La séance, suspendue à douze heures vingt, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Jean-Claude Carle.
La séance est reprise.
M. le président. Mes chers collègues, il m’est particulièrement agréable de saluer la présence, dans notre tribune d’honneur, d’une délégation de députés de la XIIe Assemblée nationale populaire de la République populaire de Chine, conduite par M. Chi Wanshun, membre du comité permanent de l’Assemblée nationale populaire, vice-président de la commission des affaires étrangères et président du groupe d’amitié Chine-France.
Mmes et MM. les sénateurs ainsi que M. le ministre de l’intérieur se lèvent.
Notre groupe d’amitié France-Chine, animé par notre collègue Jean Besson, reçoit cette délégation aujourd’hui et demain au Sénat.
La délégation est en France depuis lundi. Cette visite se déroule à Paris et dans le sud-est de la France, autour des thèmes de la coopération entre les PME et l’urbanisation. Elle s’achèvera vendredi prochain.
Chers collègues chinois, nous vous souhaitons la plus cordiale bienvenue au Sénat français.
Applaudissements.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à l’élection des sénateurs (projet n° 377, résultat des travaux de la commission n° 539, rapport n° 538, rapport d’information n° 533).
Les motions de procédure ayant été repoussées lors de la précédente séance, nous passons à la discussion des articles.
La commission n’ayant pas adopté de texte, la discussion portera sur le projet de loi initial.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 8 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article L. 280 du code électoral est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« La composition du collège électoral appelé à élire les sénateurs assure, dans chaque département, la représentation des différentes catégories de collectivités territoriales et de la diversité des communes, en tenant compte de la population qui y réside.
« Ce collège électoral est composé : »
Cet amendement n’est pas soutenu.
Je suis donc saisi d’un amendement n° 61, présenté par M. Sueur, au nom de la commission des lois, et dont le libellé est strictement identique à celui de l’amendement n° 8 rectifié bis.
Vous avez la parole pour le défendre, monsieur le président de la commission.
En l’absence des signataires de l’amendement n° 8 rectifié bis, que nous n’avions pas prévue, je supplée temporairement notre rapporteur pour dire que la commission avait émis un avis favorable sur ledit amendement. Voilà pourquoi elle en reprend le texte.
L'amendement n° 57 rectifié, présenté par MM. de Montgolfier, Billard et Cornu, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article L. 280 du code électoral est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« La composition du collège électoral appelé à élire les sénatrices et les sénateurs reflète la population et les territoires qui composent le département.
« Ce collège électoral est composé : »
La parole est à M. Albéric de Montgolfier.
Pourquoi la France a-t-elle une chambre haute ? Devant nos collègues chinois présents en tribune, je rappelle que la mission première du Sénat est de représenter les collectivités, conformément à l’article 24 de la Constitution. Le présent amendement tend donc à tenir compte de cette spécificité, en rappelant la composition du collège électoral qui sera appelé à élire les sénatrices et les sénateurs. Cette composition doit bien sûr refléter la population, mais, au-delà de ce critère numérique, elle doit également représenter les collectivités.
Mes chers collègues, je vous invite à adopter cet amendement, qui vise à procéder à un rappel tout à fait nécessaire. En effet, on a parfois trop tendance à prendre en compte la seule représentation démographique, alors que le Sénat a avant tout vocation à représenter l’ensemble des collectivités et donc des territoires. Je suis certain que vous serez sensibles à cet argument.
Cet amendement est très proche de celui qu’avait déposé M. Mézard et ses collègues. Toutefois, les termes « tenant compte », qui figurent dans l’amendement repris par la commission, sans impliquer de mécanisme particulier, rappellent un critère que le Conseil constitutionnel nous reprocherait beaucoup de ne pas considérer. Je demande donc à M. de Montgolfier de bien vouloir rectifier son amendement afin de rendre les deux dispositifs identiques.
Monsieur de Montgolfier, acceptez-vous de modifier votre amendement dans le sens suggéré par la commission ?
L’esprit de l’amendement que j’ai présenté étant identique à celui déposé par M. Mézard, je me rallie à la proposition de la commission.
Je suis donc saisi d’un amendement n° 57 rectifié bis, présenté par MM. de Montgolfier, Billard et Cornu, et ainsi libellé :
Avantl’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article L. 280 du code électoral est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« La composition du collège électoral appelé à élire les sénateurs assure, dans chaque département, la représentation des différentes catégories de collectivités territoriales et de la diversité des communes, en tenant compte de la population qui y réside.
« Ce collège électoral est composé : »
Quel est l’avis du Gouvernement sur ces deux amendements identiques ?
M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur. Le consensus qui réunit à la fois MM. de Montgolfier, Mézard et Sueur ne peut qu’inciter le Gouvernement à s’incliner devant tant de sagesse.
Sourires.
En tant que cosignataire de l’amendement présenté par M. de Montgolfier, je tiens à dire que notre collègue a eu raison de se rallier à la proposition de la commission. Ce geste illustre le consensus qui règne au Sénat lorsqu’il s’agit de défendre les territoires. C’est un préambule important avant d’examiner les dispositions du projet de loi.
Bien souvent, on ne prend en compte que le critère de la population. Or c’est une erreur. C’est l’Assemblée nationale qui a vocation à représenter la population. Le Sénat, lui, représente les territoires !
Je le répète, ces dispositions consensuelles sont un bon début. Elles permettent à chacun d’affirmer que la représentation des territoires au sein de la Haute Assemblée doit primer sur celle de la population.
À mon sens, on ne peut pas opposer représentation des territoires et représentation de la population. Or l’adoption de ces amendements risquerait de figer la situation face aux évolutions démographiques à venir au sein de nos territoires, et dont il faut également tenir compte. Certes, le Sénat représente les collectivités, mais il représente également la population qui compose ces collectivités.
En conséquence, les membres du groupe CRC s’abstiendront.
Afficher la représentation des territoires est une chose, mais il faut surtout passer à l’acte !
Nous sommes actuellement en discussion avec les préfets en ce qui concerne le découpage dans le cadre de la nouvelle loi qui instaure le binôme. Or les territoires pourront être mis à mal si la population est le seul critère déterminant pour la formation des futurs grands cantons.
Monsieur le ministre, si vous avez la volonté de reconnaître que le Sénat représente les collectivités territoriales, vous aurez également la volonté d’assurer, avec votre cabinet, un découpage équitable de la nouvelle carte cantonale, qui doit véritablement représenter les territoires. Je fais appel à votre compréhension, d’autant que la carte de l’intercommunalité vient d’être déclinée, parfois de façon douloureuse, dans l’ensemble de nos départements. Respectons la cohésion sociale et territoriale que traduisent nos intercommunalités et faisons en sorte que chacun puisse se retrouver dans les futurs conseils départementaux.
Le Sénat mérite cette reconnaissance largement réclamée de véritable défenseur de ces territoires.
L’amendement n° 8 rectifié bis et l’amendement n° 57 rectifié visent le même objectif, mais je préfère la rédaction proposée par M. Mézard. En effet, l’amendement de M. de Montgolfier indique que « la composition du collège électoral appelé à élire les sénatrices et sénateurs reflète la population et les territoires qui composent le département ». Or, mes chers collègues, je vous rappelle que les sénateurs des Français établis hors de France ont, par définition, une circonscription hors du territoire national.
A contrario, l’amendement de M. Mézard indique bien que la composition du collège électoral est assurée « dans chaque département ». Il reflète donc beaucoup mieux la réalité. Voilà pourquoi je voterai cet amendement ; j’espère que M. de Montgolfier me le pardonnera.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 1er.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 27, présenté par M. Gorce, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er :
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 1° de l’article L. 280 du code électoral est abrogé.
La parole est à M. Gaëtan Gorce.
L'amendement n° 40 rectifié, présenté par MM. Cornu, de Montgolfier et Billard, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé,
Le 1° de l'article L. 280 du code électoral est complété par les mots : « et des sénateurs ».
La parole est à M. Gérard Cornu.
En effet, si l’amendement n° 27 était adopté, le mien tomberait. Or les deux dispositifs ne sont pas de même nature : l’amendement de M. Gorce tend à rayer les députés de la liste des grands électeurs. Le mien, qui vise également le code électoral, a pour objet d’assurer la présence des sénateurs au sein du collège électoral.
Mes chers collègues, si les sénateurs ne pouvaient pas voter aux élections sénatoriales, ce serait tout de même un comble ! N’oublions pas qu’on nous prépare actuellement un texte de loi visant à interdire le cumul des mandats. Jusqu’à présent, les sénateurs pouvaient souvent prendre part à ce scrutin parce qu’ils avaient un mandat local. À l’avenir, s’il n’est plus possible de cumuler un mandat local et un mandat national, on aboutira à cette contradiction tout à fait surréaliste : le sénateur sortant ne pourra pas voter aux élections sénatoriales !
Les mieux à même de se déterminer pour choisir les sénateurs restent les sénateurs eux-mêmes. C’est une question de bon sens !
Si l’amendement de M. Gorce devait être adopté, il faudrait rectifier le mien en supprimant la référence au 1° de l’article 280 du code électoral pour qu’il puisse être mis aux voix.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. La commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 27, qui a été défendu par M. Gorce avec une grande économie de moyens, pour une raison historique : les députés participent à l’élection des sénateurs depuis 1875. Nos relations avec l’Assemblée nationale sont bonnes et nous souhaitons qu’elles le demeurent.
Sourires.
Il est un second argument que je souhaite invoquer. Certains ont une conception un peu restrictive de l’article 24 de la Constitution, au terme duquel le Sénat représente les collectivités territoriales de la République : ils voudraient que les prérogatives de la seconde chambre se limitent aux textes relatifs aux collectivités territoriales, comme dans certains pays que chacun connaît. Or le bicamérisme tel que nous le concevons a vocation à donner aux deux chambres la possibilité de se prononcer sur tous les sujets qui relèvent du domaine de la loi. Le fait que les députés fassent partie du collège électoral des sénateurs n’est donc nullement choquant.
Je dois dire que l’amendement n° 40 rectifié de M. Cornu a donné lieu à un grand débat au sein de commission. Celle-ci a finalement émis un avis favorable au motif que, au moment de l’élection sénatoriale, les sénateurs exercent encore leur fonction. Dès lors qu’à l’instant du vote ils sont encore sénateurs, il nous est apparu qu’il y avait une certaine logique à ce qu’ils puissent voter, comme le font les députés et les autres grands électeurs.
Monsieur Collombat, vous le savez, nous avons de grands débats au sein de la commission des lois.
–, pour les raisons évoquées il y a un instant par la commission, le Gouvernement émet un avis défavorable. Il ne nous semble pas nécessaire de revenir sur le principe historiquement ancré selon lequel les députés participent à l’élection des sénateurs.
Au sujet de l’amendement n° 40 rectifié, je veux répondre à M. Cornu que, si, comme je le souhaite, le projet de loi limitant le cumul des mandats est adopté, les sénateurs, comme les députés, pourront garder un mandat local, ce qui leur permettra de participer à l’élection sénatoriale.
Exclamations sur les travées de l'UMP.
Le groupe socialiste, dans sa grande majorité, suivra l’avis de la commission et votera contre l’amendement n° 27 et pour l’amendement n° 40 rectifié.
Je voudrais tout de même préciser que je ne connais pas d’exemple où un élu ne peut pas participer à sa propre réélection, que ce soit aux municipales, aux cantonales ou aux législatives. Pourquoi les sénatoriales constitueraient-elles une exception ?
Je milite pour le mandat unique, je n’évoque donc pas les possibilités offertes par l’exercice d’un autre mandat. Monsieur le ministre, vous voulez éradiquer le cumul des mandats, n’en parlez donc pas non plus.
Lorsque nous avons un mandat de sénateur, nous représentons un territoire, notre département, nous devrions donc pouvoir voter tout à fait normalement.
Je suis de ceux qui pensent qu’il ne faut toucher au mode de scrutin que d’une main tremblante.
Pour ma part, je préférerais en rester au statu quo. C’est pourquoi je ne voterai ni l’un ni l’autre des amendements.
Les arguments qui ont été développés sont très éclairants. Nous le savons tous, l’élection sénatoriale est très particulière : l’accès au bureau de vote est non pas public mais réservé aux électeurs. Nous nous trouverions donc dans une situation très paradoxale où un sénateur qui n’aurait pas d’autre mandat en application de l’interdiction du cumul des mandats que prônent certains serait privé de la qualité de votant et ne pourrait même pas pénétrer dans le bureau de vote !
Cette situation serait totalement aberrante. Je le répète, il s’agirait de la seule élection où le candidat ne pourrait pas lui-même voter en raison de l’interdiction ou de la limitation du cumul des mandats, qu’à titre personnel je ne souhaite pas. Quel paradoxe !
L’amendement que j’ai cosigné avec Gérard Cornu vise à réparer cette anomalie, et j’espère qu’il rencontrera un large consensus.
Je suis désolée de mettre fin aux illusions de notre collègue Jean-Pierre Michel, mais je suis candidate aux élections sénatoriale dans un département où je n’exerce aucun autre mandat. Je ne peux donc pas assister au scrutin ni pénétrer dans le bureau de vote. Je dois me contenter de rester à l’entrée.
Sourires.
Et bien élue, d’ailleurs !
En outre, je ne peux pas voter. Il est donc en effet paradoxal que les autres candidats, qui eux exercent d’autres mandats, puissent voter aux élections sénatoriales.
Mme Nathalie Goulet. Je voterai donc des deux mains l'amendement n° 40 rectifié. Je serai ainsi assurée d’obtenir au moins une voix la fois prochaine…
Sourires.
Je voterai contre l’amendement de M. Gorce, qui vise à retirer aux députés la qualité de grands électeurs.
Cela étant, je suis un peu étonné par les arguments du ministre et du président de la commission des lois : ils ont en effet évoqué une raison historique. C’est bien la première fois que j’entends dire que l’histoire doit guider le droit ! Si tel est le cas, pourquoi ne revenons-nous pas à la belle époque où chaque commune avait un grand électeur ? Vous qui voulez prendre de plus en plus en considération le poids de la population, au mépris du poids des collectivités et du rôle des territoires, …
… je suis donc surpris, je le répète, qu’en l’espèce vous invoquiez un précédent historique, qui devrait, au contraire, nous ramener à une époque où chaque collectivité avait un grand électeur.
Je voterai moi aussi l’amendement de Gérard Cornu, parce qu’il semble tout à fait anormal qu’un sénateur ne puisse pas participer à une élection à laquelle il est candidat. Sur ce sujet également, votre argument ne m’a pas convaincu, monsieur le ministre. Vous nous dites que, selon le projet de loi concernant le cumul des mandats, il restera possible d’être conseiller municipal et donc grand électeur. Je me permets de vous rappeler que tous les conseillers municipaux ne sont pas grands électeurs.
Ils le sont dans une grande commune comme Évry, mais elle n’est pas représentative des 36 600 communes de France, dont les deux tiers ont moins de 500 habitants. Votre argument ne me paraît donc pas pertinent.
Comme le président de la commission, je considère qu’il est bon que les députés participent aux élections sénatoriales.
Je ne retire rien à ce que j’ai dit en présentant mon amendement, d’autant qu’un consensus semble se dégager. Décidément, nous démarrons bien ! Je voudrais simplement vous rappeler, monsieur le ministre, vous qui avez été maire d’une grande ville, qu’il existe encore des communes rurales.
Votre réponse avait sans doute été préparée par vos collaborateurs, et mon sentiment est que vous allez vous rallier aux explications que nous venons d’entendre. Comme nous venons de vous le dire, il existe des communes rurales dans lesquelles tous les conseillers municipaux ne sont pas forcément grands électeurs !
Je voudrais rebondir d’un mot sur ce que nous a dit notre collègue Maurey concernant la pertinence de la référence historique au droit de vote des députés pour l’élection des sénateurs. Il a raison dans le principe, une tradition peut être changée. Je voudrais toutefois prolonger les propos du président Sueur.
Il se trouve que durant l’Assemblée nationale de 1871, dans laquelle régnait une grande incertitude constitutionnelle puisque la majorité, qui certes s’effritait, était royaliste, l’existence d’un Sénat était une revendication des royalistes à laquelle les républicains étaient opposés. La tradition de l’époque évoquant en effet un Sénat conservateur.
Au moment d’atteindre le compromis, qui a conduit à l’amendement Wallon, les républicains se sont rendu compte qu’en donnant au Sénat une base électorale démocratique, ils pouvaient en faire un garant de la République. Gambetta a ainsi prononcé un grand discours dans lequel il expliquait son revirement et affirmait que la présence des députés dans le collège sénatorial constituait à ses yeux une garantie de son caractère démocratique. Cette considération de principe est, me semble-t-il, toujours valable.
À l’époque où le cumul était valorisé, le maire d’Évry que je fus était également député d’une circonscription dans laquelle il y avait des communes rurales. Je vous demande donc avec beaucoup d’amitié de ne pas me donner de leçons sur la ruralité !
Je rappelle que vous avez voté contre le mode de scrutin des conseillers départementaux en faisant valoir des arguments juridiques et constitutionnels que le Conseil constitutionnel a contredits quand il a validé le texte.
Cependant, compte tenu des arguments développés avec beaucoup de talent, non pas par vous, mais par Mme Goulet, concernant l’existence d’une inégalité au regard du vote entre le candidat sortant et celui ou celle qui est candidat sans mandat, le Gouvernement décide de s’en remettre à la sagesse du Sénat.
Sourires.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 1er.
L'amendement n° 62, présenté par M. Sueur, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er
Ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase de l'article L. 281 du code électoral, après le mot : « députés, », sont insérés les mots : « les sénateurs, ».
La parole est à M. le président de la commission.
Cet amendement purement rédactionnel fait suite à l’adoption de l’amendement n° 40 rectifié.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er.
Je constate par ailleurs que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L'amendement n° 7 rectifié, présenté par MM. Bertrand, Mézard, Baylet, C. Bourquin, Collin et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code électoral est ainsi modifié :
1° Les deux dernières phrases de l’article L. 281 sont supprimées ;
2° Après l’article L. 281, il est inséré un article L. 281-… ainsi rédigé :
« Art. L. 281-… – En cas d’empêchement majeur, les membres du collège électoral sénatorial peuvent exercer, sur leur demande écrite, leur droit de vote par procuration. Le mandataire doit être membre du collège électoral et ne peut disposer de plus d’une procuration. »
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
Nous proposons d’étendre le vote par procuration aux délégués des conseils municipaux, selon les mêmes conditions que celles qui sont aujourd’hui appliquées aux conseillers généraux et régionaux ainsi qu’aux députés.
Cet amendement tend à permettre aux délégués des conseils municipaux d’établir, en cas d’empêchement majeur, une procuration au profit d’un autre membre du collège électoral.
Je le rappelle, les dispositions actuellement en vigueur ont conduit à certaines confusions, lesquelles ont amené le Conseil constitutionnel à annuler le scrutin sénatorial en Lozère en 2011 et en Haute-Saône en 2002.
La commission a émis un avis favorable sur l’amendement de M. Bertrand défendu avec ardeur par M. Requier. La disposition proposée lui a paru opportune pour des raisons pratiques et de simplification.
Toutefois, la commission souhaite insister sur le fait que l’amendement limite les procurations aux cas d’empêchement « majeur ». Le préfet devra s’assurer qu’il s’agit bien de cela, et non d’une simple raison de confort.
L’adoption de cet amendement devrait logiquement entraîner la suppression des suppléants, ce que vous proposez d’ailleurs, monsieur le sénateur – cela ne m'a pas échappé ! –, dans un autre de vos amendements. Or la mise en place d’un système de suppléance pour les délégués municipaux répond à des spécificités propres. Si seul était possible le vote par procuration, un certain nombre de difficultés se feraient jour.
Ainsi, un délégué municipal décédé ou privé de ses droits civiques et civils ne pourrait être remplacé. La commune perdrait alors automatiquement une voix à l'élection sénatoriale. La même difficulté surviendrait en cas de démission du délégué municipal de sa fonction de conseiller municipal dans une commune de plus de 9 000 habitants et en cas d'annulation de l'élection d'un délégué, son remplacement étant pourvu par le suppléant.
Pour ces raisons, le Gouvernement estime qu'il convient de maintenir la suppléance. Si tel est le cas, l'extension du vote par procuration aux délégués municipaux n'apparaît alors plus justifiée.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Je ne voterai pas cet amendement pour deux raisons.
D'une part, cela n'a pas été rappelé, le vote aux élections sénatoriales fait partie des rares votes obligatoires. Si un délégué ne vient pas voter, il est normalement sanctionné par une amende, dont je ne sais d’ailleurs si elle est effectivement appliquée et recouvrée.
D'autre part, le caractère obligatoire de ce vote se traduit en pratique par un taux de participation extrêmement élevé des grands électeurs, supérieur dans beaucoup de départements à 99 %, un pourcentage qui fait rêver bon nombre de démocraties !
Aussi, je ne vois pas l'intérêt de prévoir ce type de procuration, d'autant plus que cela soulève le problème du maintien des suppléants très justement évoqué par M. le ministre.
Les élections sénatoriales sont les seules où le vote est obligatoire. Le fait de ne pas voter est théoriquement sanctionné, même si la sanction n'est pas toujours appliquée.
Être désigné une fois tous les six ans délégué sénatorial par un conseil municipal – il est vrai que, dans les grandes communes, les conseillers municipaux le sont automatiquement – représente un engagement. En cas de problème, le suppléant est là !
Franchement, si vous permettez le vote par procuration, vous verrez qu’après quelques élections il n’y aura plus que la moitié des délégués sénatoriaux qui iront voter.
La procuration serait réservée aux cas d'empêchement majeur dites-vous, mais on sait très bien ce que cela signifie ! Rappelez-vous qu’on cherchait des motifs d’empêchement pour certaines élections… Et puis, il n’a plus été nécessaire d’en trouver. Est-ce qu'avoir pris un billet d'avion pour partir en vacances constitue un empêchement majeur ?
Le vote aux élections sénatoriales est solennel : les délégués viennent voter à la préfecture. Je regretterais qu’il soit banalisé. Aussi, je ne voterai pas cet amendement, d’autant que M. le ministre nous a apporté d’excellents arguments en ce sens.
Je ne voterai pas non plus cet amendement, qui tend à banaliser le vote. Or l'élection des sénateurs est un moment important, qui intervient tous les six ans. Par ailleurs, comme l'a souligné Albéric de Montgolfier, le vote est obligatoire.
Ce qui me fait peur, ce sont les explications apportées par le président de la commission des lois sur les justifications qui devront être fournies. Nous n’avons pas intérêt à ajouter des conditions, sinon nous aurons sans cesse des contestations.
Il serait vraiment plus simple d’en rester au système actuel, d'autant que le nombre d'électeurs est élevé. Nous pourrions nous poser la question d’un éventuel changement si le taux de participation n’était que 60 %, mais il est souvent de 99 %. Il serait donc plus sage de s’en tenir au statu quo.
Les arguments qui viennent d’être avancés par nos collègues me semblent tout à fait justes. Le vote obligatoire est une spécificité de l'élection des sénateurs. Même si je comprends l’argument du président de la commission des lois, qui insistait sur le fait que la procuration serait réservée aux cas de force majeure, il ne me satisfait pas.
Je me range donc volontiers aux arguments de notre collègue Jean-Jacques Hyest. Instaurer un système de procuration ne ferait que complexifier une élection qui fonctionne bien et conduirait à des contestations.
Mon groupe votera donc contre cet amendement.
Voter à l'élection sénatoriale est une démarche très personnelle. Le choix se fait vraiment intuitu personae, plus encore que dans d'autres élections. J'irai même jusqu'à dire que le fait de participer à la journée d'élection peut éclairer le grand électeur, contribuer à son information. Vous voyez ce que je veux dire, mes chers collègues ! Les intentions de vote peuvent évoluer durant cette journée.
La participation physique du grand électeur à cette élection doit être encouragée ; a contrario, tout ce qui faciliterait son absence physique doit être écarté, sauf dans des cas extrêmes.
Je ne voterai donc pas cet amendement.
