Intervention de Marie-France Beaufils

Réunion du 4 juillet 2008 à 15h00
Modernisation de l'économie — Article 41

Photo de Marie-France BeaufilsMarie-France Beaufils :

À la suite de ma collègue Odette Terrade, je souhaite poursuivre l’analyse des questions soulevées par cet article 41.

Ainsi qu’elle vient de le rappeler, c’est « l’affaire » EADS qui apparaît en filigrane de notre débat, et qui constitue l’une des motivations principales de l’actuelle rédaction de l’article 41. Sans cela, jamais il n’aurait été question de créer un comité des investissements, dispositif plutôt lourd et peu réactif qui contredit l’esprit du projet de loi, lequel se vante d’aller vers davantage de souplesse et de simplification.

Cette affaire, comme chacun le sait, a été très abondamment commentée par la presse, et a justifié la création de deux commissions parlementaires spécifiques. Si nous avions souhaité que la situation de la société EADS soit examinée de manière prioritaire, nous avions regretté que cet examen se soit limité à des auditions, bien que celles-ci aient été publiques. À cet égard, la création d’une commission d’enquête ou d’une mission d’information aurait permis d’approfondir la question et, peut-être, d’apporter d’autres réponses que celles qui sont aujourd’hui proposées.

La lecture du compte rendu des auditions comme celle du rapport laissent à penser que ce qui est en question, c’est la manière dont l’État joue un rôle moteur en matière industrielle. En effet, il est à peu près avéré que ni la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, ni l’Agence des participations de l’État n’ont été en mesure, à quelque moment que ce soit, de prévenir ce qui allait devenir un sinistre boursier puis une crise industrielle et sociale majeure.

De notre point de vue, l’actualité récente devrait d’ailleurs conduire à reconsidérer le plan « Power eight » – qui prévoit plusieurs milliers de suppressions d’emplois en France –, en raison notamment de la signature d’un important contrat entre EADS et l’armée nord-américaine.

Mais pour en revenir à notre débat, une bonne partie des critiques semblent se diriger contre l’Agence des participations de l’État qui, au lieu d’être un outil de politique industrielle à disposition du ministère de l’économie et des finances, ce qu’elle devrait être, s’avère finalement ne constituer, à l’expérience, qu’une structure de gestion des participations de l’État avec l’apparence d’un organisme d’administration de biens.

Les recommandations formulées par cette agence qui, avant les mésaventures boursières du titre EADS, avait suggéré une cession partielle des parts de l’État illustrent d’ailleurs parfaitement cette conception de courte vue, laquelle conduit à s’interroger sur la stratégie et la politique patrimoniale de l’État en matière de participations industrielles.

Les sénateurs du groupe CRC soulignent au demeurant que la création de l’Agence des participations de l’État, aujourd’hui critiquée dans l’affaire EADS, avait été souhaitée par les actuels président et rapporteur général de la commission des finances…

Quant à l’autre institution questionnée, la Caisse des dépôts et consignations, elle a dû provisionner plusieurs centaines de millions d’euros pour faire face à l’éventuelle déperdition de valeur de ses titres EADS.

Cette situation semble donner à certains l’occasion de poser de nouveau la question de la « gouvernance » de cet établissement public essentiel à la vie économique de la nation, véritable bras séculier de l’État en bien des domaines. Nicole Bricq vient d’en rappeler quelques éléments.

Si les parlementaires que nous sommes estiment que la composition de la commission de surveillance doit effectivement être légèrement modifiée, ils demeurent persuadés que c’est au travers de l’affirmation et de l’exécution de missions d’intérêt général, dans le cadre du service public, que la Caisse des dépôts et consignations se doit de jouer son rôle, de manifester sa présence et de prouver l’efficacité économique et sociale de son intervention.

Au moment où la Commission européenne mène l’assaut contre la spécificité du financement du logement social, qui découle de la centralisation par la Caisse de l’encours du livret A, cette position doit être réaffirmée.

Enfin, et c’est sans doute sur ce point que notre sentiment diverge par rapport à celui qu’ont exprimé le président de la commission des finances et le rapporteur, l’affaire EADS, avant d’être la traduction de dysfonctionnements au sein d’organismes publics ou parapublics, est d’abord et avant tout une affaire de délit boursier, et il est dommage que l’on en ait tiré prétexte pour proposer des mesures comme celles qui concernent la Caisse des dépôts et consignations.

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