Intervention de Yahya Cheikh

Délégation sénatoriale à la prospective — Réunion du 30 mai 2013 : 1ère réunion
Atelier de prospective : pour donner leur chance aux adolescents issus des quartiers sensibles

Yahya Cheikh, agrégé d'arabe, professeur à Sciences Po et responsable d'associations :

Il existe aujourd'hui de nombreux manuels d'arabe. Les manuels conçus par l'éducation nationale observent un principe de neutralité. C'est pourquoi ils ne font pas référence à l'histoire. Les programmes du baccalauréat s'inspirent plutôt de textes littéraires. En revanche, le rapport à la mémoire et l'enseignement d'histoire se trouvent dans les manuels d'histoire. Ainsi, les manuels d'histoire des classes de cinquième comportent une partie intitulée « religion », qui évoque la religion musulmane. Or, concernant la religion musulmane, un certain nombre de mes collègues historiens font état de difficultés. Leurs élèves n'admettent pas certaines réalités scientifiques, leur rapport à la religion relevant d'une transmission familiale. Ainsi, le programme de seconde portait sur le Moyen Âge. Il s'agissait d'une occasion de recevoir un enseignement sur l'âge d'or des sciences arabes. Cette partie a été supprimée. Certains de mes collègues ont adressé des courriers à leurs académies pour leur demander d'intervenir pour que cet enseignement puisse perdurer.

Je suis en train de préparer un rapport sur le regard des élèves issus de l'immigration sur les matières proposées en philosophie, en français et en histoire, susceptibles d'avoir un rapport avec leur quotidien.

Sur les cinquante élèves de lycée et de collège interrogés, la majorité estime que la place consacrée à la culture arabe dans le système scolaire est insuffisante, ce qui les incite à chercher une formation hors du système éducatif français, notamment auprès d'associations communautaires. Or, l'enseignement de l'arabe, de l'histoire et de la religion connaît un problème d'identité. L'enseignement de l'arabe dans le système scolaire est très minoritaire. Il concerne moins de 7 000 élèves, ce chiffre comprenant les 1 800 élèves de Mayotte et les 1 500 élèves scolarisés par l'intermédiaire du Cned. Cela représente 262 professeurs agrégés ou certifiés. L'enseignement supérieur se porte mieux, notamment les classes préparatoires et les écoles de commerce.

Mais l'enseignement qui rencontre le plus de succès est celui qui est dispensé hors du système éducatif français. Selon les chiffres du ministère de l'intérieur, en 2003, 265 000 élèves étaient scolarisés dans des associations ou des écoles coraniques.

Les enseignements de langue et de culture d'origine (Elco) constituent un autre lieu d'enseignement de l'arabe. Ce dispositif a été créé à la suite des accords bilatéraux entre l'État français et un certain nombre de pays. Commencé en 1965 avec le Portugal, il s'est poursuivi en 1982 avec le Maroc. Ce dispositif scolarise à lui seul plus de 50 000 élèves.

Au final, l'enseignement de l'arabe est vraiment minoritaire dans le système éducatif français. Il s'agit donc d'une langue rare et que je pense être « un peu plus étrangère que les autres ».

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