Cet amendement s’inscrit dans le droit-fil de notre position de fond sur la prétendue généralisation du livret A, prévue à l’article 39.
Il s’agit en fait d’organiser la concurrence sur le livret A, en réglant les questions de transfert de livrets, de centralisation ou encore d’unification des fonds d’épargne.
À vrai dire, l’une des questions essentielles posées par cet article est celle du niveau de la rémunération des établissements distributeurs. Cette question n’est pas secondaire puisqu’elle conduira naturellement les établissements à procéder aux ajustements correspondants, en termes d’implantations et de moyens humains.
Transformer le livret A en simple produit financier et en banaliser la distribution, c’est porter atteinte à un dispositif vertueux, qui fonctionne depuis fort longtemps en circuit fermé avec une très grande efficacité, et qui est somme toute peu coûteux pour la collectivité nationale.
En revanche, la banalisation à la sauce « Camdessus » du livret A coûterait 1, 3 milliard d'euros par an à l’ensemble des banques françaises et déclencherait de nouveaux rapprochements.
Au demeurant, pourquoi donc se priveraient-elles de siphonner ces encours au profit de placements plus rémunérateurs pour elles-mêmes ?
S’agissant des caisses d’épargne, un commissionnement de 0, 6 %, au lieu de 1 %, des encours du livret A, c’est un revenu brut d’exploitation en régression de 320 millions d'euros, et donc la fermeture annoncée de 700 à 1 200 agences « sans perspective de rentabilité », singulièrement en milieu rural. Sans compter, évidemment, l’effet des pertes d’encours liées au transfert des comptes.
Car la conséquence principale de cette concurrence organisée sous la forme d’un abaissement sensible de la rémunération des réseaux, c’est bien entendu la suppression massive d’emplois liée à la fermeture des implantations insuffisamment génératrices de résultat bancaire.
À moyen terme, 4 000 à 4 500 emplois seront supprimés, sans licenciements proprement dits. Les efforts de mutualisation des fonctions supports seront accentués.
Nous tenons à dénoncer un processus qui va conduire au démaillage du réseau des agences et qui condamnera des milliers de salariés à une mobilité forcée.
Leurs conditions de travail seront également affectées, car les horaires d’ouverture des agences aux clients seront probablement étendus pour pouvoir intensifier encore davantage la pression commerciale, mettant en cause la vie familiale même des salariés.
Ce portrait du devenir de la situation sociale des agents des caisses d’épargne représente l’un des motifs qui nous conduisent à souhaiter la suppression de l’article 40. Quelque part, cet article est en effet un peu la face cachée des conséquences sociales de la banalisation du livret A et de sa cession, sans droit ni titre, aux établissements bancaires engoncés dans la crise financière.
Enfin, comment ne pas souligner ici que ceux-là mêmes qui piloteront demain la transformation des caisses d’épargne sont précisément ceux qui ont mené ces derniers temps des aventures financières peu glorieuses sur les marchés spéculatifs ?