus que le courrier adressé le 18 février dernier à Mme Lebranchu mentionnait justement la transition énergétique. De surcroît, il était signé par l’Association des régions de France, l’Association des départements de France et l’ensemble des intercommunalités ; je ne suis pas sûr que toutes ces collectivités aient fait beaucoup de propositions communes à propos de ce projet de loi !
Je suis donc saisie d’un amendement n° 685 rectifié, présenté par Mme Lipietz, MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste, qui est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
développement durable du territoire,
insérer les mots :
à la transition énergétique,
Madame la ministre, veuillez poursuivre.
Je suis donc favorable à l’amendement n° 685 rectifié. Je suis également favorable à l’amendement n° 314 rectifié.
La question du tourisme est effectivement complexe, monsieur Karoutchi. Nous avons eu d’ailleurs une longue discussion sur ce sujet, à la fois avec Jean-Michel Baylet, la ministre du tourisme et un certain nombre de représentants.
Sans plagier M. Longuet, qui l’a fort bien rappelé tout à l’heure, je précise que cette compétence est dévolue au niveau régional, avec un comité régional du tourisme, et au niveau départemental, avec des comités départementaux du tourisme.
M. Baylet l’a parfaitement bien expliqué, les départements souhaitent exercer le rôle de chef de file en matière de tourisme. Mais leur demande ne concerne ni la communication, ni la gestion à l’extérieur, ni l’image, ni les grands événements ; ils veulent pouvoir gérer tout ce qui concerne l’aide aux gîtes ruraux, les chambres d’hôtes, le reclassement des hôtels, l’accessibilité des hôtels de faible catégorie et les villages vacances.
Nous avons effectivement accédé, dans ce contexte, à cette demande de chef de filat. Je m’engage à répondre, d’ici à la deuxième lecture, à un certain nombre d’arguments qui ont été avancés pour justifier le rejet d’une telle évolution. En effet, le schéma régional devient ainsi une compilation des schémas départementaux. Par ailleurs, comme je vous l’ai dit tout à l’heure, j’estime que le nombre de ces schémas est beaucoup trop important.
Selon moi, il serait souhaitable de définir un exercice conventionnel de la compétence touristique, à l’image de ce que nous avons retenu pour un certain nombre d’autres compétences. Nous devrons y travailler de façon précise, avec Jean-Michel Baylet, l’auteur de l’amendement, un certain nombre d’entre vous et Mme la ministre du tourisme. L’objectif serait de permettre aux départements d’assurer les missions que je viens d’énumérer. De surcroît, il faudrait que les départements et la région passent un accord sur quelques grandes options, concernant notamment la stratégie, la participation aux grands salons internationaux, Atout France, N2D2.
En effet, en ne retenant que les schémas et les intrusions d’un schéma dans l’autre, nous ne réussirions pas à créer une harmonie dans ce domaine de compétences.
Je le répète, d’ici à la deuxième lecture, j’espère pouvoir vous proposer, avec la ministre concernée, quelque chose de plus clair. Quoi qu’il en soit, nous avons parfaitement compris que, suivant les territoires concernés, les chefs de file pouvaient être soit les régions, soit les départements. En effet, certaines destinations touristiques – je pense aux fameux contrats de destination que vous avez évoqués tout à l’heure – s’identifient à un département, à une région ou à une ville. Nous appuyant sur l’ensemble de ces éléments, nous réussirons. C’est la raison pour laquelle je suis favorable à cet amendement, qui permet d’ouvrir le débat. J’espère que nous serons collectivement meilleurs en deuxième lecture.
Le Gouvernement est favorable aux amendements identiques n° 15 rectifié ter, 241 rectifié ter, 248 rectifié et 438.
Quant à l’amendement n° 367, relatif à l’aménagement numérique, je demande à M. Pierre-Yves Collombat de bien vouloir le retirer, afin d’avancer dans le sens qui a été retenu pour les départements. Sur ce texte, nous le savons, deux sujets sont susceptibles de provoquer certains frottements : le tourisme et le numérique.
Sur l’amendement n° 671, qui concerne également le numérique, le Gouvernement émet un avis défavorable. Nous en avons discuté avec la commission.
Concernant l’amendement n° 675, si les départements n’avaient plus de compétences en matière de politiques liées à la jeunesse, leur gestion du Fonds social européen, le FSE, pourrait être remise en cause, ce qui poserait un réel problème. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
S’agissant de l’amendement n° 667, je rappelle que les agendas 21, qui sont des outils que nous avons beaucoup de mal à expliquer à nos populations, sont mis en place volontairement. Par conséquent, dans ce domaine, il ne peut pas y avoir de chef de file ni une tutelle d’une collectivité sur une autre, puisque nous sommes favorables à ce que tout le monde élabore un tel instrument. Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement.
Un retrait chaleureux !
Le Gouvernement demande également le retrait des amendements identiques n° 243 rectifié bis, 393 rectifié et 439, au profit de l’amendement n° 827. Malgré une différence d’appréciation avec M. le rapporteur, je maintiens notre position.
Le Gouvernement demande aussi le retrait de l’amendement n° 14 rectifié ter, eu égard à l’explication que j’ai donnée tout à l’heure.
En revanche, il est favorable aux amendements identiques n° 242 rectifié ter et 249 rectifié.
Quant à l’amendement n° 672, je comprends parfaitement son objet. Il s’agit de répondre au souci exprimé par les uns et les autres à propos du chef de filat des communes en termes de services de proximité.
La solidarité des territoires et la solidarité de proximité sont des compétences que l’on pourrait plutôt confier aux départements. Toutefois, en l’état actuel des choses, notre analyse du problème n’étant pas aboutie, je vous demande, madame Lipietz, de bien vouloir retirer cet amendement. Il s’agirait bien sûr d’un retrait constructif.
