La refondation de l’école a été au cœur de nos récents débats. Depuis la loi de 1998 instaurant un contrôle renforcé du respect de l’obligation scolaire, nos enfants ont les moyens de s’instruire, d’apprendre, de se former et de réussir.
Néanmoins, tous les enfants ne sont pas touchés au même degré par cette avancée sociale qu’est la démocratisation de l’accès aux connaissances. Ainsi, le taux de réussite scolaire des enfants des gens du voyage est encore bien trop faible.
Si la seconde loi Besson a fait bouger les choses depuis 2000, elle n’a malheureusement pas atteint tous ses objectifs. Alors qu’elle aurait dû faciliter l’accès à l’habitat, elle n’a été que partiellement respectée à l’échelon des communes. Trop d’itinérants n’ont ni les moyens ni la possibilité de créer un foyer sain et valorisant pour leurs enfants, dans le respect de leur culture et de leurs traditions. J’en veux pour preuve le bilan établi en 2010 par la Cour des comptes, faisant apparaître que seulement 52 % des aires d’accueil et 29, 4 % des aires de grand passage prévues avaient été réalisées.
Du fait de leur vie nomade, les gens du voyage sont souvent renvoyés de commune en commune sans se voir proposer de solution de logement ; leurs conditions de vie sont donc extrêmement précaires. Dans le Morbihan, de surcroît, l’application de la loi littoral, en introduisant la notion de « rupture d’urbanisme », a retardé la création de certaines aires d’accueil. Leur réalisation est subordonnée aux plans locaux d’urbanisme des communes, qui éprouvent d’ores et déjà des difficultés financières et foncières pour répondre à leurs obligations. Ainsi, pour la ville d’Auray, dont j’ai été le maire durant dix-sept ans, cela s’est traduit par quinze ans de démarches et de retards accumulés.
Pouvoir disposer d’un lieu où éduquer ses enfants est un droit primordial. Il faut faire cesser une forme de discrimination à cet égard, en réalisant et en sécurisant les aires d’accueil, afin que les itinérants puissent réellement offrir un avenir meilleur et digne à leurs enfants.
Dans le seul Morbihan, nous accueillons environ 2 500 itinérants, dont 40 % sont des mineurs. Nous devons non pas manifester à leur égard une volonté d’intégration fictive, mais leur donner les moyens de cohabiter en harmonie avec les populations locales.
Cela passe, avant tout, par une facilitation des relations entre la famille et l’école. Vous le savez, monsieur le ministre délégué, les gens du voyage se méfient quelquefois de l’institution scolaire, vue comme un agent intégrateur par une population qui veut sauvegarder son identité propre.
Par ailleurs, que dire de la suppression de postes au sein du Réseau d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, le RASED, dont la spécificité permettait d’offrir à ces enfants davantage de chances de réussite ?
En réalité, la préfecture du Morbihan ne dispose pas de moyens suffisants pour effectuer des recherches approfondies sur les conditions de vie de ces enfants, ni pour établir un état des lieux précis et actualisé de leur scolarisation. Pourtant, le droit à la formation ne peut se concevoir indépendamment du droit à la santé ainsi que de celui à un logement décent.
Dans certains bassins de vie, lorsque les aires d’accueil prévues par la loi existent, des progrès significatifs ont été constatés, surtout en primaire. La scolarisation au collège, en revanche, demeure très problématique. Nombre d’enfants sont ainsi inscrits au CNED, le Centre national d’enseignement à distance, ce qui ne les place pas dans les meilleures conditions pour apprendre.
Eu égard à cette situation délicate et hétérogène, je vous demande, monsieur le ministre délégué, de bien vouloir préciser quelles sont les mesures envisagées par le Gouvernement pour améliorer la scolarisation de ces jeunes, notamment en termes de poursuite de la création des aires d’accueil des gens du voyage et d’adaptation des règlements départementaux au calendrier scolaire.