Je comprends les raisons qui ont amené M. Bertrand à rédiger cet amendement. Vous connaissez tous les événements qui se sont produits ; la présence de plusieurs suppléants pose problème, car la mécanique est tout de même relativement compliquée et peut soulever des difficultés, qui aboutissent devant le Conseil constitutionnel. Les élections de 2011 en ont fourni l'exemple.
Pour autant, je suis tout à fait sensible aux arguments de nos excellents collègues et de M. le ministre. C’est pourquoi, au nom de notre groupe, je retire cet amendement.
L'amendement n° 7 rectifié est retiré.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 26, présenté par M. Gorce, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un nouvel article ainsi rédigé :
Le 4° de l’article L. 280 du code électoral est ainsi rédigé :
4° Des délégués sénatoriaux élus en même temps que les conseillers municipaux dans les conditions fixées à l'article L. 284. »
La parole est à M. Gaëtan Gorce.
Mon amendement précédent, qui était relatif aux députés, était une sorte d’amendement d'appel au regard de la réflexion que nous devons engager sur le mode de scrutin de notre assemblée.
Étant un membre relativement récent du Sénat, comme M. le ministre a eu la gentillesse de le rappeler, je ne peux m'empêcher d'être surpris que la représentativité de notre haute et belle assemblée soit construite sur une base aussi étroite.
Si l’on doit défendre le Sénat – et on a raison de le faire, car il montre tous les jours par la qualité de son travail l’importance de sa participation à l'élaboration de la loi –, on doit s'interroger sur son mode de scrutin archaïque.
Exclamations sur les travées de l'UMP.
Je vois que vous défendez les archaïsmes, mes chers collègues. Je n’en suis pas surpris.
Le mode de scrutin est archaïque…
… parce qu'il repose sur une base trop étroite et que nos concitoyens n’y sont pas suffisamment associés.
On ne peut pas à la fois considérer que le mode de scrutin doit être élargi aux députés pour que le Sénat ne soit pas considéré comme étant seulement élu par les représentants des collectivités et refuser l’élargissement à d'autres catégories de population, comme je le propose au travers de mes amendements.
Je propose simplement que les délégués sénatoriaux soient désignés tous les six ans sur une base démographique plus large à l'occasion des élections municipales, en même temps que les délégués aux communautés de communes et que les conseillers municipaux.
Ce système permettrait d'assurer une véritable transparence à un scrutin dont on ne connaît l'issue que le lendemain et dont les citoyens ignorent l’existence le dimanche même où il se tient, alors qu'il s'agit tout de même de l’élection de la deuxième chambre du Parlement.
Je trouve cela déplorable, et je le dis ! Si cela déplaît à certains, peu importe : mon amendement est là, il sera certainement repoussé, mais il me permet au moins d'exprimer mon point de vue.
L'amendement n° 6 rectifié, présenté par MM. Bertrand, Mézard, Baylet, C. Bourquin, Collin et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code électoral est ainsi modifié :
1° Au 4° de l’article L. 280, les mots : « ou des suppléants de ces délégués » sont supprimés ;
2° À la fin de la première phrase de l’article L. 283, les mots : « et leurs suppléants » sont supprimés ;
3° L’article L. 286 est abrogé ;
4° L’article L. 288 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « et celle des suppléants se déroulent séparément » sont remplacés par les mots : « se déroule » ;
b) À la troisième phrase du premier alinéa, les mots : « ou suppléant » sont supprimés ;
c) À la première phrase du troisième alinéa, les mots : « et les suppléants » sont supprimés ;
d) Le dernier alinéa est supprimé ;
5° L’article L. 289 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « et des suppléants a lieu sur la même » sont remplacés par les mots : « a lieu au scrutin de » ;
b) À la seconde phrase du premier alinéa, les mots : « et de suppléants » sont supprimés ;
c) Au deuxième alinéa, les mots : « et de suppléants » sont supprimés ;
d) Le troisième alinéa est supprimé ;
e) Au quatrième alinéa, le mot : « suppléant » est remplacé par le mot : « suivant » ;
f) À la première phrase du dernier alinéa, les mots : « et les suppléants » sont supprimés ;
6° À l’article L. 290, les mots : « et suppléants » sont supprimés ;
7° À l’article L. 291, les mots : « et des suppléants » sont supprimés ;
8° Au second alinéa de l’article L. 292, les mots : « et suppléants » sont supprimés ;
9° À la première phrase de l’article L. 293, les mots : « ou d’un suppléant » et les mots : « des suppléants élus » sont supprimés ;
10° Le second alinéa de l’article L. 318 est supprimé.
Cet amendement n'a plus d’objet.
L'amendement n° 13 rectifié ter, présenté par M. Détraigne, Mmes Férat, Morin-Desailly et Goy-Chavent et MM. J.L. Dupont, Deneux, Bockel, Capo-Canellas, Tandonnet, Amoudry, Maurey, J. Boyer, Guerriau, Jarlier et Mercier, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le quatrième alinéa de l'article L. 288 du code électoral est supprimé.
La parole est à M. Yves Détraigne.
Le code électoral fixe l'ordre qui doit être suivi lorsque les suppléants votent à la place des titulaires. Lors des dernières élections sénatoriales, voilà plus d'un an, nous avons constaté que cela a parfois posé des problèmes, le suppléant normalement prévu dans l'ordre du tableau fixé par le code électoral n’étant pas celui qui est allé voter à la place du titulaire empêché.
Par mon amendement, je propose simplement de supprimer l'ordre imposé pour le vote des suppléants.
L'amendement n° 20 rectifié bis, présenté par Mmes Cohen et Gonthier-Maurin, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article L. 289 du code électoral est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Sur chacune des listes, l’écart entre le nombre de candidats et de suppléants de chaque sexe ne peut être supérieur à un. Chaque liste est composée alternativement d’un candidat de chaque sexe et d’un suppléant de chaque sexe. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Les dispositions relatives à la désignation des délégués qui composent le collège sénatorial ainsi que leurs suppléants ne sont assorties d’aucun mécanisme de nature à favoriser la parité. Cette situation est d’autant plus paradoxale qu’un nombre appréciable de ces délégués et suppléants est élu au scrutin de liste, un mode de scrutin qui se prête tout particulièrement aux mécanismes paritaires.
Le présent amendement, qui apporte une traduction législative à la recommandation n° 7 de la délégation aux droits des femmes, tend à remédier à cette situation en précisant que, dans les communes où les délégués sont élus à la proportionnelle, chaque liste devra être constituée alternativement d’un candidat de chaque sexe. Cette règle s’imposera également aux suppléants qui figurent d’ailleurs sur la même liste.
Une amélioration de la parité au sein du collège sénatorial ne suffira certes pas à garantir l’élection d’un plus grand nombre de candidates aux élections sénatoriales, mais elle pourrait avoir un effet dissuasif sur le dépôt de listes dissidentes ostensiblement conçues pour contourner l’exigence de parité.
L'amendement n° 26 tend à proposer un nouveau système qui révolutionnerait la désignation des grands électeurs et romprait avec la tradition républicaine de désignation des électeurs sénatoriaux au sein même des conseils municipaux. Cet amendement transformerait le système de désignation d’une partie de ces électeurs sénatoriaux.
De plus, cet amendement n’est pas sans présenter un risque constitutionnel, dans la mesure où le corps électoral du Sénat doit être l’émanation des collectivités territoriales, aux termes de la décision n° 2000-431 du Conseil constitutionnel du 6 juillet 2000. En effet, si le Sénat assure la représentation des collectivités territoriales, il est logique que les délégués des conseils municipaux soient désignés par les conseils municipaux eux-mêmes et non par les électeurs directement.
Pour toutes ces raisons, la commission des lois a émis un avis défavorable sur cet amendement.
L’amendement n° 13 rectifié ter vise à supprimer la règle selon laquelle l’ordre des suppléants est déterminé par le nombre de voix obtenues, dans les communes dont les conseils municipaux sont élus au scrutin majoritaire, c’est-à-dire dans les communes de moins de 1 000 habitants – je vous rappelle que ce seuil était auparavant de 3 500 habitants.
Il est vrai que cette règle est contraignante, puisqu’elle impose de recourir aux suppléants dans un ordre précis en cas d’empêchement d’un titulaire. Des problèmes pratiques peuvent se poser, mais il faut bien concevoir que, si cette règle était supprimée, le maire désignerait parmi les suppléants celui qui lui conviendrait le mieux. Ce système ne serait pas des plus démocratiques.
Dès lors qu’on conserve le mode actuel d’élection des délégués et des suppléants, il faut maintenir la règle : les suppléants peuvent être appelés à siéger au sein du collège électoral selon le nombre de voix qu’ils ont obtenues au sein du conseil municipal, et non selon un choix du maire fondé sur la disponibilité de tel ou tel, ou sur son choix politique présumé. Aussi la commission des lois a-t-elle émis un avis défavorable.
Quant à l’amendement n° 20 rectifié bis, qui prévoit la constitution de listes paritaires pour la désignation des délégués dans les communes de 1 000 habitants et plus, il soulève deux objections.
Sur le plan constitutionnel, d’abord, l’objectif fixé par l’article 1er de la Constitution d’un « égal accès des femmes et des hommes », en tant que dérogation au principe d’égalité, est d’interprétation stricte : il concerne seulement les mandats électoraux et les fonctions électives. Or le fait d’être désigné par le conseil municipal pour siéger au sein du collège électoral des sénateurs ne confère pas un mandat électoral ou une fonction élective, mais simplement la qualité d’électeur à une élection au suffrage indirect.
Sur le plan pratique, ensuite, l’article L. 289 du code électoral n’imposant pas la présentation de listes complètes, la règle proposée pourrait être totalement contournée par le jeu de candidatures isolées.
Pour ces deux raisons, la commission des lois demande le retrait de cet amendement ; s’il est maintenu, elle y sera défavorable.
L’amendement n° 26 de l’honorable sénateur Gorce soulève plusieurs objections.
La première se situe sur le plan des principes. À mon tour, je rappelle que, aux termes de l’article 24 de la Constitution, le Sénat « assure la représentation des collectivités territoriales de la République ».
Il n’est donc pas nécessaire que les membres du collège sénatorial soient élus au suffrage universel direct, en tout cas dans le cadre de ce débat.
Sans doute, on peut débattre de tout, mais attention : emprunter la voie proposée par M. Gorce conduirait à changer la nature de la Constitution ! Je suis heureux de recevoir, sur cette question, le soutien de M. Mézard…
Par ailleurs, le Sénat étant renouvelé en deux séries distinctes, désigner les délégués au moment des élections municipales ne garantirait pas un collège sénatorial toujours constitué peu de temps avant le scrutin.
Enfin, comme l’amendement n° 30 que M. Gorce a déposé, l’amendement n° 26 prévoit que la liste des candidats à la fonction de délégué sénatorial figure, de manière distincte, sur le même bulletin que la liste des candidats au conseil municipal. Cette modalité pratique soulève des difficultés, dans la mesure où la loi du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral prévoit déjà la présentation d’une double liste sur les bulletins de vote lors des élections municipales : l’une pour les candidats au conseil municipal, l’autre pour les candidats au conseil communautaire.
Dans ces conditions, monsieur Gorce, votre amendement aurait pour conséquence de faire figurer sur les bulletins de vote une troisième liste ; vous conviendrez que ces bulletins deviendraient peu lisibles pour les électeurs. C’est pourquoi le Gouvernement invite le Sénat à rejeter votre amendement.
En ce qui concerne l’amendement n° 13 rectifié ter, le Gouvernement appuie les objections présentées par M. le rapporteur et émet un avis défavorable.
Enfin, madame la rapporteur, vous avez expliqué en présentant l’amendement n° 20 rectifié bis qu’il s’agissait d’apporter une traduction législative à la recommandation n° 7 du rapport de la délégation sénatoriale aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, qui consiste à compléter l’article L. 289 du code électoral. Puisque, dès 2014, des listes paritaires devront être présentées dans les communes de 1 000 habitants et plus pour l’élection des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, il semble souhaitable de prévoir la même obligation pour l’élection des délégués et des suppléants au collège sénatorial.
Le Gouvernement est donc favorable à votre amendement dans son principe, sous réserve qu’un sous-amendement soit adopté. En effet, les délégués et les suppléants étant élus sur une même liste, je propose la formulation suivante : « Chaque liste de candidats aux fonctions de délégués et de suppléants est composée alternativement d’un candidat de chaque sexe ». Il me semble que cette rédaction serait plus claire.
Mme Laurence Cohen acquiesce.
Je suis donc saisi d’un sous-amendement n° 63, présenté par le Gouvernement et ainsi libellé :
Amendement 20 rectifié bis
Alinéas 3 et 4
Rédiger comme suit ces alinéas :
Le premier alinéa de l'article L. 289 du code électoral est complété par une phrase ainsi rédigée :
Chaque liste de candidats aux fonctions de délégués et de suppléants est composée alternativement d'un candidat de chaque sexe.
La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour explication de vote sur l'amendement n° 26.
Je ne vais pas relancer le débat, car je sais bien quel sort va être réservé à mon amendement. Je tiens néanmoins à souligner une petite contradiction : on ne peut pas affirmer, comme nombre de nos collègues le font à juste titre, que la vocation du Sénat est d’intervenir dans d’autres domaines que celui des collectivités territoriales – par exemple, dans le domaine de la protection des libertés publiques et individuelles, il a montré quelle pouvait être son utilité, quels que soient les gouvernements – et, au même moment, vouloir limiter le corps électoral à sa définition actuelle.
La politique et notre démocratie traversent une crise profonde, dont nous savons qu’elle est liée, pour l’essentiel, aux interrogations de nos concitoyens sur le fonctionnement de nos institutions. Dans ce contexte, il serait normal que nous jouions, chaque fois que l’occasion s’en présente, la carte d’une participation élargie des citoyens et d’une transparence accrue des modes d’élection et du fonctionnement de nos institutions.
J’ai bien conscience que ma position ne trouvera pas le soutien d’une majorité au Sénat ; ce serait une révolution, et le Sénat ne l’a jamais fait. Reste qu’il serait utile que nous ouvrions une réflexion sur cette question si nous voulons éviter que la seconde chambre subisse à l’avenir les critiques qu’elle a subies par le passé et qui, chers collègues, ne vous ont pas fait plaisir !
M. Claude Dilain et Mme Hélène Lipietz applaudissent.
Je ne dirai pas, comme M. Gorce, que le mode de désignation des délégués sénatoriaux est archaïque ; il a fait ses preuves, et il a sa légitimité. Je dois pourtant admettre que nous devons être cohérents. Il n’y a pas si longtemps, nous avons voté comme un seul homme – que nos collègues femmes me pardonnent cette expression –, autrement dit à l’unanimité, l’élection directe par les citoyens des délégués sénatoriaux pour les Français de l’étranger. Je constate que ce système est exactement celui proposé par M. Gorce dans son amendement. Il existe donc un précédent !
Mon cher collègue, il y a une collectivité de fait !
Cela étant, trouvez-vous normal, mes chers collègues, que le Conseil constitutionnel estime que le collège électoral sénatorial ne doit pas comprendre plus de délégués non élus que de représentants élus ? Pour ma part, je suis un peu étonné par ce qui se passe à Paris où les délégués sénatoriaux non élus sont beaucoup plus nombreux que les représentants élus par le conseil de Paris.
Comme l’a souligné M. Gorce, nous devons réfléchir à cette question. Pour ma part, je ne voterai pas contre l’amendement n° 26 ; je m’abstiendrai, parce que j’estime que, s’il n’est pas possible de l’adopter, nous devons réfléchir au moyen de changer des situations qui ne sont pas tout à fait satisfaisantes, c’est le moins que l’on puisse dire. Si nous voulons un collège sénatorial beaucoup plus représentatif, il ne faut pas écarter la possibilité de faire élire les délégués directement par les citoyens.
Il faut tout de même le rappeler : les collectivités territoriales ne sont pas des bouts de papier ! Elles sont composées d’hommes et de femmes et ce sont eux qui votent pour élire leurs représentants. La démarche de M. Gorce n’est donc absolument pas anormale. Elle est peut-être prématurée, mais elle permet au moins d’engager une réflexion, qui, je l’espère, va se poursuivre.
Je ne crois pas que ce débat oppose les anciens et les modernes, les archaïques et les réformateurs. En réalité, ce n’est pas une question de modernité, c’est une question de sens !
Contrairement à ce que M. Gorce a soutenu, les sénateurs ne sont pas élus par un corps électoral, mais par un collège électoral. En effet, comme il a été rappelé au moment de l’examen de l’amendement n° 7 rectifié, les grands électeurs n’ont pas le droit de vote, mais l’obligation de voter ; ils remplissent une fonction et ils accomplissent un devoir pour lesquels, en application de la loi électorale, ils ont été sélectionnés.
Mes chers collègues, le corps électoral des sénateurs n’est pas différent de celui des députés : nous sommes élus au suffrage universel !
Simplement, dans le cas des sénateurs, le suffrage universel s’exprime à travers les élus des collectivités territoriales. De fait, aux termes de l’article 24 de la Constitution, le Sénat assure la représentation de ces collectivités, à côté de celle des Français de l’étranger.
La fonction de ce collège électoral est remplie par des personnes qui ont l’expérience de la gestion des affaires publiques au niveau des communes, des départements et des régions. C’est cette spécificité qui les autorise à s’exprimer au nom des collectivités territoriales.
Dans ces conditions, comme M. le ministre l’a rappelé à juste titre, seuls les membres des assemblées élues des collectivités territoriales doivent pouvoir faire partie du collège électoral appelé à désigner les sénateurs.
Il y a bien sûr des exceptions ; elles doivent être considérées comme telles et l’on doit veiller à ne pas les élargir de manière imprudente, au risque d’altérer, au niveau national ou seulement dans certains départements, la représentativité du Sénat à l’égard des collectivités territoriales de la République.
Monsieur Gorce, votre amendement n’est pas moderne : il tourne le dos au sens profond de notre assemblée. En ce qui me concerne, je voterai contre !
Je voterai moi aussi contre l’amendement de M. Gorce, et j’approuve les arguments de M. le ministre.
Je crois qu’on a tout intérêt, lorsqu’on légifère, à rechercher la plus grande simplicité. Quand les élections sont compliquées, les électeurs ne se déplacent pas ! Si nous ajoutons des strates de complexité, les électeurs auront d’autant plus de mal à s’y retrouver et la participation sera d’autant plus faible.
Par ailleurs, je ne crois pas que le système actuel soit archaïque. Je trouve vos propos assez déplaisants, monsieur Gorce. Je ne comprends pas pourquoi vous êtes venu au Sénat si c’est pour le critiquer. Pourquoi n’êtes-vous pas resté à l’Assemblée nationale ?
Pour avoir été député avant d’être sénateur, je reconnais la valeur de tout le travail accompli par les sénateurs. Le Sénat a vraiment son utilité et qui est très complémentaire de l’Assemblée nationale. Comme il a été rappelé, l’Assemblée nationale a vocation à représenter la population ; la Haute Assemblée a vocation à représenter les territoires, ce qui n’empêche pas qu’elle représente aussi la population.
Puisque vous avez été député, vous devriez vous être aperçu que les deux assemblées font un travail différent. Vous voyez bien que, ici, il y a plus de profondeur dans la réflexion.
Ce n’est pas être désagréable à l’égard des députés que de faire ce constat : on sait bien que, à l’Assemblée nationale, il y a des effets de balancier et des effets de mode. Le Sénat, au contraire, du fait de son mode d’élection, peut mener une réflexion plus profonde ; les élus locaux qui le composent savent de quoi ils parlent et comprennent le territoire.
Les deux chambres sont donc complémentaires. La Constitution est très claire sur ce point.
Je souhaite soulever trois points.
Tout d’abord, certains archaïsmes valent bien des évolutions dont on se passerait volontiers. Tous les lendemains ne chantent pas !
Ensuite, notre débat pose en creux le problème de cette anomalie démocratique qu’est le Sénat. Or quel est l’intérêt du Sénat dans une démocratie ? Comme M. Cornu vient de le dire, il est relativement plus à l’abri des émotions médiatiques que l’autre chambre.
Effectivement, de moins en moins !
En Grande-Bretagne, par exemple, la Chambre des Lords prend paradoxalement des positions qui apparaissent plus progressistes que celles de la Chambre des Communes.
Si d’aventure le Sénat devait être élu selon des modalités comparables à celles de l’Assemblée nationale, je ne verrais pas l’intérêt d’avoir une deuxième chambre.
Enfin – je n’insisterai pas sur ce point qui a déjà été évoqué plusieurs fois –, le Sénat représente, que vous le vouliez ou non, non pas des électeurs ou des individus, mais des collectivités. J’ai la faiblesse de penser qu’une collectivité a aussi une réalité sociale, affective – on en a tous les jours la démonstration – et politique.
Voilà quelques années, une mission d’information de la commission des lois conduite par le doyen Gélard a procédé à un examen des modes de scrutin pour les deuxièmes chambres dans plusieurs pays européens. Nous avions entamé nos travaux un peu la mort dans l’âme et, au final, nous étions arrivés au constat suivant, reprenant en quelque sorte les mots de Talleyrand : quand nous nous regardons, nous nous inquiétons, mais quand nous nous comparons, nous nous rassurons !
Applaudissements sur certaines travées de l'UMP.
Élu moi aussi récemment, je n’ai pas le sentiment d’être arrivé dans une assemblée archaïque. Au contraire, je constate que des progrès sont régulièrement proposés par le Sénat. Je suis donc complètement en désaccord avec les arguments développés par notre collègue Gorce.
La représentation des collectivités territoriales ne peut véritablement se faire qu’avec notre mode de scrutin. Si, dans un département comme le mien, c’est-à-dire peu peuplé, puisqu’il y a 52 habitants au kilomètre carré, avec des écarts allant de 7 habitants au kilomètre carré dans certaines zones jusqu’à 3 000 habitants au kilomètre carré pour la ville de Reims, la représentation de tous les territoires n’est pas assurée, même ceux à faible densité de population, cela voudrait dire que la ruralité n’a plus sa place au Sénat. Or nous savons tous combien elle est importante !
Par ailleurs, vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, le Sénat est renouvelable par moitié tous les trois ans. C’est un gage de stabilité, qui n’empêche pas l’alternance, comme nous l’avons vu aux dernières élections.
Les hommes politiques ont une fonction d’incarnation. S’ils veulent être respectés, il faut en tenir compte. C’est pourquoi je suis opposé à l’abaissement du seuil à trois sénateurs pour l’application du mode de scrutin proportionnel. Je pense que c’est le scrutin majoritaire qui reflète véritablement la volonté des électeurs de voter pour des hommes et des femmes représentant les intérêts de la population.
Je voterai donc contre l’amendement n° 26.
Je voterai également contre l’amendement déposé par M. Gorce.
Sur le plan international, comme l’a dit M. Collombat, toutes les études montrent que les chambres hautes ont en général un mode de scrutin différent, et personne ne remet en cause leur légitimité démocratique. Pourquoi en irait-il différemment en France ? Notre mode de scrutin repose sur un corps électoral composé essentiellement de maires et de délégués des conseils municipaux. Or quelle est l’élection en France qui enregistre la plus forte participation ? Il s’agit de l’élection municipale.
Les sénateurs s’appuient donc sur un corps électoral de plusieurs dizaines de milliers de conseillers municipaux, ce qui confère un caractère hautement démocratique à leur élection, même s’il s’agit d’un mode de scrutin indirect.
Je voterai aussi contre cet amendement.
Si le Gouvernement a fait preuve d’une certaine modération dans l’élaboration de son projet de loi, parallèlement, certains adoptent des positions extrémistes. Ce serait remettre en cause le Sénat que de contester sa représentativité au travers du mode de scrutin. L’auteur de cet amendement et les membres de la majorité qui le soutiennent auraient mieux fait d’en discuter auparavant avec le Gouvernement, lequel a compris qu’il ne fallait pas dépasser les bornes et aller au-delà du raisonnable.
