Intervention de Vincent Capo-Canellas

Réunion du 3 juin 2013 à 16h00
Modernisation de l'action publique territoriale et affirmation des métropoles — Article 10

Photo de Vincent Capo-CanellasVincent Capo-Canellas :

Permettez-moi de compléter ici le point de vue que j’ai commencé à exprimer lors de la discussion générale.

Pour ma part, je suis favorable au développement de l’intercommunalité en Île-de-France, qui est à mes yeux nécessaire mais doit se faire au rythme francilien, et pas seulement avec le pied sur le frein. Il nous faut combler notre retard et tenir compte des éléments très spécifiques à l’Île-de-France.

L’objectif est d’assurer la création de la métropole en ayant au préalable trouvé les voies et les moyens de développer l’intercommunalité en Île-de-France et de structurer réellement le territoire en première couronne. Cette première étape est nécessaire avant d’envisager de construire une métropole.

Le plus gros point de désaccord avec le Gouvernement porte sur la méthode. Je pense que le seuil de 300 000 habitants qui avait été initialement fixé était inatteignable.

J’entends bien le raisonnement un peu technocratique de certains, selon qui les grosses intercommunalités fonctionnent mieux. En même temps, comme Philippe Dallier et Roger Karoutchi l’ont dit, il faut tout de même trouver des logiques de territoire.

À titre d’exemple, permettez-moi d’évoquer le cas que je connais le moins mal, à savoir celui de ma communauté d’agglomération, celle de l’aéroport du Bourget, qui compte 92 000 habitants. Nous pourrions passer à 142 000 ou 145 000 habitants, mais au-delà, nous basculerions vers un tout autre projet de territoire, qui n’aurait plus le même sens. Les populations de la communauté d’agglomération connaîtraient bien évidemment la ville avec laquelle nous pourrions nous associer, elles la traversent à l’occasion, mais il n’y a pas d’intérêt commun, de communauté d’aménagement avec elle. Les territoires n’ont pas de problématique commune.

Le seuil de 300 000 habitants me paraissait tout à fait aberrant. La commission des lois a proposé de le réduire à 200 000, ce qui est déjà une bonne chose. Pour ma part, je pense que ce seuil devrait pouvoir être modulé. Dans certains cas, alors que des communes formant un ensemble de 180 000 habitants pourraient s’associer, on le leur refusera en réclamant un effort supplémentaire, car elles n’atteignent pas encore la toise.

Il me semble qu’il faut aussi intégrer la logique du schéma directeur de la région Île-de-France, le SDRIF, qui a repris une partie de la logique du Grand Paris et des contrats de développement territorial, les CDT – je la défendrai par voie d’amendement. Les CDT donnent une armature à l’Île-de-France et fixent des stratégies franciliennes. Il faudrait d’abord débattre de ce que nous voulons faire de l’Île-de-France : autour de quels équipements, autour de quelles voies routières, autour de quels bassins d’emploi, autour de quels projets collectifs voulons-nous la structurer ?

Après avoir répondu à ces questions, nous parviendrons à trouver des bassins de vie. Je suis d’accord sur ce point avec Philippe Dallier, il est beaucoup plus difficile de les dessiner.

Un travail a déjà été fait à partir d’une vision de l’Île-de-France ; il est repris pour une bonne part dans le SDRIF et va être fixé dans les CDT qui sont en cours de discussion.

Si nous partons du principe que l’intercommunalité doit répondre à une vision technocratique et juridique, cela ne marchera pas ! Il faut arriver à définir les buts de l’intercommunalité avec les élus : pour développer l’emploi, moderniser les transports, réaliser des équipements, améliorer la qualité de vie, désenclaver certains territoires – en Seine-Saint-Denis notamment. C’est en suivant une telle démarche que nous pourrons construire un projet.

La toise à 300 000 habitants pour la constitution des intercommunalités était mauvaise. Je proposerai un amendement tendant à moduler le seuil de 200 000 habitants, pour tenir compte des CDT, du SDRIF et des projets de territoire, car cet aspect qualitatif est indispensable, sinon tout le monde sera soumis à une norme unique.

Si nous choisissons aujourd’hui de repousser l’échéance, je crains, comme l’a dit Roger Karoutchi, que ce ne soit pas de très bonne politique à l’égard des territoires qui se sont déjà engagés dans cette démarche, dont le bien-fondé pourrait être mis en doute. Si, en plus, nous pénalisons ces territoires en fixant le seuil à 200 000 habitants, ils vont perdre toute confiance dans la loi : nous ne pouvons pas changer de règle tout le temps. Donnons envie aux élus de constituer une intercommunalité, bâtissons-la sur des projets de territoire.

Enfin, je crains qu’une réforme ne soit plus difficile demain si nous ne trouvons pas une solution aujourd’hui. Je suggère donc au Gouvernement d’amender son projet de loi, de proposer une voie acceptable par les territoires. Il me semble que nous devons essayer de préciser cette démarche cet après-midi, mais rien ne pourra se faire sur la base des propositions du Gouvernement ou de la commission des lois.

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