Intervention de Bertrand Castagné

Délégation sénatoriale à la prospective — Réunion du 30 mai 2013 : 1ère réunion
Atelier de prospective : pour donner leur chance aux adolescents issus des quartiers sensibles

Bertrand Castagné, vice-président et président de la commission sociale de la fédération des entreprises de propreté (FEP) :

Je représente une profession, la propreté, qui est souvent stigmatisée, puisqu'elle concentre tous les sujets qui fâchent : travail au noir, emploi de salariés en situation irrégulière. Bref, à l'instar du secteur de la sécurité, nous sommes souvent cités comme les mauvais élèves.

Je souhaite vous présenter une autre image de ce secteur, qui emploie environ 450 000 salariés, représente 15 000 entreprises en France et contribue à la création de plus de 15 000 emplois non délocalisables par an. Ces emplois ne disparaîtront pas, ils sont donc l'avenir. Nos gouvernants devraient s'y intéresser davantage.

Notre profession intègre une part importante de populations sur des emplois non qualifiés. Il nous revient donc de qualifier ces personnes, quels que soient leur âge ou leur éventuel handicap, social ou physique. Nous avons un besoin de ressources permanentes pour pourvoir les postes dans des métiers dont l'image n'est pas très attractive.

Notre profession est concernée par les horaires décalés. Aujourd'hui, 40 % de notre profession dépendent de la commande publique. Dans ce contexte, les horaires de nos salariés sont définis par les donneurs d'ordre dans les cahiers des charges. Nous sommes contraints de nous y conformer. Nous travaillons beaucoup sur la sensibilisation des donneurs d'ordre publics à ce sujet afin de faire évoluer les pratiques.

Dans le secteur privé, la situation est plus facile. Depuis plusieurs années, la prestation s'effectue de plus en plus en journée, pour éviter la fragmentation du temps de travail et les horaires atypiques, qui participent à la non-reconnaissance du métier. Toutefois, les Français sont réticents à l'égard du changement. Modifier les habitudes par rapport aux horaires de ménage n'est pas toujours bien accepté. Nous avons donc développé une boîte à outils pour faciliter ce changement.

Le phénomène des multiemployeurs est aujourd'hui très prégnant Il convient donc de faire preuve de prudence dans les changements d'horaires. De nombreux salariés se sont adaptés et n'accepteraient pas forcément une modification de leurs horaires. Les syndicats du secteur nous interpellent à ce propos. La révolution ne doit pas entraîner des suppressions d'emplois. Le sujet est donc complexe.

Dans les pays nordiques, la prestation de ménage intervient en journée. Il est donc possible de procéder à ce changement en termes d'organisation, en minimisant les nuisances et en adaptant la prestation aux activités de l'entreprise. Dans le secteur hospitalier, le nettoyage des blocs opératoires se fait d'ailleurs en journée, alors qu'il s'agit précisément d'un milieu hyper-contraint.

Aujourd'hui, la situation de l'emploi est très grave. Comme l'a souligné François Roux, dans ce type de contexte, l'important est non pas le type de contrat mais le fait d'avoir un emploi. Il est préférable d'entrer dans la vie en entreprise, d'apprendre ou de réapprendre la vie professionnelle, plutôt que de rester dans un système d'assistanat.

À mon sens, il convient de redonner aux jeunes le goût du travail. Nous sommes responsables de la vision que nous donnons de certains métiers peu qualifiés. Nous devons changer notre discours à leur égard.

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