Concernant l’amendement n° 234 rectifié bis, sur lequel deux sénateurs ont tenu des propos similaires, je ne pense pas, dans la logique de ce que j’ai dit voilà quelques instants, que l’on puisse attribuer au bloc communal la responsabilité de l’organisation des services publics de proximité. Il s’agit en effet d’une trop petite surface. À un moment donné, les communes elles-mêmes seraient bien en peine d’assurer ces services. Selon moi, cette compétence doit être assurée par des surfaces départementales ou équivalant à un rassemblement de communautés de communes rurales. Je suis donc défavorable à cet amendement. Au demeurant, nous nous pencherons sur ce problème à une autre occasion.
Sur les amendements identiques n° 244 rectifié bis et 394, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Enfin, l’amendement n° 668 rectifié vise à confier au bloc communal le chef de filat en matière de démocratie participative et de débat public. Je serai très franche avec vous, madame Lipietz. Si le débat peut, bien évidemment, être organisé par chacune des collectivités territoriales, est-il judicieux de retenir pour ce faire le niveau communal ? Vous-même avez justement évoqué la nécessité de prévoir des débats publics au niveau de l’intercommunalité, si celle-ci a bénéficié d’un transfert de compétences. Par ailleurs, j’estime qu’il ne s’agit pas d’une compétence en tant que telle. Il serait sans doute quelque peu dangereux non seulement de créer une telle compétence, mais aussi de la confier au niveau communal.
J’interviendrai globalement, afin d’expliquer notre vote sur l’ensemble de ces amendements.
On le voit bien, on passe d’une collectivité à une autre avec une certaine légèreté, qui inquiéterait certainement nos concitoyens s’ils nous écoutaient aujourd’hui. Mais nous savons que la commission et d’autres ont mené de longues réflexions.
Si je m’apprête à voter bien volontiers certains de ces amendements, je suis également décidé à en rejeter un certain nombre.
Il est notamment proposé de confier la compétence liée aux politiques menées en faveur de la jeunesse aux régions. Ainsi, celles-ci s’occuperaient de la jeunesse, tandis que les départements se chargeraient des personnes âgées et des personnes handicapées. Il leur resterait tout de même à gérer la protection maternelle et infantile, ce qui est un vrai métier !
Que gagnerions-nous à ces transferts ? Laissons les compétences à ceux qui savent les exercer !
Les départements, à qui l’on a confié la solidarité des hommes et des territoires – l’un ne va pas sans l’autre –, ont de vraies responsabilités en la matière. Si vous leur enlevez la solidarité des territoires, il ne leur restera que l’exercice des compétences sociales, ce qui aura un effet particulièrement restrictif : les départements géreront la misère, excusez le terme, puisqu’ils ne pourront plus développer de stratégie pour réduire la pauvreté et améliorer la cohésion sociale. Ces deux compétences sont donc complémentaires, et se déclinent en outre avec d’autres.
Le fait que l’aménagement du territoire constitue une compétence très large ne doit pas empêcher les départements, qui sont véritablement une structure de proximité, de mettre en œuvre la solidarité des territoires.
S’agissant de l’économie sociale et solidaire, je voterai volontiers l’amendement proposé par Bernard Cazeau. Permettez-moi toutefois de formuler une remarque à ce propos.
Représentant l’Assemblée des départements de France au Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire, j’ai interrogé M. Hamon sur le problème des chefs de file, dans la mesure où un projet de loi sur l’économie sociale et solidaire devrait voir le jour d’ici peu. Ce dernier n’est pas favorable à l’introduction de chefs de file dans ce secteur. En effet, l’économie sociale et solidaire est à la fois une affaire sociale et économique. Elle a besoin, sous la responsabilité de l’État, de l’appui des départements pour ce qui est de l’action sociale, des régions pour ce qui concerne la formation et de l’Europe pour ce qui a trait aux crédits de cohésion ou d’inclusion sociale.
On le voit bien, ces besoins transcendent les compétences propres de chacune des collectivités. Une telle situation est préoccupante, dans la mesure où ce secteur possède un vrai intérêt dans la période de difficulté que nous connaissons.
Par ailleurs, je tiens à attirer l’attention de mes collègues sur le problème de l’aménagement numérique. En la matière, des schémas de cohérence territoriale existent : il s’agit des SCORAN, les stratégies de cohérence régionale d’aménagement numérique.
Si les choix sont orientés au niveau régional, ils se déclinent différemment d’un département à l’autre : il peut s’agir de monter en débit, de faire le choix de la fibre – la FTTO pour les équipements importants et la FTTH pour chaque habitation – ou, pour des quartiers ou des zones très particuliers, d’opter pour le passage par les ondes, avec des antennes.
Une fois que ce choix de cohérence territoriale a été défini, il importe de réaliser l’aménagement numérique. C’est la raison pour laquelle les départements sont des interlocuteurs privilégiés : ils élaborent les schémas départementaux d’aménagement numérique, qui permettront de mettre en cohérence les boucles locales, lesquelles seront ensuite réalisées sous l’égide des communes.
Il n’empêche que, pour réaliser ces infrastructures, il faut un maître d’ouvrage qui ne peut pas être la région. La loi prévoit que ce rôle est assumé soit par une société publique locale, soit par le département, soit par un syndicat couvrant l’ensemble des communes, à l’image des syndicats d’électrification.
La cohérence territoriale est indispensable. En effet, dans la mesure où des opérateurs aménageront différents programmes sur les fibres que nous aurons éventuellement installées, l’échelon départemental semble le plus approprié pour trouver ceux qui utiliseront ces équipements, ce qui nous permettra d’éviter les investissements « morts ».
En résumé, la région est compétente, à un certain moment, pour la réalisation du schéma de cohérence, mais ensuite, le département a un rôle déterminant d'interlocuteur et d'aménageur.
Pardonnez-moi de vous le dire, mais je trouve que notre débat a pris un tour surréaliste. Nous disons tous : « Attention, toute compétence, tout pouvoir nouveau, tout pouvoir ancien doit être défini au millimètre près, de manière à mesurer précisément les charges nouvelles que cela représente. » Or, depuis tout à l'heure, c’est un autre discours qu’on entend : « Tiens, je te donne ça, tiens, redonne-moi ça. Et est-ce que tu ne pourrais pas me refiler ça ? » Franchement, je trouve ce travail incohérent.