Finalement, je suis surpris que, à l’occasion de la discussion du projet de loi, il y ait, au sein même de la majorité censée soutenir le Gouvernement, des sénateurs qui en rajoutent en proposant des solutions que je considère comme extravagantes par rapport à la logique sénatoriale telle qu’elle est inscrite dans la Constitution : en contrepartie du fait que nous ne soyons pas élus au suffrage uninominal direct comme les députés, nous avons moins de pouvoirs, puisque l’Assemblée nationale a le dernier mot. Tel est le cas pour la plupart des deuxièmes chambres dans les grandes démocraties européennes.
Il serait malvenu pour la majorité de remettre maintenant en cause cet arbitrage. Il aurait mieux valu que ses élus et le Gouvernement réfléchissent en amont pour se mettre d’accord.
Nous discutons ici de notre propre mode d’élection, donc restons calmes, écoutons-nous et ne nous en prenons pas les uns aux autres.
Même si M. Gorce n’a pas besoin d’avocat, je signale qu’il n’a pas critiqué le Sénat en tant que tel, au contraire.
Il a simplement jugé que, pour accroître encore la visibilité du Sénat, sa légitimité, il faudrait peut-être trouver un autre système électoral. C’est tout ce qu’il a dit, donc restons modérés dans nos propos !
Pour ma part, je partage la position de M. Cointat, qui pointe un problème d’élection des sénateurs. Il a raison !
Cela étant, je ne voterai pas l’amendement de M. Gorce, mais je pense qu’il faut y réfléchir, sans nous livrer à des invectives pour nous retrouver au Journal officiel.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
Même si votre serviteur était plutôt favorable à l’amendement n° 20 rectifié bis, la commission s’est montrée majoritairement défavorable au fait de présenter des listes paritaires pour la désignation des délégués des conseils municipaux au sein du collège électoral.
À mon sens, le sous-amendement du Gouvernement permet de relancer le débat. À titre personnel, j’y suis donc favorable.
Le sous-amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 1er.
L'amendement n° 28, présenté par M. Gorce, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase de l'article L. 281 du code électoral, le mot : « députés » est remplacé par les mots : « délégués sénatoriaux ».
Cet amendement n’a plus d’objet.
L'amendement n° 29, présenté par M. Gorce, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l'article L. 282 du code électoral, le mot : « député, » est supprimé.
Cet amendement n’a plus d’objet.
L'amendement n° 41 rectifié, présenté par MM. Cornu, de Montgolfier et Billard, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 282 du code électoral est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après le mot : « député, », il est inséré le mot : « sénateur, » ;
2° Au second alinéa, après le mot : « député », sont insérés les mots : « ou sénateur ».
La parole est à M. Gérard Cornu.
Il s’agit d’un amendement de conséquence après l’adoption de l’amendement n° 40 rectifié.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 1er.
L'amendement n° 11 rectifié ter, présenté par M. Détraigne, Mmes Férat, Morin-Desailly et Goy-Chavent et MM. J.L. Dupont, Merceron, Deneux, Bockel, Capo-Canellas, Tandonnet, Amoudry, Maurey, J. Boyer, Guené, Jarlier, Mercier et Dubois, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase de l’article L. 283 du code électoral, les mots : « le jour auquel » sont remplacés par les mots : « la semaine au cours de laquelle ».
La parole est à M. Yves Détraigne.
Actuellement, le code électoral impose un jour unique pour que chaque conseil municipal désigne ses grands électeurs. Cette règle pose quelques problèmes, puisqu’un conseil municipal peut préférer se réunir la veille ou le lendemain.
Cet amendement a donc pour objet d’introduire un peu de souplesse dans la fixation de la date de désignation des grands électeurs en proposant que le code électoral indique non pas un jour précis, mais une période d’une semaine.
Le sous-amendement n° 60, présenté par Mme Lipietz, est ainsi libellé :
Amendement n° 11 rectifié ter, alinéa 3
Remplacer les mots :
la semaine au cours de laquelle
par les mots :
les trois jours au cours desquels
La parole est à Mme Hélène Lipietz.
Ce sous-amendement tend à laisser une marge de manœuvre pour la désignation des grands électeurs en prévoyant non pas une seule journée – on sait les dérives auxquelles cela a mené –, mais une période de trois jours. Une semaine pour procéder à cette élection, c’est peut-être beaucoup ; le délai que je propose me paraît plus adapté.
Le rapporteur que je suis n’est pas défavorable à l’introduction de cette souplesse, mais la commission a considéré que cette mesure pouvait favoriser des manœuvres électorales de la part de candidats aux élections sénatoriales, qui auraient ainsi la possibilité de peser davantage sur le choix des délégués par les conseils municipaux. Elle a donc émis un avis défavorable à la période d’une semaine prévue par l’amendement n° 11 rectifié ter. Je crois qu’on peut conclure de ses débats qu’elle ne serait pas non plus favorable au sous-amendement n° 60, qui vise à réduire ce délai à trois jours.
Pour ma part, je voterai l’amendement de M. Détraigne, et je vais en expliquer les raisons.
L’argument selon lequel une manipulation du corps électoral serait possible si tous les délégués sénatoriaux n’étaient pas désignés le même jour me choque. Le fait d’entendre certains, dans cet hémicycle, expliquer que des pressions sur les élus locaux seraient à craindre dès lors que la désignation s’étalerait sur trois, quatre, cinq, six ou sept jours heurte mes principes.
Si vraiment d’aucuns le pensent, pourquoi la loi ne fixe-t-elle pas non seulement un jour, mais une heure, pour que tous les conseils municipaux de tout le département se réunissent exactement au même moment ?
Eh oui ! sur les travées de l'UMP.
En effet, un décalage des réunions dans une même journée pourrait permettre l’organisation d’un certain nombre de manœuvres.
Par quel retournement notre assemblée, qui, habituellement, fait le pari de l’intelligence des territoires et plaide, sur beaucoup de textes, pour un renforcement des responsabilités et des pouvoirs des élus locaux, en vient-elle aujourd’hui à se méfier des conseils municipaux, qui, selon certains, pourraient être tentés de décaler leur jour de réunion pour faire en sorte de modifier la liste de ceux qui vont être présentés au suffrage ? Cela me semble une hérésie par rapport à la mission de la Haute Assemblée et, plus largement, par rapport à notre conception du rôle des élus locaux au quotidien.
Prétendre que la manipulation commencerait dès lors que le premier conseil municipal aurait désigné ses délégués est assez surprenant : soit des moyens de pression existent, et le fait que la désignation se passe sur plusieurs jours ou le même jour n’y change pas grand-chose, soit ces moyens de pression n’existent pas ! Au nom de quoi n’introduirions-nous pas un minimum de souplesse afin de permettre à toutes les communes concernées de s’organiser ?
Au moment où le Président de la République demande un choc de simplification – dont on mesure qu’il n’est pas évident à mettre en œuvre dans tous les domaines –, laisser un peu de souplesse à nos assemblées locales ne devrait franchement gêner personne !
M. Patrice Gélard. Je suis en total désaccord avec ce que vient de dire notre collègue Christophe Béchu.
Ah ! sur les travées du groupe socialiste.
En effet, ce n’est pas seulement une question de logique électorale qui est en cause, c’est aussi une tradition républicaine. Aussi loin que remonte le mode d’élection des sénateurs que nous connaissons actuellement, les délégués des conseils municipaux ont toujours été désignés le même jour à la même heure : en règle générale, un dimanche à dix heures du matin !
Marques de désaccord sur de nombreuses travées.
Sourires.
Traditionnellement, la convocation était adressée par le préfet. Tel n’a peut-être pas été le cas la dernière fois, mais la tradition républicaine voulait que ces opérations soient réalisées le même jour, à la même heure.
Reste que je ne crois pas que les candidats puissent procéder à des manipulations. En revanche, les manipulations peuvent venir d’ailleurs. De la presse, par exemple, qui va commenter les désignations intervenues le lundi et pronostiquer le résultat du scrutin du mardi. Le risque n’est donc pas que des manipulations interviennent au sein des conseils municipaux, mais à l’extérieur de ceux-ci.
Enfin, à titre personnel, il me semble que le fait que les désignations interviennent toutes le même jour à la même heure confère à l’ensemble de ces opérations une forme de solennité tout à fait positive.
Lorsque notre collègue Yves Détraigne a déposé cet amendement, je ne l’ai pas cosigné. Il me semble en effet que la simultanéité des opérations représente déjà une forme de simplification. Je ne crois pas à la possibilité d’une manipulation, car il est assez rare que les conseillers municipaux aient une étiquette politique particulière dans les communes rurales.
En revanche, les services préfectoraux rencontrent de grandes difficultés à collecter les données et à dresser les listes de grands électeurs, que nous n’obtenons jamais à temps pour organiser notre campagne électorale. Le fait que la désignation des délégués se déroule le même jour, à la même heure, dans toutes les communes, est donc une bonne chose. Voilà pourquoi: je ne voterai pas cet amendement.
Je trouve les arguments de Christophe Béchu excellents. Nous devons faire confiance aux élus locaux et apporter un peu de souplesse dans l’organisation de la désignation des grands électeurs. Je rappelle à M. Gélard que cette opération doit intervenir partout le même jour, mais pas nécessairement à la même heure.
Faut-il accorder trois jours ou une semaine pour organiser la désignation ? Je n’en sais rien. L’essentiel est d’introduire une certaine souplesse dans la désignation des grands électeurs en faisant confiance aux élus locaux. Adopter une attitude dirigiste consistant à imposer la réunion du conseil municipal à un jour donné me semble relever d’un autre âge.
De nombreux arguments contraires ont été développés.
Si Yves Détraigne, sénateur du département de la Marne comme moi, a déposé cet amendement, c’est parce qu’il exprime une remontée du terrain ! C’est en discutant avec les grands électeurs que de telles propositions peuvent être élaborées. Pour être l’émanation des territoires, il faut aussi savoir s’inspirer de la réflexion locale.
J’ai fait campagne avec Yves Détraigne : combien de fois ne nous a-t-on pas demandé d’apporter un peu de souplesse ? Une commune a dû annuler la célébration d’un jumelage parce que la convocation du conseil municipal pour désigner les grands électeurs tombait le même jour ! Si on veut faire campagne pour la désignation des grands électeurs, on dispose de mois et d’années pour le faire, on ne s’y prend pas au dernier moment. Il n’y aura donc aucune pression, d’autant plus que les pressions de dernière heure sont toujours très mal ressenties.
Les territoires demandent un peu plus de souplesse pour procéder à ces opérations ; leur accorder une semaine me paraît intéressant !
L’argument tiré des pressions exercées sur les conseils municipaux ne me paraît pas du tout crédible. En revanche, en tant que candidats aux élections sénatoriales, nous avons tous été confrontés au problème de l’accès aux listes électorales. Lorsque la désignation a lieu le même jour, les services préfectoraux ont déjà beaucoup de mal à nous donner des listes à jour ; si on étale le processus sur huit jours, le foutoir sera complet !
Mon département compte plus de sept cents communes. La situation est parfois extravagante, parce qu’il arrive que certains conseils municipaux ne transmettent pas les informations. Si la préfecture doit attendre huit jours de plus pour constater l’absence de réponse, les problèmes de constitution des listes électorales seront aggravés, ce qui ne contribuera pas à améliorer l’accessibilité des listes électorales définitives.
Je suis le premier à reconnaître que l’argument tiré d’éventuelles pressions ne tient pas : la démocratie locale est bien installée en France et faire croire que des pressions pourraient être exercées sur certains conseils municipaux ne me paraît pas convaincant. En revanche, nous devons nous mettre à la place des services des élections dans les préfectures : si nous leur compliquons le travail, nous serons malvenus à nous plaindre que le travail n’est pas bien fait.
Comme nos collègues viennent de le dire, je ne crois pas qu’il puisse y avoir de manipulations du corps électoral pendant la semaine où se déroulerait la désignation des délégués des conseils municipaux.
En revanche, un problème de cohérence se pose. Qu’on le veuille ou non, quand une ville désigne ses délégués, elle donne une indication sur la température politique dont on ne peut pas ne pas tenir compte. La ville qui procédera à la désignation de ses délégués après une autre pourra être tentée de modifier son choix en fonction de la désignation précédente : c’est ainsi !
La preuve : dans le même souci de cohérence, mes chers collègues, nous avons tous voté que les élections dans certaines collectivités d’outre-mer ou dans d’autres pays du monde auraient lieu le samedi afin que les électeurs de ces contrées lointaines ne soient pas influencés par les commentaires de la presse sur les résultats de la métropole.
Que nous propose-t-on ici ? Organiser la désignation des délégués des conseils municipaux sur une semaine ! Je suis désolé de dire à mon ami Yves Détraigne que, dans la République, il faut être cohérent et désigner les délégués le même jour à la même heure !
M. Jean-Pierre Michel applaudit.
Le sous-amendement n’est pas adopté.
L’amendement n’est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 30, présenté par M. Gorce, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 284 du code électoral est ainsi rédigé :
« Art. L. 284.- I. - Les communes soumises au mode de scrutin prévu au chapitre II du titre IV du livre 1er, comptent deux délégués : le maire et un délégué élu en même temps que les conseillers municipaux.
« II. - Dans les communes soumises au mode de scrutin prévu au chapitre III du titre IV du livre 1er, les délégués sénatoriaux sont élus en même temps que les conseillers municipaux. La répartition des mandats de délégués entre chaque liste s’effectue à la proportionnelle intégrale au premier tour de l’élection municipale.
« III. - Dans les communes soumises au mode de scrutin prévu au chapitre IV du titre IV du livre 1er, les délégués sénatoriaux à Paris, Lyon et Marseille sont élus en même temps que les conseillers d’arrondissement et que les membres du conseil de Paris ou du conseil municipal.
« La liste des candidats aux mandats de délégués sénatoriaux figure de manière distincte sur le même bulletin que la liste des candidats au conseil municipal. La liste des délégués sénatoriaux comprend en priorité les candidats au conseil municipal. »
Cet amendement n’est pas soutenu.
L’amendement n° 58, présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les premier à sixième alinéas de l’article L. 284 du code électoral sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Les conseils municipaux élisent un nombre de délégués déterminé en fonction de la population des communes à raison d’un délégué pour 500 habitants ou une fraction de ce nombre. »
La parole est à M. Christian Favier.
Un rappel historique est nécessaire pour comprendre le sens de cet amendement.
Le projet de loi présenté par le gouvernement de Lionel Jospin en 1999 comportait une disposition similaire, à savoir la désignation d’un délégué par fraction de 500 habitants. Au cours de la navette, sur l’initiative de notre groupe, le texte avait été modifié – et l’Assemblée nationale avait retenu cette modification – afin d’établir le seuil de désignation des délégués à 300 habitants, quelle que soit la taille de la ville.
Dans sa décision du 6 juillet 2000, le Conseil constitutionnel avait censuré cette disposition, indiquant qu’elle dépassait la simple correction démographique acceptée jusqu’alors. Les délégués supplémentaires devenaient majoritaires dans le collège électoral, au détriment des membres des conseils municipaux. Le Conseil constitutionnel appuyait d’ailleurs sa démonstration sur des exemples précis.
Nous vous proposons de désigner un grand électeur supplémentaire par fraction de 500 habitants, parce que le constat du Conseil constitutionnel ne sera plus le même s’il est à nouveau saisi. Nous rentrerions en effet dans le schéma d’une correction démographique classique.
Contrairement à ce qui a pu être dit en commission, cet amendement ne méconnaît pas la jurisprudence du Conseil constitutionnel, puisqu’il est sensiblement différent de la disposition censurée. En effet, cette décision ne portait pas sur le principe de l’élargissement du corps électoral ni sur le mécanisme de désignation du nouveau collège électoral, mais sur les conséquences chiffrées du nouveau mode de répartition des délégués.
Nous vous demandons donc d’examiner précisément cet amendement, qui vise à renforcer la légitimité du Sénat et à rééquilibrer la représentation des zones urbaines et des zones rurales.
L’amendement n° 31 rectifié, présenté par Mme Klès, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 284 du code électoral est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le nombre : « 9 000 » est remplacé par le nombre : « 10 000 » ;
2° Au sixième alinéa, les mots : « et vingt-neuf » sont supprimés ;
3° Après le sixième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« - vingt-cinq délégués pour les conseils municipaux de vingt-neuf membres. »
La parole est à Mme Virginie Klès.
Il n’aura échappé à personne, vu l’animation des débats, que la constitution du collège des grands électeurs présente un certain nombre d’erreurs ou d’anomalies que je n’aurai pas la prétention de régler dans leur totalité avec ce seul amendement.
Néanmoins, une anomalie saute aux yeux lorsque l’on examine le tableau de la répartition des grands électeurs : il s’agit de l’apparition d’une strate de communes ayant une population allant de 9 000 habitants à 10 000 habitants – pour vous épargner la référence à 9 999 habitants. Cette particularité existe uniquement dans le code électoral ; elle y figure depuis 1956 ou 1958 : nul n’en connaît plus les raisons, et cette strate ne correspond à rien dans le code général des collectivités territoriales, pas même à une composition différente du conseil municipal. Je propose donc de rectifier cette incohérence et de fusionner la tranche allant de 5 000 habitants à 9 000 habitants et celle allant de 9 000 habitants à 10 000 habitants en une seule.
Par ailleurs, les communes appartenant à cette nouvelle tranche seraient représentées par 27 grands électeurs. Les communes de 9 000 habitants à 10 000 habitants verraient ainsi leur représentation diminuer légèrement, mais celle des communes de 5 000 habitants à 9 000 habitants augmenterait de façon significative, logique et cohérente. La logique observée par le législateur en élaborant ce tableau ne serait en rien perturbée ; en revanche, une anomalie serait ainsi supprimée.
La commission demande le retrait de l’amendement n° 58 ; à défaut, elle émettra un avis défavorable. En effet, la décision du Conseil constitutionnel du 6 juillet 2000, à laquelle il a été fait référence, précise, d’une part, que la part des grands électeurs non élus au suffrage universel direct ne doit pas être substantielle au niveau national et, d’autre part, que les grands électeurs désignés ne doivent pas être majoritaires dans un département, à l’exception du cas de Paris.
En appliquant la règle que vous proposez, monsieur Favier, à la désignation des grands électeurs d’un département comme celui des Bouches-du-Rhône, plus de la moitié de ceux-ci ne seraient pas élus au suffrage universel direct mais désignés par les différents conseils municipaux.
En ce qui concerne l’amendement n° 31 rectifié, la commission avait demandé à son auteur une rectification, afin de rétablir une forme de progressivité. En effet, dans sa rédaction initiale, Mme Klès maintenait le nombre de 15 délégués pour les communes allant de 3 500 habitants à 5 000 habitants ; elle proposait de désigner 25 délégués dans les communes appartenant à la tranche allant de 5 000 habitants à 9 000 habitants et 29 délégués dans les communes de la tranche allant de 9 000 habitants à 10 000 habitants.
La rectification de l’amendement, qui conduit à ne faire qu’une seule tranche pour les communes comprises entre 5 000 et 10 000 habitants, n’est pas vraiment conforme à la volonté de la commission. Cette dernière souhaitait en effet conserver les 29 délégués pour les communes de 9 000 à 10 000 habitants et envisageait d’établir un nombre de délégués intermédiaires pour la tranche de 5 000 à 9 000 habitants en portant éventuellement le nombre actuel de délégués de 15 à 21. Je ne peux donc émettre un avis favorable.
L’adoption de l’amendement n° 58 affecterait l’équilibre du texte. Il aurait en effet pour conséquence de fortement réduire la représentation des plus petites communes. Dans les communes de 500 habitants, le nombre de délégués des conseils municipaux serait divisé par trois, ce qui fonde l’avis défavorable du Gouvernement.
Madame Klès, je vous demande de bien vouloir retirer l’amendement n° 31 rectifié, car le Gouvernement souhaite éviter la multiplication des strates, source de nouveaux effets de seuils. Très honnêtement, votre proposition compliquerait la tâche en termes de représentation et compromettrait l’équilibre actuel.
Mes chers collègues, permettez-moi de vous présenter une suggestion.
L’amendement n° 31 rectifié de Mme Klès porte sur un sujet assez sérieux, la composition du collège sénatorial, lequel doit être composé de représentants des collectivités. Le Conseil constitutionnel nous a rappelé que cette représentation des collectivités devait respecter leur diversité, ce qui signifie qu’il ne faut pas aller jusqu’à une proportionnalité démographique complète. En revanche, il nous dit aussi que les délégués supplémentaires ou la progression du nombre de délégués en fonction de la population ont pour objet d’opérer un correctif démographique, ce qui est conforme à la Constitution.
Or, quand on regarde le tableau, il saute aux yeux que le correctif démographique aujourd’hui en vigueur pose des problèmes de cohérence. Jusqu’à 3 500 habitants, la représentation des communes dans le collège est, au fond, plafonnée à un délégué pour 500 habitants. Entre 500 et 1 499 habitants, les conseils municipaux désignent trois délégués. Entre 1 500 et 2 499 habitants, ils en désignent cinq. À chaque tranche du tableau, vous partez d’un nombre d’habitants plus bas, de l’ordre de 200 puis 300, et vous remontez jusqu’à 500. Or, à partir de 3 500 habitants, vous passez d’un seul coup de sept à quinze délégués. Le niveau de représentation pour les communes ayant juste 3 501 habitants, soit un délégué pour 233 habitants, est donc plus favorable que pour les communes de 2 501 habitants, qui n’ont qu’un délégué pour 357 habitants. C’est une première incohérence.
Deuxième incohérence, le nombre de délégués est le même pour les communes dont la population est comprise entre 3 501 habitants et 8 999 habitants, ce qui signifie, dans cette même tranche, un écart supérieur à deux : un délégué pour 253 habitants au début, un pour 600 à la fin de la même tranche.
Nouvel effet de seuil, que rappelait Virginie Klès, à partir de 9 001 habitants, vous passez de 15 à 29 délégués. Vous retombez donc à un niveau de représentation du délégué supplémentaire de un pour 310 habitants, inférieur à celui qui est en vigueur pour les communes de 3 000 habitants.
Nous devrions, me semble-t-il, profiter du fait que nous aurons deux lectures pour réexaminer ces quelques points de différence de représentation.
Je prends ainsi la liberté de me séparer de la position de M. le ministre. Je dis, pour ma part, que si on veut que le correctif démographique, qui doit accompagner et compléter la représentation des collectivités, ne comporte pas d’anomalies de représentation, il faudrait le travailler avec un nombre de strates légèrement augmenté dans cette tranche comprise entre 3 500 et 9 999 habitants.
Il n’est pas raisonnable de chercher à improviser maintenant. Nous avons abordé ce problème trop tard. On doit d’ailleurs remercier Mme Klès de l’avoir soulevé. Il me semble que nous ne finirions pas le travail d’amélioration et d’équilibrage du collège sénatorial si nous ne saisissions pas l’occasion de la deuxième lecture pour travailler plus en détail sur ce sujet.
Soulignons le fait que notre collègue Klès ne multiplie pas les strates : elle en supprime une. Or ce sont précisément les communes de 5 000 à 9 000 habitants qui sont aujourd’hui sous-représentées. La circonscription que je représente à la Haute Assemblée se trouve dans ce cas, comme le sont la plupart des communes de Nouvelle-Calédonie.
Telle est la raison pour laquelle j’avoue porter un regard assez favorable sur l’amendement n° 31 rectifié. S’il n’est pas retiré, je lui apporterai ma voix.
Je suis fort dubitative. Je propose effectivement de supprimer une strate, mais, après avoir entendu notre collègue Alain Richard, je me dis qu’il faudrait peut-être les démultiplier.
En tout cas, j’ai envie de maintenir l’amendement pour qu’au moins on se saisisse du sujet. S’il était adopté, son imperfection nous obligerait à examiner la question de façon plus approfondie en deuxième lecture. Si, par hasard, il est parfait, ce que je ne crois pas, autant le voter maintenant !
