Peut-être consentirez-vous à reconnaître, chers collègues, que cet effort pour définir des compétences exclusives ménageait néanmoins des exceptions notables.
Rappelons le droit d’initiative, qu’a évoqué M. Savary, reconnu au département et à la région quand la loi ne prévoit pas à titre exclusif la dévolution de telle ou telle compétence.
Souvenez-vous aussi de la réaction de Mme Létard qui, lors de l’examen du texte, s’inquiétait de ce que le sport, la culture, le tourisme ne soient plus subventionnés par la région et le département. Selon elle, on ne devait pas permettre cela, car un secteur entier de l’économie s’en trouverait affecté… §
Je dis cela pour que chacun ait bien présent à l’esprit la situation réelle. Sur le papier, la clause de compétence générale avait disparu, mais en réalité, des brèches étaient ouvertes, et de tels doutes sont apparus, monsieur Karoutchi, que le législateur a décidé de reporter l’application de la mesure au 1er janvier 2015.
Dans le présent dispositif, la clause de compétence générale redevient un élément identifiant, même si je comprends que certains y voient plus un marquage idéologique qu’une réalité pratique. Je respecte les convictions des uns et des autres, mais, à mon sens, il est important de rétablir cette faculté.
Pour illustrer mon propos, je prendrai un exemple très juridique.
Lyon, si vous le décidez, ne sera plus un établissement public de coopération intercommunale, une communauté urbaine soumise au principe de spécialité ayant besoin d’une compétence décernée explicitement par un texte selon une liste limitative ; elle sera désormais titulaire d’une compétence générale.
Par ailleurs, c’est un élément fondamental de sauvegarde de l’autonomie communale, et vous l’avez tous dit. Mais reconnaissez avec moi que la jurisprudence du Conseil d’État est explicite. Ainsi, dans sa décision du 29 juin 2001, Commune de Mons-en-Barœul, ce dernier a jugé que cette clause était limitée, pour reprendre l’expression de la Direction générale des collectivités locales, à « l’interstitiel » que la loi laisse. En d’autres termes, la compétence générale des collectivités n’est pas démesurée.
En revanche, le rétablissement de la clause de compétence doit s’accompagner, Mme la ministre l’a très bien expliqué, de la reconnaissance, pour certaines compétences, d’un chef de file.
Mais j’insiste sur le fait que la commission des lois a vraiment été un gardien vigilant. Quand il y a compétence partagée, il y a nécessité d’un chef de file. Cependant, le chef de file a, de par la Constitution et la décision du Conseil constitutionnel du 24 juillet 2008, pour seule prérogative de réunir les différents titulaires de la compétence, qu’il ne dessaisit d’aucune de leurs attributions. Il organise une discussion sur la manière la plus rationnelle – les restrictions financières favorisent d’ailleurs la rationalité ! – d’exercer ces attributions.
Je tenais dire cela pour que nous évitions de nous enliser dans un débat franco-français qui fait beaucoup rire en Europe. §