L’économie française a de nombreux atouts, tenant en grande partie à l’activité des petites et moyennes entreprises qui maillent nos territoires. Ce sont ces entrepreneurs qui créent des emplois et font le dynamisme de notre pays. Quand une entreprise innovante alerte les élus parce qu’elle craint pour sa pérennité, c’est d’abord à la sauvegarde des emplois locaux que ceux-ci pensent.
C’est ainsi que la société Cellaouate, dont le siège est installé à Morlaix, m’a fait part de ses grandes inquiétudes quant à l’avenir de la filière de matériaux écologiques à base de ouate de cellulose. Elle est l’une des huit usines françaises qui fabriquent ce produit.
L’innovation est le maître mot de la politique industrielle française, depuis le « nouveau modèle français » annoncé par le Premier ministre jusqu’aux objectifs fixés à la Banque publique d’investissement. Or la réalité de la vie des entreprises montre que la route de l’innovation est parfois semée de nombreuses embûches. C’est le cas pour la filière de la ouate de cellulose, secteur clef de l’économie verte dans notre pays et facteur capital de la réussite du plan bâtiment Grenelle et du plan de rénovation énergétique des bâtiments annoncé le 21 mars dernier par le Président de la République. Le marché français de la ouate de cellulose représente un volume annuel de 45 000 tonnes, dont 15 000 tonnes importées. Il faut savoir que si cet isolant est nouveau en France, il est utilisé depuis soixante-dix ans aux États-Unis et quarante ans en Allemagne. Cette filière représente aujourd'hui de 3 % à 4 % du marché des isolants.
En 2011, la commission chargée de formuler les avis techniques, la CCFAT, a suspendu les avis techniques pour les ouates de cellulose contenant des sels de bore, alors même qu’elle les autorise pour les laines de verre « biosolubles », qui contiennent également de l’acide borique. Par ailleurs, la législation européenne concernant les substances chimiques restreint l’usage de ce produit si sa concentration est supérieure à 5, 5 %, ce qui n’est pas le cas pour la ouate de cellulose.
Entré en vigueur le 30 juin 2012, cet avis technique pousse les professionnels à remplacer les sels de bore par des sels d’ammonium. Cette nouvelle formule a été validée par la CCFAT, mais, dès le mois d’octobre 2012, des émanations d’ammoniaque se produisent sur certains chantiers, conduisant à l’arrêt de la fabrication. Des entreprises du bâtiment et, bien évidemment, des consommateurs se trouvent alors particulièrement lésés.
Le 5 novembre 2012, la CCFAT a ré-autorisé les sels de bore ! Le 17 mai dernier, la France aurait notifié à la Commission européenne un projet d’arrêté relatif aux isolants à base de ouate de cellulose qui interdit toute adjonction de sels d’ammonium. Or, selon les professionnels, les ouates de cellulose comportant à la fois des sels de bore et un pourcentage minime de sels d’ammonium sont stables. Ce type de formulation est utilisé dans d’autres pays européens sans que des retours négatifs aient été enregistrés.
En tout état de cause, les entreprises concernées, majoritairement des PME, regrettent que ces décisions soient prises sans concertation et ont dénoncé une distorsion de concurrence devant l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.
Je suis pour ma part attentif aux arguments relatifs à la protection des consommateurs, laquelle doit primer sur toute autre considération. Cependant, monsieur le ministre, je souhaiterais savoir si le Gouvernement a engagé des actions visant à la mise en place d’un système impartial de certification des matériaux d’isolation. En outre, est-il prévu d’instituer, dans le cadre du plan de rénovation énergétique des bâtiments, une aide particulière pour favoriser le développement dans notre pays des entreprises de fabrication d’éco-matériaux ?