J’ai écouté avec beaucoup d’attention l’intervention de notre collègue Richard. Je ne sais pas si sa suggestion colle tout à fait avec l’amendement de Mme Klès, mais elle me paraît intéressante sur le plan intellectuel et mérite d’être approfondie. Elle aurait au moins l’avantage de redonner un peu de vigueur au monde rural, du moins aux petites communes et aux communes de taille moyenne.
Que cela ne plaise ni au ministre de l’intérieur ni au Gouvernement, je le comprends. Cette idée va en effet un peu à l’encontre de l’objectif du texte, qui vise, nous l’avons tous compris, à donner encore un peu plus de poids aux grandes communes. Ce projet de loi s’inscrit dans la lignée des textes « ruralicides ». Celui dont nous débattons comme celui qui concerne l’élection des conseillers départementaux ont le même objectif : l’affaiblissement du monde rural.
Je ne voterai pas l’amendement de Mme Klès, qui mérite une réflexion plus approfondie. Je suggère de regarder si, au travers de l’intervention de M. Richard, on ne peut pas redonner un peu plus de poids au monde rural plutôt que de donner toujours plus de poids à la « métropolisation », aux grandes communes. Le rôle du Sénat est quand même de participer à l’aménagement du territoire. Il n’assure pas uniquement la représentation des grandes communes !
Je ne suis pas certain, monsieur Doligé, que la proposition de Mme Klès ne poserait pas des problèmes de représentation au monde rural.
Madame Klès, je vous propose de prendre en considération la proposition de M. Richard. Si le Gouvernement n’a pas émis un avis défavorable sur votre amendement et vous a demandé de le retirer, c’est pour que cette question puisse être étudiée de près. À condition de trouver des voies de consensus sur le sujet, le Gouvernement est prêt à prendre le temps de regarder avec vous ces éléments de seuil. Ne complexifions pas le problème, mais allons vite. Avant de revenir en deuxième lecture au Sénat, le texte sera examiné à l’Assemblée nationale, comme l’a rappelé M. Richard.
En tout cas, sans préjuger le vote du Sénat, je ne suis pas certain que cet amendement sera adopté. C’est pourquoi, je le répète, je vous demande de le retirer. Le problème a été soulevé. Étudions le sujet ensemble pour voir comment améliorer les choses sans rompre les équilibres auxquels, je me permets de le rappeler, vous êtes tous ici attachés.
Compte tenu des engagements du ministre, j’accepte de retirer l’amendement. J’ajoute que je suis tout à fait prête à travailler sur le sujet avec qui le voudra.
L'amendement n° 31 rectifié est retiré.
Monsieur Favier, l'amendement n° 58 est-il maintenu ?
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 42 rectifié ter, présenté par MM. Cornu, de Montgolfier et Billard, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 287 du code électoral est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après le mot : « députés, » sont insérés les mots : « les sénateurs, » ;
2° Au second alinéa, après le mot : « député, » sont insérés les mots : « un sénateur, ».
La parole est à M. Albéric de Montgolfier.
Nous avons introduit dans le corps électoral des sénateurs « les sénateurs » eux-mêmes. Il y a donc lieu de tirer les conséquences de notre précédent vote, à moins que cet amendement ne soit déjà satisfait.
Je vais être très laconique puisqu’il s’agit de tirer les conséquences d’un vote précédemment intervenu : avis favorable.
Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 1er.
Je constate par ailleurs que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
Au second alinéa de l’article L. 285 du code électoral, le nombre : « 1000 » est remplacé par le nombre : « 800 ».
Je l’ai déjà dit au cours de la discussion générale : autant je suis plutôt favorable à l’article 2, autant je suis très hostile à l’opération qui consiste à augmenter encore le poids des grandes villes. À force de persister dans cette voie, on va arriver à remettre en cause la finalité profonde du Sénat, qui est de représenter les territoires.
Avec les redécoupages des cantons, déjà programmés, qui se conçoivent lorsque les écarts de populations sont trop importants, on va donner aux villes un poids beaucoup plus important qu’aux campagnes dans la gestion des départements. Or il est important que le Sénat reste le défenseur des territoires. C'est la raison pour laquelle il ne me paraît pas très opportun de vouloir revenir sur le taux de représentativité de 1 pour 1 000 et de le faire passer à 1 pour 800.
Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 2 est présenté par M. J.C. Gaudin et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
L'amendement n° 23 est présenté par M. Masson.
L'amendement n° 32 est présenté par M. Collombat.
L'amendement n° 39 est présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Albéric de Montgolfier, pour présenter l’amendement n° 2.
Nous en arrivons à l’essentiel : la définition du cœur électoral.
L’article 1er du texte vise à modifier l’article L. 285 du code électoral en prévoyant d’instaurer un délégué pour 800 habitants au lieu d’un délégué pour 1 000 habitants dans les communes de plus de 30 000 habitants, ce qui aboutirait à la désignation de délégués supplémentaires.
La motivation de cette modification est clairement indiquée dans le rapport, que j’ai lu avec attention : assurer une meilleure représentation de la population des villes, des communes les plus peuplées et des zones urbaines dans le collège électoral. Par définition, cela signifie qu’on souhaite assurer une moindre représentation des zones rurales. N’oublions pas le contexte : le nombre de cantons va être divisé par deux dans les très grands territoires et le nombre d’élus va augmenter. Je ne vois donc pas très bien l’intérêt de l’opération. Cette mesure va contre le monde rural !
Outre cette raison de fond qui justifie notre amendement de suppression de l’article, il y a une raison de forme et de calendrier.
Les élections sénatoriales auront lieu en septembre 2014. Pourtant, nous le savons, conformément à la tradition républicaine, on ne modifie ni le mode d’élection ni le corps électoral au cours de l’année qui précède l’élection. Or nous sommes déjà le 18 juin 2013 et deux lectures doivent avoir lieu sur ce texte dans chaque chambre.
Certes, nous avons tous reçu le décret du 14 juin 2013 portant convocation du Parlement en session extraordinaire à compter du lundi 1er juillet 2013. L’ordre du jour, décliné dans l’article 2 du décret, qui comporte quatre pages, indique que nous allons commencer par l’examen du projet de loi constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de magistrature. Nous allons poursuivre avec la discussion du texte interdisant le cumul des mandats, puis des projets de loi relatifs à la transparence de la vie publique, au procureur de la République financier, à l’indépendance de l’audiovisuel public, à l’approbation des comptes de l’année 2012, à la qualité de pupille de l’État, à diverses dispositions relatives aux outre-mer, sans oublier le projet de loi relatif à l’élection des sénateurs.
J’ai donc quelques doutes sur le fait que nous soyons en mesure au cours de cette session extraordinaire extrêmement chargée, au programme de laquelle figurent en outre un débat d’orientation des finances publiques et un débat sur la réforme de la politique agricole commune, de modifier les règles relatives au corps électoral, tout en respectant la tradition selon laquelle on ne légifère pas sur un tel sujet lors de l’année précédant l’élection sénatoriale.
Mes chers collègues, il serait beaucoup plus sage de supprimer l’article 1er et de laisser le corps électoral en l’état, plutôt que de le « tripatouiller » à quelques mois des élections, en réduisant le seuil du nombre d’habitants de 1 000 à 800. Cette modification, qui ne se justifie pas sur le fond, constitue sur la forme, je le répète, une atteinte à la tradition largement établie selon laquelle on ne doit pas modifier les règles relatives au corps électoral dans l’année précédant l’élection.
Encore une fois, la session extraordinaire de juillet étant très chargée, je ne vois pas comment nous pourrions achever l’examen de ce texte avant le mois de septembre.
Telles sont les raisons pour lesquelles mon groupe propose de supprimer l’article 1er.
La parole est à M. Jean Louis Masson, pour présenter l’amendement n° 23.
J’ai déjà expliqué mon point de vue auparavant : je propose la suppression de cet article, pour défendre et préserver non pas la stabilité du système électoral à longue échéance – il s’agit en effet d’une habitude très récente, qui n’a pas de fondement juridique –, mais simplement les zones rurales et la représentation des communes rurales.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour présenter l’amendement n° 32.
Comme j’ai eu l’occasion de l’expliquer lors du vote sur la motion tendant à opposer la question préalable, cette disposition qui vise à étendre le champ du mode de scrutin proportionnel ne changera pas grand-chose. On ne sait d’ailleurs pas trop quelles en seront les conséquences sur la représentation des territoires ruraux.
Même si je reconnais bien volontiers que la portée pratique de cet article sera, in fine, tout à fait limitée, il n’en reste pas moins qu’il vise à amoindrir la capacité d’expression de ces territoires. C’est la raison pour laquelle je souhaite sa suppression. Pour moi, c’est une question de principe !
Je ne vous surprendrai pas en rappelant mon opposition, déjà affirmée lors de la discussion générale, à cette disposition visant à abaisser de 1 000 à 800 le seuil du nombre d’habitants ouvrant droit à un délégué supplémentaire dans les communes de plus de 30 000 habitants, et ce pour trois raisons.
Tout d’abord, cette disposition constitue clairement une atteinte au monde rural, déjà fortement touché par l’instauration, contre l’avis du Sénat, du fameux binôme paritaire pour les élections départementales.
Ensuite, l’étude d’impact de cette disposition est très incomplète. On nous parle de 3 000 délégués supplémentaires, mais nous n’avons aucune indication chiffrée par département. Or les élections sénatoriales ont lieu à l’échelle départementale !
Enfin, si cet article était adopté, l’augmentation du nombre de délégués serait telle, dans certains départements, qu’un certain nombre de sénateurs ne devraient leur élection qu’à ces grands électeurs supplémentaires, qui ne seraient pas des élus de terrain, des élus locaux.
Cela pose un vrai problème par rapport au rôle même des sénateurs. Le Sénat est en effet, en vertu de la Constitution, le représentant des collectivités territoriales de la République.
Pour ces raisons, nous sommes totalement opposés à cet article.
Le projet de loi comporte deux dispositions essentielles : l’instauration du scrutin proportionnel dans les départements où seront élus trois sénateurs et une légère augmentation du nombre de grands électeurs dans les communes de plus de 30 000 habitants, soit 3 000 délégués supplémentaires sur un total de 151 000. Il s’agit donc, au travers de ce texte, de corriger, de rectifier et d’équilibrer le dispositif en vigueur afin que les grandes villes soient un peu mieux représentées.
Je tiens à rassurer tous ceux qui s’érigent en défenseurs du monde rural : celui-ci demeure très largement avantagé. Dans les petites communes, en effet, un grand électeur continuera à représenter 200 ou 300 habitants, tandis que dans les villes dont la population est supérieure à 30 000 habitants, un grand électeur, qui représente aujourd’hui 1 000 habitants, en représentera 750 après la réforme. Pour ce qui est du nombre de grands électeurs ramené à la population, le monde rural restera donc privilégié.
L’un de nos collègues a fait référence à l’usage qui veut que l’on ne modifie pas les règles électorales dans l’année précédant les élections. Or il ne s’agit que d’un usage ! Par ailleurs, nous sommes encore bien loin des élections sénatoriales, qui se dérouleront dans la moitié des départements en septembre 2014 – et non pas en 2013 ! –, soit dans quinze mois. Cela laisse largement le temps au Parlement de voter la loi.
Je suis certain que tous les candidats seront rapidement informés de cette légère modification des règles relatives au corps électoral pour les élections de septembre 2014...
Référence a également été faite à la décision du Conseil constitutionnel précisant qu’il ne saurait y avoir parmi les grands électeurs d’un département, à l’exception de la capitale, davantage de personnes non élues que d’élus.
L’étude d’impact montre bien que le département le plus concerné par la modification proposée, les Bouches-du-Rhône, verrait la part de grands électeurs non élus passer, sur l’ensemble du corps électoral, de 32 % à 36 %. Point n’est besoin d’être grand mathématicien pour comprendre que, de 36 % à 50 %, la marge est grande ! Cette modification, qui vise à rééquilibrer la représentation des territoires et à y introduire un peu d’équité, a d’ailleurs souvent été jugée modeste par nombre de groupes politiques.
Je crois cependant qu’il nous faut aller dans ce sens : rééquilibrer de manière raisonnable en faisant passer la tranche d’un grand électeur pour 1 000 habitants à un pour 800, afin de tenir compte des évolutions démographiques. Il nous faut prendre en considération les grandes villes, sans pour autant les opposer au monde rural, qui continue d’être privilégié pour ce qui concerne la répartition des grands électeurs.
Cela a été dit lors de la discussion générale, cette modification est raisonnable et renforce la légitimité du Sénat, qui a pour vocation, bien sûr, de représenter les zones rurales, mais également les villes et les grandes villes. N’opposons pas les unes aux autres, car elles sont complémentaires : le monde urbain a besoin du monde rural, et vice-versa. Le Sénat a vocation à représenter toutes les collectivités, qu’elles soient rurales ou urbaines.
L’avis de la commission est donc défavorable.
Je suis quelque peu étonné par certaines réactions.
L’objet du projet de loi est de faire passer, pour les villes de 30 000 à 40 000 habitants, le nombre d’habitants représentés par un grand électeur de 800 à 780.
Il existe en réalité d’immenses disparités puisque, dans certains cas, le grand électeur représente 800 habitants, et d’autres dans lesquels il représente 100, voire 50, ou même 10 habitants.
Le Gouvernement, en présentant ce projet de loi, a fait preuve d’une modération que je tiens à saluer, ...
Il ne pouvait pas faire autrement ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)
Si l’on avait choisi de prendre davantage en compte la démographie et, après tout, le principe d’égalité, on aurait pu prévoir des changements du type de ceux préconisés par Mme Klès, ou d’autres plus amples encore.
Le Gouvernement ne le fait pas, et la majorité non plus. Je vous prierai donc de ne pas instruire un procès qui, en l’espèce, n’a pas lieu d’être.
Il est difficile d’argumenter davantage après les excellents propos du rapporteur et du président de la commission.
Cet article a pour objet, vous le savez, de rééquilibrer la représentativité entre les différentes catégories de communes, afin de tenir compte de la croissance démographique. Par ailleurs, l’article 24 de la Constitution ne nous oblige pas à respecter une stricte égalité de la représentation. En outre, nous devons tenir compte de la décision rendue en 2000 par le Conseil constitutionnel.
Compte tenu de ces éléments, nous opérons avec une prudence toute particulière un changement, un rééquilibrage, qui ne remet pas en cause les grands équilibres et qui reste très favorable au monde rural pour ce qui concerne la désignation des délégués sénatoriaux.
Cette prudence, associée au respect de l’application de l’article 24 de la Constitution et des décisions du Conseil constitutionnel, nous permettra d’évoluer favorablement tout en maintenant un équilibre qui, je le crois, devrait convenir à tous. Cette disposition ne représentant en rien un bouleversement, elle ne mérite aucune critique sévère.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
M. le président. Je suis heureux de saluer la présence dans la tribune officielle de Mme Miapetra Kumpula-Natri, présidente de la Grande commission de l’Eduskunta finlandaise.
Mmes et MM. les sénateurs ainsi que M. le ministre se lèvent.
Mme Kumpula-Natri est en visite en France pour une série d’entretiens sur les questions européennes.
Elle s’est entretenue au Sénat avec notre collègue Simon Sutour, président de la commission des affaires européennes.
En notre nom à tous, je lui souhaite la plus cordiale bienvenue et un bon séjour en France. (
Nous reprenons la discussion du projet de loi relatif à l’élection des sénateurs.
Nous avons évoqué l’opération de rééquilibrage des zones rurales visant les communes de 5 000 à 10 000 habitants. Ne faudrait-il pas, en l’occurrence, faire de même ? Réalisons l’étude, présentons-la le plus tôt possible, à la fois pour le monde rural et pour le monde urbain ! Pourquoi proposer une meilleure représentation des villes au détriment des zones rurales, sans tenir compte des problèmes de celles-ci ?
Lorsqu’on parle d’élection et de représentation, il faut trouver le juste équilibre entre la représentation démographique et celle des territoires.
Force est de constater que les textes que vous nous soumettez depuis quelques semaines vont tous dans le même sens et portent un message clair : l’atténuation de la représentation territoriale au profit d’une représentation démographique.
Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas nous dire, la main sur le cœur, combien vous êtes attaché aux territoires ruraux et, dans le même temps, envoyer lors de chaque texte le même message !
Je me suis penché sur le cas de mon secteur, comme chacun a pu le faire dans son département. Que vous le vouliez ou non, ce n’est pas tant la division par deux du nombre de cantons qui me préoccupe
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.
La réforme de la désignation des grands électeurs va, elle aussi, dans le sens d’un amoindrissement de la représentation territoriale.
Par conséquent, étant, comme nombre de mes collègues, opposé à cet article, je voterai ces amendements identiques de suppression. En effet, ce sont les territoires ruraux qui feront les frais de cette réforme.
M. Dominique de Legge. Monsieur le ministre, je ne sais si vous aviez des intentions malignes concernant un résultat électoral que vous anticiperiez...
Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.
M. Dominique de Legge. Je ne peux pas le croire… J’en conclus que la seule justification de cette disposition est l’affaiblissement des territoires ruraux.
M. François Trucy applaudit.
Monsieur de Legge, je ne peux accepter les malentendus, encore moins les faux procès. En l’occurrence, c’est bien de cela qu’il s’agit.
Vous confondez l’élection des délégués au Sénat et l’élection aux conseils départementaux. Dans le second cas, des principes constitutionnels s’appliquent, même si nous avons aussi intégré dans le redécoupage la représentation des territoires par le biais d’un amendement centriste, qui a été voté à l’Assemblée nationale, puisqu’une majorité du Sénat a rejeté ce texte. Personne, ni un ministre ni un parlementaire, ne peut les remettre en cause.
Cette représentation des territoires repose sur des bases démocratiques, mais tient compte aussi de la réalité de notre pays. Je suis convaincu qu’il en sera de même du redécoupage cantonal. Toutefois, dans une démocratie, notamment pour les élections au suffrage direct, il n’est pas totalement inconcevable que s’impose le principe « un homme – ou une femme – une voix ».
Pour ce qui concerne le Sénat, plus des deux tiers des délégués des conseils municipaux représentent les communes de moins de 10 000 habitants, alors que celles-ci ne regroupent que la moitié de la population. Or nous ne modifions pas sensiblement ce rapport.
La population totale des communes de plus de 100 000 habitants est deux fois plus élevée que celle des communes de moins de 500 habitants, tandis que ces dernières disposent de deux fois plus de délégués. Là encore, nous n’apportons pas de bouleversement notable.
Dans les communes de plus de 100 000 habitants, le nombre des délégués désignés, par rapport au nombre total de délégués, a même évolué dans un sens défavorable à ces grandes communes, passant de 8, 3 % en 1964 à 7, 45 % en 2010.
Par conséquent, ne nous faites pas de procès sur la représentation des territoires !
Exclamations sur les travées de l'UMP.
Si vous n’attaquez pas les territoires ruraux, que faites-vous, alors ?
Comme viennent de l’expliquer très bien M. le rapporteur et M. le président de la commission des lois, l’article 1er a pour objet de rééquilibrer la représentativité entre les différentes catégories de communes, de façon à tenir compte de la croissance démographique dans les plus grandes communes.
Il s’agit donc d’ajouter pour les grandes communes un délégué supplémentaire par tranche de 800 habitants au-dessus de 30 000 habitants, sans que cela remette en cause la représentativité des petites communes. C’est tout le débat que nous avons eu.
Dans ces communes de plus de 300 000 habitants, un délégué représenterait 760 habitants, alors que, dans les communes de moins de 500 habitants, il continuerait à en représenter 227. Au regard des évolutions démographiques que notre pays a connues, nous ne pourrions pas permettre aux grandes communes de disposer de seulement quelques délégués supplémentaires ?
Nous avons été très raisonnables, pour les raisons qui ont été exposées, notamment par Jean-Pierre Sueur : le caractère contraignant de la décision du Conseil constitutionnel et le souhait du Gouvernement de ne pas mettre en cause les équilibres du Sénat.
Acceptez donc la diversité du pays telle qu’elle est, y compris dans sa représentation au Sénat, sans oublier que ce dernier représente les territoires et les collectivités. Ne nous faites pas un faux procès, car il est sans fondement.
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
M. Didier Guillaume remplace M. Jean-Claude Carle au fauteuil de la présidence.
Nous avons pris acte du rééquilibrage très modeste – « très prudent », selon vos propres termes, monsieur le ministre – que propose le Gouvernement, à savoir un délégué supplémentaire pour 800 habitants.
Vous connaissez notre attachement à l’égalité des citoyens. Nous pensions, quant à nous, que nous aurions pu aller plus loin – nous l’avions d’ailleurs suggéré –, d’autant que la mesure ne concerne que les communes de plus de 30 000 habitants. Cela ne retire absolument rien aux communes plus petites, dont le nombre de délégués reste inchangé.
De la part de mes collègues de l’opposition, il y a une certaine contradiction à voter dans l’enthousiasme, voilà quelques jours à peine, la création des grandes métropoles, dont on sait qu’elles conduiront inévitablement à réduire très fortement le rôle et la place des communes rurales, et, aujourd’hui, à défendre à tout prix les communes rurales.
Pour notre part, nous ne voterons pas ces amendements identiques de suppression, car nous sommes favorables à l’article 1er, même s’il constitue une avancée modeste.
M. René-Paul Savary. Pour M. le rapporteur et M. le ministre, que j’ai écoutés attentivement, il s'agirait d'une modification minime. Raison de plus pour ne pas l'accepter !
Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste.
Il y a vraisemblablement une arrière-pensée, monsieur le ministre. Nous le savons bien : notre majorité, elle aussi, a pratiqué des découpages !
Mêmes mouvements.
On affirme vouloir défendre le monde rural, mais au moment de passer à l'acte et de décider, on prend le contre-pied, et ce à quelques minutes d’intervalle ! Ainsi, Alain Richard a brillamment expliqué qu’il était peut-être préférable de recalculer pour atteindre le bon nombre de délégués. Pourtant, à peine son intervention finie, on examine des mesures qui, insidieusement, modifient les équilibres entre le rural et l’urbain.
Nous avons consacré un certain nombre d'heures dans cet hémicycle à travailler sur les élections municipales, les élections départementales et, aujourd’hui, les élections sénatoriales. Pour ma part, je ne peux m’empêcher de faire le rapprochement avec le découpage territorial relatif aux futurs conseillers départementaux.
D’un côté, le binôme « un homme, une femme », élu des villes, ne siégera peut-être même pas dans un collège, parce qu'il n'y en aura pas. Étant à l'intérieur d'une agglomération, il n'aura pas à défendre de route départementale, puisque, bien souvent, grâce à des accords entre le département et l'agglomération, les routes à l’intérieur des agglomérations ne sont plus départementales. Avec un peu de chance, il aura l'occasion d'exercer des compétences sociales au travers de circonscriptions de la solidarité, si son canton en est pourvu.
De l'autre côté, le binôme, toujours « homme, une femme », de conseillers départementaux du monde rural siégera peut-être dans un ou deux collèges – il n’est qu’à voir la carte – de plus de 90 communes – 110 communes dans l'un des éventuels futurs cantons du département de la Marne, si vous en décidez ainsi, monsieur le ministre. Il aura à sa charge des centaines de kilomètres de routes départementales.
Vous le voyez, dans les deux cas, les missions respectives de ces binômes seront bien différentes. Nous sommes donc légitimement en droit de penser qu'il faut veiller à cet équilibre entre monde rural et monde urbain.
Il faut en outre souligner qu'il s'agit d'une élection au scrutin indirect : les conseillers municipaux sont désignés par les électeurs pour assumer des responsabilités et aussi pour former le corps électoral du Sénat. Ajouter à ce collège d’autres membres élus indirectement par des personnes désignées indirectement revient à s’éloigner complètement des électeurs de base.
C’est la raison pour laquelle je suis particulièrement hostile à cet article 1er qui, en fait, habille surtout l'article suivant, prévoyant le passage à la proportionnelle dans les départements de trois sénateurs. Il est vrai qu'il est préférable de faire passer une telle mesure à travers un projet de loi comprenant plusieurs articles, plutôt que par le biais d’un texte dont l’article unique n’aurait que cette seule finalité !