Non, monsieur le président de la commission, ce n'est pas caricatural. Sincèrement, je n'ai pas le sentiment que c’est ainsi, en défendant une telle batterie d'amendements, que nous ferons progresser les collectivités locales.
Moi aussi, j'aurais pu me lever et défendre un amendement en disant : « Je souhaite que la région dispose de telle ou telle compétence. » D’ailleurs, je ne sais pas pourquoi on veut lui donner la compétence sur les politiques liées à la jeunesse ? Parce que la région gère les lycées ? Mais les collèges dépendent eux des départements et l'enseignement supérieur est de la responsabilité de l'État ! On est en train de contredire nos propres propos, lorsque nous réclamions tout à l’heure qu’on agisse de façon équilibrée et sérieuse. Or chacun présente ses amendements, en réalité, pardon de le dire, des amendements transmis par diverses associations, ce qui, somme toute, est normal.
Madame la ministre, durant tout l'après-midi, il a été répété que, pour éviter tout clash, toute aberration, on ne désignerait pas de chef de file en matière de tourisme. Or toute une batterie d'amendements, dont un amendement présenté par le Gouvernement, ont pour objet de redonner au département le chef de filat en matière de tourisme. Reconnaissez que c'est l'inverse de ce qui a été dit tout l'après-midi !
Monsieur le président de la commission, je n'ai pas parlé du rapporteur, qui est d’une parfaite cohérence, je le reconnais bien volontiers. Mais, sincèrement, je suis un peu étonné de la manière dont nous discutons maintenant, les uns après les autres, toute une vague d’amendements qui se résument à ceci : « Et à toi, je te donne ça, et toi tu reprends ça, et toi tu prends le chef de filat sur ça… »
Pardon, mais je trouve cela aberrant et je ne voterai certainement pas des amendements ayant pour objet de changer les chefs de filat et de revenir sur ce que la commission a décidé. Je ne suis pas toujours d'accord avec ce qu'elle dit, mais puisqu’elle a passé des heures, des nuits à tout arranger au cordeau, ce n’est pas pour que chacun modifie tout en séance avec des amendements suscités, je l’ai dit, par diverses associations. Franchement, ce n'est pas cohérent du tout.
Je comprends très bien que les gîtes ruraux, notamment, relèvent de la responsabilité des départements. Qui prétend le contraire ? Les comités régionaux du tourisme ont été créés en 1942, avant de faire l’objet d’une révision législative en 1987. Ils ne datent pas d'hier ! Évidemment, ce sont bien les comités départementaux, et pas les comités régionaux, qui doivent être chargés des questions locales. Mais là, qu’est-on en train de faire ? On est en train de dire aux régions : « Vous avez bien fait de gérer depuis vingt-cinq ans les CRT, mais, ce n'est pas grave, on va transférer la compétence aux départements. » C’est un signal abominable ! Soit l'on dit qu'il n'y a pas de chef de file en matière de tourisme et que les CRT et les CDT agissent de concert, et c’est très bien ainsi et parfaitement cohérent, …
... soit l’on dit, comme c’est le cas depuis deux heures : « Vous, vous prenez ça et vous, vous reprenez ça. » Franchement, eu égard au travail de la commission, eu égard à ce que sont les collectivités locales, je trouve cela aberrant.
Appréciant particulièrement le travail qu'a fait la commission pour nous permettre d’aboutir, en dépit de la difficulté du sujet, à un texte sinon quasi consensuel, à tout le moins qui ne soit pas trop dissensuel, je retire mon amendement, même si l’on aurait pu en discuter jusqu'à demain matin. Qu’on s’en tienne à ce qui a été décidé en commission.
S’agissant de la compétence tourisme, actons l’absence de tout chef de file, ce que nous n’avons pas encore fait, à ma connaissance. C’est d’ailleurs sans doute cela qui crée ces perturbations auxquelles moi-même, je dois bien le dire, je n’échappe pas.
Aucun amendement n’a été déposé ayant cet objet ! Le faire nous simplifierait la vie.
L’amendement n° 384 rectifié est retiré.
La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.
Je souhaite brièvement réagir à l’avis qu’a exprimé M. le rapporteur sur l’amendement n° 234 rectifié bis, que j'ai défendu tout à l'heure.
Monsieur le rapporteur, vous me faisiez gentiment remarquer que mon amie Jacqueline Gourault, présidente de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, membre de mon groupe, rejoint la position de la commission. Cela ne m’avait pas échappé. Il ne vous échappera pas non plus qu’il peut m'arriver d’être en désaccord avec Mme Gourault.
C’est un peu cruel de votre part de l’avoir signalé, car j’espérais que vous ne l’auriez pas remarqué, en dépit de votre sagacité !
Sourires.
Même si je suis en total accord avec Jacqueline Gourault sur beaucoup d’aspects de ce texte, il peut arriver, comme c’est le cas ici, où ma position était autre, que nous ne soyons pas forcément d'accord sur tout.
Je remercie le Gouvernement d'avoir émis un avis favorable sur cet amendement. Je remarque d'ailleurs que le texte de son amendement n° 828 reprenait une partie de mon amendement, ce qui signifie que nous nous rejoignons l’un et l’autre.
Je note que, pour une fois, je suis d'accord non pas avec Mme Gourault, mais avec le Gouvernement. §On me dit que c’est plus souvent l'inverse qui se produit, mais peu importe, là n'est pas l'essentiel.
Dernière chose : j’aurais volontiers déposé un amendement visant à remplacer l'expression « chef de filat », utilisée communément dans le texte, par celle de « rôle de chef de file ». Cette expression « chef de filat » me paraît bizarre.
Ne caricaturons pas : on ne part pas de rien. Certains citent l’exemple de la région d'Île-de-France, mais il faudrait peut-être voir également ce qui se fait en région Aquitaine ou en région Limousin. Évitons de sérier les choses point par point.
