Intervention de Marie-France Beaufils

Réunion du 4 juillet 2008 à 15h00
Modernisation de l'économie — Articles additionnels après l'article 40

Photo de Marie-France BeaufilsMarie-France Beaufils :

Toutefois, un grain de sable est venu gripper ces deux mécaniques au cœur des politiques publiques françaises depuis plus de deux siècles.

Même les procédures de nomination garantissent la solidité de l’édifice. Le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations est nommé par décret du chef de l’État. Pour sa part, le président du directoire de la CNCE est désigné par le conseil de surveillance, mais, compte tenu des missions d’intérêt général confiées à l’institution, sa nomination doit recevoir l’agrément du ministre en charge de l’économie. Il est donc normalement impossible que les deux entités « divorcent », sauf à penser que la puissance publique puisse un jour se désintéresser de ces deux missions d’intérêt général et laisser l’une ou l’autre des deux entreprises voguer vers d’autres horizons… C’est précisément ce qui est advenu au début de l’année 2006.

En effet, en violation de son pacte d’actionnaires, le président de la CNCE a pris langue avec M. Philippe Dupont, le président du groupe Banque populaire, pour lui proposer de fusionner leurs divisions « banque d’investissements ». Cela a suscité de l’indignation ; non seulement pour des raisons éthiques et morales, mais également parce que cela crée une concurrence entre la nouvelle entité, Natixis, et la Caisse des dépôts et consignations, qui était jusque-là son partenaire naturel.

Cette concurrence s’exacerbe au travers de prises de position sur les marchés financiers, et dans des conditions croissantes d’insécurité. La CNCE se lance dans des stratégies commerciales agressives, comme la banque en ligne, la promotion et les prêts immobiliers, la croissance externe sur les marchés financiers étrangers ou la pénétration du marché nord-américain des produits dérivés. Tout cela recueille l’assentiment, par tacite acceptation, des autorités publiques, puisque le ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi semble de s’être jamais alarmé.

Depuis, rien n’a été fait, loin s’en faut, pour interrompre ce processus. Cela conduit Natixis droit dans le mur, puisque l’établissement a annoncé un plan social particulièrement sévère. Dans le même temps, l’« Écureuil » est en grande difficulté et a besoin d’une recapitalisation au plus tôt.

Les mesures contenues dans le texte quant au devenir des caisses d’épargne, avec la disparition de la Caisse nationale, ne peuvent naturellement pas recueillir notre assentiment.

A fortiori, ce sont ceux qui ont conduit les caisses d’épargne dans les plus grandes difficultés qui sont aujourd’hui encore écoutés et dont les choix et les options sont validés par le présent projet de loi.

En effet, la Caisse nationale est largement engagée dans le bourbier des produits dérivés américains, où elle a perdu des sommes considérables sur les placements favorisés par les opérations de titrisation menées outre-Atlantique.

De plus, tout se fait dans un contexte où l’on décide de mettre un terme – nous le verrons à l’occasion de l’examen de l’article 40 bis – aux missions d’intérêt général de la caisse d’épargne et à la solidarité entre les caisses. Les élus locaux auront seulement le droit de constater les dégâts et, au besoin, de payer l’addition.

Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas cet amendement.

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