C'est à un double titre que cet amendement gouvernemental est innovant.
Tout d'abord, il vise à proposer une mesure alternative à une disposition qui a été mise en place en juin 2005. C'est ce que l'on appelle une législation flottante.
Ensuite, il tend à donner au Gouvernement, prétendument à titre expérimental, la liberté de prendre cette mesure par voie d'ordonnance. Or l'urgence ayant été déclarée sur ce projet de loi, ce dernier ne fera l'objet que d'une lecture unique. Cela signifie que nos collègues députés n'auront même pas été saisis de cette demande d'habilitation, puisque ce texte ira ensuite directement en commission mixte paritaire.
Où sont les droits du Parlement lorsqu'une chambre n'est pas saisie et que l'autre doit voter un amendement déposé la veille ? Il ne s'agit pas d'un problème politique anodin, madame la ministre !
Que vous nous présentiez des textes dans le désordre et dans la précipitation, il y va de votre responsabilité. Mais le débat parlementaire peut au moins avoir lieu, même s'il se déroule dans de très mauvaises conditions ! Or, dans le cas présent, il est clair que vous contournez délibérément les droits du Parlement, en assurant un service minimum devant le Sénat, et le plus tard possible, pour obtenir un accord en commission mixte paritaire avec votre majorité.
Votre ordonnance sera ensuite publiée, et un projet de loi de ratification sera déposé devant le Parlement, mais il ne sera bien entendu jamais inscrit à l'ordre du jour de nos travaux.
Sans doute respectez-vous la lettre de la Constitution, mais pas l'esprit. Je suis sûr que nos collègues de la majorité vont, par discipline, voter cette habilitation, mais certains d'entre eux ne connaissent pas de manière précise le contenu de cette ordonnance puisqu'ils viennent de la découvrir. Nous-mêmes, en tant que membres de la commission des affaires sociales, n'avons été saisis qu'au dernier moment de cet amendement. Celui-ci était accompagné d'une sorte de notice baptisée « Expérimentation du contrat de transition professionnelle », que nous avons à peine pu étudier puisque nous avons dû simultanément suivre les débats en séance publique.
Cette méthode reflète un mépris sans précédent du Parlement. Et tout cela seulement pour un nouveau contrat précaire !
Madame la ministre, était-il à ce point urgent de casser les droits des salariés et le code du travail ? Ne pouviez-vous attendre pour déposer, dans des formes convenables, un projet de loi d'habilitation, même s'il n'avait compris qu'un seul article ?
Je reviendrai tout à l'heure, lors de mon explication de vote, sur le contenu même de l'ordonnance.