Nous avons réintroduit le principe de compétence générale. Qu’on soit pour ou contre, c'est décidé. Nous équilibrons celle-ci avec un chef de file : c’est le principe du chef de filat – moi non plus, je n’aime pas beaucoup ce néologisme. Ce chef de file organise les modalités de l’action commune pour l’exercice de certaines compétences. Mais c’est déjà ainsi que cela se passe ! Qu'est-ce que vous nous racontez ? Mon département a signé une convention économique avec la région Aquitaine et cela se passe très bien : nous gérons les petits problèmes des PME-PMI quand la région s’occupent des grands problèmes. C'est ainsi que les choses se passent en province, monsieur Karoutchi. Nous ne sommes pas en Île-de-France, qui est confrontée à des problèmes différents, je veux bien le croire.
Une conférence territoriale sera organisée, en cas de difficultés. Mais tout cela n'a rien de compliqué, cela fonctionne !
Personnellement, s’agissant du tourisme, la position de la commission me satisfait entièrement. Comme l’a dit Mme la ministre, il y a ce qu'on construit dans le département et puis il y a la promotion internationale. Qu’il n’y ait pas de chef de file et que la voie conventionnelle prévale, je m’en satisfais.
Je conclurai sur la question du numérique. Le déploiement du numérique requiert d'abord la mise en place d’un réseau très haut débit ou de fibre optique. C’est le rôle du département que de faire en la matière des choix bien précis, de privilégier un certain nombre de secteurs, de commencer le déploiement à tel endroit et de finir par tel autre. Les « tuyaux », cela relève de la compétence du département. Nous, en Dordogne, nous avons fait un syndicat général qui concerne notamment les réseaux électriques.
Vient ensuite la commercialisation. Les gens ne se rendent pas compte des difficultés auxquelles seront confrontés les départements pour ces opérations de commercialisation. C'est là qu'il faudra se tourner vers la région.
En Aquitaine, nous avons constitué un ensemble de type syndicat d'économie mixte réunissant les cinq départements de la région. Tous se rejoignent, au côté de la région, pour discuter avec les opérateurs, pour retrouver une partie de notre mise, pour peu qu’on sache vendre.
Prenons garde de bloquer le développement du numérique en en confiant le développement soit à la région, soit au département : cela ne sert à rien. C'est un domaine très complexe, croyez-en ma petite expérience, acquise de longue date.
Madame la présidente, mon rappel au règlement se fonde sur l'article 29 de notre règlement et porte sur l’organisation nos travaux.
Depuis tout à l'heure, nos collègues dissertent, fort brillamment d’ailleurs, de l'ensemble des amendements sans qu'on sache exactement sur lequel d’entre eux porte la discussion. Discutons-nous de l’ensemble de ces amendements ? Discutons-nous de l'article ? Discutons-nous de la philosophie générale de ce texte ? Depuis maintenant trois quarts d’heure, nous avons un débat très général, alors qu’il serait plutôt temps de mettre aux voix chacun de ces amendements, qui sont tout de même relativement importants, quitte à ce qu’ils fassent, pour certains d’entre eux, l’objet d’une explication de vote individuelle.
MM. Jacques Gillot et Claude Dilain, rapporteur pour avis, applaudissent.
Je vous prie de m'excuser si, par malheur, je vous ai offensée dans votre façon de présider, mais franchement, je ne comprends absolument pas ce qu'on fait en ce moment.
Acte vous est donné de votre rappel au règlement, madame Goulet.
Sachez néanmoins que nos collègues s’expriment sur la philosophie de ce bloc d'amendements. Si vous souhaitez intervenir sur un amendement en particulier, attendez que je le mette aux voix.
La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
Nous le savons tous, rien n'est pire, dans les assemblées que nous présidons ou que nous avons présidées, de faire en réunion plénière le travail de commission.
Or c'est exactement ce que nous sommes en train de faire à cet instant.
À cela, il y a une raison apparente : si nous n'avons pas tous le bonheur d'être membres de la commission des lois, en revanche, nous avons tous la passion et, parfois même, une expérience des collectivités locales.
Cela dit, n’exagérons pas cette passion, parce que nous ne sommes tout de même pas très nombreux en ce moment dans cet hémicycle, quoique la qualité supplée naturellement à la quantité.
Sourires.
Voilà pour la raison apparente. S’agissant de la raison réelle, je serai sans doute plus sévère.
Madame la ministre, l’architecture de votre texte nous conduit à cette dispersion des interventions que soulignait Mme Goulet ? Pourquoi ? Parce que, au fil de trois articles différents, vous faites un choix et son contraire.
À l’article 2, vous nous dites que chaque niveau de collectivités locales bénéficie d'une compétence générale, pour des raisons qui sont les vôtres et que je conteste formellement. Vous avez fait ce choix et notre assemblée vous a suivi.
Vous savez que ce choix n'est pas facile à mettre en œuvre et qu'il impose une clarification, en particulier dans des domaines nouveaux. C’est l’objet de l'article 3.
Je vous rappelle que, sur ce même sujet de la compétence et des priorités des différents niveaux de collectivités, nous avons, au cours des années passées, débattu des journées entières. Si notre collègue Philippe Adnot, départementaliste enthousiaste, était présent en séance, il pourrait nous rappeler les nuits passées sur la compétence du département et de la région en matière d’action économique, par exemple.
Vous avez fait le choix de rétablir la clause de compétence générale, même si la commission s'est efforcée d'y mettre un peu d'ordre. Tout à l’heure, nous examinerons sans doute l'article 4, qui rétablit une forme de coopération conventionnelle – laquelle est tout à fait dans l'esprit des collectivités locales –, qui conduit en réalité à reconstituer le conseil régional dans sa forme ancienne, quand il était un établissement public régional, quand il avait pour fonction de fédérer le travail des collectivités locales qu’il représentait et quand ses membres n'étaient pas élus au suffrage universel.
Tel est notre sentiment.