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voterai les amendements identiques de suppression de l’article 1er, pour les raisons qui sont exposées dans l'étude d'impact. Comme cela a été rappelé, cette disposition a pour objet d'assurer une meilleure représentation des zones urbaines et une meilleure prise en compte du poids démographique des communes. Or je suis en désaccord total avec ce double objectif !
Renforcer les zones urbaines se fait forcément au détriment du monde rural, n'en déplaise à M. le ministre, qui s'est agacé à ce sujet, ce qui montre d'ailleurs qu'il n'est pas très à l'aise.
M. le ministre s'exclame.
Texte après texte, dispositif après dispositif, on s’achemine donc toujours vers la réduction du poids du monde rural.
Monsieur le ministre, au cours de la discussion générale, vous avez affirmé qu'il s’agissait d’assurer une meilleure prise en compte du poids démographique des communes. Je m'en étais d’ailleurs étonné : comment espérer renforcer les territoires en accentuant le poids de la démographie ? C'est exactement l’inverse qui se produira ! Quand on parle de territoires, on ne doit pas prendre en compte leur poids démographique, c’est-à-dire leur nombre d’habitants. C'est l'Assemblée nationale qui représente le peuple. Le poids de la démographie et le nombre d'habitants d'un territoire s’expriment lors des élections législatives, et non lors des élections sénatoriales.
M. Jean-Jacques Mirassou s’exclame.
Monsieur le ministre, selon vous, deux tiers des délégués représenteraient les communes de moins de 10 000 habitants. Je rappelle que les deux tiers des communes comptent moins de 500 habitants. Le poids relatif des collectivités est donc déjà clairement pris en compte.
L'argument avancé pour tenter de nous rassurer est que cette réforme ne changerait finalement pas grand-chose : 3 000 délégués seraient concernés sur 150 000, ce qui ne serait pas beaucoup. C’est peut-être vrai, mais j'observe tout de même, et cela a été souligné par Michel Mercier et Yves Détraigne, que, dans certains départements, dont le Rhône et le Val-de-Marne, cette réforme aura un impact très fort sur le collège électoral.
En outre, comme je viens de l'indiquer, il s’agit encore et encore de porter des mauvais coups au monde rural.
En écoutant Gaëtan Gorce, dont les propos pouvaient paraître provocants – ils l'étaient, de fait –, je me suis demandé s'il n'était pas d'une certaine façon en service commandé
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
M. Hervé Maurey. … pour exprimer tout haut ce qu'un certain nombre de parlementaires socialistes pensent tout bas : le Sénat est une « anomalie démocratique », pour reprendre la formule d’un illustre socialiste. Par conséquent, on essaie peu à peu – heureusement, la jurisprudence du Conseil constitutionnel est là – de rogner son rôle comme représentant des territoires et des collectivités locales.
Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.
Monsieur le ministre, je me garderai bien de faire un procès d'intention au Gouvernement. Les différentes interventions des membres du groupe auquel j'appartiens n’ont pas du tout cet objet.
Certes, ce texte ne diminue pas le nombre de représentants du monde rural, mais, comme il augmente le nombre de représentants du monde urbain, en valeur relative, le monde rural sera moins représenté qu'avant !
Ce n'est pas un procès d'intention, c'est une constatation objective.
La question de principe soulevée ici est grave. À désigner de plus en plus de grands électeurs qui ne sont pas des élus de leur collectivité territoriale, nous nous engageons sur un mauvais chemin, puisque cela revient à diminuer la portée du principe constitutionnel selon lequel le Sénat représente les collectivités territoriales de la République.
Et si, dans leur sagesse, les constituants des régimes républicains successifs ont prévu exactement la même chose, ce n'était pas simplement pour faire plaisir aux communes, c’était avec l'idée que la deuxième chambre, si elle existe, doit avoir une part d’originalité. En l’occurrence, celle-ci repose sur le fait que les membres de cette assemblée sont sélectionnés par des élus, en raison de l'expérience qu'ils ont des affaires publiques, laquelle leur permet d'avoir une vision originale de la manière dont ils entendent remplir leur fonction sénatoriale.
Dès lors que, dans certains départements – on a cité par exemple le cas des Hauts-de-Seine –, la part des grands électeurs qui ne sont pas des élus, mais des militants, …
M. Philippe Bas. … va passer de 30 % à 35 %, on dénature l'institution sénatoriale. Pour moi, cette question de principe, absolument essentielle, ne peut pas être passée par pertes et profits.
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.
À partir du moment où vous rapportez systématiquement le nombre de délégués sénatoriaux supplémentaires non élus à l'ensemble des délégués sénatoriaux d'un même département, vous êtes sur la mauvaise voie.
Vous prétendez que c’est une goutte d'eau à l’échelle du département, mais, dans la commune qui passera, de ce fait, à 50 % de délégués sénatoriaux non élus, ce ne sera pas négligeable.
Si les cas de villes importantes comptant davantage de délégués non élus que de délégués élus se multiplient – cela existe parfois déjà, mais sous forme de correctif démographique –, nous considérons que les dispositions de l'article 24 de la Constitution ne sont plus respectées.
C'est la raison pour laquelle, avec mes collègues, je ne voterai pas cet article 1er.
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.
En prenant deux ou trois notes, je me suis aperçu que nous reprenons largement le débat que nous avons déjà eu lors de la discussion générale.
Chers collègues, tout ce qui est excessif est insignifiant, et certaines des remarques que vous avez formulées n'ont pas lieu d'être. Comment pouvez-vous parler d’un texte « ruralicide » ? Son objet n’est absolument pas de diminuer la représentation du monde rural. Il est d'augmenter légèrement la représentation du monde urbain.
Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.
Non, ce n'est pas la même chose !
Chers collègues, vous connaissez suffisamment le fait rural pour savoir que, par exemple, une commune comprenant de zéro à dix habitants désigne un représentant, donc un grand électeur. En revanche, une commune de 200 000 habitants désigne à peine 200 grands électeurs. Le rapport qui prévaut aujourd'hui dans la représentation démographique des territoires est donc tout simplement d’un à cent.
Il n'agit non pas de diminuer le poids du monde rural, mais de rééquilibrer légèrement la représentation à l’avantage du monde urbain. Car dans quel monde vivez-vous, chers collègues ? Je suis d’ailleurs prêt à parier que la plupart d'entre vous habitent en ville.
Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.
Ce n’est pas en refusant ainsi de reconnaître le fait urbain que vous défendrez au mieux le monde rural. En effet, les interactions entre les deux sont nombreuses. C’est bien souvent dans nos agglomérations que l’on trouve du travail, qu’ont lieu des échanges et des activités culturelles. Les ruraux sont heureux de venir en ville, tout comme les citadins sont contents de partir à la campagne le week-end. Or, au lieu de voir la richesse de cet échange, vous restez bloqués sur l'image d'un monde figé.
Vous êtes des conservateurs !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste . – Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.
C'est votre droit le plus strict, mais, en réalité, vous vivez dans un autre monde.
Nous avons déjà pu le constater à l'occasion de précédents débats : vous ne voyez pas la société évoluer. Ce fut d'ailleurs la raison de nombre de vos échecs électoraux.
Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.
Toutefois, faute de faire l'inventaire de ces échecs électoraux d'importance, vous ne pouvez même pas en tirer de leçons.
Je vous appelle à prendre en compte la réalité, mes chers collègues. Aujourd'hui, nous proposons en faveur du monde urbain un léger rééquilibrage, qui reste d’ailleurs insuffisant à mon avis.
M. François Rebsamen. Bien évidemment, je partage le souci de sérénité qui anime le président de la commission des lois, le rapporteur et le ministre. Avec le groupe socialiste, je me range donc totalement derrière ce projet de loi, qui me semble parfaitement équilibré.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Je dois reconnaître à M. le ministre une certaine constance.
On peut même deviner un fil directeur dans l’action du Gouvernement, qui, depuis un an, au lieu de s'atteler à la réduction du chômage, à l’amélioration de la compétitivité des entreprises et à la défense du pouvoir d'achat de nos concitoyens a réussi à « bidouiller » les élections à tous les niveaux – municipal, intercommunal, cantonal, et maintenant sénatorial. C’est remarquable !
Pis, il le fait avec une mauvaise foi évidente, à moins qu’il ne sache pas compter ; malheureusement, je penche plutôt pour la première hypothèse.
Franchement, c'est le monde rural que vous voulez atteindre. Vous le méprisez ; telle est la réalité ! §
On le voit bien à travers l’accroissement du nombre de sénateurs élus à la proportionnelle : c'est encore le monde rural qui est atteint. En réalité, vous voulez bidouiller les élections pour rester au pouvoir ! Ne vous méprenez pas : les résultats de l'élection législative partielle de dimanche dernier sont éloquents.
Les Français ne seront pas dupes : ils ne manqueront pas de sanctionner cette modification du mode de scrutin à un an des élections sénatoriales. Il faudrait arrêter de nous prendre pour des imbéciles !
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
Monsieur le sénateur, vous m’attribuez des responsabilités majeures…
… en matière de politique économique, de compétitivité, de chômage.
M. Manuel Valls, ministre. Je vais y venir, monsieur Delattre. Ce sont des sujets complexes, surtout au regard de la situation du pays que nous avons trouvée.
Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.
Cela devrait vous conduire à faire preuve d'un tout petit peu plus de modestie.
Monsieur Bas, je vois bien que vous avez la foi du converti depuis votre élection au Sénat. Pourtant, il me semble que vous avez été ministre.
Je ne le suis plus ! Et vous, vous avez la foi du converti au Gouvernement !
M. Manuel Valls, ministre. Je vous le confirme : je suis au Gouvernement, et vous, vous n'y êtes plus ; les électeurs sont passés par là !
Souriressur les travées du groupe socialiste.
En tout état de cause, nous devrions, les uns et les autres, faire preuve de davantage de modestie.
Je ne doute pas un seul instant que certains mots que vous avez prononcés dépassent votre pensée, monsieur Cornu. Le Gouvernement présente un certain nombre de textes électoraux. Nous avions notamment pris l’engagement d’abroger le conseiller territorial – le texte n’était de toute façon pas encore entré en application ; nous l’avons tenu.
Aujourd'hui, le texte relatif au Sénat que nous présentons me semble équilibré. Il revient d'ailleurs, s'agissant de la proportionnelle, sur des choix qui avaient déjà été les nôtres lorsque nous étions au pouvoir.
Je reviens quelques instants sur les mots que vous avez prononcés au sujet de la ruralité. En tant que ministre de l'intérieur, je suis d’abord en charge de la sécurité des Français.
Or, qui a supprimé plus de 10 000 postes de policiers et de gendarmes dans ce pays, si ce n'est votre gouvernement et votre majorité au cours de ces dernières années ? C’est vous !
Qui a créé les conditions d'une hémorragie sans précédent dans la gendarmerie, c'est-à-dire dans la force qui a la charge de la sécurité dans les territoires ruraux ? C’est vous !
Qui a mis en cause l'organisation des brigades de gendarmerie dans les territoires ruraux ? C’est vous !
Je n'accepte donc pas les leçons que vous voulez me donner à propos du monde rural. Par votre politique économique, votre politique agricole, votre politique de sécurité, vous avez mis en cause le monde rural. Nous n'avons aucune leçon à recevoir de votre part dans ce domaine !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Il est peut-être possible de conserver les conditions d'un dialogue courtois et amical.
Je pense que nous sommes plusieurs à le souhaiter dans cet hémicycle.
Je voudrais simplement poursuivre le raisonnement de nos collègues qui ont évoqué les difficultés résultant, pour le monde rural, du système adopté pour les élections départementales.
Je me permets de rappeler que nous avons, les uns et les autres, saisi le Conseil constitutionnel de toutes les lois électorales, petites ou grandes, qui ont été adoptées au cours des trente dernières années. Or, chacun à notre tour, nous avons – passez-moi l’expression – pris le manche du râteau dans la figure. Une bonne partie des décisions adoptées par le Conseil constitutionnel, que nous avions sollicité, ont en effet abouti à des solutions qui ne nous convenaient pas.
En particulier, pour des élections directes comme les élections départementales, nous nous devons d’appliquer dans tous les cas le principe « un homme, une voix », comme le Conseil constitutionnel le réaffirme depuis trente ans à l'occasion du contrôle de toutes les lois électorales. Même dans le cas des intercommunalités, le Conseil a censuré en 1995 une loi soutenue par M. Pasqua et adoptée par la majorité de l’époque, au motif qu’il convenait de respecter ce principe. C'est précisément ce qui vous a conduit à prévoir, dans la loi que vous avez présentée en 2009, une représentation proportionnelle démographique des représentations communautaires.
Nous sommes, en quelque sorte, sur des rails. J'ajoute, pour détendre l'atmosphère, que l’histoire du râteau vient une nouvelle fois de se réitérer.
Comme je l'avais prévu gentiment, un peu ironiquement aussi, alors que le débat sur le conseil départemental voyait se dérouler un grand concours d'ingéniosité pour parvenir au plus grand écart démographique possible entre les cantons – nous nous étions plus ou moins entendus sur un écart de plus ou moins 30 %, avec de surcroît des dérogations –, le recours que vous avez présenté devant le Conseil constitutionnel sur le fondement du principe d'égalité démographique a prospéré. À la suite de votre saisine, le Conseil a donc supprimé de la loi du 17 mai 2013 toute possibilité de dérogation à l'égalité démographique.
Il me semble donc que, dans ce domaine, nous devons tous apprendre de l'expérience et rester quelque peu sur la réserve.
En ce qui concerne maintenant l'élection indirecte du Sénat, nous pouvons diverger sur l’appréciation du léger rééquilibrage que nous entendons opérer au profit de la représentation démographique des communes urbaines ; constitue-t-il un dérapage ?
Je fais observer à mon excellent collègue Philippe Bas que, dans sa décision de 2000, qui portait sur la précédente réforme des élections sénatoriales, le Conseil constitutionnel a pris la peine de préciser que le dispositif en vigueur à l'époque, avec les pondérations, était conforme aux principes constitutionnels. Or cette loi, à l'époque, comportait une forte correction démographique en faveur des villes, et cela ne dérangeait personne.
Dans certains départements, les délégués supplémentaires représentaient déjà 20 %, 25 % ou 30 % du corps électoral. Il n’est venu à l'esprit de personne de le supprimer. Nous vivons avec ces éléments, qui représentent un équilibre correct, réfléchi et délibéré entre la représentation de la diversité des collectivités et la représentation tenant compte du principe « un homme, une voix », qui n’est tout de même pas un attentat à la représentation territoriale.
Enfin, j’observerai qu’il n’est pas possible, juridiquement, de prétendre que des élus représentent des territoires. Ils représentent toujours des êtres humains. En effet, on ne représente pas des territoires vides, mais les personnes qui les occupent.
M. Éric Doligé. Je m’exprimerai avec beaucoup d’attention, pour ne pas m’attirer les foudres de M. le ministre. Ainsi celui-ci pourra-t-il garder son calme, comme nous essayons de garder le nôtre sur cet important sujet.
M. le ministre s’exclame.
M. Rebsamen a affirmé tout à l'heure que tout ce qui est excessif est insignifiant. Il me semble que M. le ministre se rendra compte que sa dernière intervention relevait d’un tel excès. Que chacun prenne donc garde à ses propres propos.
Monsieur le ministre, je pense, pour ma part, que vous avez de grandes chances de marcher un jour sur le râteau dont vient de parler M. Richard, en raison des réformes successives que vous mettez en œuvre. En effet, lorsqu’on joue avec les règles électorales, on a parfois quelques surprises.
Je souhaiterais préalablement rappeler, puisqu’on nous a reproché de faire piétiner le débat, le temps que nous avons passé à débattre de la question du conseiller territorial, instauré par la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales. Cette création du conseiller territorial est la seule modification que nous avions faite, sous la précédente majorité, concernant les différentes strates de collectivités. Cette unique réforme était devenue un point de focalisation du débat politique.
Ici, il n’y a pas lieu à une telle focalisation, puisque le Gouvernement multiplie, tous azimuts, les réformes touchant aux collectivités ! Je souhaiterais les rappeler, sans même parler de la ruralité, puisque celle-ci a été atteinte indirectement au travers des règles électorales.
Le seuil de population à partir duquel les conseillers principaux seront élus au scrutin de liste à la proportionnelle a été abaissé de 3 500 à 1 000 habitants. Il s’agit d’une petite modification électorale qui touche les communes, particulièrement les communes rurales, et dont on appréciera les conséquences dans les mois à venir.
Vous souhaitez également introduire le fléchage dans l’élection des représentants des communes dans les intercommunalités. On entend aussi dire que, à terme, il n’est pas impossible que les compétences des communes en matière d’urbanisme soient transférées aux intercommunalités, ce qui amène les communes rurales à s’interroger sur le rôle qu’elles joueront à l’avenir dans les territoires ruraux.
S’agissant des départements, sans revenir sur le débat sur le scrutin binominal, on essaye certes de faire en sorte que les voix des citoyens soient équivalentes, dans la limite de l’écart de plus ou moins 20 % entre le maximum et le minimum de population d’un canton, dans un département. Toutefois, c’est une équivalence qui ne vaut que lorsqu’on considère chaque département isolément. En effet, s’agissant de deux départements voisins, une voix dans l’un, où il y a moins de population et autant de cantons, peut avoir dix fois plus de poids qu’une voix dans l’autre.
À présent, vous vous en prenez aux élections sénatoriales. Il est vrai, monsieur le ministre, que vous n’avez pas touché à la ruralité. Néanmoins, comme cela a été souligné par mes collègues, dès lors qu’il y a plus de communes de plus de 30 000 habitants dans le monde urbain que dans le monde rural, les quelque 3 000 délégués supplémentaires créés par la réforme proviendraient très majoritairement du monde urbain. Or ces 3 000 délégués, sur les 150 000 qui composent le collège électoral, ont tout de même un certain poids. Nous savons tous que, dans certains endroits et s’agissant d’élections acquises avec des écarts de voix extrêmement faibles, ces petites touches, cumulées, produisent un certain effet.
Enfin, vous allez peut-être aussi toucher aux élections législatives, puisque l’on évoque l’introduction de la proportionnelle à ces élections.
En un an, voilà qui constitue un tableau de chasse remarquable ! Vous n’avez oublié qu’une élection, l’élection régionale. On se demande bien pourquoi ! §
Cherchez l’erreur ! Je pensais, en écoutant tout à l’heure mon collègue M. Albéric de Montgolfier, que l’on évoquerait les élections régionales, mais je n’ai rien entendu.
Peut-être pourrions-nous introduire le scrutin binominal dans les élections régionales ? Il s'agirait d’un beau débat pour notre assemblée. De plus, une telle réforme serait très simple à mettre en œuvre, puisque nous avons désormais l’expérience de ce mode de scrutin au sein des départements. Et au moins ces derniers ne seraient pas les seuls au monde à le connaître…
Sourires sur les travées de l'UMP.
Je souhaite, enfin, revenir sur certains chiffres. M. François Rebsamen nous a dit tout à l’heure qu’il existait un écart de 1 à 100. Or, s’agissant de la charge de travail du nouveau conseiller départemental, il y aura un rapport de 1 à 200, voire de 1 à 300, selon que celui-ci est élu dans une grande ville ou dans le monde rural. Dans une grande ville, les conseillers départementaux peuvent être dix à se partager la tâche, alors que, en zone rurale, un seul conseiller peut s’occuper de trente communes. Vous verrez donc la différence dans leur charge de travail.
Je souhaiterais vous faire part d’un dernier chiffre relatif à cette modification du calcul du nombre de délégués des communes, qui peut sembler insignifiant, mais qui ne l’est pas. Avec ce texte, nous descendons d’une strate : ce n’est plus à partir de 80 000 habitants, mais dès 70 000 habitants qu’une commune aura plus d’électeurs désignés hors du corps communal que d’électeurs choisis à l’intérieur de celui-ci. Toutes les modifications ont un sens !
Je souhaiterais simplement revenir sur les interventions de M. le ministre et de M. Alain Richard. Je crois que cet hémicycle n’est pas forcément l’endroit le plus indiqué pour faire l’exégèse des décisions du Conseil constitutionnel, mais cet exercice est intéressant, et cela nous rajeunit un peu.
Je voudrais préciser que le Conseil constitutionnel, dans sa décision sur la loi du 17 mai 2013, ne s’est pas, contrairement à ce que vous laissez entendre, prononcé sur l’écart de moins ou plus 30 % entre le maximum et le minimum de population d’un canton. Il n’a, de plus, pas affirmé strictement que l’on devait respecter le principe selon lequel une voix doit correspondre à une personne. Il me semble qu’il a simplement reproché au législateur l’utilisation de formules quelque peu alambiquées, qui permettaient d’aller plus loin que ne l’autorisait son approche.
Cette précision me semble importante, parce que je trouve qu’il est un peu malséant de s’appuyer sur la décision du Conseil constitutionnel pour expliquer ce texte.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 2, 23, 32 et 39.
J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe socialiste et, l'autre, du groupe UMP.
Je rappelle que l'avis de la Commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 259 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 53 rectifié, présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 285 du code électoral est abrogé.
La parole est à M. Christian Favier.
L’amendement n° 58, que j’ai déposé précédemment, ayant été rejeté, cette disposition n’a plus lieu d’être. Je retire donc mon amendement, monsieur le président.
L’amendement n° 53 rectifié est retiré.
L'amendement n° 59, présenté par Mme Klès, est ainsi libellé :
Avant l'alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Au premier alinéa de l'article L. 285 du code électoral, le nombre : « 9 000 » est remplacé par le nombre : « 10 000 ».
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 44 rectifié, présenté par MM. Cornu, de Montgolfier, Billard et Pointereau, est ainsi libellé :
Remplacer le nombre :
par le nombre :
La parole est à M. Gérard Cornu.
Il s’agit en quelque sorte d’un amendement de rattrapage, en lien avec la discussion que nous avons eue précédemment.
Tout le monde semble s’accorder sur la nécessité de défendre le monde rural ou, plus particulièrement, comme le précisait M. Alain Richard, les habitants du monde rural. Je propose donc, par cet amendement, de faire passer la tranche d’habitants pour laquelle est élu un délégué supplémentaire de 800 habitants à 1 500 habitants.
L'amendement n° 45 rectifié, présenté par MM. Cornu, de Montgolfier, Billard et Pointereau, est ainsi libellé :
Remplacer le nombre :
par le nombre :
La parole est à M. Gérard Cornu.
Il s'agit d’un amendement de repli : le seuil y est porté à 1 200 habitants seulement.
L'amendement n° 54 rectifié, présenté par MM. de Montgolfier, Billard et Cornu, est ainsi libellé :
Remplacer le nombre :
par le nombre :
La parole est à M. Albéric de Montgolfier.
Cet amendement vise à éviter la mise en place d’un seuil trop brutal, notamment afin que le nombre de délégués supplémentaires dans les communes de plus de 30 000 habitants n’augmente pas trop fortement.
Ainsi, les délégués supplémentaires ne seraient élus que par tranche de 950 habitants, et non de 800 habitants comme il est prévu par le projet de loi.
L'amendement n° 22, présenté par M. Masson, est ainsi libellé :
Remplacer le nombre :
par le nombre :
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements n° 44 rectifié, 45 rectifié et 54 rectifié ?
La commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 44 rectifié. Monsieur Cornu, le système permettant aux communes de plus de 30 000 habitants de disposer d’un grand électeur supplémentaire par tranche de 1 000 habitants existe depuis le début de la Ve République, …
… un régime auquel je vous pensais très attaché, ainsi que vos collègues du groupe UMP… D’ailleurs, tout à l’heure, vous avez rougi de plaisir lorsque François Rebsamen vous a qualifié de « conservateurs ». Par conséquent, j’ai du mal à comprendre votre volonté de revenir sur un dispositif qui a fait ses preuves depuis longtemps !
La commission émet le même avis, pour les mêmes raisons, sur l’amendement n° 45 rectifié.
Enfin, si l'amendement n° 54 rectifié vise à améliorer quelque peu le système actuel, ses dispositions vont moins loin que la modification proposée par le Gouvernement. C’est pourquoi la commission y est également défavorable.
