Inattendu, ce texte l'est aussi par sa volonté d'embrasser toutes les dimensions de l'intégration sociale des jeunes et des citoyens en difficulté. Il repose sur le triptyque formation-emploi-logement, auquel s'ajoutent quelques menues mesures en matière d'éducation. Cette ambition a été justement approuvée par le Conseil économique et social.
Ce projet de loi décline des séries d'articles qui remanient profondément le service public de l'emploi, renforcent la place de l'apprentissage dans l'accès au premier poste de travail, taillent dans la liste des contrats aidés pour en clarifier l'ordonnance et la philosophie.
S'agissant du droit au logement, les objectifs et les sommes annoncées étonnent : non seulement votre démarche se veut l'opposée de celle qui a été suivie jusqu'à présent par le gouvernement de M. Raffarin, encore présente dans le projet de loi de finances pour 2005 - je pense au mauvais coup porté au prêt à taux zéro - mais encore vous assignez à la nation des objectifs qui répondent à la demande insistante de l'abbé Pierre et des organismes d'HLM, sans oublier celle des élus locaux. On se prend à espérer, presque à rêver...
La réalisation de ces objectifs dépend pourtant d'une condition de taille : que la programmation budgétaire d'ici à 2009 soit respectée lors de chaque loi de finances et maintenue à l'abri des mesures de gel. Et c'est là que s'insinue le doute.
A l'instant, M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, notre éminent collègue M. Paul Girod, a lui aussi exprimé son incertitude quant à l'accompagnement budgétaire des dispositifs présentés, d'autant que la pratique actuelle de votre ministère n'est pas pour nous rassurer.
Prenons l'exemple des contrats aidés mis à disposition des collectivités, des associations et des administrations. Outre les emplois-jeunes, qui sont en voie d'extinction, en 2000, on comptait dans le département de l'Hérault environ 12 000 postes de contrats emploi-solidarité, CES, et de contrats emploi consolidé, CEC, financés par l'Etat. Il en restait quelque 8 000 en 2003. Il en subsiste à peine 5 000 cette année.
En effet, le gel massif des crédits de votre ministère - 650 millions d'euros - effectué par Bercy au printemps dernier a tari le financement de cette ligne budgétaire et souvent empêché la signature de nouveaux contrats à la rentrée. On dénombre plusieurs centaines de postes non pourvus dans les communes - cinq dans la mienne - dans les crèches associatives, les collèges, les lycées, etc.
La mobilisation qui en est résultée a conduit le Gouvernement à débloquer 800 contrats pour trois mois là où il en aurait fallu 2 000 pour satisfaire des besoins déjà estimés au plus juste. On est donc loin du compte.
Aussi, mesdames, messieurs les ministres, qu'en sera-t-il demain ? Et demain, c'est le mois de janvier. De nombreux maires se demandent comment se fera la jonction avec le contrat d'avenir, selon quel calendrier ? Sur quelle base les nouveaux postes seront-ils alloués, notamment aux départements qui connaissent un taux de chômage élevé, un nombre important de bénéficiaires du RMI et une forte croissance démographique, comme c'est le cas dans le Languedoc-Roussillon.
Je pourrais faire la même démonstration s'agissant du logement : nous vivons dans une période de pénurie des crédits, de raréfaction des programmes, et vous nous promettez le père Noël pour les années 2005 à 2007 ! Comment vous croire ?