Puisque Mme la présidente nous invite à exprimer un point de vue général sur l'ensemble des amendements, ma ligne de conduite consistera simplement à soutenir le travail de la commission, car, à tout prendre, c’est elle qui a le plus approfondi la question. J’aurai l’occasion, sur des sujets très pointus, peut-être d’éclairer le choix.
Mais soyons honnêtes, c’est bien l’esquive que vous avez choisie, à savoir la répartition des responsabilités entre niveaux de collectivités locales, laquelle se traduit par la compétence générale reconnue aux différents niveaux, qui aboutit à cette contradiction.
Ou alors il faut nous dire très clairement : la diversité française aboutira à des politiques contractuelles par département, par région, par groupe de régions, à l’intérieur de chaque région, et on vivra une diversité d’Ancien Régime, ce qui, pour le conservateur que je suis, n’est pas choquant
M. Roger Karoutchi rit.
Tout le monde voit bien que nous sommes confrontés à un problème, qui a été évoqué par plusieurs collègues, dans l’organisation du débat.
Madame la présidente, vous veillez scrupuleusement, chacun peut le constater, à l’application du règlement de notre assemblée. Mais permettez-moi d’évoquer l’esprit de notre règlement.
Nous examinons l’article 3 du projet de loi. Quelques constats s’imposent.
Premièrement, chacun a eu la possibilité de s’exprimer sur l’article.
Ensuite, chacun a pu présenter son amendement. Puisqu’il s’agit d’une discussion commune, nous avons donc entendu la présentation de la trentaine d’amendements.
Puis, nous avons entendu la position du rapporteur et celle des ministres.
Aussi, il me paraîtrait de bonne méthode – je ne sais pas ce que prévoit le règlement sur ce point, ni même s’il prévoit quelque chose – d’appeler les amendements et, s’il y a des explications de vote, que celles-ci ne portent que sur un amendement déterminé.
Sans porter un jugement sur le fond, je constate, après avoir écouté les quatre ou cinq dernières interventions, que l’on assiste à un nouveau débat général sur l’article 3, bien entendu éclairé par les amendements.
Je me permets donc de suggérer, si tout le monde en est d’accord, que les amendements soient appelés…
… et qu’il soit possible d’expliquer son vote sur un amendement déterminé.
Vous voyez bien que la procédure en vigueur au Sénat – je suis très précis – présente un avantage par rapport à celle de l’Assemblée nationale. À l’Assemblée nationale, lorsqu’un amendement est voté, les autres tombent. Au Sénat, tous les amendements sont présentés.
Mais pensez un instant aux nombreuses personnes qui lisent le compte rendu de nos travaux.
Considérons un amendement déterminé. D’abord, il va être évoqué lors des prises de parole sur l’article. Quatre pages plus loin, il sera présenté. Encore cinq pages après, vous aurez l’avis de la commission, et il faudra trois pages de plus pour connaître l’avis du Gouvernement. Puis il y aura un nouveau débat et il faudra cinq pages supplémentaires avant de connaître le vote.
Afin que la situation que nous connaissons ne se reproduise pas, je me permettrai, à la reprise de nos travaux après le dîner, ou un peu plus tard, de présenter des propositions pour disjoindre certains amendements, …
Le fait, pour ceux qui le souhaitaient, d’avoir pu s’exprimer sur la philosophie globale des amendements, après avoir entendu l’avis de la commission et du Gouvernement, a permis, me semble-t-il, de gagner du temps.
Nous pouvons donc passer au vote sur chaque amendement. Il est bien entendu que je donnerai la parole à qui me la demandera pour une explication de vote sur un amendement particulier. J’invite toutefois ceux qui se sont déjà exprimés à ne pas intervenir à nouveau.
Je mets aux voix l'amendement n° 436.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote sur l’amendement n° 685 rectifié.
Je suis opposé à cet amendement parce que, hélas ! les régions de France ne sont pas en mesure de gérer un problème que l’on ne parvient pas à régler à l’échelle mondiale, à savoir l’énergie et le climat.
L'amendement est adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 15 rectifié ter, 241 rectifié ter, 248 rectifié et 438.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, l’amendement n° 367 n’a plus d’objet.
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l'amendement n° 908, qui est la reprise, par le Gouvernement, de l’amendement n° 736 rectifié.
Mme Nathalie Goulet. Il s’agit de l’amendement n° 736 rectifié qui est devenu l’amendement n° 908 – être parlementaire, c’est un métier !
Sourires.
Madame la ministre, je voudrais vous dire à quel point je suis favorable à cet amendement, qui s’inscrit dans la droite ligne des positions soutenues par Nicole Bricq et, surtout, par le ministre Laurent Fabius. Ce dernier a dépêché dans les régions des ambassadeurs sans affectation qu’ils les aident à l’internationalisation. Membre de la commission des affaires étrangères qui travaille beaucoup sur la coopération internationale, je peux vous assurer que les régions sont les acteurs majeurs du développement international.
Je voyage très souvent avec des collègues qui sont les mieux placés pour promouvoir leur région et leur département. J’ai croisé Gérard Collomb aux Émirats voilà quelques semaines.
Non, il y était au titre du Grand Lyon. Il a réalisé sur place un travail extraordinaire pour drainer des investissements émiriens vers le territoire dont il est élu. Et je pourrais citer nombre d’exemples similaires.
Il convient donc de promouvoir cet excellent amendement. Notre commerce extérieur est confronté à de grandes difficultés. Il me paraît important que les régions, et non pas les départements, s’occupent de l’internationalisation des entreprises.
L'amendement est adopté.
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l'amendement n° 671.
Madame la présidente, je ne souhaite pas allonger les débats, mais reconnaissez que j’ai été d’une légèreté de sylphide depuis hier. Je ne suis pas intervenue, …
Mme Nathalie Goulet. Pour ne rien vous cacher, cela me manquait aussi !
Nouveaux sourires.
Je ne suis pas élue dans un département ni dans une région. Je suis « hors sol », je n’ai donc pas de parti pris sur la clause de compétence générale.
En ce qui concerne l’aménagement numérique, je tiens à le souligner, nous sommes dans une situation paradoxale.