Je mets aux voix l'amendement n° 44 rectifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Protestations sur les travées de l'UMP.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 260 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 45 rectifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Protestations sur les travées de l'UMP.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 261 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 54 rectifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Protestations sur les travées de l'UMP.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 262 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 1er.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
L'amendement n° 43 rectifié, présenté par MM. Cornu, de Montgolfier et Billard, est ainsi libellé :
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 288 du code électoral, le mot : « âgé » est remplacé par le mot : « jeune ».
La parole est à M. Gérard Cornu.
Il s'agit ici d’un problème qui se pose dans de nombreux scrutins. Je propose que, en cas d'égalité des suffrages, ce soit le candidat non pas le plus âgé, mais le plus jeune qui soit élu.
Il paraît préférable de maintenir la règle d’élection au bénéfice de l’âge, qui, en tout état de cause, ne s’applique que dans des hypothèses rarissimes. Si l’on devait modifier ce principe, il faudrait le faire pour toutes les élections.
La commission émet donc un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
Sourires sur les travées de l'UMP.
L'amendement n° 33, présenté par M. Masson, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la deuxième phrase de l’article L. 290-1 du code électoral, après les mots : « la section électorale correspondante ou », sont insérés les mots : «, à défaut, ».
La parole est à M. Jean Louis Masson.
Les communes associées ont la possibilité de désigner des délégués sénatoriaux spécifiques pour les élections sénatoriales.
C’est la commune prise globalement qui désigne les délégués supplémentaires. Je suis tout à fait d'accord avec ce principe, mais, dans la mesure où il s’agit de délégués prévus spécifiquement pour les communes associées, il faudrait, lorsqu’il y a une section électorale – si tant est qu’il en reste –, que ces délégués soient choisis parmi les conseillers municipaux représentant les communes associées et non parmi l’ensemble des conseillers municipaux de la commune, prise globalement.
Pour l’auteur de cet amendement, les délégués des communes associées doivent être désignés prioritairement parmi les conseillers municipaux élus dans la section électorale correspondante, et seulement à défaut parmi les électeurs de cette section. Cette règle est logique au regard du rôle de représentant des collectivités territoriales assuré par les sénateurs, puisque celui-ci donne la priorité aux élus locaux dans la désignation des grands électeurs.
La commission émet donc un avis favorable.
Monsieur Masson, je vous rappelle que la loi du 17 mai 2013 a supprimé les sections électorales dans les communes de moins de 20 000 habitants. Les communes associées comprises dans des communes de 20 000 à 30 000 habitants sont concernées par la désignation de grands électeurs issus des sections correspondant aux communes associées.
Par ailleurs, le 5 juin dernier, lors de l’examen de la proposition de loi portant diverses dispositions relatives aux collectivités locales, votre commission des lois a voté un amendement présenté par son rapporteur, Alain Richard, qui visait à supprimer les sections électorales dans toutes les communes ; nous examinerons d'ailleurs cette disposition plus tard dans cette folle journée.
Sourires.
Je vous propose donc de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable.
Monsieur le ministre, votre argument est un faux argument. On ne peut pas spéculer sur une disposition qui n’est pas encore votée, surtout lorsque la disposition en question est très loin de faire l’unanimité.
D'ailleurs, le président de la commission des lois semble ne pas être de votre avis, puisqu’un article de sa proposition de loi portant diverses dispositions relatives aux collectivités locales prévoit le rétablissement de toutes les sections électorales. Le rapporteur de cette proposition de loi a son avis, que je ne partage pas ; le président de la commission des lois a lui aussi son avis. J’ignore s’il existe une entente entre les deux pour noyer le poisson, mais, en l’état actuel des choses, celui-ci est toujours bien vivant.
La loi étant ce qu’elle est, il n’y a aucune raison de ne pas adopter mon amendement. Je le maintiens donc, monsieur le président.
Monsieur Masson, comme vous avez pu le constater, il y a eu un ample débat au sein de la commission des lois. En partant d’une proposition que j’avais formulée à la suite du précédent débat sur la loi électorale, la commission des lois a adopté la position qui sera présentée par M. le rapporteur et que M. le ministre a évoquée.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er.
L'amendement n° 34, présenté par M. Masson, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L’article L. 290-1 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les communes déléguées qui ont été substituées aux communes associées en application de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, conservent un nombre de délégués égal à celui auquel elles auraient eu droit en l’absence de fusion. Ces délégués sont désignés par le conseil municipal de la commune issue de la fusion, parmi les conseillers municipaux domiciliés dans le ressort de l’ancienne commune associée ou à défaut parmi les électeurs inscrits sur les listes électorales de la commune dans les conditions fixées au présent titre. »
II. Le I entre en vigueur à la date d'entrée en vigueur de l'article 33 de la loi n°2013-403 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral.
La parole est à M. Jean Louis Masson.
La loi du 17 mai 2013 a porté un mauvais coup aux communes associées. Au départ, le Gouvernement avait complètement oublié les communes associées ; c’est moi qui le lui avais fait remarquer. En première lecture, le Sénat avait voté mon amendement.
Sourires sur les travées du groupe socialiste.
Pourtant, soudainement, en deuxième lecture à l’Assemblée nationale, le président socialiste de la commission des lois a sorti de sa poche un amendement visant à supprimer le sectionnement électoral des communes associées et à transformer ces dernières en communes déléguées.
Il m’a semblé anormal qu’une telle décision soit prise lors de l’examen d’un texte n’ayant rien à voir avec les communes associées et les communes déléguées. Un vrai problème se pose ici. C'est pourquoi nous débattrons de ce sujet tout à l'heure, grâce au président de notre commission des lois.
Je veux rappeler qu’il m’a été indiqué en commission des lois que le rétablissement du « bonus » de délégués sénatoriaux pour les communes anciennement associées, et aujourd'hui déléguées, serait mieux perçu si l’amendement correspondant était présenté lors de l’examen du projet de loi relatif à l’élection des sénateurs. Cela m’a été précisé lors de l’examen en commission d’un amendement similaire, que j’avais déposé sur la proposition de loi portant diverses dispositions relatives aux collectivités locales.
Ayant beaucoup d’estime pour les avis de la commission des lois, et ne pensant pas un seul instant qu’elle puisse tenir un double discours en disant blanc le matin et noir l’après-midi, je suis convaincu qu’elle sera logique avec elle-même et qu’elle soutiendra donc mon amendement.
Cet amendement a pour objet de maintenir le bonus de délégués sénatoriaux pour les communes associées qui deviendraient communes déléguées sous l’effet de la loi du 17 mai 2013.
Outre sa complexité, cette disposition présente un risque d’inconstitutionnalité. En effet, dans la mesure où elle constitue une dérogation au principe d’égalité des communes, puisqu’il s’agit de donner à certaines communes un nombre de délégués supérieur à celui qui devrait normalement découler de leur population, l’attribution de ce bonus doit reposer sur un critère rationnel et objectif.
En l’état du droit, un tel critère existe : le bonus est attribué aux communes associées et non aux communes déléguées. En revanche, si cet amendement était adopté, deux régimes coexisteraient : les communes déléguées créées depuis 2010 n’auraient pas droit au bonus, tandis que les communes déléguées ayant succédé à une commune associée y auraient droit. Il n’est pas sûr que l’origine de la constitution de la commune déléguée soit un élément suffisant pour justifier cette différence de traitement.
La commission émet donc un avis défavorable.
Il convient d’examiner cette affaire de plus près.
On nous dit qu’il n’y a désormais plus qu’une seule commune. De fait, nous assistons là à une sorte de rupture du pacte républicain auquel avaient adhéré ces communes en 1971. Sur les 700 communes associées qui existent en France, mon département en compte 100. Le nombre des délégués sénatoriaux, au nombre de 1 000 environ, s’en trouve donc réduit de 10 %.
Mes chers collègues, vous pouvez aisément imaginer le trouble que peut créer dans un département la suppression, du jour au lendemain, d'abord des sections de communes, puis des délégués sénatoriaux qui y étaient associés. Aussi, l'amendement de M. Masson est plus qu’intéressant.
Ce soir, nous aurons l’occasion d’aborder une nouvelle fois ce sujet lors de l’examen de la proposition de loi portant diverses dispositions relatives aux collectivités locales, mais il est inexact de dire qu’on crée un seul régime pour autant, puisque, au côté du régime des communes nouvelles, il subsistera ce régime d’entre-deux.
C’est pourquoi il aurait été sans doute utile de prolonger notre discussion, afin de voir comment il était possible de traiter ces communes déléguées de manière identique à tout le moins aux communes nouvelles, lesquelles ont la possibilité, dans les six mois qui suivent leur création, d'opter pour un régime avec des maires délégués. En effet, les communes déléguées passent directement d’un pacte qu'elles avaient librement conclu à une sorte de néant, ce qu'elles ne comprennent absolument pas.
Aussi, je crois que nous honorerions en votant cet amendement de M. Masson.
Je souhaite interroger M. le ministre sur la situation paradoxale des communes associées constituées en application d’une procédure de fusion-association de communes.
La création en quelque sorte d’un droit de vote plural me paraît inconstitutionnelle. En effet, la commune fusionnée conservera l'ensemble de ses grands électeurs, alors même que le nombre de ceux de la commune issue de la fusion sera déterminé en fonction du nombre d’habitants de l’ensemble ainsi formé. La commune fusionnée et celle qui sera issue de la fusion seront donc doublement prises en compte pour le calcul du nombre des grands électeurs.
Le Gouvernement ne pourrait-il pas profiter de l’examen de ce projet de loi pour mettre fin à cette situation, qui, je le répète, me paraît être inconstitutionnelle et qui, de ce fait, pourrait faire l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité ?
Je fais miennes les observations de notre collègue Charles Guené.
Nous sommes confrontés à un réel problème. Soit on supprimait ce système de communes associées, soit on respectait le pacte conclu à l'origine par ces collectivités, assez nombreuses, qui, par consensus, avaient fait le choix de se regrouper précisément parce qu’elles ne voulaient pas fusionner. En vérité, aucune véritable consultation n’a été menée sur cette question.
Les élus des communes concernées commencent à se rendre compte de ce qui se passe, ou alors ils en prendront conscience après le vote de la loi.
Personnellement, je voterai donc l'amendement de M. Masson.
Le véritable problème, c'est que la modification du statut des communes associées a été votée à la sauvette. À tout le moins, il aurait fallu adopter cette mesure de manière claire, après un débat, et non pas lors d'une deuxième lecture à l'Assemblée nationale.
D'ailleurs, l'article en question était si peu compréhensible que la plupart des personnes intéressées n'ont rien vu venir. J’en veux pour preuve que le maire d’une commune associée qui s’était adressé à son association de maires s’est entendu répondre par son interlocuteur, apparemment un conseiller juridique, que les communes associées n’étaient pas concernées, pour la simple raison que le mot « suppression » était absent de l’article en question, seule la mention « 20 000 habitants » y étant inscrite. En réalité, ce seul ajout suffisait pour empêcher les communes associées de disposer de délégués propres lors des élections sénatoriales.
Par le vote de mon amendement, nous marquerions notre attachement à ces communes.
Je mets aux voix l'amendement n° 34.
J’ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 264 :
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er.
Marques de satisfaction sur les travées de l'UMP.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 21 rectifié bis est présenté par Mmes Cohen et Gonthier-Maurin.
L'amendement n° 49 rectifié bis est présenté par MM. Maurey, Détraigne, Guerriau, Merceron, Marseille et Deneux et Mme Férat.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article L. 299 du code électoral est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le candidat et son remplaçant sont de sexe différent. »
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 21 rectifié bis.
Avec la réforme proposée dans ce projet de loi, quelque 93 sièges continueront d’être pourvus au scrutin majoritaire dans les départements ainsi que dans les collectivités d’outre-mer élisant un ou deux sénateurs.
La délégation aux droits des femmes considère qu’ils ne doivent pas être dispensés de toute obligation paritaire. Dans sa recommandation n° 4, elle propose en conséquence, à l’instar de ce qu’avait prévu la loi du 31 janvier 2007 pour les conseillers généraux, que le candidat et son remplaçant soient de sexe différent.
Le présent amendement tend à traduire cette recommandation, sur le plan législatif, en complétant l'article L. 299 du code électoral.
La parole est à M. Hervé Maurey, pour présenter l'amendement n° 49 rectifié bis.
Le présent projet de loi a pour objectif avoué de favoriser la parité. Or nous pensons qu'il n’en sera rien, parce que l’on ne parvient pas aux résultats tels qu’ils sont annoncés ou escomptés en appliquant limitativement le scrutin proportionnel.
On l'a bien vu lors des élections sénatoriales de 2001 : alors que la proportionnelle s’appliquait dans les départements élisant trois sénateurs, les femmes élues ont représenté 20 % du nombre total des élus, c'est-à-dire moins que la proportion de femmes siégeant au Sénat, alors même que nous sommes élus par moitié au scrutin majoritaire et par moitié au scrutin proportionnel, et bien moins qu’à l'Assemblée nationale – celle-ci compte 26 % de femmes –, où les députés sont élus au scrutin majoritaire.
Je le répète, nous ne croyons pas du tout à l'efficacité du scrutin proportionnel dans les départements désignant trois sénateurs pour renforcer la parité. Nous l’avons dit, nous pensons que les motivations du Gouvernement sont tout autres, et nous y reviendrons.
Pour notre part, pour tendre vers cette situation – nous ne prétendons pas parvenir immédiatement à une stricte parité – et respecter ce qui est un objectif constitutionnel, nous proposons une mesure concrète consistant à rendre obligatoire le choix d’un suppléant de sexe différent. Cela signifie que, lorsque le titulaire sera un homme, il devra avoir une femme comme suppléante, et inversement.
Ce dispositif s’inspire de celui qui existait jusqu'à présent pour l'élection des conseillers généraux en application la loi de 2007.
L'amendement n° 17 rectifié, présenté par M. Masson, est ainsi libellé :
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article L. 299 du code électoral, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le candidat et la personne appelée à le remplacer comme sénateur dans les cas prévus à l’article LO. 319 sont de sexe différent. »
La parole est à M. Jean Louis Masson.
Sous la précédente législature, le gouvernement de M. Fillon avait proposé d'instaurer pour les conseillers généraux un système paritaire entre le titulaire et le suppléant. Lors de l’examen de la loi, nombre d'intervenants avaient indiqué qu’une telle solution ne servait à rien.
Or, dans mon département de la Moselle, par exemple, l'obligation d'avoir comme une femme comme suppléante quand on est un homme et réciproquement a permis en trois ans de doubler le nombre de femmes conseillères générales. Contrairement à ce que certains croient, cette mesure n’est pas anodine, parce que, que l’on soit sénateur ou conseiller général, des changements peuvent survenir en cours de mandat. La raison d'être des suppléants, c’est de remplacer, en cas de nécessité, le titulaire. S’ils ne servaient à rien, ils n'existeraient pas !
Ma proposition est un petit pas en avant. Puisque nous l’avons fait pour les conseillers généraux, il n'y a aucune raison de ne pas le faire pour les sénateurs.
La proposition commune à ces trois amendements, directement inspirée de la règle applicable pour l’élection des conseillers généraux, permettrait de mettre en œuvre l’objectif d’égal accès des hommes et des femmes aux mandats électoraux prévu par l’article 1er de la Constitution.
Une telle disposition avait d’ailleurs été avancée dans une proposition de loi déposée par notre collègue Antoine Lefèvre en mai 2011. Cette mesure formerait le pendant, pour le scrutin majoritaire, de l’obligation de dépôt de listes paritaires dans les départements où l’élection se déroule au scrutin de liste à la représentation proportionnelle.
Toutefois, en commission, les débats sur ce sujet ont été particulièrement âpres.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Approfondis !
Sourires.
Approfondis, soit ! Et même argumentés !
Cette disposition a suscité un certain nombre de réticences, et ce pour plusieurs raisons : elle contraindrait la liberté du candidat de choisir son remplaçant ; elle n’existe pas pour les députés, qui peuvent librement choisir leur suppléant ; elle n’existe plus pour les conseillers généraux du fait de l’adoption du scrutin binominal.
Confrontée à ces arguments contradictoires, la commission, après un long débat, a décidé de s’en remettre à la sagesse du Sénat, la proposition ayant recueilli autant de voix pour que de voix contre.
Mes chers collègues, je ne suis qu’un modeste rapporteur. Je vous explique ce qui s’est passé en commission, à l’issue de débats approfondis.
Les défenseurs de ces amendements s’appuient sur l’exemple des cantonales.
Comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner lors de la présentation du projet de loi sur le changement de mode de scrutin pour l’élection des conseillers généraux, force est de constater que cette disposition n’a pas permis un véritable progrès. En 2011, on avait même assisté à une régression du nombre de candidatures féminines. Cela nous a amenés à modifier le mode de scrutin, non plus pour favoriser la parité, mais pour l’appliquer totalement. D’où le choix du mode de scrutin départemental.
Le Gouvernement n’est donc pas favorable à ces amendements, parce qu’il souhaite plus de sénatrices, et non pas plus de suppléantes.
La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 21 rectifié bis et 49 rectifié bis.
Je suis très étonné de l’avis de la commission, et plus encore de celui du Gouvernement.
Ces deux amendements, issus de différentes travées de notre hémicycle, visent à améliorer la parité ! Certes, le dispositif proposé n’assure pas une parité parfaite ; il ne constitue qu’un pas pour tendre vers cet objectif, que nous a fixé la Constitution et que nous devons, à ce titre, respecter.
La commission est réservée. Et M. le rapporteur nous présente un argument extraordinaire, que j’ai noté, car j’en croyais à peine mes oreilles : cela pourrait contraindre le titulaire. Mais croyez-vous que, lorsque l’on instaure le scrutin binominal, on ne contraint pas le titulaire, femme si elle doit prendre un suppléant homme et homme s’il doit prendre une suppléante femme ? Lorsque cela vous arrange, vous sortez de votre chapeau des arguments inédits !
Un autre élément était que ce système ne s’applique pas aux députés. Très bien ! Il y a une navette. Il y aura une deuxième lecture. Faisons-le pour les députés. Je ne vois pas pourquoi les parlementaires seraient dispensés de cette règle.
J’en viens à l’observation de M. le ministre, qui nous dit ne pas vouloir simplement de suppléants de sexe différent de celui du titulaire.
Le dispositif que nous proposons s’appliquerait dans le cas où l’on en resterait, comme nous le souhaitons, à trois sénateurs élus au scrutin majoritaire par département. Et si, par malheur, le scrutin proportionnel devait s’appliquer dans les départements élisant trois sénateurs, notre proposition vaudrait alors pour les départements qui élisent deux sénateurs.
Je ne comprends vraiment pas le Gouvernement et sa majorité, qui n’ont de cesse de crier « parité, parité, parité ! » – et je ne cherche pas à parodier le général de Gaulle –, mais qui, lorsqu’on leur présente une disposition ayant pour seul inconvénient de ne pas être issue de leurs rangs, demandent son rejet. Ce n’est vraiment pas cohérent.
Ces amendements sont certes symboliques, mais les symboles comptent.
Un de ces amendements a été déposé par la délégation aux droits des femmes. C’est donc une recommandation qui mérite d’être prise en compte. La délégation aux droits des femmes rend des travaux très intéressants, qui honorent le Sénat. On ne peut pas négliger son avis.
Par ailleurs, ces amendements sont peut-être symboliques, mais j’invite les partis politiques, tous autant qu’ils sont, à mettre une femme à la tête de la moitié des listes qu’ils présentent pour les élections sénatoriales.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC et sur certaines travées du groupe socialiste . – Murmures sur les travées de l'UMP.
Il est bien malheureux de devoir voter en permanence des textes de loi pour que la parité entre enfin dans nos mœurs politiques. Il reste encore bien du chemin à faire et des progrès à accomplir.
Monsieur le ministre, j’en appelle à votre générosité : acceptez cet amendement, dont les dispositions ne bouleverseront pas le paysage politique.
Je tiens à indiquer à M. Maurey que le rapporteur a remarquablement assumé sa mission. Cette question a donné lieu, en commission, à un débat long et approfondi. Lors du vote, il y a eu autant de voix pour que de voix contre. Le rapporteur a présenté au Sénat, en toute neutralité, les arguments qui ont été défendus en commission, et il lui a fait part de son vote partagé.
J’apporte ces précisions parce que je ne voudrais pas qu’il y eût mise en cause de notre rapporteur, monsieur Maurey.
Mes chers collègues, je vais voter ces amendements, mais je tiens à vous dire que je suis surpris par les arguments que j’entends.
Une large majorité s’est dégagée, dans cet hémicycle et à l’Assemblée nationale, lorsqu’il s’est agi d’appliquer une disposition analogue, dans une rédaction similaire, pour l’élection des conseillers généraux.
Dès lors que nous avons décidé d’appliquer cette disposition pour l’élection des conseillers départementaux, je ne comprends pas pourquoi il faudrait considérer qu’elle n’a pas vocation à s’appliquer pour l’élection des législateurs.
J’ajoute que les députés, qui ont, à une large majorité, voté pour l’application de cette disposition pour l’élection des conseillers généraux, se sont bien gardés de se l’imposer.
En début d’après-midi, nous avons employé les termes d’archaïsme, de conservatisme et de modernisme. Je ne vois pas pourquoi on s’abriterait derrière le fait que les députés se sont exemptés d’une telle disposition pour ne pas nous l’appliquer, si l’on considère qu’elle est un progrès.
Je souhaite soulever une question de procédure.
Nous examinons trois amendements qui font l’objet d’une discussion commune. Dans l’ordre de dépôt, on trouve le mien, qui porte le numéro 17, ensuite les amendements n° 21 et 49. Tous ont été rectifiés.
Je ne comprends pas pourquoi mon amendement, n° 17 rectifié, sera mis aux voix après les amendements n° 21 rectifié bis et 49 rectifié bis. Dans la mesure où tous ces amendements visent le même sujet, il aurait été pertinent de les traiter dans l’ordre de leur dépôt. Je vous demande donc, monsieur le président, pourquoi ces amendements n’ont pas été appelés dans cet ordre.
Par ailleurs, si trois amendements sont déposés sur le même sujet, il n’est pas de bonne procédure que l’un d’eux soit mis de côté. C’est pourquoi je souhaite modifier mon amendement pour le rendre identique aux amendements n° 21 rectifié bis et 49 rectifié bis, ce qui permettra de les mettre aux voix en même temps.
Monsieur Masson, les deux amendements précédents étaient parfaitement identiques. Votre amendement porte sur le même sujet, et c’est la raison pour laquelle il fait l’objet d’une discussion commune avec eux. Ensuite, il revient à la direction de la séance de classer les amendements en fonction de l’ordre des dispositions du projet de loi qu’ils tendent à modifier.
Cela dit, mon cher collègue, vous avez toute latitude pour modifier votre amendement.
Dans ces conditions, je le modifie pour le rendre identique aux amendements n° 21 rectifié bis et 49 rectifié bis, monsieur le président.
Je suis donc saisi d’un amendement n° 17 rectifié bis, présenté par M. Masson, et ainsi libellé :
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article L. 299 du code électoral est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le candidat et son remplaçant sont de sexe différent. »
La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.
Je voterai ces trois amendements identiques. Toutefois, je comprends mal, je l’avoue, les explications de M. le ministre. Dans un premier temps, il nous explique qu’il veut la proportionnelle dans les départements élisant trois sénateurs afin de favoriser la parité. Dans un second temps, il refuse un amendement visant à favoriser la parité en prévoyant que le titulaire et le suppléant doivent être de sexe différent.
Monsieur le ministre, dès lors que vous souhaitez imposer, dans une élection à la proportionnelle, la présentation de listes comprenant alternativement un homme et une femme – une proportionnelle « chabada » ! –, je ne comprends pas que vous refusiez cette alternance homme femme lorsqu’il s’agit d’un scrutin uninominal à deux tours. Un point de votre raisonnement m’échappe.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous le dis en toute sympathie, je constate que nous assistons à une sorte de séance de rattrapage afin de déterminer quels sont les tenants de la parité.
