J'ai acquis la conviction que le mot de transparence n'est qu'un avatar de la souveraineté du peuple. Relisez les débats de février et mars 1988 sur la loi de transparence financière de la vie politique. Quelles brillantes interventions du rapporteur Jacques Larché et des sénateurs Michel Dreyfus-Schmidt ou Charles Lederman !
Tous les grands scandales politico-financiers ont conduit à changer les lois ; c'est le scandale de la garantie foncière en 1971 qui a ainsi provoqué l'instauration de la déclaration de patrimoine.
Ce texte ne fait pas exception. Le Président de la République a demandé au Gouvernement d'améliorer notre législation à la suite de l'affaire impliquant l'ancien ministre du budget. Le groupe de réflexion du Sénat sur les conflits d'intérêt a nourri nos travaux ; le texte peut encore être amélioré, notamment sur la question du lobbying, champ qui n'a pas été abordé à l'Assemblée nationale.
Un mot sur les nouvelles déclarations d'intérêt, d'activité et de patrimoine, qui s'imposent à plus de 7 000 responsables publics. Cette préoccupation existe depuis le 14 mai 1793 ! L'Assemblée nationale a trouvé un équilibre satisfaisant mais perfectible. Un droit d'alerte du citoyen est créé. Le délit de publication non autorisée du patrimoine d'une personne peut susciter des interrogations ; il mérite d'être précisé. Autre avancée, la protection des lanceurs d'alerte. Le financement de la vie publique doit aussi être rendu plus transparent. Je salue le travail de Gaëtan Gorce sur ce sujet, à l'occasion de la loi de finances pour 2013, comme les suggestions du groupe écologiste, en réaction à la multiplication des micro-partis.
La notion de conflit d'intérêts sera définie pour la première fois dans la loi, nous en débattrons lors de l'examen des amendements. Il faut faire régresser la zone de non-droit. Le Gouvernement propose donc que les déclarations d'intérêt soient obligatoirement publiées. Pour la première fois, un système de déport sera mis en place, imposant aux personnes concernées -membres du Gouvernement ou d'autorités indépendantes- par un conflit d'intérêts de s'abstenir : on ne peut être juge et partie. Cette mesure a-t-elle vocation à s'appliquer aux parlementaires ? Sous quelle forme ? La réponse n'est pas aisée. La séparation des pouvoirs est une borne indépassable.
La Haute Autorité disposera de pouvoirs effectifs et d'une autonomie financière, comme le proposait M. Gélard dans son rapport sur les autorités administratives indépendantes. Son président sera nommé par décret, selon la procédure prévue à l'article 13 de la Constitution. La Haute Autorité aura un rôle élargi par rapport à l'ancienne commission, elle disposera des services fiscaux et d'un pouvoir d'injonction. Je ne sais pas s'il est possible de faire davantage en la matière, mais les délais impartis peuvent peut-être être mieux calibrés, selon qu'il s'agit de nominations au Gouvernement ou des autres déclarations...
M. Sauvé préconise une culture déontologique. Nous proposons de renforcer la répression pour garantir l'indépendance des parlementaires vis-à-vis des intérêts extérieurs. Relisez les débats sur la proposition de loi organique de 1995, devenue l'article L. 146-1 du code électoral, qui fixe un certain nombre d'incompatibilités. Le texte peut être amélioré sur ce point.
Le projet de loi met en oeuvre l'engagement 49 du Président de la République sur l'inéligibilité, renforce la répression du pantouflage et introduit, sous une forme adaptée, la notion de parjure dans notre droit. Beaucoup reste à faire, nos concitoyens nous regardent.