Comme l'a rappelé le président, le Gouvernement avait inclus dans le projet de loi relatif à la participation du public une habilitation à légiférer par ordonnance, pour les décisions émanant des collectivités territoriales, et pour les décisions individuelles. Nous avions alors fait valoir que la contrepartie de cette dépossession du pouvoir législatif, sur un sujet qui intéresse particulièrement le Sénat et les collectivités territoriales, était que le Gouvernement nous consulte en amont, avant de transmettre le projet d'ordonnance au Conseil d'État.
Pour mémoire, dans le cadre de la loi du 29 décembre 2012, nous avions réécrit l'article L. 120-1 du code de l'environnement, qui détermine la procédure de participation du public applicable aux décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement, quand aucune autre procédure de participation n'est prévue. Dans ce cas, le projet de décision réglementaire de l'État est mis à disposition du public, accompagné d'une note de présentation synthétique. Le public a vingt et un jours pour faire parvenir ses observations. L'administration doit prendre en compte celles-ci et publier sa décision définitive dans un délai qui ne peut être inférieur à quatre jours. La décision est accompagnée d'une synthèse des observations et, dans un document séparé, de ses motifs.
Nous avions ajouté l'obligation pour l'administration de rendre disponible le dossier du projet de décision en préfecture si un citoyen en fait la demande, en complément de l'information dématérialisée. Le décret d'application est paru le 28 mai dernier. Il est conforme à ce que nous avons voté : tout citoyen peut demander à avoir accès au projet de décision sur support papier, s'il dépose sa demande dans une préfecture ou sous-préfecture du territoire concerné par la décision, au plus tard quatre jours avant l'expiration du délai de consultation.
Dans le cadre du projet d'ordonnance, le Gouvernement réécrit l'article L. 120-1. Cet article est désormais applicable aux décisions réglementaires ayant une incidence sur l'environnement de toutes les personnes publiques et plus seulement de l'État. Il est toutefois prévu que les collectivités de taille moindre puissent, si elles le souhaitent, recourir à des modalités alternatives de participation.
Pour les communes de moins de 10 000 habitants et les groupements de collectivités de moins de 30 000 habitants, le projet de décision et la note de présentation peuvent être consultés sur support papier, et les observations peuvent être déposées sur un registre. Le délai de dépôt des observations ne peut être inférieur à vingt et un jours. Trois jours sont ensuite consacrés à la prise en compte des observations du public. Pendant une durée minimale d'un mois, le maire rend publique, par voie d'affichage, la synthèse des observations. Pour les communes de moins de 2 000 habitants, la consultation du public peut être réalisée dans le cadre d'une réunion publique. Un délai de trois jours doit, là encore, être respecté pour prendre en compte les observations du public.
L'ordonnance crée, par ailleurs, un nouvel article L. 120-1-1 pour les décisions individuelles. Plusieurs modulations sont prévues en fonction de la taille des collectivités. Pour les communes de moins de 10 000 habitants et les groupements de collectivités de moins de 30 000 habitants, le projet de décision ou le dossier de demande peuvent être consultés sur pièces et des observations peuvent être déposées sur un registre. Le délai de consultation ne peut être inférieur à quinze jours. La décision ne peut être adoptée qu'après un délai de deux jours à compter de la clôture de la consultation. Contrairement à ce qui est prévu pour les décisions réglementaires, il n'est pas possible, pour les décisions individuelles, d'organiser une réunion publique. Cette modalité de participation serait en effet inadaptée à la nature de ces décisions.
L'ordonnance crée un article L. 120-1-2 qui reprend les dispositions précédemment inscrites à l'article L. 120-1, concernant l'urgence. Les articles que j'ai évoqués ne s'appliquent pas lorsque l'urgence, justifiée par la protection de l'environnement, de la santé publique ou de l'ordre public, ne permet pas d'organiser une procédure de participation du public.
Le nouvel article L. 120-1-3 rappelle que les modalités de participation du public peuvent être adaptées pour protéger les intérêts mentionnés à l'article L. 124-4 du code de l'environnement, à savoir la défense nationale, la sûreté de l'État, ou encore les procédures juridictionnelles.
L'article L. 120-2 prévoit les cas d'exemption de participation du public, notamment pour les décisions prises conformément à une décision, un plan, schéma ou programme ou tout autre document de planification ayant lui-même donné lieu à participation du public.
Enfin, l'ordonnance rétablit mot pour mot le 4° de l'article L. 411-2. Cet alinéa avait été censuré par le Conseil constitutionnel, dans la mesure où aucune procédure de participation du public n'était prévue pour les décisions aujourd'hui visées par le projet d'ordonnance. La création d'une telle procédure permet de rétablir ces dispositions.
Le projet d'ordonnance procède donc à une transposition assez fidèle aux collectivités territoriales de ce qui est prévu pour les décisions de l'État. L'administration a cherché à moduler les exigences de participation en fonction de la taille de la collectivité concernée. C'est un point positif : autant la Charte de l'environnement doit être respectée, autant il convient de ne pas imposer d'exigences disproportionnées aux collectivités territoriales. Une réunion publique peut suffire dans une commune de petite taille.
Pour autant, un point pourrait être amélioré : pour la version modulée de la participation, lorsque la commune ou l'EPCI a un site internet, il faudrait prévoir la publication des informations sur le site. Cela permettrait de toucher un public plus large. La mise à disposition par voie électronique est conforme aux objectifs fixés par la convention d'Aarhus de 1998. Je vous propose donc de suggérer au Gouvernement cet ajout.
Concernant le délai prévu pour déposer des observations, nous l'avions porté à vingt et un jours pour les décisions réglementaires, faisant le constat qu'il s'agissait du délai minimal pour que le public, d'une part, prenne connaissance de l'existence d'une consultation, d'autre part, puis fasse parvenir ses observations. Or, pour les décisions individuelles, y compris celles de l'État et de ses établissements publics, le délai est réduit à quinze jours. Peut-être serait-il opportun de porter à nouveau ce délai à vingt et un jours, afin de garantir que la participation du public puisse être effective.
Enfin, nos discussions à l'occasion de l'examen du projet de loi s'étaient beaucoup portées sur la question du « tenu compte » : comment l'administration manifeste-t-elle qu'elle a bien pris en compte les observations du public ? L'option retenue avait été de faire publier une synthèse des observations déposées et, pour les décisions réglementaires de l'État, de faire apparaître les motifs de la décision dans un document séparé. Dans le projet d'ordonnance, il n'est pas prévu de synthèse des observations pour les décisions individuelles. Le ministère a indiqué que cet aménagement s'explique par la nécessité de prévoir des modalités de participation plus souples, du fait notamment du nombre bien plus important de décisions individuelles que de décisions réglementaires.
Au final, nous pouvons, je crois, nous féliciter de la transmission de ce projet d'ordonnance. Le Gouvernement a tenu parole. Ce genre d'ordonnances gagne à être discuté en amont de la ratification. Si vous en êtes d'accord, nous pourrions transmettre une lettre à la ministre résumant la position de notre commission, avec les aménagements que je vous ai signalés et ceux que vous proposerez et que nous jugerons utiles.