Je comprends la proposition faite voilà un instant par Mme la rapporteur de la délégation aux droits des femmes. Toutefois, les chiffres concernant les suppléants aux élections cantonales sont implacables. Et c’est bien là que réside le problème.
Nous, nous voulons favoriser la parité. J’illustrerai mon propos d’exemples concrets, monsieur Béchu. Pour les élections législatives, il y a un régulateur financier. Il a d’ailleurs coûté cher à votre famille politique, et elle paie encore, dans tous les sens du terme.
Les élections européennes ou régionales se font au scrutin de liste, comme les élections municipales.
Pour les cantonales, le régulateur financier n’intervient pas. Une première tentative, intéressante, d’ailleurs – elle ne mérite pas d’être rejetée d’un revers de la main –, a été faite avec les suppléants. Néanmoins, par définition, les suppléants ne sont pas des titulaires ; ce ne sont pas eux qui sont élus. Et comme j’ai eu l’occasion de le rappeler lors du débat sur les élections cantonales et départementales, les chiffres sont là.
C’est pourquoi, pour obtenir la parité, nous avons proposé le scrutin binominal. En l’occurrence, ce sont deux personnes qui sont élues, et non plus un titulaire élu avec son suppléant, ou sa suppléante.
Pour ce qui concerne les élections sénatoriales, certains sénateurs sont élus au scrutin proportionnel, lequel, nous le savons, n’est pas une garantie absolue, mais permet de faire progresser la parité.
Les auteurs de ces amendements identiques nous proposent de faire avancer la parité en jouant sur la suppléance. Et certains de s’exclamer : enfin, la parité arrive grâce à la suppléance !
Nous savons ce qu’il en sera.
Je vous le dis clairement. Le Gouvernement ne s’oppose pas à ce que le Sénat vote ces amendements, afin que les suppléantes ou les suppléants soient choisis en fonction du sexe du titulaire. En revanche, il s’oppose à l’idée selon laquelle, grâce à cette mesure, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, vous nous expliqueriez que vous êtes favorables à la parité.
Comme je n’ai aucune envie de vous laisser le moindre espace sur ce sujet…
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC . – Protestations sur les travées de l'UMP.
M. Manuel Valls, ministre. Non, ce n’est pas inadmissible ! Mesdames, messieurs les sénateurs, soyez beaux joueurs. Il y a parfois des pièges, même de la part de personnes aussi talentueuses que M. Béchu.
Bravo ! et applaudissementssur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Le Gouvernement s'en remet donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
Monsieur le président, je demande une suspension de séance, afin que le groupe socialiste puisse se réunir, car certains de ses membres ne partagent pas la position de M. le ministre.
Nous allons donc interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-huit heures quinze, est reprise à dix-huit heures trente.
La séance est reprise.
La parole est à Mme Françoise Cartron, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 21 rectifié bis, 49 rectifié bis et 17 rectifié bis.
J’espère que, dès les prochaines élections sénatoriales, nous aurons des femmes têtes de liste, et qui y seront pleinement à leur place !
Nous ne sommes pas dupes de ce petit jeu d’optique que vous nous proposez, mais nous considérons que les femmes méritent qu’on fasse aujourd'hui ce petit pas dans le sens d’une amélioration de la parité. §
Nous n’avons pas l’habitude de changer d’avis en cours de séance, mais, s’agissant d’un scrutin uninominal, il est un principe, auquel nous, en tout cas, nous sommes attachés : le ou la candidate doit pouvoir choisir librement son suppléant, quel que soit le sexe de ce dernier. C’est un principe de liberté et de responsabilité.
Nous ne sommes pas dupes, non plus, de ce qui se joue en ce moment, que ce soit au travers de l’amendement de M. Maurey ou d’autres, mais nous persisterons à considérer que la responsabilité du choix de la suppléante ou du suppléant incombe à celle ou celui qui mène le combat.
Aussi difficile soit-il de délivrer ce message, nous l’assumons pleinement.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Le principe de liberté devrait conduire aussi à reconnaître aux femmes, qui représentent tout de même 50 % de l’humanité, leur place en politique et à tout mettre en œuvre pour qu’elle l’occupe effectivement.
Certes, la disposition proposée ne va pas tout régler. Néanmoins, poser en permanence la question de la place des femmes en politique, c’est porter haut et fort cette exigence, de manière à produire un effet pédagogique sur les hommes, bien sûr, mais aussi sur les femmes, pour inciter ces dernières à revendiquer leur juste place dans la société. C’est la raison pour laquelle je voterai ces amendements. §
Je mets aux voix les amendements identiques n° 21 rectifié bis, 49 rectifié bis et 17 rectifié bis.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UDI-UC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 265 :
Nombre de votants346Nombre de suffrages exprimés345Pour l’adoption325Contre 20Le Sénat a adopté.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et de l’UDI-UC . – M. Gérard Cornu applaudit également.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 1er.
Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 9 rectifié bis est présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Chevènement, Collin et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.
L'amendement n° 55 rectifié bis est présenté par MM. de Montgolfier, Cornu et Billard.
L’amendement n° 25 rectifié ter est présenté par M. Masson
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 305 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Nul ne peut être candidat au second tour s’il ne s’est présenté au premier tour. »
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 9 rectifié bis.
M. Jacques Mézard. Il s’agit d’en finir avec un véritable archaïsme. Cette proposition ne devrait guère susciter l’intérêt puisqu’il s’agit d’un vrai problème de fond…
Murmures.
Nous proposons en effet de prévoir que nul ne peut être candidat au second tour s’il ne s’est présenté au premier tour.
Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.
Il faudra sûrement un scrutin public pour que chacun puisse exprimer un véritable choix, sans aucune pression médiatique ou démagogique !
Nous considérons qu’il faut mettre fin à cette règle qui permet à un candidat, dans les circonscriptions où l’élection des sénateurs a lieu au scrutin majoritaire, de se présenter au second tour sans avoir été candidat au premier tour. Au demeurant, cette règle n’est plus appliquée depuis longtemps.
J’observe au passage qu’on ne s’est jamais posé la question des comptes de campagne, alors qu’elle va nécessairement se poser désormais. Ce point a dû être oublié, monsieur le ministre, à l’instar du problème des communes associées. Il y a, comme cela, des questions qui passent un peu au travers des mailles du filet… §
Nous souhaitons que celle-ci soit réglée une fois pour toutes.
La parole est à M. Albéric de Montgolfier, pour présenter l’amendement n° 55 rectifié bis.
Pour quelles raisons, en effet, pourrait-on être candidat au second tour sans avoir été candidat au premier ? Par rapport aux élections législatives, cela apparaît comme une anomalie.
Cela étant, la question des comptes de campagne qui vient d’être évoquée par M. Mézard est tout à fait essentielle. En effet, si une personne se déclare candidate entre les deux tours, c’est-à-dire sans avoir posé sa candidature au premier tour, cela peut soulever une vraie difficulté de ce point de vue. La meilleure façon d’éviter toute anomalie en la matière est tout simplement de mettre fin à cette règle un peu étrange qui consiste à pouvoir être candidat au second tour sans s’être présenté au premier tour. Je ne doute pas que le Sénat en tiendra compte pour adopter ces amendements.
La parole est à M. Jean Louis Masson, pour présenter l’amendement n° 25 rectifié ter.
Lors de l’examen du projet de loi relatif aux élections municipales et cantonales, que nous avons voté, j’avais présenté un sous-amendement tendant à empêcher qu’une personne qui n’était pas candidate au premier tour des élections municipales puisse être élue, et ce sous-amendement avait d’ailleurs été adopté au Sénat.
Dans la même logique, j’ai déposé le présent amendement pour les sénateurs. Petit à petit, nous parviendrons, de ce point de vue, à une uniformisation pour l’ensemble des scrutins.
L'amendement n° 15 rectifié ter, présenté par M. Détraigne, Mmes Férat, Morin-Desailly et Goy-Chavent et MM. J.L. Dupont, Merceron, Deneux, Bockel, Namy, Capo-Canellas, Tandonnet, Amoudry, Maurey, J. Boyer, Guerriau, Jarlier, Mercier et Dubois, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 305 du code électoral est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Nul ne peut être candidat au deuxième tour s'il ne s'est présenté au premier tour et s'il n'a obtenu un nombre de suffrages au moins égal à 12, 5 % du nombre des électeurs inscrits.
« Dans le cas où un seul candidat remplit ces conditions, le candidat ayant obtenu après celui-ci le plus grand nombre de suffrages au premier tour peut se maintenir au second.
« Dans le cas où aucun candidat ne remplit ces conditions, les deux candidats ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages au premier tour peuvent se maintenir au second. »
La parole est à M. Yves Détraigne.
Cet amendement va un peu plus loin que les trois précédents. En effet, il tend non seulement à supprimer toute possibilité d’être candidat au second tour d’une élection sénatoriale sans s’être présenté au premier, mais aussi à fixer un seuil de 12, 5 % des électeurs inscrits pour pouvoir se maintenir au second tour.
L'amendement n° 18 rectifié, présenté par M. Masson, est ainsi libellé :
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l’article L. 294 du code électoral, il est inséré un article L. 294-… ainsi rédigé :
« Art. L. 294-.. . – Dans les départements où les élections ont lieu au scrutin majoritaire, nul ne peut être élu candidat au deuxième tour s’il ne s’est pas présenté au premier tour et s’il n’a obtenu un nombre de suffrages au moins égal à 12, 5 % du nombre des électeurs inscrits.
« Dans le cas où un seul candidat remplit ces conditions, le candidat ayant obtenu après celui-ci le plus grand nombre de suffrages au premier tour peut se maintenir au second.
« Dans le cas où aucun candidat ne remplit ces conditions, les deux candidats ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages au premier tour peuvent se maintenir au second. »
II. - L’article L. 305 du code électoral est abrogé.
La parole est à M. Jean Louis Masson.
Cet amendement a le même objet que celui qui vient d’être présenté. Je considère qu’il est défendu.
J’émets un avis favorable sur les amendements identiques n° 9 rectifié bis, 55 rectifié bis et 25 rectifié ter. Au demeurant, j’avais moi-même déposé un semblable amendement en commission, avant que la commission ne rejette le présent texte.
Il s’agit d’une modification logique. Avec l’ouverture des comptes de campagne, le maintien de cette disposition aurait d’ailleurs posé des difficultés supplémentaires.
Certains m’ayant demandé si le cas de figure s’était déjà présenté par le passé, j’ai examiné les résultats des précédentes élections sénatoriales. En 2011 et en 2008, aucune nouvelle candidature n’a été déposée au second tour. Une seule a été constatée en 2004 et une autre en 2001. En 1998, en revanche, quatre cas ont été recensés, dont l’un a conduit à l’élection, à Wallis-et-Futuna, de notre collègue Robert Laufoaulu, qui a du reste été réélu en 2008.
Concernant les amendements n° 15 rectifié ter et 18 rectifié, qui tendent à fixer un seuil de 12, 5 % pour pouvoir se maintenir au second tour, la commission a émis un avis défavorable. Ces amendements lui ont paru trop restrictifs, dans la mesure où ils visent à imposer aux candidats de réunir nombre minimum d’électeurs inscrits, ce qui marquerait une nette rupture avec le droit actuel et avec la tradition des élections sénatoriales, qui plus est au détriment du pluralisme politique.
Le Gouvernement rejoint avec enthousiasme la cavalcade que lance M. Mézard contre les archaïsmes !
Il s’agit ici de mettre fin à un dispositif dont, en toute honnêteté, on ne comprend pas très bien la logique. Comme M. Masson vient de le souligner, c’est une question de cohérence. J’émets donc un avis favorable sur les amendements identiques n° 9 rectifié bis, 55 rectifié bis et 25 rectifié ter.
En revanche, le Gouvernement est défavorable à l’établissement d’un seuil de 12, 5 % des électeurs inscrits pour l’accès au second tour du scrutin sénatorial. Nous aurons l’occasion d’y revenir : en la matière, le Gouvernement n’est pas favorable à l’introduction d’un seuil.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 9 rectifié bis, 55 rectifié bis et 25 rectifié ter.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er, et les amendements n° 15 rectifié ter et 18 rectifié n'ont plus d'objet.
Il me semble que ce n’est pas le cas de mon amendement n° 18 rectifié, monsieur le président. Puis-je m’expliquer à son sujet ?
M. le rapporteur a indiqué qu’une telle disposition pourrait porter atteinte au pluralisme. Il a tout à fait raison ! C’est bien pourquoi je n’avais pas voté le rehaussement de 10 % à 12, 5 % du seuil d’électeurs à réunir pour les scrutins cantonaux, mesure dont je regrette l’adoption. Et je me souviens que M. le ministre avait alors justifié la barre très élevée de 12, 5 % des inscrits, qui porte pourtant atteinte au pluralisme.
Au reste, je note que, sans ce critère, les élections législatives partielles de dimanche dernier n’auraient peut-être pas eu la même issue. Je rappelle que le troisième candidat a été éliminé dès le premier tour. D’après mes informations, il n’en était pas très satisfait… Il faut choisir : soit on veut du pluralisme, soit on n’en veut pas !
En tout état de cause, j’accepte de retirer mon amendement, monsieur le président.
Ce n’est pas nécessaire, monsieur Masson, puisque, comme je l’ai indiqué, votre amendement est devenu sans objet.
L'amendement n° 24, présenté par M. Masson, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 312 du code électoral est ainsi modifié :
1° Après le mot : « départements », sont insérés les mots : « où l’élection a lieu au scrutin majoritaire à deux tours ».
2° Il est complété par une phrase ainsi rédigée : « Dans les autres départements, les électeurs sont convoqués au chef-lieu de leur arrondissement. »
La parole est à M. Jean Louis Masson.
À l’origine, la plupart des élections sénatoriales étaient organisées au scrutin majoritaire et, comme plusieurs tours étaient en général nécessaires au cours de la même journée, il était indispensable que l’élection se tienne au chef-lieu du département, afin de centraliser les décisions et l’organisation.
En revanche, dans les départements où le scrutin sénatorial a lieu à la proportionnelle, il n’y a réellement aucune raison d’imposer aux grands électeurs des déplacements pouvant atteindre 120 ou 130 kilomètres, à l’aller comme au retour. C’est le cas dans le département dont je suis l’élu, où le scrutin proportionnel est en vigueur et où il n’est donc pas nécessaire de réunir tous les électeurs en un seul et même lieu. En pareil cas, le scrutin devrait pouvoir être organisé dans chaque chef-lieu d’arrondissement, le bureau centralisateur demeurant au siège de la préfecture.
À mon sens, cela permettrait d’épargner beaucoup de temps et d’énergie aux grands électeurs et de limiter, du même coup, leurs frais de déplacements, lesquels, je le rappelle, sont pris en charge par l’État. Cet amendement est donc susceptible de contribuer à ces économies d’argent public que l’on cherche à grappiller un peu partout !
Ce mode d’organisation des élections sénatoriales pourrait a priori apparaître comme une bonne idée pour limiter les déplacements des grands électeurs, lutter contre l’effet de serre et permettre à l’État de rembourser un peu moins de frais de déplacements.
Toutefois, s’il était adopté, cet amendement compliquerait la tenue de ces scrutins, que le préfet a la charge d’organiser avec l’appui du président du tribunal.
Par ailleurs, cette proposition semble peu justifiée dans la mesure où les élections sénatoriales n’ont lieu qu’une fois tous les six ans. De plus, ces scrutins permettent de réunir un grand nombre d’élus du département à la préfecture à l’occasion d’un vote solennel, auquel les grands électeurs sont très attachés.
En conséquence, la commission a émis un avis défavorable.
Il y a quelques instants, nous évoquions les archaïsmes dont il convient de se défaire. Toutefois, il convient aussi de ne pas confondre archaïsmes et traditions !
Mes chers collègues, je vous rappelle qu’un sénateur est l’élu du département, …
… et non pas d’un chef-lieu d’arrondissement quelconque. Par conséquent, il me semble que le point de vue du rapporteur et du ministre est le bon.
L'amendement n'est pas adopté.
Le premier alinéa de l’article L. 294 du même code est remplacé par les dispositions suivantes :
« Dans les départements où sont élus deux sénateurs ou moins, l’élection a lieu au scrutin majoritaire à deux tours. »
Pour ma part, je suis très favorable à cet article, et pas seulement dans un souci de parité. En effet, le scrutin proportionnel permet d’éviter la formation de coalitions conduisant au « gel » du pluralisme. À l’inverse, on l’a observé lorsque la proportionnelle a été introduite en 2001, ce système a permis non seulement la parité, mais aussi, dans les départements comptant trois ou quatre sénateurs, un plus grand pluralisme.
Contrairement à ce que j’ai pu entendre dans cet hémicycle, le scrutin proportionnel est au moins aussi efficace que le scrutin majoritaire, sinon beaucoup plus, pour garantir l’expression d’un véritable pluralisme fondé sur les réalités du terrain. Si, par exemple, vous ne disposez pas de l’investiture d’un parti politique, vous pouvez tout aussi bien être élu à la proportionnelle qu’au scrutin majoritaire !
Voilà pourquoi je suis favorable à cet article, et ce à double titre : pour la parité et pour le pluralisme. Il n’est pas normal qu’un parti politique représentant 50, 001 % des grands électeurs obtienne les trois sièges sénatoriaux d’un département, …
… et qu’un autre parti, qui en représenterait 49, 999 %, n’ait aucun élu.
Dans cet article, il y a une logique de démocratie !
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 3 est présenté par M. J.C. Gaudin et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
L'amendement n° 37 est présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour présenter l’amendement n° 3.
Mes chers collègues, au cours de la discussion générale, nous avons déjà largement évoqué cet article. Au-delà du seuil de 800 habitants, que nous avons abordé tout à l'heure, le retour au scrutin proportionnel pour les départements à trois sièges constitue le cœur du présent texte.
Tout d’abord, dans ces départements, contrairement à ce que prétend M. Masson, le scrutin majoritaire n’empêche pas l’élection d’un sénateur appartenant à la minorité départementale.
M. Jean-Jacques Hyest. Nous en avons d’ailleurs un exemple vivant en la personne de notre excellent président de la commission des lois, M. Jean-Pierre Sueur.
Nouveaux sourires.
M. Manuel Valls, ministre. Et M. Sueur est toujours vivant !
Nouveaux sourires.
… et même bien élu !
Quoi qu'il en soit, nos collègues radicaux de gauche avaient, me semble-t-il, émis la même opinion que moi en commission… Toutefois, je ne sais pas ce qui s’est passé et nous avons observé un changement ! §
Monsieur Mézard, le présent texte a été rejeté par la commission des lois parce que vous avez voté contre ! Peut-être, après mûre réflexion, certains ont-ils changé d’avis…
Pour ma part, ayant voté naguère le retour au scrutin majoritaire pour les départements comptant trois sièges, je ne vais pas me déjuger aujourd’hui ! Allons-nous modifier le système à chaque alternance ?
Bien entendu, si nous retrouvons la majorité, nous rétablirons le scrutin majoritaire pour les départements à trois sénateurs !
En effet, le système tel qu’il existe actuellement présente un équilibre : une moitié des sénateurs est élue au scrutin proportionnel et une moitié, au scrutin majoritaire. Avec cette modification, la part des sénateurs élus à la proportionnelle sera très majoritaire.
En fait, la proportionnelle ne me paraissant pas être forcément et dans tous les cas le meilleur système, je pense que cette mesure est uniquement destinée à essayer de gagner un siège dans les départements où l’on est minoritaire… Au demeurant, comme l’illustrent les exemples passés, je ne suis pas certain que ces petits calculs se révèlent nécessairement fructueux. Nous verrons bien !
En tout état de cause, nous ne souhaitons pas le retour au scrutin proportionnel pour les départements comptant trois sièges.
Le motif de la parité est, à bien des égards, une fiction. Dans la durée, cette raison peut être pertinente, mais il n’en reste pas moins que certains sénateurs, qui estiment avoir bien fait leur travail, ne pourront plus se représenter d’une élection à l’autre. Dans certains territoires, cela va être très douloureux ! Et même sanglant !
Marques d’approbation sur plusieurs travées de l’UMP.
Mes chers collègues, pour éviter que de telles situations ne se produisent, nous vous invitons à adopter l’amendement de suppression du présent article.
Au cours de la discussion générale, nous avons largement exposé les raisons pour lesquelles nous étions contre l’abaissement à trois sénateurs du seuil d’application du scrutin à la proportionnelle. Je n’y reviens pas : nous restons résolument opposés à cette disposition.
La commission émet un avis défavorable, pour d’évidentes raisons que M. Hyest a d’ailleurs évoquées : l’extension du scrutin proportionnel constitue l’objet principal de ce projet de loi.
Sans le présent article, l’ensemble du texte perd beaucoup de son intérêt.
Bien entendu, je voterai ces amendements de suppression.
Nous sommes là véritablement au cœur du sujet. Une fois de plus, on avance l’argument de la parité. Mais qui pourrait ne pas y être favorable ? Nous avons presque tous voté, voilà quelques instants, en faveur de la parité dans un scrutin uninominal en imposant un suppléant de sexe différent. Voilà au moins une disposition susceptible de la faire avancer !
Le scrutin proportionnel pour élire quatre sénateurs a eu des effets très favorables en matière de parité, on l’a vu dans certains départements, puisqu’il y a souvent eu deux élus de chaque sexe. En revanche, dès lors qu’il s’agit d’élire trois sénateurs, nous savons très bien que ce sont les têtes de liste qui seront élues, et non les candidats en deuxième et troisième positions.
Quand des sénateurs sortants, hommes ou femmes, se représentent, ils sont souvent têtes de liste, et ce sont eux qui sont élus !
La parité est ici véritablement un prétexte sournois puisque tout le monde est d’accord sur son principe.
En réalité, vous tripatouillez encore le mode de scrutin pour essayer de conforter votre majorité et de gagner les élections par un bidouillage électoral ! §
C’est la réalité, et vous le savez bien !
Mais les électeurs ne sont pas dupes et, de toute façon, nous expliquerons bien dans nos campagnes que vous êtes contre la ruralité, que vous la méprisez. Croyez-moi, les grands électeurs, qui sont très attentifs à ce débat, sauront s’en souvenir !
Deux arguments sont donc évoqués en faveur de cette disposition. Le premier est la parité, répété à l’envi. Or nous savons très bien que, avec la multiplication des listes, le scrutin proportionnel dans les départements à trois sénateurs ne la garantit en rien. Les têtes de liste sont en général élues et cela ne donne évidemment lieu à aucun progrès en matière de parité.
Le second argument avancé est le pluralisme. Je crois qu’à ce sujet le rapport est très éclairant. Le rapporteur cite très justement, à la page 27, des chiffres précis. Il nous rappelle que, sur vingt-cinq départements pourvus de trois sièges de sénateurs, neuf comptent parmi leurs élus un sénateur appartenant au camp opposé aux deux autres. Ainsi, dans neuf départements sur vingt-cinq, le scrutin majoritaire n’empêche en rien le pluralisme. Le président de la commission des lois en est d’ailleurs la meilleure illustration !
Je ne vois donc pas en quoi votre proposition est susceptible de faire progresser la parité – nous savons très bien que c’est une fiction – et le pluralisme.
Nous connaissons évidemment l’intérêt de cette modification du mode de scrutin : elle est de pure opportunité électorale.
En outre, je suis un peu étonné qu’au mois de juin, presque en juillet, nous en arrivions à évoquer une telle question. Cela rompt avec la tradition républicaine qui consiste à ne pas modifier le mode de scrutin dans l’année précédant l’élection. J’ai observé l’ordre du jour particulièrement copieux de la session extraordinaire, qui présente une liste de quatre pages entières de textes à examiner. Dans la mesure où il y aura deux lectures de ce texte, nous n’en achèverons pas l’examen avant la fin de la session extraordinaire de juillet, peut-être même pas de celle de septembre. Or, en octobre, nous serons à moins d’un an des prochaines élections sénatoriales. Cela apparaîtra alors comme une magouille électorale, et les grands électeurs ne l’oublieront pas au moment de voter !
