Depuis le début de nos travaux en commission, nous avons beaucoup entendu parler de la future métropole lyonnaise, comme si tout le monde se réjouissait de la mise en place de cette nouvelle collectivité et comme si elle semblait ne poser de problème à personne.
Pourtant, au moins un aspect n’a jamais été évoqué : cette métropole, à l’inverse des autres, ne serait pas un établissement public de coopération auquel les communes délègueraient certaines de leurs compétences. Si le projet de loi était voté, elle deviendrait une collectivité de plein exercice, absorbant l’essentiel des compétences des communes.
Ainsi, pour la première fois, la loi déciderait d’attribuer à une collectivité une tutelle complète sur d’autres collectivités.
Les communes, par définition, ne sont pas membres de la métropole et la loi n’a toujours pas prévu qu’une collectivité territoriale soit composée par d’autres collectivités. Celles-ci sont censées être indépendantes les unes des autres.
Aussi, dans cette perspective métropolitaine lyonnaise, comment pourrons-nous continuer à affirmer que toutes les communes du territoire disposent de leur libre administration dans les domaines que la loi leur attribue ? En fait, ces communes deviendront de simples arrondissements et ne pourront demeurer elles-mêmes tant les pouvoirs leur restant attachés seront faibles et tant, de fait, leur autonomie sera réduite en matière financière et fiscale.
En définitive, il n’est pas certain que cette création, dans les conditions prévues par le présent projet de loi, soit parfaitement constitutionnelle, la mise sous tutelle des communes de l’actuelle communauté urbaine de Lyon étant clairement définie dans le texte et les attributs de leur libre administration totalement remis en cause.
La présentation avantageuse de l’opération de métropolisation vise évidemment à laisser penser que ce mouvement est dans l’ordre des choses et qu’un avenir radieux attend les habitants de la future métropole. Or les maux qui traversent la société française depuis la loi créant les communautés urbaines sont bien loin d’épargner le Grand Lyon.
Cette question concerne 1, 2 million d’habitants, et bien des mots vont encore couler sur le sujet, comme la Saône et le Rhône coulent vers une confluence dont l’avenir n’est pas encore tout à fait établi...
Les enjeux sont importants. À la fin du mois de décembre 2011, on dénombrait sur le territoire du Grand Lyon près de 95 000 chômeurs, dont le tiers connaissait un chômage de longue durée, plus de 50 000 familles monoparentales et, malgré un revenu fiscal moyen supérieur à la moyenne nationale, plus de 40 % de personnes non imposables disposant de moins de 10 000 euros de revenu.
De plus, l’agglomération compte près de trente zones urbaines sensibles. À la Grappinière, sur la commune de Vaulx-en-Velin, le revenu moyen est inférieur de 20 % à celui de la commune et ne représente que 45 % du revenu des habitants de l’agglomération. Plus largement, près de 25 000 familles de ces zones urbaines sensibles ont des ressources constituées totalement ou majoritairement de prestations familiales.
Sur le plateau des Minguettes, cher à mon collègue Guy Fischer, à Vénissieux, le quart de la population la plus modeste ne dispose pas de l’équivalent de 40 % du revenu observé sur l’agglomération.
Alors, bien sûr, il y a des beaux quartiers et des beaux villages : le Mont d’Or, la Tête d’Or, les Brotteaux…
La métropole lyonnaise sans les Lyonnais ne sera qu’une construction technocratique de plus, éloignée de la population et ne répondant aucunement à ses besoins, ni à la nécessaire vitalité démocratique devant accompagner chaque grand projet structurant.
Au nom de la concurrence libre et non faussée entre les territoires, les échelons démocratiques seront sacrifiés sur l’autel de la finance. La métropole coupe le territoire en deux, et ce sans aucune consultation des populations.
À l’heure où le débat semble enfin vouloir s’ouvrir sur la question du cumul des mandats, c’est pourtant l’accumulation des pouvoirs dans les mains de quelques-uns que cet article et les suivants tendent à inscrire dans la loi.
C’est pourquoi nous ne voterons pas cet article 20 et nous demanderons la suppression de tous les articles relatifs à la création de la métropole lyonnaise.
J’ai d’ailleurs cru comprendre, monsieur Mercier, que le grand accord de façade n’était pas encore tout à fait réglé, notamment s’agissant de quelques répartitions financières… Je laisse le débat s’installer afin que vous puissiez régler les derniers problèmes de virgule et vous accorder à l’euro près !