J’interviendrai globalement, afin d’expliquer notre vote sur l’ensemble de ces amendements.
On le voit bien, on passe d’une collectivité à une autre avec une certaine légèreté, qui inquiéterait certainement nos concitoyens s’ils nous écoutaient aujourd’hui. Mais nous savons que la commission et d’autres ont mené de longues réflexions.
Si je m’apprête à voter bien volontiers certains de ces amendements, je suis également décidé à en rejeter un certain nombre.
Il est notamment proposé de confier la compétence liée aux politiques menées en faveur de la jeunesse aux régions. Ainsi, celles-ci s’occuperaient de la jeunesse, tandis que les départements se chargeraient des personnes âgées et des personnes handicapées. Il leur resterait tout de même à gérer la protection maternelle et infantile, ce qui est un vrai métier !
Que gagnerions-nous à ces transferts ? Laissons les compétences à ceux qui savent les exercer !
Les départements, à qui l’on a confié la solidarité des hommes et des territoires – l’un ne va pas sans l’autre –, ont de vraies responsabilités en la matière. Si vous leur enlevez la solidarité des territoires, il ne leur restera que l’exercice des compétences sociales, ce qui aura un effet particulièrement restrictif : les départements géreront la misère, excusez le terme, puisqu’ils ne pourront plus développer de stratégie pour réduire la pauvreté et améliorer la cohésion sociale. Ces deux compétences sont donc complémentaires, et se déclinent en outre avec d’autres.
Le fait que l’aménagement du territoire constitue une compétence très large ne doit pas empêcher les départements, qui sont véritablement une structure de proximité, de mettre en œuvre la solidarité des territoires.
S’agissant de l’économie sociale et solidaire, je voterai volontiers l’amendement proposé par Bernard Cazeau. Permettez-moi toutefois de formuler une remarque à ce propos.
Représentant l’Assemblée des départements de France au Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire, j’ai interrogé M. Hamon sur le problème des chefs de file, dans la mesure où un projet de loi sur l’économie sociale et solidaire devrait voir le jour d’ici peu. Ce dernier n’est pas favorable à l’introduction de chefs de file dans ce secteur. En effet, l’économie sociale et solidaire est à la fois une affaire sociale et économique. Elle a besoin, sous la responsabilité de l’État, de l’appui des départements pour ce qui est de l’action sociale, des régions pour ce qui concerne la formation et de l’Europe pour ce qui a trait aux crédits de cohésion ou d’inclusion sociale.
On le voit bien, ces besoins transcendent les compétences propres de chacune des collectivités. Une telle situation est préoccupante, dans la mesure où ce secteur possède un vrai intérêt dans la période de difficulté que nous connaissons.
Par ailleurs, je tiens à attirer l’attention de mes collègues sur le problème de l’aménagement numérique. En la matière, des schémas de cohérence territoriale existent : il s’agit des SCORAN, les stratégies de cohérence régionale d’aménagement numérique.
Si les choix sont orientés au niveau régional, ils se déclinent différemment d’un département à l’autre : il peut s’agir de monter en débit, de faire le choix de la fibre – la FTTO pour les équipements importants et la FTTH pour chaque habitation – ou, pour des quartiers ou des zones très particuliers, d’opter pour le passage par les ondes, avec des antennes.
Une fois que ce choix de cohérence territoriale a été défini, il importe de réaliser l’aménagement numérique. C’est la raison pour laquelle les départements sont des interlocuteurs privilégiés : ils élaborent les schémas départementaux d’aménagement numérique, qui permettront de mettre en cohérence les boucles locales, lesquelles seront ensuite réalisées sous l’égide des communes.
Il n’empêche que, pour réaliser ces infrastructures, il faut un maître d’ouvrage qui ne peut pas être la région. La loi prévoit que ce rôle est assumé soit par une société publique locale, soit par le département, soit par un syndicat couvrant l’ensemble des communes, à l’image des syndicats d’électrification.
La cohérence territoriale est indispensable. En effet, dans la mesure où des opérateurs aménageront différents programmes sur les fibres que nous aurons éventuellement installées, l’échelon départemental semble le plus approprié pour trouver ceux qui utiliseront ces équipements, ce qui nous permettra d’éviter les investissements « morts ».
En résumé, la région est compétente, à un certain moment, pour la réalisation du schéma de cohérence, mais ensuite, le département a un rôle déterminant d'interlocuteur et d'aménageur.