Je veux d'abord rappeler le combat constant et déterminé de la fédération que je représente contre les clauses de désignation, ainsi que son rôle essentiel, en tant que membre de l'Association pour la promotion de l'assurance collective (Apac), dans la saisine de l'Autorité de la concurrence qui a servi de base à l'excellente décision du Conseil constitutionnel de la semaine dernière, que toutes les mutuelles applaudissent.
Avant les bouleversements de ces dernières années, il existait au sein du monde mutualiste ce qui constituait à mes yeux de véritables réseaux de soins : nos structures pouvaient disposer en leur sein de centres optiques ou auditifs. Nos mutuelles de proximité délivraient alors de véritables services sociaux. La scission exigée par le droit européen entre les activités commerciales et assurantielles - les premières régies par le livre II du code de la mutualité et les secondes par son livre III - a contraint nos structures à l'équilibre, sinon à la rentabilité. Je regrette cette évolution, à l'origine de l'inégalité constatée désormais entre les assurances et les instituts de prévoyance d'une part, et les mutuelles d'autre part.
Il est légitime que les mutuelles mettent en place des réseaux de soins, mais ce faisant, elles ne font que pallier les insuffisances des pouvoirs publics, à qui il incombe en principe de réguler le secteur. Au passage, les soins optiques relèvent-ils véritablement de l'assurance, en principe destinée à la gestion des risques ? Dans ce domaine, nous avançons de la trésorerie plus que nous n'assurons de risques : à 100 euros de cotisation par an, l'adhérent qui renouvelle son équipement tous les trois ans en moyenne avance 300 euros pour n'en percevoir que 200 en remboursement, une fois déduits taxes, frais de gestion et résultat technique. Celui qui consomme des soins optiques tous les ans y gagne, celui qui change de lunettes tous les cinq ans beaucoup moins.
Nous tenons beaucoup aux principes, rappelés dans le code de la mutualité, d'égalité de traitement entre les adhérents et de liberté totale de choix de leur praticien. Différencier les remboursements en fonction de la participation du professionnel à un réseau de soins est une pratique qui les méconnaît. La manne ainsi prélevée sur les adhérents qui sortent du réseau pourrait être utilisée au profit de tous les adhérents.
En tant que président d'une mutuelle régie par le livre III du code de la mutualité, je crains qu'à trop faire pression sur les prix et les marges, nous menacions la qualité des soins. Nous le constatons trop souvent. Incompétents pour évaluer si un professionnel de santé fait bien son métier, nous ne sommes pas des acheteurs de soins. C'est pourquoi nous défendons la liberté de choix et l'égalité de traitement.