Je comprends très bien la position d’Hervé Maurey, qui a réalisé un travail important sur l’aménagement numérique des territoires. De ce point de vue, l’Orne se montre très actif. Cela s’explique sans doute par le fait que le conseil général est présidé par notre ancien collègue Alain Lambert, qui a la fibre numérique chevillée au corps. Le département a développé un plan numérique avec 115 sites prioritaires, …
… des centres de télétravail, 80 zones d’activités. Il est donc très bien placé à cet égard.
En revanche, pour ce qui est des aménagements lourds, la région doit, à l’évidence, être chef de file. Orange a dressé un tableau de la situation de la couverture de la Basse-Normandie. Permettez-moi de vous en livrer quelques données.
Dans la Manche, Saint-Lô et Cherbourg ont leur propre système. Le reste du département a un troisième système. Dans le Calvados, la Côte Fleurie a un système particulier et Deauville un système spécial, qui d’ailleurs ne fonctionne pas. La communauté d’agglomération de Caen la mer a un troisième système de haut débit, ce qui fait déjà plus de cinq systèmes pour la même région. Quant au département de l’Orne, il utilise lui aussi plusieurs systèmes de couverture.
Autrement dit, pour une petite région comme la Basse-Normandie, on dénombre au moins dix procédés différents de couverture en haut débit.
Madame la ministre, il faudra absolument coordonner ce genre d’investissements, qui sont lourds.
La région doit se doter d’un plan d’investissement, d’un plan de développement pour le haut débit et la fibre optique, et ensuite, pour son application, procéder à une répartition entre les départements.
On ne pourra pas s’en sortir autrement. Aujourd'hui, nous connaissons la nature du haut débit et de la fibre optique. Mais la technologie évolue, les coûts vont évoluer à due concurrence, et les départements ne pourront pas suivre.
Vous le savez, dans certaines zones, on a développé des boucles locales qui ont ensuite été remplacées par le WiMAX, lui-même supplanté par d’autres types de réseaux. Il ne faut pas oublier non plus qu’il existe des incompatibilités entre certaines technologies. Faute d’y mettre bon ordre aujourd’hui, les investissements qui sont faits à l’heure actuelle risquent d’être perdus parce qu’ils auront été mal programmés pour l’avenir.
Je suis donc très favorable à l’amendement de Mme Lipietz. Je constate d’ailleurs qu’un amendement analogue avait été déposé par M. Collombat, mais aussi par M. Reichardt notamment pour l’Alsace.
Je suis extrêmement favorable à un schéma régional pour le haut débit, les technologies d’avenir et le numérique, qui soit ensuite décliné par département. En effet, compte tenu de ce qui se passe en Basse-Normandie, le risque est d’avoir des fonds publics qui soient mal utilisés et un service mal rendu aux usagers comme aux entreprises. Or, on le sait aujourd’hui, le numérique est absolument indispensable pour le développement de nos territoires, y compris des territoires ruraux.
Je soutiens absolument l’amendement n° 671.
Comme j’avais demandé tout à l’heure la parole pour une intervention plus globale, je vais tenter de faire le lien avec la présente intervention.
Il s’agit effectivement d’un amendement important. On voit bien l’enjeu en termes d’égalité des territoires et d’aménagement numérique. Nous sommes aujourd’hui tous convaincus sur ce point.
Contrairement à ce que M. Karoutchi a dit voilà quelques instants, je pense que la plupart des amendements déposés sont assez logiques et cohérents par rapport à la discussion sur le chef de file. §
Nous passons assez régulièrement d’une question de « chef de file », qui a un rôle de coordination, à « compétence », ce qui n’est pas la même chose. On est bien sur une compétence générale pour les uns et les autres. Il s’agit, à partir de là, de coordonner l’action publique. C’est le rôle du chef de file.
Cela ne veut pas dire, si la région coordonne l’action sur la jeunesse par exemple, que les départements ou les communes en sont dessaisis. Parfois, les choses sont mal comprises.
Concernant l’aménagement numérique, il est de l’intérêt des départements les moins riches que la région soit chef de file et qu’elle ait la responsabilité de cet aménagement avec sa propre puissance financière, afin de faire de la péréquation et de l’aménagement, pour qu’il n’y ait pas de territoires démunis. Sinon, de petits départements ruraux vont avoir énormément de difficultés.
De ce point de vue, donner le chef de file à la région est tout à fait cohérent.
De même, en termes de cohérence, et cela avait certainement échappé à certains, quand nous avons proposé tout à l’heure que le chef de file de la démocratie de proximité soit attribué à la commune et au bloc communal, cela signifie que l’on considère que la commune a justement un rôle d’organisation sur de très nombreuses concertations qui peuvent même être de niveau départemental ou régional sur son territoire.
Par conséquent, nous renforcions bien la commune dans ce rôle démocratique, y compris de coordination d’autres niveaux de concertation.
Il y avait là des logiques d’ensemble ; je ne suis pas certain qu’elles soient tout à fait apparues.
Et là, très logiquement, c’était le sens de l’amendement de notre collègue Christian Favier, que j’aurais évidemment voté, mais nous arrivons au même résultat.
S’agissant du tourisme, il est évident qu’on ne peut pas avoir de chef de file. En effet, certaines régions ont une identité forte – prenons au hasard la Bretagne §: il est assez logique qu’il y ait un chef de file régional sur le tourisme –, tandis que d’autres régions ont des identités beaucoup plus disparates…
Monsieur Dantec, je vous en prie, vous revenez à une discussion générale.
En effet, alors que nous sommes sur un amendement qui concerne l’aménagement numérique, vous évoquez le tourisme.
Cela me permettait de montrer la cohérence de l’ensemble du dispositif. Veuillez m’excuser, madame la présidente. Mais vous avez bien saisi le principe.
Je n’avais pas vraiment l’intention de parler de ce sujet, mais puisque chacun illustre son propos avec l’exemple de son département, je le ferai aussi.
Dans le Rhône, nous avons élaboré tout seuls un plan de très haut débit, de haut débit et de moyen débit, partout, y compris sur le territoire de la communauté urbaine de Lyon, et cela ne nous empêchera pas de faire la métropole.