Je voterai naturellement ces amendements de suppression.
Nous sommes très attachés au scrutin majoritaire pour l’élection des sénateurs dans les départements qui en élisent trois, tout simplement parce que c’est un scrutin de liberté. Il permet à des candidats de se présenter seuls, en liste complète ou incomplète, et il permet aux grands électeurs de se déterminer de manière tout à fait libre, avec la possibilité de panacher, comme on le fait aux élections municipales dans les petites communes.
Il suffit d’assister à un dépouillement pour constater que les grands électeurs usent pleinement de cette faculté. Ils votent très souvent à la fois pour une liste portée par une famille politique dans laquelle ils se reconnaissent et pour un candidat, homme ou femme, envers lequel ils éprouvent de l’estime ou de l’attachement ou, tout simplement, auquel ils témoignent ainsi leur reconnaissance pour le travail qu’il a accompli.
Il nous paraît donc important de préserver ce mode de scrutin auquel les élus locaux sont très attachés. J’insiste sur ce point, monsieur le ministre, car j’ai le sentiment que vous n’en avez pas conscience. Je suis d’un département où l’on élit de la sorte les sénateurs et je peux vous dire que les grands électeurs que je rencontre, maires, adjoints ou autres élus, sont très mécontents d’apprendre que l’on s’apprête à les priver de cette liberté et de cette souplesse dans le choix de leurs sénateurs.
On nous explique qu’il s’agit de parité. Une fois encore, la parité a bon dos ! Je n’ai pas besoin de rappeler que cela n’aura des effets sur la parité qu’à la marge dès lors que le scrutin proportionnel s’appliquera pour élire un nombre très limité de sénateurs. Une fois encore, l’exemple de 2001 est très éclairant à ce sujet.
On nous explique que cela favorisera le pluralisme, mais comme cela vient d’être dit, le pluralisme existe déjà. Un certain nombre de départements à trois sénateurs désignent des parlementaires de familles politiques différentes avec le scrutin majoritaire, précisément parce que c’est un mode de scrutin qui favorise la liberté.
Tout à l'heure, monsieur le ministre, je crois bien vous avoir entendu dire, à propos du conseiller départemental, que le Président de la République et le Gouvernement s’étaient engagés à revenir sur le conseiller territorial. En revanche, le changement de mode de scrutin aux élections sénatoriales, lui, n’a fait l’objet d’aucun engagement : il n’a jamais été question de cela durant la campagne électorale, et le Premier ministre n’en a pas non plus parlé quand il a engagé la responsabilité de son gouvernement. À aucun moment, il n’a été dit aux Français que l’on changerait le mode de scrutin des élections sénatoriales.
En fait, cette mesure est sortie du chapeau au terme de petits calculs ! Vous avez sans doute fait tourner vos logiciels, et vous estimez que cela permettra d’éviter que le Sénat ne bascule de l’autre côté et que votre majorité, déjà très courte, ne disparaisse.
Voilà, à mon sens, la réalité de vos intentions. Il ne s’agit pas de parité ! En prétendant vouloir changer le mode de scrutin pour cette raison, vous cherchez à nous leurrer !
En outre, monsieur le ministre, j’aimerais que vous nous expliquiez pourquoi, selon les modes de scrutin que vous nous proposez, vos arguments varient.
Quand vous nous avez proposé le scrutin binominal, avec la création du conseiller départemental, vous avez fait l’apologie du scrutin majoritaire.
Je m’en étais d’ailleurs réjoui sur-le-champ et vous en avais félicité.
Mais pourquoi voulez-vous maintenant faire reculer ce mode de scrutin ici, dans l’assemblée parlementaire où siègent déjà une moitié d’élus à la proportionnelle ? Demain, si votre texte est adopté, cette proportion atteindra à peu près 75 %, soit plus que dans toute autre assemblée, même locale, car, dans les assemblées élues avec des scrutins mixtes, cette proportion ne fait qu’approcher 75 %.
Pourquoi donc vouloir absolument plus de proportionnelle au Sénat ?
Pourquoi, surtout, vous faites-vous, selon les élections concernées, tantôt l’apôtre du scrutin majoritaire, tantôt celui du scrutin proportionnel ? §
Notre groupe sera fidèle à la position de fond que nous avons toujours défendue : la proportionnelle toujours et partout !
C’est avant tout une question de démocratie : il s’agit d’obtenir la représentation la plus juste possible des différentes sensibilités politiques existant dans la population.
Je rappelle que ce sont, par définition, de petits départements qui élisent trois sénateurs. Ce sont donc des départements plus ruraux que ceux qui désignent quatre, cinq ou six sénateurs.
Au demeurant, le président de la commission des lois, dont je connais fort bien la situation, est l’exemple vivant de la pluralité que préserve le scrutin majoritaire, un exemple auquel tout le monde se réfère.
Dans notre département rural, en effet, les électeurs n’ont pas voulu mettre tous leurs œufs dans le même panier.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Merci de me considérer comme un œuf !
Nouveaux sourires.
Ils ont voulu, peut-être, envoyer un signal politique, ou souligner la qualité de telle ou telle personnalité.
Ce mode de scrutin permet donc effectivement d’offrir un choix et de favoriser la parité. Avec un autre système, une autre vision aurait probablement prévalu, offrant moins de liberté dans le choix des électeurs.
Aujourd’hui, dans les départements ruraux, l’électeur choisit, parmi tous les candidats, ceux qu’il souhaite voir siéger au Sénat.
Dans les départements plus urbanisés, la situation est un peu différente : les électeurs sont très nombreux, le scrutin est plus politisé, les grands centres urbains ont un plus grand poids, etc.
À mes yeux, la situation actuelle ouvre toutes les possibilités et permet au candidat de se faire élire sur sa personnalité, et non pas sur son étiquette politique. §
Je suis également élu d’un département concerné par cette mesure et qui a déjà connu le vote au scrutin proportionnel, il y a quelques années, puis au scrutin majoritaire, il y a deux ans.
Quel que soit le mode de scrutin, on parvient à convaincre les électeurs de la nécessité de la parité. En revanche, il va être difficile, après leur avoir expliqué comment voter à la proportionnelle, puis au scrutin majoritaire, de leur demander de revenir à la proportionnelle. Car il y a des grands électeurs qui auront connu cette succession de modes de scrutin !
Pendant ce temps-là, on ne parlera pas de leurs préoccupations, qui sont vives, notamment dans le milieu rural. Ils vont être touchés par la baisse des dotations, par la diminution des subventions des départements, qui n’ont plus les moyens de faire face à leurs responsabilités. C’est cela, leurs préoccupations !
Marques d’approbation sur les travées de l’UMP.
En mettant en place un mode de scrutin qui éloigne encore les élus et les décisions du territoire, vous vous enfoncez dans le refus de prendre en compte les besoins de ces territoires.
J’en suis convaincu, il faut conserver le mode de scrutin que nous connaissons aujourd’hui dans ces départements de taille moyenne. Car il ne s’agit pas de « petits départements » : leur population est supérieure à 200 000 habitants, sans pour autant atteindre un million. Ce sont simplement des départements témoins de la réalité de tous les jours.
Je suis donc farouchement opposé à cet article.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 266 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 16, présenté par M. Masson, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - Après l’article L. 294 du code électoral, il est inséré un article L. 294-… ainsi rédigé :
« Art. L. 294-... - Dans les départements où sont élus deux sénateurs, l’élection a lieu au scrutin majoritaire binominal à deux tours, sans panachage.
« Nul candidat d’un binôme n’est élu sénateur au premier tour de scrutin si son binôme n’a réuni la majorité absolue des suffrages exprimés et un nombre de voix égal au quart des électeurs inscrits.
« Au second tour de scrutin, la majorité relative suffit. Si plusieurs binômes de candidats obtiennent le même nombre de suffrages, l’élection est acquise au binôme qui comporte le candidat le plus âgé. »
II. - Après l’article L. 299 du code électoral, il est inséré un article L. 299-… ainsi rédigé :
« Art. L. 299-... - Dans les départements où les élections ont lieu au scrutin binominal, les candidats se présentent en binôme de sexe différent. Ils doivent mentionner dans leur déclaration de candidature, pour chaque candidat, les nom, prénoms, date et lieu de naissance, domicile et profession de la personne appelée à les remplacer comme sénateur dans les cas prévus à l'article L. O. 319. Ils doivent y joindre l'acceptation écrite des remplaçants, lesquels doivent remplir les conditions d'éligibilité exigées des candidats.
« Le candidat et la personne appelée à le remplacer comme sénateur dans les cas prévus à l’article L. O. 319 sont de même sexe.
« Nul ne peut figurer en qualité de remplaçant des deux candidats du binôme. Nul ne peut figurer en qualité de remplaçant sur plusieurs déclarations de candidature. Nul ne peut être à la fois candidat et remplaçant d'un autre candidat. Nul ne peut désigner pour le second tour de scrutin une personne autre que celle qui figurait sur sa déclaration de candidature lors du premier tour. »
III. - Au premier alinéa de l’article L. 294 du code électoral, les mots : « sont élus trois sénateurs ou moins » sont remplacés par les mots : « est élu un sénateur ».
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 50 rectifié, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - Au premier alinéa de l’article L. 294 du code électoral, les mots : « sont élus trois sénateurs ou moins » sont remplacés par les mots : « est élu un sénateur ».
II. - Après l’article L. 294 du même code, il est inséré un article L. 294-… ainsi rédigé :
« Art. L. 294-... - Dans les départements où sont élus deux sénateurs, l’élection a lieu au scrutin majoritaire binominal à deux tours.
« Nul candidat d’un binôme n’est élu sénateur au premier tour de scrutin si son binôme n’a réuni la majorité absolue des suffrages exprimés et un nombre de voix égal au quart des électeurs inscrits.
« Au second tour de scrutin, la majorité relative suffit. Si plusieurs binômes de candidats obtiennent le même nombre de suffrages, l’élection est acquise au binôme qui comporte le candidat le plus jeune. »
III. - Après l’article L. 299 du même code, il est inséré un article L. 299-… ainsi rédigé :
« Art. L. 299-... - Dans les départements où les élections ont lieu au scrutin binominal, les candidats se présentent en binôme de sexe différent. Ils doivent mentionner dans leur déclaration de candidature, pour chaque candidat, les nom, prénoms, date et lieu de naissance, domicile et profession de la personne appelée à les remplacer comme sénateur dans les cas prévus à l'article L. O. 319. Ils doivent y joindre l'acceptation écrite des remplaçants, lesquels doivent remplir les conditions d'éligibilité exigées des candidats.
« Le candidat et la personne appelée à le remplacer comme sénateur dans les cas prévus à l’article L. O. 319 sont de même sexe.
« Nul ne peut figurer en qualité de remplaçant sur plusieurs déclarations de candidature. Nul ne peut être à la fois candidat et remplaçant d'un autre candidat. Nul ne peut désigner pour le second tour de scrutin une personne autre que celle qui figurait sur sa déclaration de candidature lors du premier tour. »
La parole est à Mme Hélène Lipietz.
Puisqu’il s’agit de faire avancer la parité, je propose, comme je l'avais annoncé lors de la discussion générale, d’instituer un scrutin paritaire.
On nous a seriné que le meilleur scrutin pour la parité était le scrutin binominal. Nous proposons donc de déplacer le curseur et d’introduire ce scrutin dans les départements élisant deux sénateurs.
L'amendement n° 46 rectifié, présenté par MM. Cornu, de Montgolfier, Billard et Pointereau, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
deux sénateurs
par les mots :
quatre sénateurs
La parole est à M. Gérard Cornu.
Je souhaite revenir sur un point qu’a évoqué M. Maurey et qui me paraît essentiel : le fait que certains sénateurs soient élus à la proportionnelle et d’autres au scrutin majoritaire uninominal.
Puisque vous n’avez pas accepté les amendements de suppression de l’article 3, que vous le vouliez ou non, vous allez complètement changer la nature du Sénat puisque, dorénavant, 75 % des sénateurs seront élus à la proportionnelle et 25 % seulement le seront au scrutin uninominal majoritaire à deux tours.
Je trouve que c'est dommage parce que la force de notre assemblée tient aussi au fait que les sénateurs ne sont pas uniquement élus sur leur appartenance politique.
La force du Sénat, c'est d'avoir en son sein des hommes et des femmes reconnus et élus directement par leurs pairs. Avec l’abaissement du seuil d’application de la proportionnelle, c’en sera fini : il suffira d'être bien placé sur la liste pour être élu. L’élection ne consacrera donc plus la reconnaissance d’un travail mené sur le terrain, elle reviendra à désigner des apparatchiks.
Il est bien dommage que le Sénat en soit réduit à cela pour une sombre histoire de calcul électoral !
L'amendement n° 47 rectifié, présenté par MM. Cornu, de Montgolfier et Billard, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - À la seconde phrase du dernier alinéa du même article L. 294, les mots : « le plus âgé des candidats » sont remplacés par les mots : « le candidat le plus jeune ».
La parole est à M. Gérard Cornu.
L'amendement n° 47 rectifié est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements n° 50 rectifié et 46 rectifié ?
La commission est défavorable à l'amendement n° 50 rectifié, qui tend à introduire un scrutin binominal dans les départements élisant deux sénateurs.
Il est certain que ce mode de scrutin favoriserait grandement la parité, et je m'étonne que MM. Maurey et Béchu ne se soient pas empressés d’appuyer cet amendement ! Ils avaient beaucoup plus d'allant lorsqu’il s’agissait de défendre la parité pour les seuls suppléants… §
Cet amendement n’est pas conforme à la tradition qui privilégie le scrutin uninominal pour les départements élisant un ou deux sénateurs, une tradition à laquelle la commission est attachée.
Avec l’amendement n° 46 rectifié, M. Cornu nous propose de retenir le scrutin uninominal pour les départements élisant quatre sénateurs. Il va ainsi plus loin que ce qu'avait défendu l'UMP en 2004… Je rappelle que, en 2000, la gauche avait institué la proportionnelle pour les départements élisant trois sénateurs ; la droite a ensuite remonté ce seuil à quatre sénateurs. Aujourd'hui, sans doute un peu par provocation, M. Cornu nous suggère de le relever à cinq sénateurs.
Sa proposition ne me semble pas très sérieuse ; peut-être s’agit-il pour lui de simplement dénoncer le scrutin proportionnel. Je le renvoie aux arguments qui ont été précédemment avancés et qui démontrent ses avantages au regard de la parité et de la représentation des différentes familles politiques.
J'ajoute que, dans un petit département rural élisant trois sénateurs, rien n'empêchera des candidats disposant d’une forte légitimité de déposer une liste et de se faire élire, pour peu que 33 % des électeurs les soutiennent. Je ne doute d’ailleurs pas que, dans ces mêmes départements, des candidats seront élus sans être membres d'un parti politique. En effet, le facteur personnel joue aussi, comme cela a été dit tout à l'heure au sujet de l’excellent président de la commission des lois, qui, notamment grâce à ses qualités, a été élu malgré des conditions difficiles.
Rien n'empêchera des candidats de se déclarer : dans notre pays, la moindre élection suscite toujours beaucoup de candidatures ! Certains de ces candidats seront élus.
N'anticipons pas sur ce que donnera ce mode de scrutin et contentons-nous de mettre en place des règles justes, auxquelles la gauche est attachée…
Monsieur le rapporteur, vous sembliez déçu que je n'aie pas pris la parole pour dire tout le bien que je pensais de l'amendement de Mme Lipietz. Sachez que cet amendement, à mes yeux, a un mérite : celui de la cohérence.
Monsieur le ministre, je regrette que vous n’ayez pas daigné répondre à la question que je vous ai précédemment posée : pourquoi vous faites-vous l'apôtre, selon les élections, de modes de scrutin extrêmement différents ?
Vous souteniez le scrutin binominal pour l'élection des conseillers départementaux. S'il est aussi formidable, pourquoi ne pas le mettre en place pour les élections sénatoriales, comme le propose Mme Lipietz. Et pourquoi ne pas l’instituer aussi pour les élections législatives ?
Pourquoi voulez-vous un mode de scrutin différent pour chaque élection ? Pourquoi avancer chaque fois des arguments différents ? Là, il faut un scrutin majoritaire ; d’où le scrutin binominal. Ici, il faut 75 % de sénateurs élus à la proportionnelle. Est-ce ce que vous envisagez aussi pour l'Assemblée nationale ? Personnellement, je n'ai entendu parler, au mieux – ou au pire, je ne sais pas ! –, que de 10 % de députés élus à la proportionnelle. Pourquoi y a-t-il deux poids, deux mesures ?
Je le redis, l'amendement de notre collègue présente un grand avantage, que je ne retrouve malheureusement pas dans les projets électoraux du Gouvernement : la cohérence.
La seule cohérence que l’on peut y voir, c'est que vous essayez de sauver des sièges. Il y a le feu au lac, comme on peut le constater, dimanche après dimanche, avec des élections législatives partielles qui sont calamiteuses pour le Gouvernement et la majorité ! Vous essayez de sauver des sièges : voilà la cohérence du Gouvernement, et elle n'est pas glorieuse !
J’entends depuis un certain temps dans ce débat des propos parfois surréalistes et souvent contradictoires.
Je n’ai pas pour habitude de mettre mon propre cas en avant, mais je veux néanmoins rappeler que j’ai été élue en 2001 à la proportionnelle et que j'étais la seule femme tête de liste.
C'est déjà une bonne leçon pour un certain nombre de nos collègues qui prônent la parité, mais qui feraient bien de la prôner de la même manière au sein de leur propre parti pour les têtes de liste…
Si j'ai été élue en 2001, ce n'est pas parce que j'étais une apparatchik, monsieur Cornu, mais parce que mes pairs ont estimé que j’étais capable de mener une liste. Ce mode de scrutin a été supprimé quatre ans plus tard pour mon département. Avec deux autres collègues, nous avons présenté une liste en 2011, alors que le mode de scrutin était redevenu majoritaire.
On nous dit que nous serions uniquement soucieux de petits calculs, voire de magouilles, mais je peux vous assurer que notre élection en a surpris plusieurs ici… Si nous avons gagné, ce n’était donc pas après avoir fait tourner les logiciels !
Comme le disait Mme Didier, la seule solution qui vaille en démocratie, c'est de recourir le plus souvent possible au mode de scrutin proportionnel.
Chère madame Herviaux, vous êtes la démonstration vivante de ce que le scrutin majoritaire, qui vous a élue la dernière fois, était le bon scrutin !
Vous avez réussi à montrer que votre implantation était durable.
Je veux simplement réagir à l'idée selon laquelle la démocratie devrait nécessairement se traduire par la proportionnelle. Ce n’est pas ma conception de la démocratie.
Regardez le monde qui nous entoure : croyez-vous qu’Israël, où s’applique la proportionnelle intégrale, est un pays ou l’on assure à la fois la représentation de la diversité et la capacité de décider ?
La proportionnelle a, selon moi, des atouts, mais, en matière électorale, il faut se méfier de la généralisation. Aucun système ne nous permet aujourd'hui de garantir que la proportionnelle, c'est la démocratie.
Je suis d'accord pour qu’il y ait une dose de proportionnelle, mais ce qui compte réellement à mes yeux pour garantir qu’un système est démocratique, c’est la capacité d'alternance. Il y a des systèmes qui permettent l’alternance sans sacrifier l’efficacité.
Je ne suis pas contre la proportionnelle en général, mais, je le redis, le bon système est celui qui permet l'alternance. Il doit, bien sûr, être représentatif. Cependant, en matière de représentativité, il y a des dizaines de modèles, et je ne suis pas sûr qu’il existe un modèle parfait. §
Monsieur Maurey, monsieur Raffarin, c’est la particularité de la France que d’avoir des systèmes électoraux différents selon les niveaux de collectivités. Et, indépendamment du débat qui nous oppose sur la question du seuil, le Sénat lui-même connaît des systèmes différents puisque certains sénateurs sont élus à la proportionnelle et d’autres au scrutin majoritaire.
La proportionnelle intégrale est appliquée aux élections européennes, tandis qu’aux élections régionales, le système proportionnel est combiné avec le principe majoritaire, la Corse ayant un régime particulier. Aux élections municipales, la part du principe majoritaire est plus importante.
Quant à la capacité d’alternance, à laquelle je suis moi aussi très attaché, elle existe très clairement à l’Assemblée nationale, même s’il faut rappeler que le scrutin proportionnel par département appliqué en 1986 n’a pas empêché le RPR et l’UDF de remporter la majorité, étant entendu que, dans les petits départements, la proportionnelle ressemblait beaucoup à un scrutin majoritaire.
Faut-il instiller une dose de proportionnelle aux élections législatives ? On verra ! C’est au Président de la République de décider. Pour ma part, j’observe simplement que les deux candidats qui se sont opposés au second tour de l’élection présidentielle avaient tous les deux avancé cette proposition.
Au fond, ces débats tournent autour d’un problème : concilier le fait majoritaire, indispensable dans le cadre de nos institutions, et la représentation de tous les courants politiques ; c’est une difficulté à laquelle nous sommes tous confrontés.
En ce qui concerne les élections sénatoriales, la majorité et l’opposition sont en désaccord au sujet du seuil à partir duquel la proportionnelle doit être appliquée. En 2000, la gauche avait décidé que ce mode de scrutin s’appliquerait dans les départements élisant trois sénateurs et plus. Après quoi, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, vous avez soutenu le retour au seuil de quatre sénateurs.
Pour notre part, nous considérons que l’application du scrutin proportionnel est possible dans un département dès que trois sièges doivent y être pourvus, en raison même du chiffre trois. Ce système favorise à la fois la parité, même si nous savons bien qu’elle peut être contournée, et la représentation de la diversité politique. C’est sur ce point que nous avons un désaccord.
De manière cohérente, le Gouvernement propose de revenir à la formule mise en place en 2000. Il est d’autant plus déterminé à le faire qu’à l’issue des dernières élections sénatoriales on a constaté un recul de la représentation des femmes au sein du Sénat. Nous suivons donc notre logique, et cela, monsieur Maurey, avec cohérence !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
La parole est à M. Patrice Gélard, pour explication de vote sur l’amendement n° 50 rectifié.
Je serai bref, car je me contenterai d’appuyer les arguments qui viennent d’être exposés par M. Raffarin.
Sourires.
En fin de compte, il n’y a pas de bon ou de mauvais scrutin. C’est le programme de la première année des facultés de droit : on étudie pendant quelques semaines les scrutins proportionnels, majoritaires et mixtes, pour conclure qu’il est très difficile de déterminer ce qu’il y a de bon ou de mauvais dans chacun d’eux.
En réalité, il n’y a ni scrutin excellent ni scrutin profondément néfaste. C’est à la représentation nationale qu’il appartient de choisir. Généralement, du reste, elle se mord les doigts parce qu’elle s’est trompée et elle change le scrutin pour l’élection d’après ; je reconnais que cela fait partie du jeu démocratique.
Toujours est-il que la proportionnelle, pas plus que le scrutin majoritaire, ne peut être tenue pour le scrutin idéal !
L'amendement n'est pas adopté.
La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote sur l'amendement n° 46 rectifié.
C’est en effet un peu par provocation que j’ai déposé cet amendement, monsieur le ministre. Du reste, je vais le retirer. Vous avez bien compris que mon véritable objectif était d’obtenir la suppression de l’article 2.
J’estime que, lorsque trois sièges sont à pourvoir, on ne peut pas parler de proportionnelle. Dans les faits, on obtiendra un scrutin à un tour dans lequel seules les têtes de liste seront élues, dont certaines seront évidemment des femmes. En effet, compte tenu du nombre de listes qui fleuriront, pratiquement jamais le deuxième candidat d’une liste ne pourra être élu.
Dans ces conditions, c’est un abus de langage de parler de proportionnelle !
Cette observation étant faite, je retire l’amendement n° 46 rectifié.
L’amendement n° 46 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 2.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 267 :
Le Sénat a adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à vingt-et-une heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Jean-Léonce Dupont.