Intervention de Sophie Pasquet

Délégation sénatoriale à la prospective — Réunion du 30 mai 2013 : 1ère réunion
Atelier de prospective : pour donner leur chance aux adolescents issus des quartiers sensibles

Sophie Pasquet, photojournaliste :

J'ai mené une enquête pour le magazine Marie Claire, en suivant trois jeunes femmes célibataires mères d'enfants en bas-âge et travaillant en horaires décalés. L'objectif était de voir comment elles concilient leur métier, qui est leur dernier rempart contre la précarité et auquel elles tiennent énormément, et leur situation de mère célibataire.

Un diaporama des photos est diffusé pendant l'intervention.

La première de ces jeunes femmes est aide médico-psychologique à Bourg-en-Bresse. Elle s'appuie sur un double système de garde : une assistante maternelle à raison de 600 euros pour trente-cinq heures par mois ; mais aussi, ce qui est une chance pour elle, une organisation familiale assez solide.

La deuxième jeune femme est chef d'antenne et gagne 2 500 euros nets par mois. Paradoxalement, elle n'est pas celle qui s'en sort le mieux car, comme elle le dit, elle « bricole ». Autrement dit, elle doit décider d'une semaine sur l'autre comment elle va procéder pour la garde de son enfant.

Celles qui s'en sortent le mieux sont celles qui ont mis en place des systèmes de garde solides.

La troisième jeune femme, âgée de trente-cinq ans, est conductrice de bus. Elle réveille souvent son fils à quatre heures du matin, et en ressent une grande culpabilité. Elle a beaucoup bataillé pour avoir accès à une crèche en horaires décalés, dont la directrice la rassure sur les problématiques du sommeil. Elle reçoit son planning de travail plusieurs semaines à l'avance, ce qui l'aide à s'organiser. Elle bénéficie par ailleurs d'une bourse d'échange d'horaires par Internet.

Au travers de cette enquête, j'ai constaté que le travail en horaires décalés touche toutes les catégories socio-professionnelles. Il concerne une large part de femmes en situation monoparentale. Ces femmes sont très attachées à leur travail, non seulement parce qu'il est une source de revenu, mais aussi parfois parce qu'elles l'ont choisi. Elles parlent souvent d'elles-mêmes comme des fantômes : et vis-à-vis de l'entreprise, parce que leurs horaires atypiques les coupent de leurs collègues ; et vis-à-vis de la société, même si certaines crèches et des centres de loisirs commencent juste à adopter des horaires décalés.

Cette enquête est un plaidoyer pour la mise en place de modes de garde décalés. Il s'agit d'une réalité dont la société doit s'occuper.

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