Donc, arrêtons de donner, chacun, notre propre exemple.
Par ailleurs, comme j’ai envie de voter dans le même sens que la commission, je demanderai à son président et à son rapporteur de lever la main rapidement ; j’attendrai de connaître leur position pour me prononcer, afin d’éviter de me tromper comme cela m’est arrivé une fois.
J’ai fait tout à l’heure une démonstration qui, manifestement, n’a pas été entendue par M. Dantec.
Les départements ont mis en place, en sus de l’État – mais cela leur a coûté très cher – les antennes téléphoniques, ensuite le haut débit. Aujourd’hui, nous en sommes au très haut débit, c’est-à-dire à la fibre optique.
J’ai dit tout à l’heure que, concernant les tuyaux, ce ne sont pas les régions qui vont dire dans quel secteur ils doivent commencer. Les départements ont des choix à faire, notamment pour la mise en place du réseau car huit à dix ans au moins sont nécessaires. Ensuite, pour la commercialisation – je souhaite que l’on comprenne cette différenciation –, c’est-à-dire la discussion avec les opérateurs, la région intervient. C’est pourquoi nous l’avons associée à ce niveau. Mais au départ, il faut que le numérique soit confié au département.
Je n’y comprends plus rien, madame la ministre. En effet, lorsque je suis allé la voir il y a trois semaines, votre collègue chargée de l’économie numérique m’a dit que les départements étaient responsables du numérique. Or aujourd’hui, personne au Gouvernement ne nous dit qui en est responsable.
Dans notre département, nous sommes partis d’un système de syndicat ouvert. Or, demain, après cette session parlementaire, on verra que le numérique a changé de responsable. Il faut tout de même qu’il y ait une cohérence au niveau du Gouvernement ! §
Nous avons la démonstration de ce que l’on disait tout à l’heure : il ne faut pas obligatoirement figer qui va être le chef de file sur un certain nombre de sujets. Il faut faire partager l’intelligence de nos collectivités pour trouver la bonne solution.
Par ailleurs, en ce qui concerne le numérique, on mesure la dégradation que l’on a créée avec le refus de garder un opérateur unique.
Nous avons ce soir la démonstration des aspects négatifs des décisions qui ont été prises voilà quelques années.
Pour ma part, je regrette que nous soyons aujourd’hui amenés à prendre des positionnements qui ne répondront pas efficacement à nos territoires, si on tranche ou pour le département ou pour la région.
Je rejoins Bernard Cazeau.
Alors que l’établissement des schémas départementaux d’aménagement numérique a eu lieu, que l’on choisit les techniques soit de montée en débit, soit de fibre, on ne peut pas remettre en cause ces schémas. Cela entraînerait un retard considérable. Nous en sommes au passage aux phases opérationnelles, avec des bassins qui sont prêts dans leur boucle locale.
Nous avons bien agi dans ce sens. En effet, pour bénéficier des subventions de l’État telles qu’elles ont été affichées lors du récent séminaire gouvernemental sur le numérique – 3 milliards d’euros sont programmés –, les départements devront aménager numériquement leur territoire sur dix ans.
On le voit bien, si on modifiait brutalement les répartitions de compétences, on engendrerait un retard, que nos concitoyens ne comprendraient pas.
Je voudrais redire calmement ceci : les auditions ont eu lieu, les concertations également, le chef de file est bien le département, ce qui ne veut pas dire qu’il exerce toute la compétence ; en effet, par définition, celle-ci est partagée et il appartient donc – la commission a maintenu ce point – à la conférence territoriale de procéder aux concertations nécessaires…
… étant précisé que, éventuellement, si elle le souhaite, une convention de partenariat coordonnant les actions des uns et des autres tiendra compte de la nécessaire différenciation territoriale.
Telle est la position de la commission sur ce point. C’est aussi celle du Gouvernement.
D’autres articles nous attendent ; il serait peut-être temps de passer au vote. §
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 243 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 393 rectifié a été retiré.
Monsieur Favier, l'amendement n° 439 est-il maintenu ?
L'amendement n'est pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 14 rectifié ter.
La parole est à M. Bernard Cazeau, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 242 rectifié ter et 249 rectifié.
Je me suis rangé à l’avis du Gouvernement. Mais j’invite à la prudence, car de toute façon, cette disposition sera réexaminée en deuxième lecture. L’ADF ne va pas admettre ça.
En outre, dans cette assemblée, monsieur le rapporteur, – M. le président de la commission le sait – des problèmes risquent de se poser quant à ce refus de faire de nouveau du département le chef de file en matière de tourisme.
Je n’en fais pas une affaire personnelle, mais j’estime qu’il faudrait être prudent sur ce point et peut-être suivre Mme la ministre. Mes chers collègues, à vous de voir… mais si vous rencontrez des problèmes au moment du vote, il ne faudra pas vous en plaindre ! §
Une bonne fois pour toutes, je suis parlementaire, mais je ne suis pas à la solde des associations d’élus, je recherche l’intérêt général et je cherche un consensus.
M. René Vandierendonck, rapporteur. … c’est mon honneur, et c’est ce que je fais depuis le début !
Mme Nathalie Goulet ainsi que MM. Jacques Gillot, Dominique de Legge et Roger Karoutchi applaudissent.
Je tiens à redire, pour que ce soit clair et pour que cela figure dans le compte rendu de nos travaux, la position de la commission, que rapporte, avec une grande intégrité, en effet, René Vandierendonck.
Dans un premier temps, nous avions pensé qu’il y avait une logique à attribuer le chef de filat, pour le tourisme, à la région, parce que nous avions entendu un certain nombre d’arguments en ce sens.
Dans un second temps, à la suite de multiples contacts et prenant d’ailleurs en compte plusieurs amendements qui ont été présentés, nous avons pensé que c’était une erreur et qu’il était beaucoup plus satisfaisant de concevoir, pour le tourisme, une complémentarité en respectant la liberté des départements comme celle des régions, et aussi des communes.
