Intervention de Geneviève Fioraso

Réunion du 21 juin 2013 à 15h00
Enseignement supérieur et recherche — Article 42 A

Geneviève Fioraso, ministre :

Je tiens à dénoncer les pratiques du centre Fernando Pessoa. Certains élus de l'opposition – je pense notamment aux maires de Toulon et de Béziers, particulièrement concernés – ont farouchement défendu l'installation de ce centre, qui s’est lui-même qualifié d’« université ». Nous avons porté plainte, et il s’agit désormais du « pôle universitaire Fernando Pessoa ». Quel progrès…

L’ouverture de ce centre s’est faite de façon tout à fait illégale, sans qu’aient été fournis de curriculum vitae, de maquettes ou de demande d'autorisation motivée auprès du rectorat. On fait payer des droits d’inscription annuels de 9 500 euros et miroiter un diplôme à des étudiants en plein désarroi après leur échec à la PACES, la première année commune des études de santé, et déçus de ne pas réaliser leur vocation.

J'avais d’ailleurs été alertée par mon homologue, l’ancien ministre Francesco Profumo, qui m’avait indiqué que des plaintes avaient été déposées contre l'installation de tels centres en Italie.

Il est apparu que le comité d'accréditation portugais, l'équivalent de notre comité d'accréditation du ministère de l'enseignement supérieur et de recherche, n'avait pas accordé d’agrément au centre Fernando Pessoa pour attribuer des diplômes, en particulier médicaux et paramédicaux, mais pas seulement, car les formations proposées sont très larges et portent sur différentes disciplines, notamment les relations internationales.

Le « pôle universitaire » Fernando Pessoa ne peut donc pas délivrer de diplômes en France. Les étudiants, appâtés par l'idée d’obtenir plus facilement dans ce centre privé un diplôme de médecin moyennant finances, se rendent maintenant compte qu’il faudra faire une troisième, voire une quatrième année d’études au Portugal, là où le centre est agréé.

C'est un scandale absolu ! Nous n'avons aucune garantie quant à la qualité de la formation, la validation du curriculum vitae et l'expérience des enseignants. L’article 42 A est donc essentiel pour éviter qu’une telle situation ne se reproduise. Nous ne sommes en effet pas à l'abri d'une décision de justice, qui pourrait se fonder sur la liberté d'entreprendre ou la liberté d'enseigner, reconnues dans l’Union européenne, pour nous donner tort.

J'ai demandé aux deux recteurs concernés, ceux de Toulon et de Montpellier, de porter plainte. La plainte a été déposée pour tromperie, mais la qualification de l’infraction pourrait être réorientée en escroquerie, voire davantage. Nous nous sommes aperçus que les droits d'inscription n’avaient pas été comptabilisés. Il apparaît qu’il s’agit d’une affaire de tromperie extrêmement grave.

Au nom de la déontologie, de l’idée que nous nous faisons de l'enseignement supérieur, de la confiance que les étudiants doivent pouvoir lui accorder – c'est d’ailleurs pour cela que vous avez adopté de façon unanime, ce dont je me réjouis, la réforme des premières années –, je vous demande vraiment de retirer votre amendement, madame la sénatrice, afin que de telles tromperies – c'est un euphémisme ! – ne puissent plus se produire.

Comme j'ai entendu bien des choses contradictoires à propos de ce centre, je tenais à indiquer quelle était la position précise du ministère et à me féliciter de l'action des parlementaires face à cette situation extrêmement grave. Et Fernando Pessoa est tout de même un merveilleux poète !

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