Deux arguments sont donc évoqués en faveur de cette disposition. Le premier est la parité, répété à l’envi. Or nous savons très bien que, avec la multiplication des listes, le scrutin proportionnel dans les départements à trois sénateurs ne la garantit en rien. Les têtes de liste sont en général élues et cela ne donne évidemment lieu à aucun progrès en matière de parité.
Le second argument avancé est le pluralisme. Je crois qu’à ce sujet le rapport est très éclairant. Le rapporteur cite très justement, à la page 27, des chiffres précis. Il nous rappelle que, sur vingt-cinq départements pourvus de trois sièges de sénateurs, neuf comptent parmi leurs élus un sénateur appartenant au camp opposé aux deux autres. Ainsi, dans neuf départements sur vingt-cinq, le scrutin majoritaire n’empêche en rien le pluralisme. Le président de la commission des lois en est d’ailleurs la meilleure illustration !
Je ne vois donc pas en quoi votre proposition est susceptible de faire progresser la parité – nous savons très bien que c’est une fiction – et le pluralisme.
Nous connaissons évidemment l’intérêt de cette modification du mode de scrutin : elle est de pure opportunité électorale.
En outre, je suis un peu étonné qu’au mois de juin, presque en juillet, nous en arrivions à évoquer une telle question. Cela rompt avec la tradition républicaine qui consiste à ne pas modifier le mode de scrutin dans l’année précédant l’élection. J’ai observé l’ordre du jour particulièrement copieux de la session extraordinaire, qui présente une liste de quatre pages entières de textes à examiner. Dans la mesure où il y aura deux lectures de ce texte, nous n’en achèverons pas l’examen avant la fin de la session extraordinaire de juillet, peut-être même pas de celle de septembre. Or, en octobre, nous serons à moins d’un an des prochaines élections sénatoriales. Cela apparaîtra alors comme une magouille électorale, et les grands électeurs ne l’oublieront pas au moment de voter !