La charte d’accessibilité bancaire, qui a été ajoutée à l’Assemblée nationale, apparaît de plus en plus clairement comme relevant d’un pur effet d’annonce.
À l’origine, chacun le sait, le Gouvernement avait l’intention, de créer le livret A du pauvre, géré par l’un des réseaux collecteurs historiques, La Banque Postale, pour y cantonner les épargnants les plus modestes. Abandonnée, cette idée réapparaît avec la charte d’accessibilité, qui fait de La Banque postale le réceptacle naturel de ces épargnants.
Cette sorte de monopole de l’accès bancaire des plus démunis à l’épargne soulève une autre série de questions.
Tout d’abord, cette priorité du rôle de La Banque Postale dans la collecte de l’épargne populaire risque de poser des problèmes à d’autres collecteurs. En effet, selon une étude de la DARES, les titulaires de minima sociaux privilégient, dans leurs relations bancaires, trois réseaux.
Le premier, c’est celui de La Banque postale, notamment dans les quartiers sensibles de nos villes de banlieue, où, bien souvent, le guichet de La Poste est le seul service financier disponible pour la population. La Poste gérerait ainsi le virement d’environ 30 % des minima sociaux et il est probable que les petits épargnants s’y retrouvent en grande partie.
Le deuxième réseau, c’est celui des caisses d’épargne, qui drainerait environ 36 % des minima sociaux. Vu que le virement de ces allocations sur un compte d’épargne est producteur d’intérêts, on comprend l’arbitrage réalisé par les titulaires de ces allocations, et singulièrement par les retraités disposant d’une pension réduite.
Le troisième réseau, recevant le virement d’un peu moins de 30 % des minima sociaux, ce sont les caisses du Crédit agricole, particulièrement dans les départements ruraux où la banque verte est souvent, comme peut l’être La Poste par ailleurs, le seul interlocuteur financier connu de la population.
De fait, ce qui est à craindre avec une accessibilité bancaire centralisée sur la seule Banque postale, c’est tout simplement qu’on favorise le nomadisme de l’épargne de clients des caisses d’épargne et du Crédit agricole, les privant d’un encours dont ils font pourtant une judicieuse utilisation ; les privant aussi de relations clientèle toujours utiles pour proposer d’autres services financiers.
Il serait curieux, mes chers collègues, que la Caisse nationale du Crédit agricole, qui a été partie prenante du recours contre les modalités de distribution du livret A, soit finalement pénalisée par les dispositions que la majorité parlementaire risque de voter.