Il nous a semblé meilleur de prendre en compte le rôle éminent que jouent les départements dans le domaine du tourisme ainsi que, je le redis, le rôle très utile des régions, notamment pour le développement touristique à l’international. Si c’était seulement les départements qui agissaient dans ce domaine, il y aurait beaucoup les doublons et il n’y aurait peut-être pas l’efficacité que l’on peut souhaiter pour l’action internationale.
En conséquence, la commission a adopté cette disposition, qui plus est – sauf erreur de ma part – avec l’accord de tous les groupes présents !
Madame la ministre déléguée, j’appelle votre attention sur cette question à laquelle, je le sais, vous êtes particulièrement attachée.
Mes chers collègues, il y a quelques instants, nous avons adopté trois amendements identiques, le premier de M. Cazeau, le deuxième de M. Roche et le troisième de M. Adnot. Ce faisant, nous avons supprimé le mot « touristique » concernant le chef de filat des régions. Cette précision ne figure donc plus dans le présent texte !
Peut-être des demandes s’élèveront-elles pour revenir sur cette modification, afin que les départements, plutôt que les régions ou les communes, assument cette fonction de chef de filat. Quoi qu’il en soit, la commission a adopté une position très logique : celle de la complémentarité, qui revient à faire confiance à l’initiative des uns et des autres. La disposition en question ne retranche rien à ce qui existe aujourd’hui dans les textes. Rien ! Je l’affirme avec une certaine gravité, car je ne voudrais pas que l’on en tire des conséquences qui n’ont pas lieu d’être.
Je l’ai déjà dit en évoquant la Dordogne : l’action menée au niveau départemental est tout à fait exceptionnelle ! On pourrait étendre ce constat à chacun de nos départements, par exemple à celui dont je suis l’élu – le Loiret –, et que j’adore. Je vous ferai grâce des multiples exemples que je pourrais citer à ce sujet. Je mentionnerai simplement le cas de la Loire à vélo, initiative qui connaît un succès phénoménal.
Nous nous sommes donné beaucoup de mal, à l’échelle de plusieurs régions, pour qu’il soit possible de suivre, à vélo, tout le cours de la Loire sans discontinuité. Sans les départements concernés, ce projet n’aurait pas pu aboutir, et sans les régions non plus ! En effet, la Loire traverse de nombreux territoires. C’est en fédérant toutes les énergies que nous avons obtenu ce formidable résultat !
Ainsi, le fait que les départements n’aient pas été désignés comme chefs de filat n’emporte pas de conséquence particulière. On avait un temps envisagé de confier ce rôle à l’échelon régional puis, je le répète, cette disposition a été supprimée afin de garantir la complémentarité d’action des conseils généraux et régionaux. Je le dis pour que ceux qui ont des oreilles entendent !
Mes chers collègues, chacun le sait, j’ai beaucoup de respect pour toutes les associations d’élus, qu’il s’agisse de l’AMF, de l’ADF ou de l’ARF. Cependant, je l’affirme en toute sincérité : si chacune de ces associations vient faire son marché ou passer ses commandes à l’Assemblée nationale et au Sénat, ne parlons plus de représentation nationale, …
M. Karoutchi a raison : il est dit dans la Constitution que tout mandat impératif est nul !
Je mets aux voix les amendements identiques n° 242 rectifié ter et 249 rectifié.
Les amendements ne sont pas adoptés.
La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote sur l’amendement n° 672.
Madame la ministre, je souhaite simplement vous poser cette question : qu’entendez-vous par « retrait constructif » ?
Monsieur Dantec, en dépit de l’étendue des travaux menés en commission, nous n’avons pas eu le temps d’étudier assez en profondeur les expressions de votre amendement et leur contenu juridique. À nos yeux, l’idée qui le sous-tend est bonne, mais le Gouvernement n’est pas pour l’heure en mesure d’émettre un avis construit et fiable à ce propos. Voilà pourquoi il convient de retravailler cette question, entre les deux lectures, pour affiner et préciser quelques points.
Je retiens que Mme la ministre considère qu’il s’agit d’une bonne idée ! Cela étant, compte tenu des explications apportées, je retire mon amendement, madame la présidente.
L’amendement n° 672 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 234 rectifié bis.
L'amendement n'est pas adopté.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 244 rectifié bis et 828.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 437 rectifié bis, présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 4
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Une collectivité territoriale ne peut exercer une tutelle sur une autre, en sa qualité de chef de file, pour l'exercice d'une compétence qui nécessite le concours de plusieurs collectivités territoriales.
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Les longues discussions que nous venons de consacrer au présent article prouvent que la notion de chef de filat reste un terme aux contours flous. De fait, elle donne lieu à de multiples interprétations, et pourrait ainsi ouvrir la voie à de nombreux contentieux.
À cet égard, les débats en commission ont révélé la difficulté que soulève la définition de ce terme et des missions qu’il recouvre. Surtout, ils ont mis au jour les risques d’inconstitutionnalité à cet égard.
À travers cet amendement, qui peut être qualifié d’amendement de principe, nous tenons à rappeler le principe constitutionnel de non-tutelle d’une collectivité territoriale sur une autre : ainsi, il sera possible de chasser toutes les craintes des élus locaux quant à la mise en place de ces chefs de filat.
Mme Cukierman le souligne avec raison, il convient de rappeler le principe de non-tutelle d’une collectivité sur une autre. La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
À mon sens, la rédaction proposée n’apporte en fait pas grand-chose, dans la mesure où le principe mentionné est déjà inscrit dans la Constitution.
Néanmoins, le Gouvernement ne saurait s’opposer à cet amendement. Il s’en remet, en conséquence, à la sagesse du Sénat.
Mme la ministre a raison. Toutefois, dans la mesure où la notion de chef de filat n’apparaît pas dans la Constitution – par définition ! –, il semble préférable que le principe constitutionnel en question soit inscrit dans le présent texte. Je voterai donc cet amendement.
L'amendement est adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à vingt-deux heures.